AVANT LA PRÉSIDENTIELLE, LA PRESSE ÉTRANGÈRE DÉPEINT UNE FRANCE PLUTÔT PROSPÈRE MAIS XÉNOPHOBE
A J-5 du premier tour, radiographie d’un pays où «la vie est belle», selon pas mal d’indicateurs économiques, mais où l’extrême droite et «l’obsession du grand remplacement» rongent la société

«Comment va la France ?» Sous le titre de cette chronique se cache Richard Werly, correspondant du quotidien suisse le Temps à Paris. Dans un récent éditorial, il notait que «les colères françaises planeront bien sur les urnes le 10 avril». Eruptive, la France ? Comme Werly, nombreux sont les journalistes étrangers à prendre le pouls du pays dans cette dernière ligne droite avant le premier tour de la présidentielle.
Fin mars, le Times britannique sillonnait ainsi les vignobles de Bourgogne, et s’arrêtait à Tonnerre, dans l’Yonne. Un «îlot de déclin», dixit le quotidien britannique. Une usine de magnétoscopes qui employait 1 300 personnes a fermé en 2002. Une cimenterie et une laiterie également. Pascal Rousselet, 52 ans, un ouvrier viticole, dit qu’il votera Zemmour. «C’est juste pour m’opposer à Macron», dit-il au Times.
A Bohal, dans le Morbihan, le quotidien canadien le Devoir a rencontré l’ex-figure des gilets jaunes Jacline Mouraud. «Il n’est pas normal qu’on n’arrive pas à vivre de notre travail, dit celle qui a depuis rallié Zemmour. Pour cela, il faut rapatrier les milliards qui ont été dépensés depuis 40 ans dans les banlieues peuplées d’immigrants, alors que nous, on n’a rien.» Bohal symbolise, selon le Devoir, cette «France qui se sent abandonnée […] loin des cercles du pouvoir parisien».
«Un jour ça va péter»
A Prades, le fief du Premier ministre dans les Pyrénées-Orientales, Gilbert Anglès, 59 ans, compare la France à une «cocotte-minute». «Un jour ça va péter, les gens vont se révolter», prédit cet ami de Jean Castex auprès du Soir. «Qu’il vienne ou pas du terroir, Castex reste un énarque», balancent de leur côté quatre jeunes couvreurs. Aucun d’entre eux n’ira voter à la présidentielle. Les «échos» que renvoie la bourgade de 6 000 habitants sont «plus sombres que les cartes postales des paysages», rapporte le quotidien belge.
A la veille d’élire son nouveau président, la France est-elle cette «poudrière» évoquée par le Frankfurter Allgemeine Zeitung, un quotidien conservateur allemand ? The Economist retraçait fin mars les «graines du mécontentement» dans une France «meurtrie». Dans le bassin minier du Nord, Emmanuelle Danjou, une directrice commerciale, tracte ainsi pour Zemmour. A l’hebdomadaire britannique, elle dit : «Nous avons perdu nos valeurs, nous sommes en train de démanteler notre pays, notre histoire.» L’auteur maurrassien, selon elle, «dit tout haut ce que beaucoup de Français pensent tout bas».