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17 mai 2025
L'HÉCATOMBE DES VAINCUS
Derrière le triomphe de Diomaye, ce scrutin a également livré son lot de grands perdants. Amadou Ba en tête, humilié dès le premier tour. Mais l'onde de choc n'a pas épargné Macky, Khalifa ou encore Idy, tous douchés dans leurs ambitions
Brice Folarinwa de SenePlus |
Publication 26/03/2024
Alors que Bassirou Diomaye Faye et la coalition Pastef ont remporté une victoire écrasante dès le premier tour, l'élection présidentielle a également livré son lot de grands perdants, selon une analyse de Seneweb.
Le principal d'entre eux reste sans conteste Amadou Ba, le candidat de la majorité au pouvoir. "Pour un ancien Premier ministre, c'est une vraie humiliation que de se faire battre à plate couture, dès le premier tour, par le principal parti d'opposition", souligne le média.
Son mentor Macky Sall subit également une "triste fin" après avoir tenté de faire obstacle au processus électoral, avant d'être désavoué. "On se demande encore quelle était cette menace tant agitée par Macky Sall", s'interroge Seneweb, estimant qu'il "a tout perdu" après avoir écarté Sonko.
"L'histoire retiendra qu'il a choisi un candidat pour ensuite lui tourner le dos. Non seulement, il n'a pas soutenu Amadou Ba, mais il l'a affaibli", ajoute le média, prévoyant "l'implosion" du parti au pouvoir.
Parmi les autres perdants figurent les alliés comme le Parti S et l'AFP "qui n'ont pas voulu avoir un candidat", mais aussi Khalifa Sall. Après avoir été écarté en 2019, l'ancien maire de Dakar "attendait d'être le faiseur de roi" mais "c'est la grande désillusion au sein de Taxawu", rapporte Seneweb.
Idrissa Seck a lui "payé la facture de sa tortuosité" en chutant de 26% en 2019 à 1% cette année, selon les projections. "Son inconstance a été lourdement sanctionnée."
Bougane Guèye Dany, "persuadé qu'il était l'homme de la situation", est également cité parmi les perdants, ayant manqué une nouvelle fois les parrainages.
Enfin, le Parti de l'Unité et du Rassemblement d'Aliou Mamadou Dia "a fortement reculé" malgré les attentes, conclut l'analyse de Seneweb.
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L'IMPÉRATIF D'UNE REFONDATION DE L'UNIVERSITÉ
La répression sur les campus ces dernières années révèle un malaise profond à l'université sénégalaise. Felwine Sarr et Ndeye Astou Ndiaye plaident pour une renaissance de ces lieux de savoir comme levier de transformation sociale et citoyenne
Deux voix majeures de l'université sénégalaise, l'universitaire et écrivain Felwine Sarr et Ndeye Astou Ndiaye, docteure en science politique, ont partagé leurs réflexions sur l'état actuel et les défis de refondation de cette institution cruciale dans l'épisode 4 de la série "Où va le Sénégal ?", animée par Florian Bobin.
La crise politique sans précédent traversée par le pays en 2023-2024, marquée notamment par la longue fermeture de l'Université de Dakar, a mis en lumière les failles du système universitaire. Au-delà des problèmes d'effectifs pléthoriques et de manque de moyens, c'est le rôle même de l'université au sein de la société sénégalaise qui est remise en cause. "C'était une attaque contre tout ce que représente l'université", a déclaré Felwine Sarr.
Face à ce constat alarmant, nles deux intervenants appellent à une véritable « refondation » de l'université sénégalaise. "Il faudrait repenser par domaine et créer une synergie avec des discussions interdisciplinaires", a plaidé Ndeye Astou Ndiaye.
Il s'agit d'abord de répenser en profondeur les cursus et programmes pour répondre aux besoins socio-économiques réels. Trop d'étudiants sortent des universités sans réelle employabilité ni compétences professionnelles selon elle.
Mais au-delà, c'est une « décolonisation » épistémologique qui est prônée par Felwine Sarr. Les universités perpétuent un savoir exogène déconnecté des réalités locales. "Il faut opérer une rupture transformationnelle en intégrant les savoirs, visions du monde et modes de connaissance propres aux sociétés africaines", a-t-il martelé.
L'université doit devenir cette "pluriversité" accueillant toutes les formes de savoirs, dans une approche transdisciplinaire innovante, comme l'a défendu Felwine Sarr. Loin d'un simple lieu de transmission, elle doit être un espace d'émancipation des regards et des imaginaires.
Ce vaste chantier exige d'associer étroitement universitaires, chercheurs et autorités publiques, un point mis en avant par Ndeye Astou Ndiaye : "Il faudrait une interconnexion entre chercheurs, enseignants et politiques".
L'enjeu, selon Felwine Sarr, est de refonder un pacte entre l'université et la société, dépassant les crises conjoncturelles pour inscrire l'institution dans un rôle de « veille intellectuelle » pérenne au service de l'intérêt général.
LA PRÉSIDENCE TOGOLAISE DÉSORMAIS DANS LES MAINS DES DÉPUTÉS
Désormais, le président togolais ne sera plus élu au suffrage universel direct, mais sera choisi "sans débat" par le Parlement réuni en congrès, pour un mandat unique de six ans
Brice Folarinwa de SenePlus |
Publication 26/03/2024
Dans une décision surprise, les députés togolais ont adopté lundi soir une nouvelle Constitution instaurant un régime parlementaire dans le pays. Selon l'Agence France-Presse (AFP), le texte a été approuvé avec 89 voix pour, une contre et une abstention.
Désormais, le président togolais ne sera plus élu au suffrage universel direct, mais sera choisi "sans débat" par le Parlement réuni en congrès, pour un mandat unique de six ans. Jusqu'ici, la Constitution prévoyait un mandat présidentiel de cinq ans, renouvelable une fois.
C'est un changement majeur pour le régime politique togolais. "Le chef de l'Etat est pratiquement désinvesti de ses pouvoirs au profit du président du Conseil des ministres, qui devient celui qui représente la République togolaise à l'extérieur, qui dirige effectivement le pays dans la gestion quotidienne", a déclaré Tchitchao Tchalim, président de la commission des lois constitutionnelles à l'Assemblée, selon l'AFP.
Ce changement a été proposé par un groupe de députés de la majorité présidentielle de l'Union pour la République (UNIR). Il intervient à un mois des élections législatives et régionales du 20 avril, auxquelles l'opposition - sous-représentée au Parlement - a annoncé qu'elle participerait, après avoir boycotté le scrutin de 2018.
La nouvelle Constitution introduit également le poste de "président du Conseil des ministres", désigné pour six ans et issu du parti majoritaire à l'Assemblée. Il sera chargé de "la pleine autorité et le pouvoir de gérer les affaires du gouvernement".
Cette réforme marque selon les députés l'entrée du Togo dans sa "Ve République", après la dernière révision constitutionnelle de 1992. Elle intervient aussi moins d'un an après que les députés aient limité à deux le nombre de mandats présidentiels, remettant les compteurs à zéro pour l'actuel chef de l'État Faure Gnassingbé, au pouvoir depuis 2005.
APPEL À LA CONCRÉTISATION DU PACTE NATIONAL DE BONNE GOUVERNANCE
Des organisations de la société civile, regroupées au sein du collectif dénommé ”Sursaut Citoyen et Demain Sénégal” félicitent le président élu Diomaye Faye, espérant qu’il réalisera les objectifs du Pacte national de bonne gouvernance démocratique.
Dakar, 26 mars (APS) – Des organisations se réclamant de la société civile, regroupées au sein du collectif dénommé ”Sursaut Citoyen et Demain Sénégal” félicitent le président élu Bassirou Diomaye Faye, espérant qu’il réalisera les objectifs du Pacte national de bonne gouvernance démocratique.
”Nos organisations félicitent également le président élu, Bassirou Diomaye Faye, pour sa victoire éclatante et méritée. Elles se réjouissent particulièrement du fait que le président élu est l’un des premiers signataires du Pacte national de bonne gouvernance démocratique, qui s’inspire des conclusions des Assises Nationales et des recommandations de la Commission nationale de réforme des institutions (CNRI)’’, écrivent-elles.
Dans une déclaration dont l’APS a eu connaissance, ‘’Sursaut Citoyen et Demain Sénégal’’ disent nourrir ‘’l’espoir que les réformes promues par ce Pacte seront rapidement et efficacement mises en œuvre par les nouvelles autorités’’.
Ces organisations encouragent ”tous les mouvements citoyens à unir leurs efforts et à poursuivre leur mobilisation pour la réalisation des objectifs du Pacte national de bonne gouvernance démocratique et pour répondre aux attentes du peuple en matière de renforcement de la démocratie, de l’État de droit et de la bonne gouvernance”.
Elles estiment que ”la tenue de l’élection présidentielle le 24 mars 2024, malgré les nombreux défis et les événements regrettables qui l’ont précédée, a marqué une étape importante dans l’histoire politique du pays”.
Selon elles, cette victoire, ”est perçue non seulement comme le fruit de la détermination du peuple sénégalais, mais aussi comme une preuve de sa volonté inébranlable de défendre sa souveraineté.’’
LE SÉNÉGAL VIENT DE FERMER UNE PAGE DE SON HISTOIRE POLITIQUE, SELON ALIOUNE TINE
Bassirou Diomaye Faye a effectué son premier discours face au peuple sénégalais, en tant que président de la République. Pour Alioune Tine, son arrivée ouvre une nouvelle recomposition politique;
iGFM – (Dakar) Bassirou Diomaye Faye a effectué son premier discours face au peuple sénégalais, en tant que président de la République. Pour Alioune Tine, son arrivée ouvre une nouvelle recomposition politique au Sénégal.
"Le Sénégal, avec l’élection de Bassirou Diomaye Faye comme Président de la République, vient de fermer une page de l’histoire politique. S’ouvre une recomposition politique faite d’incertitudes et aussi de surprises. Une démocratie de l’imprévisible", a affirmé le fondateur du think tank Afrikajom Center.
Alioune Tine conseille également à Bassirou Diomaye Faye de faire de certains axes ses priorités. "Excellence PR Bassirou Diomaye Faye, la réconciliation nationale est une priorité. Elle passe aussi par la Commission Paix, Vérité, Justice, Réconciliation, Pardon et Réparation pour purger les cœurs de la haine et des ressentiments. Merci d’avoir démissionné des instances du parti", a noté Alioune Tine.
CANDIDATS MALHEUREUX À LA PRÉSIDENTIELLE, PLUS D’UN DEMI-MILLIARD DANS LES CAISSES DE L’ÉTAT
A l’issue du scrutin remporté par Diomaye Faye, hormis Amadou Ba (31%), les 17 perdants abandonnent leur caution dans les caisses de l’État (510 millions de FCFA).
Dix-neuf candidats étaient en lice pour la succession du président Macky Sall lors de la présidentielle du dimanche 24 mars. Le président Bassirou Diomaye Faye a été élu à l’issue du scrutin. En dehors de celui de Benno Bokk Yakaar, Amadou Ba, qui a 31,9% des suffrages selon les résultats provisoires et pas encore officiels, aucun candidat malheureux n’a obtenu 4%, selon Libération.
Le quotidien, qui s’est intéressé au sujet ce mardi, rappelle que les 17 perdants abandonnent donc tous leur caution dans les caisses de l’État. Cela fait un demi-milliard de francs CFA, exactement 510 millions.
La loi électorale sénégalaise est claire : la caution- dont le montant s’élève cette année, à 30 millions F CFA, versée au niveau de la Caisse des dépôts et consignations (CDC), est remboursée au candidat dans les 15 jours qui suivent la proclamation définitive des résultats s’il obtient au moins 5% de suffrages exprimés. Ce qui veut dire que sous cette barre, le cautionnement est perdu d’office.
Lors de la présidentielle de février 2019, deux des cinq candidats avaient perdu leur caution pour n’avoir pas obtenu au minimum 5% des suffrages valablement exprimés. Il s’agit du Pr Issa Sall (4,07 %) et l’ancien ministre Madické Niang (1,48 %).
Édition Spéciale du 25 Mars 2024 - Election Présidentielle 2024, le Jour d'Après
ÉMIGRATION IRRÉGULIÈRE, 53 CANDIDATS INTERPELLÉS PAR LA GENDARMERIE
Cette action entre dans le cadre de la lutte contre le trafic de migrants. Les gendarmes ont réussi ce coup de filet, entre Mboro et Nianing, selon le lieutenant-colonel Ibrahima Ndiaye, le chef de la Divcom.
La légion de gendarmerie de Thiès, commandée par le lieutenant-colonel Alioune Diop, a interpelé 53 candidats à l’émigration irrégulière, dont 12 Gambiens, deux Guinéens et un Malien.
Cette action entre dans le cadre de la lutte contre le trafic de migrants. Les gendarmes ont réussi ce coup de filet, entre Mboro et Nianing, selon le lieutenant-colonel Ibrahima Ndiaye, le chef de la Divcom.
La gendarmerie nationale appelle à plus de vigilance et de collaboration en cette période électorale, pour mieux lutter contre ce fléau qui touche la jeunesse.
Par Hamidou ANNE
FAIRE FACE
L’élection a enfin eu lieu. Le résultat est sans appel : le camp fasciste va gouverner le Sénégal. Ce scrutin bat une nouvelle fois en brèche les théories fantaisistes sur le fichier électoral et la transparence des élections.
Il me revient en ce moment ce beau vers de René Char : «La lucidité est la blessure la plus rapprochée du soleil.» L’élection a enfin eu lieu. Le résultat est sans appel : le camp fasciste va gouverner le Sénégal. Ce scrutin bat une nouvelle fois en brèche les théories fantaisistes sur le fichier électoral et la transparence des élections. Notre système démocratique est tellement performant qu’il peut permettre l’élection de n’importe qui.
Pire, pour la première fois, un président fantoche aura été élu pour conduire aux destinées de ce grand peuple. Le débat programmatique, conformément à l’hystérisation du débat public depuis trois ans, n’a pas existé. Il y a eu un référendum consécutif à la polarisation du champ politique, à l’issue duquel une marionnette au-dessus de laquelle trône un marionnettiste a gagné. Il faudra expliquer dans les livres d’histoire qu’un homme qui n’a même pas eu la dignité de battre campagne sur son propre nom, un homme qui ne s’est pas assumé et n’a pas assumé sa candidature a été élu, un homme qui reconnaît avoir un chef, a été élu président de la République.
Pour la première fois, le Sénégal s’offre à un mouvement qui profite des infrastructures de la démocratie sans y croire ; un mouvement qui a opté de manière délibérée pour le choix de l’insurrection comme mode d’action politique.
Ils devront incarner des institutions qu’ils ont désacralisées, commander la police, l’Armée et la gendarmerie qu’ils ont insultées et préserver une Justice qu’ils ont vilipendée. Il faudra assumer de régner sur des ruines…
Les raisons de ce basculement dans la tragédie sont nombreuses et profondes. Mais deux me semblent utiles à toujours rappeler : l’opposition républicaine a crédibilisé et légitimé un parti fasciste en nouant des alliances et en gouvernant des municipalités avec lui. La majorité, elle, a précipité cette fin brutale en donnant tous les jours, depuis trois ans, l’impression qu’elle préparait l’arrivée de fascistes au pouvoir. L’amnistie gracieusement offerte à des insurgés et des criminels est le dernier acte d’une volonté manifeste de leur confier le pouvoir pour plonger le pays dans une spirale d’incertitude et de d’abaissement. Le choix de sortir le dirigeant et son candidat en pleine campagne permettait de leur offrir une dynamique, de contribuer à faire de gens peu fréquentables des héros insubmersibles aux yeux de la jeunesse. Après les multiples appels à l’insurrection, les arrestations, les procédures judiciaires, s’ils sortent blanchis de la machine infernale de l’appareil répressif de l’Etat, pour l’opinion c’est soit qu’ils n’avaient de toute façon rien fait, soit qu’ils étaient plus forts que l’Etat, donc qu’il fallait leur donner le pouvoir.
Cette défaite électorale est aussi celle de gens qui, pendant trois ans, ont refusé de se mouiller dans le combat contre les profanateurs de la République alors qu’ils étaient en responsabilité. Amadou Ba est de ceux-là. Il est un homme courtois et décent, mais comme ministre et Premier ministre, et tout simplement comme personnalité politique, sa voix n’a jamais été audible dans le combat contre l’hydre populiste même dans les pires épisodes de violence.
Dimanche, j’ai circulé une grande partie de la nuit dans les rues de Dakar. J’ai croisé des jeunes jubilant, juchés sur des motos Jakarta ou à l’étroit dans des véhicules aux klaxons stridents. Le pays aspirait au changement, il aura obtenu une plongée dans le gouffre. Après les Etats-Unis, l’Italie, le Brésil, l’Argentine, une autre grande démocratie tombe dans l’escarcelle populiste dans un contexte de montée du péril identitaire en Afrique de l’Ouest. Je m’y attendais et je ne cessais de le répéter à des amis très dubitatifs, voire qui moquaient mes soi-disant fantasmes morbides.
Le populisme monte par la colère du peuple des opprimés contre les promesses non tenues de la République. Il agrège des frustrations et flirte avec les passions tristes. Il peut connaître une ascension fulgurante aussi par la lâcheté ou la complicité des élites -politiques, intellectuels, chefs d’entreprise et cadres- qui pensent nourrir la bête pour participer au festin une fois au pouvoir. Elles seront les premières victimes d’un mouvement obscurantiste et intolérant qui aura montré en dix ans qu’il haïssait la raison et le débat contraire, donc la liberté et l’émancipation par le savoir.
Les prochaines victimes de ce nouveau régime seront les masses, qui ont défilé dimanche dans les rues. Les espoirs immenses nourris par dix ans de propositions farfelues et intenables comme sur le franc Cfa, les milliards qui tomberont du ciel, le fait de virer les étrangers et la nationalisation de pans entiers de l’économie seront déçus, car ces gens ne sont ni compétents ni intègres pour gouverner un pays.
L’aventure dans laquelle nous nous engouffrons mènera le pays à la ruine morale et à une plus grande fracture de la communauté nationale. Et les promesses qui ne seront jamais tenues par un président sous tutelle, incompétent notoire, impréparé, nourriront une colère qui lui sera fatale, lui, son chef et son camp.
Un nouveau régime s’installe. Il va réunir une kyrielle d’opportunistes, de haineux et de revanchards. Ce régime, qui a promis l’antisystème, la révolution et, en passant, l’exécution des anciens présidents de la République, comptera dans ses rangs Karim Wade, Aminata Touré, Birima Mangara, Mary Teuw Niane, Moustapha Guirassy, Aïda Mbodj, Habib Sy, Pape Samba Mboup…Je passe outre les curieux personnages -complotistes, charlatans, activistes islamistes- à qui les Sénégalais devront désormais faire confiance pour conduire les affaires de l’Etat.
Un peuple progressiste et républicain est depuis lundi matin orphelin ; il faut lui offrir un refuge et bâtir une maison commune des républicains, des démocrates, des socialistes et de tous les progressistes qui défendent une certaine idée d’un Sénégal comme rempart contre le nationalisme, l’absolutisme, l’intolérance et les atteintes graves à ce qui fait de nous une Nation debout, ouverte et respectée.
Dès la proclamation définitive des résultats, il faut offrir à la moitié des Sénégalais, qui ont refusé de confier le pays à des aventuriers, un horizon, un projet, un discours et un cadre d’expression pour une opposition exigeante sur les principes, intelligente sur la stratégie et innovante sur les méthodes. Dans ce chemin d’espérance qui doit surgir pour faire de la défaite du 24 mars un terreau fertile pour un sursaut vers des victoires futures, je suis prêt à assumer toute ma part de responsabilité.
Par Ibrahima Anne
OUF, ENFIN
L’élection présidentielle qui s’est tenue hier aura battu tous les records en termes de rebondissements. Rien n’aura, en effet, été dans l’ordre des évidences pour cette élection présidentielle dont le premier tour a eu lieu hier.
L’élection présidentielle qui s’est tenue hier aura battu tous les records en termes de rebondissements. Rien n’aura, en effet, été dans l’ordre des évidences pour cette élection présidentielle dont le premier tour a eu lieu hier. Programmé, déprogrammé, reprogrammé puis avancé, le scrutin d’hier aura tenu en haleine tout un peuple qui a ainsi vogué de surprise en surprise. D’abord, sur l’identité des protagonistes. Réélu en 2019, le Président Macky Sall a été le premier à avoir jeté un voile sur la configuration et la tenue de la Présidentielle de 2024. D’abord, en ne donnant pas une position tranchée sur son ambition de se présenter pour briguer une troisième candidature. Jusqu’au 3 juillet, Macky Sall a maintenu le flou sur cette intention. Le «ni oui, ni non» ne fera que rajouter à la confusion. Laquelle a été un des déclencheurs d’une situation de tension rarement vécue dans notre pays. La question du troisième mandat fut une ligne centrale dans la plateforme revendicative de l’opposition. Muet sur ses intentions, le Président sortant a gardé son flegme jusqu’au bout. Ni l’opposition qui le bousculait sur tous les couloirs et sur tous les fronts, ni ses partisans qui le poussaient à tenter une troisième confrontation n’ont pu l’obliger à briser le silence. Ce qui fait que, jusqu’au 3 juillet 2024 à 20 heures, nul ne savait ce que le Président allait faire. Finalement, «après y avoir mûrement réfléchi» comme lui-même l’a dit dans son adresse à la Nation, Macky Sall décide de ne pas se représenter.
Dr Bakar DIA, ancien ministre : « le vaccin pose plus de problèmes qu’il n’apporte de réponses »
En face, on a un Ousmane Sonko qui a le vent en poupe. Porté par une jeunesse qui ne se reconnaît pas dans les politiques publiques, frappée de plein fouet par le chômage et tentée par les envies du large (barça wala barsax), le leader de Pastef donne du fil à retordre au pouvoir. Il est le maître de la rue publique et des réseaux sociaux. Les trending topics l’y mettent en tête de classement. Les affaires dans lesquelles il est mêlé décuplent, paradoxalement, sa côte de popularité auprès d’une frange jeune qui reprend à son compte la théorie de la conspiration et du complot. Ce fort élan de sympathie le porte en triomphe et dope ses capacités de nuisance. Aussi, maniant les foules avec une dextérité jamais égalée, l’ancien inspecteur des impôts et domaines aura été très déterminant dans le choix de Macky Sall de renoncer à un risqué troisième mandat. Le président de la République va le lui faire payer jusqu’au dernier sacrifice. En effet, parallèlement à sa décision de renoncer à une troisième candidature, le chef de l’Etat promet, avant de partir, d’appliquer toutes les décisions de justice. L’allusion aux affaires Sonko tombe sous le sens. Le leader de Pastef, sous le coup de diverses condamnations, est dans le viseur du pouvoir. Il est arrêté, envoyé en prison, son parti dissous. Mettant une croix sur sa «présidentiabilité». La messe est définitivement dite pour le maire de Ziguinchor quand l’administration électorale et le Conseil constitutionnel font fondre ses derniers espoirs.
Macky Sall n’est donc pas partant. Ousmane Sonko, non plus. Le premier objectif de Macky est atteint. Pourtant, il n’y a guère, toute la vie politique sénégalaise était réduite à une bipolarisation Macky Sall-Ousmane Sonko. «Macky dou bokk, Sonko day bokk» était le slogan des pastéfiens. Au finish, on se retrouve avec tous les deux challengers hors course. Alors, il leur faut trouver une solution de rechange. La majorité présidentielle choisit Amadou Bâ quand Ousmane Sonko désigne Bassirou Diomaye Faye comme joker. Le scénario est des plus imprévisibles. Il le sera davantage quand le Président Sall abroge le décret convoquant le corps électoral et observe avec intérêt l’Assemblée nationale jeter les derniers pelletés de sable sur la date du 25 février 2024 qui est définitivement compromise. Il a fallu toute la hardiesse, toute l’intransigeance et tout l’entêtement du Conseil constitutionnel pour que le plan Pds-Apr tombe à l’eau. Aussi, c’est un processus riche en suspenses qui a été couronné avec la tenue, hier, du scrutin présidentiel. Des citoyens souffrant d’insuffisance cardiaque auraient pu y laisser leur souffle tant ce suspense était haletant. En définitive, la démocratie, l’Etat de droit et la solidité des institutions ont triomphé et en sont sortis renforcés. Mais, au prix d’une attente longue et riche en surprises avec les principaux acteurs, Macky Sall et Ousmane Sonko, qui d’acteurs principaux passent à intermittents du spectacle.