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28 août 2025
par Cheikh Ahmadou Bamba Ndiaye
MACKY SALL, ADADA
Monsieur le président de la République, avec vous, notre Nation a eu à subir deux déficits à sa tête : liés à la compétence et à la personnalité. : l’Histoire ne vous célèbrera pas comme un Homme d’État du Sénégal
Monsieur le président de la République du Sénégal, vous êtes un échec.
Cela me fait mal de devoir vous le dire. On m’a appris à ne souhaiter du mal à personne, surtout pas à quelqu’un se trouvant à la tête d’une Nation entière. Nation que vous avez aujourd’hui malmenée, déchiquetée et entraînée dans les abysses de vos turpitudes.
Je vous ai souhaité de réussir de tout mon cœur, même si je ne vous ai jamais fait confiance. En 2012, vous aviez hérité d’un Sénégal déjà en ruines : les caisses de l’État ressemblaient plus à un toŋ- toŋ et les tricheries constitutionnelles de Maître Abdoulaye Wade avaient placé notre Pays sur une mauvaise pente.
Au moins six Sénégalais ont sacrifié leurs vies pour arrêter les manœuvres de votre prédécesseur et vous confier la destinée de notre Nation. Aujourd’hui, vous laissez beaucoup plus de morts derrière vous : au moins 45 personnes tuées, de mars 2021 à ce jour. Non seulement vous n’avez pas eu honte d’imiter votre prédécesseur dans ses errements, mais à sa différence, vous n’avez pas la lucidité ou le cœur pour vous arrêter. Mettre un terme à nos souffrances. Arrêter de rabaisser notre République, de nous ridiculiser.
Jusqu’à trois ans après votre élection, je m’étais imposé de vous donner le bénéfice du doute. Conscient que diriger est un devoir lourd quand on s’y met correctement, j’avais jugé nécessaire de vous observer avant de formuler une quelconque appréciation de votre action à la tête de notre État.
Les années passées ou la pratique du pouvoir n’ont pas inversé la tendance. Elles ne vous ont pas assagi. Ni élevé à la hauteur de votre rang institutionnel. Jusqu’au bout, vous vous révélez incapable d’être le président du Sénégal. D’être notre concitoyen, notre Nawle.
Monsieur le président de la République du Sénégal, avec vous, notre Nation a eu à subir deux déficits à sa tête : liés à la compétence et à la personnalité.
J’ai toujours eu peur de vous écouter, car une gaffe nous tombe toujours dessus. Passons, votre « relation particulière » avec la France qui donnait, selon vous, « au régiment des Tirailleurs sénégalais des desserts pendant que d’autres Africains n’en avaient pas ». Passons, votre atalaku ou bàkku devant Jeune Afrique, en août 2014, quand vous disiez fièrement : « Vous seriez surpris par le nombre de dossiers auxquels je n’ai pas donné suite ». Passons, votre invitation aux Burkinabè, aux prises avec la dictature de Blaise Compaoré, à laisser ce dernier en place, car il « contribue grandement à la stabilité de la sous-région ».
Alors que des nervis servaient aux côtés des forces de l’ordre, vous avez lancé un appel à vos maires d’organiser des milices « d’autodéfense », le 1er juillet 2023 : « Bu leen nangu ay nit ñëwseen gox di ko yàq. Loolu yëfu ñàkk faayda la. » Le 17 novembre dernier, en plein conseil présidentiel à Fatick, vous nous avez montré vos carences sur la décentralisation (sur laquelle vous avez pourtant passée des années) et sur la codification des langues nationales en lettres latines (ignorant que des décrets sur le sujet existent depuis 1968, 1975). Dans les crises au niveau de la Cédéao, vous avez foncé tête baissée dans l’asphyxie de pays frères, sans aucun sens historique ou diplomatique.
Bien que graves, ces limites paraissent banales quand on évalue votre personnalité en tant que chef de l’État, garant d’une Nation.
Je suis loin d’être le seul Sénégalais à se demander ce qui vous lie à notre pays, Monsieur Sall. J’ai le sentiment que vous nous détestez, méprisez. Votre mine serrée n’engage que vous, mais votre disponibilité à plus vous adresser aux médias occidentaux qu’à vos compatriotes, les menaces à tout bout de champ en interne, les silences infinis quand la Nation a besoin d’entendre son chef, sont inexcusables.
En mars 2021, pendant que le pays était à feu et à sang, personne ne savait où vous vous trouviez. Aviez-vous fui comme des rumeurs l’ont laissé entendre ? Aux Historiens de nous éclairer un jour. Tout compte fait, vous êtes resté sans nouvelles cinq jours durant. Après l’insurrection de juin 2023, vous vous enfoncez à nouveau dans le mutisme, durant 1 mois 2 jours, pour ensuite lamentablement vous justifier : « Devant l’insoutenable, l’innommable, la prise de parole n’est pas toujours facile ».
Vous, le volontariste qui, en 2015, s’est rendu jusqu’à Paris pour pleurer les 12 morts de Charlie Hebdo, n’aviez pas eu un mot, même pas un vulgaire tweet, en novembre 2020, quand 480 de vos Jeunes mouraient en mer en tentant d’émigrer. Selon l’OIM, durant la seule année 2023, ils ont été plus de 10 000 Compatriotes à avoir atteint l’Espagne, avec 93 morts décomptées par le journaliste Ayoba Faye, entre octobre et début novembre. À la place, nous avons droit à la basse besogne de vos ministres tentant de mettre en doute des informations crédibles, ou de faire croire que les embarcations « proviennent du Sénégal, mais sont remplies d’étrangers ».
Mais, justement, qu’auriez-vous dit, vous, Macky Sall, à ces jeunes ?
Leur auriez-vous appris comment être milliardaires comme vos acolytes et vous dans la fonction publique, sans activités commerciales ou industrielles ? Interrogé sur vos 1,3 milliards de patrimoine déclaré en 2012 (sous-évalué selon plusieurs sources parlant de 8 milliards), on comprend vite que l’intégrité et le sens de l’effort dans vos discours sont vides : « En ce qui me concerne, j’ai bénéficié de privilèges liés à ma fonction de Premier ministre ou de président de l'Assemblée nationale, ce qui est tout à fait normal » (revue Foreign Affairs, 2013).
Et si vous étiez si doué à faire fructifier les richesses par le travail, vous ne vous seriez pas rendu jusqu’à Saint-Pétersbourg en juillet 2023 pour quémander du blé pour notre Nation. Le taux de chômage dans notre Pays ne serait pas passé à 19,5% fin 2023 (contre 10,2% en 2012). Le nombre de pauvres n’aurait pas augmenté de 200 048 personnes entre 2011 et 2018 et notre dette publique ne vaudrait pas 13 331,9 milliards en juin 2023 (contre 3 041 milliards en 2012).
Auriez-vous rassuré ces jeunes, Monsieur Sall, comme vous l’exige votre statut de protecteur de la Nation ? La misère socio-économique n’est pas le seul élément aux trousses de nos Compatriotes. Les Sénégalais vous fuient, Monsieur Sall. Sous votre présidence, en plus des morts, pas moins de 1 000 citoyens ont été jetés en prison. Maîtres coraniques, journalistes, caricaturistes, membres de la société civile, chercheurs, opposants politiques, jeunes mariés, femmes enceintes, mères avec bébés à allaiter, tout le monde aura vécu ou vu ce Sénégal de la terreur.
Ce Sénégal où l’État fait extrader ses propres citoyens depuis l’étranger, sous des motifs tendancieux, afin de les jeter en prison. Ce Sénégal où des citoyens sont cueillis depuis l’aéroport ou réveillés brutalement la nuit pour aller croupir en détention provisoire. Dans ce Sénégal où, sociologiquement la prison est une humiliation pour toute la famille de l’arrêté, le président de la Cour suprême, Monsieur Ciré Aly Ba, n’a même pas eu honte de vouloir nuancer le fait qu’il y ait 6 000 personnes en détention provisoire dans une population carcérale de 15 000 compatriotes.
Finalement, Monsieur Sall, je vous le concède : peut-être aviez-vous eu raison de vous taire. Car, après tout, que vaut votre parole ?
Après avoir dit et répété sous tous les toits que vos deux mandats s’arrêtaient constitutionnellement en 2024, vous n’avez renoncé au troisième mandat que sous la contrainte. Au point où vous n’avez pas laissé émerger un éventuel successeur dans votre parti. Même pour un simple manager, c’est là la preuve d’un manque de vision impardonnable. Au point où vous devez liquider Ousmane Sonko, votre principal opposant, promouvoir une bureaucratie déviante (avec une DGE qui tient tête aux décisions de justice), et pour combler le tout : reporter les élections présidentielles, une première dans notre Nation. À douze heures du début officiel de la campagne électorale. Pour gagner du temps, peureux d’aller aux urnes.
Et en vous dédisant une nouvelle fois. Ici, vos mots, en 2012 : « Le président de la République ne peut pas prolonger son mandat. C’est impossible. Et cette question avait été posée en 2006, je vous le rappelle, parce qu’il y avait des gens qui agitaient aussi la possibilité pour le chef de l’État de reporter un peu les élections et d’engager un dialogue politique avec l’opposition pour organiser les élections en 2009. Mais, nous avions dit que ce n’est pas possible. Il ne faut pas augmenter d’une journée son mandat. Sinon, le pays serait dans le chaos puisque les gens ne le reconnaîtraient plus. Il n’y aurait plus d’autorité dans le pays. À partir du moment où le président n’est plus reconnu, chacun fera ce qu’il veut. Et ça, c’est dangereux pour le pays. Donc ça, c’est une fiction. »
Mais qu’y a-t-il de choquant dans tout cela, Monsieur Sall ? N’est-ce pas qu’il faut de l’élégance, une haute estime de sa personne et de sa fonction, pour s’interdire l’arbitraire ? Ou, au pire des cas, avoir de bons compagnons de route qui vous tirent vers le haut ?
La façon dont vous avez traité Ousmane Sonko vous a rendu petit à jamais. Même Senghor, envers Mamadou Dia, n’a pas été aussi cruel que vous. Même Diouf, envers Wade, n’est pas allé aussi loin que vous. C’est agaçant, en effet, d’avoir un opposant, quelqu’un qui vous apporte de la contradiction pendant que vous dirigez. Mais c’est là où la grandeur d’esprit fait la différence : savoir partager l’espace politique avec l’autre, pour le bien-être de la Nation, sans chercher à l’écraser, l’humilier, l’anéantir.
Enfermer votre opposant avec toute sa famille dans sa maison, durant 57 jours, sans aucune décision de justice. L’engloutir sous des dossiers judiciaires, aussi graves et grossiers les uns que les autres : diffamation, viols répétés, menaces de mort, appel à l’insurrection, atteinte à la sûreté de l’État, complot contre l’autorité de l’État, association de malfaiteurs en lien avec une entreprise terroriste… vol de téléphone portable. Priver sa ville de maire et mettre en embargo toute la Casamance pendant 1 mois 17 jours, sur fond de ciblages ethniques dans un Sénégal où même les nominations ont commencé à être lues sous ce prisme nauséabond digne de l’époque coloniale.
Je suis désolé de vous l’annoncer, Monsieur Sall : l’Histoire ne vous célèbrera pas comme un Homme d’État du Sénégal.
Et la mégalomanie avec laquelle votre femme et vous donnez vos noms à nos rues ou infrastructures publiques n’y changera rien. Votre action vous condamne à l’oubli. Et l’oubli est plus impitoyable que vous. Vous avez fait le choix de la médiocrité pour nous diriger : vous entourer de femmes et hommes disposés à vous soutenir dans le mensonge, en appelant ouvertement « à tuer ceux qu’il faudra tuer » ou à « brûler vif » votre opposant, « même s’il faut tuer 90% des Sénégalais ». Un député de votre mouvance résumera bien cet état d’esprit : « Pour conserver le pouvoir après 2024, nous du pouvoir, nous marcherons sur vos cadavres. »
À la prochaine génération, vous avez enseigné comment être adulte n’est pas un gage absolu de savoir, de dignité et de droiture, dans un Sénégal, une Afrique, où l’âge est pourtant vénéré. Que de silences de trop, mal placés. Que de deals, de compromissions, sous les lambris dorés d’un dialogue national interminable, insincère, toujours réactivé quand il faut nous faire avaler l’inadmissible. Que de trahisons, de transhumances, de rationalisations d’injustices flagrantes sur fond de « neutralité » ou d’une gérontocratie à deux balles : prompte à conspuer « l’impatience, l’impulsivité ou la violence des Jeunes », mais indifférente, bouche cousue, quand l’arbitraire se déhanche sous leurs yeux. Les manifestations systématiquement interdites. L’usage abusif de la force par nos forces de l’ordre devenu banal. Le principal parti d’opposition dissout dans notre pays. Les autres partis interdits de circuler ou d’accéder à leurs propres locaux.
J’ai davantage compris qu’il ne faut attendre personne pour se lever et se battre pour la Justice. J’ai malheureusement appris que pour de banals titres de « ministres », « députés », « directeurs », pour des joues plus ballonnées, des bijoux ou des voitures climatisées, certains sont encore capables de mentir, trahir et jeter en pâture notre pays.
Pour moi qui ai toujours été hanté par la question de savoir comment, dans les faits, nos sociétés se sont retrouvées assujetties, dans l’esclavage ou la colonisation, les mécanismes à l’œuvre au Sénégal ces derniers mois et années, m’ont édifié. Dans la douleur, dans l’amertume, mais jamais dans l’impuissance.
Monsieur Sall, votre dessein ne s’accomplira pas. Nous ne nous agenouillerons jamais devant vous. Le Sénégal regagnera sa souveraineté, pleine et entière. Et cela, aucun d’entre vous n’y pourra quelque chose.
À qui profite le report du scrutin du 25 février ? Que pensent les Sénégalais du report sine die de ce grand rendez-vous démocratique ? Le candidat du pouvoir serait-il mal barré et a besoin du temps ? Réponses dans Opinions sur rue-AfricaGlobe Tv
En décidant de reporter la présidentielle du 25 février très attendue des Sénégalais, le président Sall semble dire envers et contre tous, «la constitution, c’est moi », pour paraphraser Lansana Conté qui disait « la justice, c’est moi » ou encore Jean-Luc Mélenchon : « La République, c’est moi». Les Sénégalais ont forcément leur petite idée sur ce report surprenant. OPINIONS SUR RUE (AfricaGlobe Tv) leur a donné la parole pour se prononcer dans cette vidéo sur cette grosse balafre démocratique.
Décision sage pour les uns, comble de ruse d'un « pouvoiriste » nostalgique d’une fonction qu’il n’a pas encore quitte, pour les autres. Pour sûr, la décision du président Sall de reporter la Présidentielle du 25 février suscite indignation, inquiétude, surprise et regret au Sénégal.
En effet, en dépit du processus de parrainage ô combien problématique et vivement contesté, les Sénégalais étaient prêts tout de même à aller aux urnes le 25 février pour changer de régime.
Mais c'est sans compter la ruse du président qui à l’air de dire comme un certain Lansana Conté (ancien président guinéen) que la Constitution, c’est moi ou comme Jean-Luc Mélenchon (leader de la France Insoumise, Gauche) lorsque il subissait une perquisition que «la République, c’est moi ».
En tout cas, dans les rues de Dakar, les avis sont divergents sur ce report inattendu et sine die de ce grand rendez-vous démocratique. Opinons sur rue est allé capter les avis des habitants de Parcelles Unité 26 pour vous.
Regardez et laissez-vous aussi votre avis en bas de la vidéo pour participer au débat. À la prochaine pour d’autres opinions captées dans les rues de la capitale sénégalaise.
LE SAMES EN GREVE DETERRE LA HACHE DE GUERRE
Le Syndicat autonome des médecins, pharmaciens et chirurgiens-dentistes du Sénégal (SAMES) a décidé d’observer une grève de 48 heures non renouvelables, lundi et mardi, sur l’ensemble du territoire, avec respect des urgences
Dakar, 4 fév (APS) – Le Syndicat autonome des médecins, pharmaciens et chirurgiens-dentistes du Sénégal (SAMES) a décidé d’observer une grève de 48 heures non renouvelables, lundi et mardi, sur l’ensemble du territoire, avec respect des urgences, indique un communiqué reçu à l’APS.
‘’Le Bureau exécutif national du Syndicat autonome des médecins, pharmaciens et chirurgiens-dentistes du Sénégal (SAMES) appelle tous les collègues sur toute l’étendue du territoire national à observer un mot d’ordre de grève de 48 heures non renouvelables, le lundi 5 et le mardi 6 février 2024, avec respect des urgences », lit-on dans le communiqué signé par le secrétaire général du syndicat.
Ce mouvement d’humeur, selon le texte, fait suite à »une agression par arme à impulsion électrique » dont a été victime leur camarade Massamba Gueye Fall, médecin de garde au Service d’Accueil des Urgences (SAU) de l’Hôpital régional de Saint-Louis .
»(..) le mercredi 31 janvier 2024, le camarade Massamba Gueye Fall, médecin de garde au Service d’Accueil des Urgences (SAU) de l’Hôpital régional de Saint-Louis (…) a été la cible d’éléments de la Police nationale en subissant une agression par arme à impulsion électrique », déplore le communiqué.
Selon la même source, »cette forfaiture est intervenue en marge de l’installation tumultueuse d’un nouvel agent comptable contestée par une partie des travailleurs’’.
‘’Nous précisons que Dr Fall de garde au SAU, n’était mêlé ni de près ni de loin à ces évènements. Nous avons constaté avec stupeur, consternation et désarroi, la gravité des faits en visualisant des vidéos de la scène’’, souligne le Secrétaire général du SAMES.
Pour le syndicat, »cette énième attaque et humiliation d’un membre du corps médical dans l’exercice de ses missions de soins, ne saurait rester sans réponse à la dimension de l’affront’’.
LES CONSEQUENCES DE L’ABROGATION DU DECRET CONVOQUANT LE CORPS ELECTORAL AU MENU DE LA REVUE DE PRESSE DE L’APS CE LUNDI
Les parutions de ce lundi 5 février 2024 épiloguent sur l’abrogation du décret convoquant le corps électoral, anticipant notamment un probable report de l’élection présidentielle du 25 février.
Dakar, 5 fév (APS) – Les journaux du lundi épiloguent sur l’abrogation du décret convoquant le corps électoral, anticipant notamment un probable report de l’élection présidentielle du 25 février.
Le président de la République, Macky Sall, réaffirmant sa décision de ne pas se présenter à la prochaine présidentielle, a annoncé samedi avoir abrogé le décret convoquant le corps électoral le 25 février prochain, en attendant les résultats de la commission d’enquête parlementaire visant à clarifier les conditions dans lesquelles certaines candidatures ont été déclarées irrecevables.
Cette annonce équivaut de facto à un report de cette élection alors que la campagne électorale devait démarrer le lendemain, dimanche.
Le Parti démocratique sénégalais (PDS) avait demandé et obtenu la mise en place d’une commission d’enquête parlementaire après l’invalidation de la candidature de Karim Wade à l’élection présidentielle pour cause de double nationalité.
Le PDS a émis des accusations de corruption présumée à l’encontre de certains membres du Conseil constitutionnel, après que la candidature de son leader, Karim Wade a été déclarée irrecevable.
Dans un message à la nation radiotélévisé , le chef de l’Etat a évoqué ce « conflit ouvert », ce « différend » entre l’Assemblée nationale et le Conseil constitutionnel, sur fond d’une supposée affaire de corruption de juges ».
‘’La présidentielle ne se tiendra pas à date’’, affiche en Une Le Soleil qui évoque entre autres conséquences de cette décision, une division de la classe politique.
‘’La décision prise par le chef de l’Etat, Macky Sall, de suspendre le processus électoral a suscité des réactions diverses au sein de la classe politique. Si l’opposition évoque des prémisses d’une régression démocratique, le camp du pouvoir salue la justesse d’une initiative présidentielle visant à éviter des contentieux pré et post-électoraux, alors que du côté des non-alignés, la pilule reste amère’’, indique le journal.
De son côté, Sud Quotidien s’exclame en Une : ‘’Macky Sall annule tout’’. Selon la publication, le chef de l’Etat reporte sine die, la 13e élection présidentielle de l’histoire politique du Sénégal qui devait se tenir dans trois semaines.
‘’Pour justifier cette décision très controversée et sans précédent dans l’histoire politique du Sénégal, du fait qu’il sort hors cadre des dispositions prévues par la Constitution du pays, Macky Sall a évoqué un différend entre l’Assemblée nationale et le Conseil constitutionnel, en conflit ouvert sur fond d’une supposée affaire de corruption de juges’’, rapporte le journal du groupe Sud communication.
D’autres journaux sont préoccupés par l’image que cette décision renvoie. Il en est ainsi de L’Observateur dont la Une est illustrée par le montage d’une photo montrant le chef de l’Etat derrière une vitre cassée.
Dans un article intitulé ‘’’Macky Sall, l’annulation de la Présidentielle et le saccage de son image’’, le journal estime que la décision d’abrogation du décret convoquant le corps électoral ‘’a provoqué une vive indignation au Sénégal et dans la communauté internationale. Une image balafrée du président Sall a été présentée à la face du monde’’.
Le Quotidien n’hésite pas à évoquer un ‘’coup de force’’ au sujet de la décision du président Sall, alors que les citoyens sénégalais devaient se rendre aux urnes le 25 février pour choisir leur 5e président de la République.
‘’Pour la première fois dans l’histoire politique du pays, la Présidentielle ne va pas se tenir à date échue, alors que la campagne électorale devait démarrer dimanche et la présidentielle se tenir le 25 février, le président Macky Sall a pris une décision qui arrête tout le processus électoral’’, fait savoir la publication.
Pendant ce temps, Bes Bi le Journal parle de ‘’coup de taille’’ au sujet de la décision ouvrant la voie à un report de l’élection présidentielle du 25 février, tandis que L’AS quotidien anticipe sur un report sine die de ce scrutin.
Évoquant les développements et implications de la décision d’abrogation du décret convoquant le corps électoral, Walf Quotidien affiche en Une : ‘’Ci-gît la démocratie’’.
La publication rend dans le même temps compte de ‘’violents affrontements entre militants et forces de l’ordre’’ dimanche alors que des leaders de l’opposition avaient appelé à un grand rassemblement sur la VDN, à Dakar, pour le démarrage de leur campagne électoral.
La convocation ce lundi des députés pour examiner la proposition de loi visant à modifier l’article 31 de la Constitution pour reporter l’élection présidentielle intéresse d’autres publication.
‘’Si la décision est actée aujourd’hui par l’Assemblée nationale, Macky Sall restera à la tête du pays jusqu’au 2 avril 2025. Etant entendu que c’est la Constitution qui cadre la date de l’élection présidentielle au dernier dimanche du mois de février, le report nous mène à l’année prochaine et l’amendement introduit à cet effet prolonge de fait le mandat du président Macky Sall’’, croit savoir le journal Kritik.
L'APPEL DE L'ÉGLISE AU RESPECT DES LOIS
"Il faut que les Sénégalais évitent la technique du contournement", rappelle Mgr Benjamin Ndiaye lors d'un discours à Joal-Fadiouth. Pour l'homme archevêque de Dakar, le respect des institutions est indispensable à la cohésion nationale
L’archevêque de Dakar, Monseigneur Benjamin Ndiaye a rappelé dimanche à Joal-Fadiouth, une commune du département de Mbour (Ouest), l’importance que les institutions de la République soient »respectées et respectables dans leurs missions ».
“Il est important que nous cherchions à vivre la cohésion nationale. Il faut que les institutions soient respectables et respectées dans leurs missions pour que nous puissions avancer ensemble et cela suppose que nous tous nous jouions le jeu du sentiment national“, a dit le chef de l’église catholique sénégalaise.
L’archevêque de Dakar présidait la fête marquant les 175 ans de l’érection juridique de la Paroisse de Joal.
”Quand il y a règlement, c’est pour qu’il soit suivi. Ce n’est pas pour qu’on passe à droite ou à gauche. Si on respecte le règlement, on peut avancer“, a-t-il dit.
L’homme de l’église, invite les sénégalais au respect des lois et des règlements pour vivre en paix.
”J’aime bien rappeler aux Sénégalais que quand nous nous saluons, nous nous souhaitons constamment la paix, mais cette paix-là, elle est à bâtir et ça passe par la vérité dans la parole et dans les gestes“, a souligné M. Ndiaye.
”Il faut que les sénégalais évitent la technique du contournement“, a-t-il ajouté.
L’archevêque qui dit partager la situation actuelle avec les concitoyens, a ajouté : ”ce qui m’importe le plus c’est que le Sénégal vive selon sa constitution. C’est l’essentiel“.
”Tout ce que l’on peut dire et que l’on peut faire, que cela corresponde à la constitution que nous avons adoptée comme citoyens de ce pays“, a-t-il conclu.
LE SÉNÉGAL S'ÉLOIGNE DE SA TRADITION DÉMOCRATIQUE SELON LE MONDE
Le journal français pointe une volonté de manipulation électorale, un mépris des institutions et un risque d'embrasement. Pour la publication, Macky Sall joue un jeu dangereux qui menace la stabilité du "phare de la démocratie" en Afrique de l'Ouest
Brice Folarinwa de SenePlus |
Publication 05/02/2024
Dans un éditorial publié le 5 février 2024, le quotidien Le Monde s'alarme du "jeu dangereux" mené par le président sénégalais Macky Sall. En effet, ce dernier a annoncé samedi "de façon surprise" le report sine die de l'élection présidentielle prévue le 25 février, rompant avec "la longue histoire démocratique" du pays.
Selon le journal, "depuis son indépendance en 1960, l'armée n'a jamais menacé le pouvoir" au Sénégal et "une véritable liberté d'expression y nourrit un débat politique dynamique". Ainsi, "depuis 1963, les scrutins présidentiels ont toujours eu lieu à la date prévue".
Or, note Le Monde, Macky Sall "s'était déjà signalé par un comportement alarmant" lorsqu'il avait laissé planer le doute sur sa volonté de briguer un troisième mandat, ce qui est interdit par la Constitution. Finalement, il y avait renoncé en juillet dernier après des "émeutes réprimées dans le sang" en juin.
Pour le journal, "tout se passe comme si le président voulait favoriser la candidature, rejetée par le Conseil constitutionnel, de Karim Wade". En prenant "prétexte de la mise en cause à l'Assemblée nationale, par des élus proches de M. Wade, de l’intégrité des juges constitutionnels", Macky Sall "risque en réalité de mettre le feu aux poudres" alors que le pays a "les nerfs à vif".
Le Monde s'inquiète du "signal" donné et de l'atteinte portée à "la séparation des pouvoirs". Car "que le phare de la démocratie dans la région donne pareil signal ne peut qu’inquiéter sur la pérennité du « modèle sénégalais »".
VIDEO
POUR ABDOU LATIF COULIBALY, MACKY SALL A ARRÊTÉ L'HISTOIRE
Pointant du doigt l'inconstitutionnalité du report électoral, l'ancien secrétaire général du gouvernement dévoile les dessous politiciens de la manœuvre et pointe la responsabilité directe du président dans cette crise démocratique
Brice Folarinwa de SenePlus |
Publication 05/02/2024
Abdou Latif Coulibaly, ancien secrétaire général du gouvernement, a accordé une interview à RFI ce lundi 5 février 2024 pour expliquer les raisons de sa démission, survenue deux jours plus tôt. Selon M. Coulibaly, le report sine die du scrutin initialement prévu le 25 février dernier constitue une "entorse" et une "dérive" inacceptable.
Interrogé sur les motifs de son départ du gouvernement, le haut fonctionnaire a indiqué vouloir "retrouver [sa] liberté d'expression" et ne plus se sentir tenu par "la solidarité du gouvernement" face à une décision avec laquelle il est en profond désaccord. Pour M. Coulibaly, ni le président Macky Sall, ni l'Assemblée nationale n'avaient le pouvoir de reporter l'élection, arguant que la réforme constitutionnelle de 2016 était censée garantir l'intangibilité du calendrier électoral.
À ce sujet, il a relevé une contradiction majeure dans la position actuelle du chef de l'État, qui affirmait lui-même en 2012 qu'un président ne pouvait "augmenter d'une journée son mandat". Selon l'ex-secrétaire général, "aujourd'hui, [Macky Sall] décide de renoncer à tout ça. Il arrête l'histoire", se déjugant par rapport aux engagements passés.
Abdou Latif Coulibaly a par ailleurs estimé probable l'existence d'"un accord sur les démarches" avec le Parti démocratique sénégalais (PDS) de Karim Wade, principal bénéficiaire du report.
Pour l'ancien ministre, la décision de Macky Sall "n'est pas un avantage pour lui et en rien du tout" sur le plan politique. Elle dénoterait selon lui une tendance chez les dirigeants, "quand on est dans l’exercice du pouvoir, [à croire] que tout est possible". Plus grave encore, M. Coulibaly a affirmé avoir "alerté le président sur les risques" d'un tel report, sans être écouté.
En fin d'interview, l'opposant a déploré l’absence de préparatifs logistiques et administratifs sur le terrain en vue du scrutin, contrairement à ce qui a toujours été fait dans le cadre du processus pré-électoral. Une situation qui révèle, pour Abdou Latif Coulibaly, une volonté délibérée de reporter les élections de la part du pouvoir.
L'INTERNET MOBILE COUPÉ
Le ministre de la Communication justifie cette mesure par la nécessité de contrer la diffusion de propos subversifs en plein contexte de tensions
Les autorités sénégalaises annoncent avoir suspendu « provisoirement » l’internet des données mobiles à partir du dimanche 4 février à 22 heures.
« Le ministre de la Communication, des Télécommunications, et du Numérique informe le public qu’en raison de la diffusion de plusieurs messages haineux e subversif relayés sur les réseaux sociaux dans un contexte de menaces de troubles à l’ordre public, l’internet des données mobiles est suspendu provisoirement à partir du dimanche 4 février à 22 heures », écrit un communiqué de la tutelle rendu public le même jour.
« Les opérateurs de téléphonie sont tenus de se conformer aux réquisitions notifiées », indique la source.
Par Madiambal DIAGNE
MACKY SALL, LE DIALOGUE POUR REFERMER LA DECHIRURE
Macky Sall est contraint et forcé d’en arriver à cette extrémité à laquelle le Sénégal n’était pas préparé. Cela est d’autant plus difficile qu’il ne le fait point pour lui-même
L’histoire dira un jour si le Président Macky Sall a eu tort ou raison de suspendre le processus électoral. Il m’a fait l’amitié de m’expliquer les raisons profondes de la lourde décision qu’il a dû prendre. Il en mesurait pleinement le risque pour sa propre image et le risque réel de tumultes politiques, et même sécuritaires pour le pays. Néanmoins, il a considéré que l’enjeu pour la défense et la préservation de la République, et la viabilité institutionnelle et démocratique en vaut la chandelle. C’est aussi une forme de courage. Mes échanges avec des acteurs de tous bords m’ont aussi permis de me départir d’un certain dogmatisme et de comprendre cette décision, douloureuse et sans doute lourde de conséquences. J’ai même manifesté une grande indulgence à l’endroit du chef de l’Etat en lui précisant me résigner à accepter cette situation. Je ne suis pas le seul dans une telle posture.
Tout le monde a pu observer la retenue, ou la prudence, on peut même dire la compréhension, peu habituelles en de pareilles circonstances, manifestées en chœur par des partenaires traditionnels du Sénégal comme les Usa, l’Union européenne ou des institutions africaines comme la Cedeao et l’Union africaine. Il est clair que Macky Sall est contraint et forcé d’en arriver à cette extrémité à laquelle le Sénégal n’était pas préparé. Cela est d’autant plus difficile qu’il ne le fait point pour lui-même, dans l’objectif de garder le pouvoir, de rester à son poste. Il piaffe assurément d’impatience de rendre le pouvoir à un successeur élu conformément aux règles et principes démocratiques.
L’Assemblée nationale, saisie par une proposition de loi portée par le Groupe parlementaire Wallu, va se prononcer sur la demande de report de l’élection présidentielle. Le report du scrutin devrait être logiquement acté, car on augure que la dynamique de la collaboration entre le groupe parlementaire de la majorité et les députés du Parti démocratique Sénégalais (Pds) lors de l’examen, la semaine dernière, de la résolution instituant une Commission d’enquête parlementaire, sera toujours de mise. Le texte permettant à l’Assemblée nationale d’ouvrir une enquête sur des faits supposés de corruption de membres du Conseil constitutionnel a été adopté par 120 voix contre 24. On envisage difficilement la possibilité d’un vote négatif du texte en raison de la configuration des forces à l’Assemblée nationale. Il restera toujours une incertitude quant à l’issue d’un recours en inconstitutionnalité dont l’éventualité est certaine. Les délais pour un tel recours vont courir avant que le Conseil constitutionnel ne se prononce. Quelle serait la situation si le Conseil constitutionnel retoque la loi ? Cela en rajouterait à l’imbroglio. Tout cela pour dire que, quelle que puisse être l’issue de la bataille procédurale, il s’avérera matériellement impossible de tenir le premier tour de l’élection présidentielle à la date du 25 février 2024. Alea jacta est.
Répondre au dialogue pour sortir de l’impasse
Que restera-t-il à faire ? S’accorder ou se voir imposer un nouveau calendrier électoral. D’où donc la nécessité absolue d’un dialogue politique. Dans une allocution solennelle le 3 février 2024 annonçant la suspension brutale du processus électoral, Macky Sall a invité les acteurs politiques et la Société civile à un nouvel épisode de dialogue. Le vent du dialogue auquel vient d’appeler le Président Macky Sall, souffle fortement et les rares acteurs politiques qui déclarent s’y opposer finiront par s’y rallier ou ils verront l’histoire se définir sans eux. Encore que ledit dialogue politique ne saurait porter que sur les limites d’un nouvel agenda électoral. Au demeurant, le juridisme autour de la situation politique actuelle ne permettra nullement de sortir le pays de cette impasse. Il faudrait prendre de la hauteur et avoir une posture politique et réaliste pour contourner les écueils qui se dressent, par la force des choses, sur le chemin de la marche du pays. Qui pourra rester sur ses certitudes et son dogmatisme pour occulter ou feindre ignorer une situation politique objective ?
Il faudrait sans doute veiller à ne pas trop alourdir l'agenda de ce dialogue. Autrement la mise en œuvre des conclusions qui en découleraient, pourrait prendre du temps et impacterait fatalement sur les délais pour l'organisation de l'élection.
Benno bokk yaakaar, le Parti démocratique sénégalais, la Coalition Idy 2024, comme celle de Aly Ngouille Ndiaye, entre autres, ainsi que de larges franges de la Société civile, seront au dialogue. Cela commence à faire du beau monde. A la vérité, la classe politique n’a pas d’autre choix que de prendre part au dialogue, et les décisions qui en découleront auront une certaine légitimité et s’appliqueront à tout le monde. Est-il nécessaire de rappeler que le 8 mai 2023, dans une chronique intitulée «Dialogue : le possible et l’impossible», nous prévenions Ousmane Sonko et ses partisans qui refusaient d’aller répondre au Dialogue politique convié par le pouvoir, que l’histoire s’écrira sans eux et à leurs dépens ou leur détriment. Ce sont les mêmes acteurs qui, une fois de plus, déclarent rejeter le dialogue pour chercher à imposer un rapport de forces dont ils n’ont pas les moyens de sortir vainqueurs. Voudraient-ils que des acteurs non politiques comme l’Armée finissent par imposer un ordre politique et institutionnel nouveau ? Le cas échéant, ils en pâtiront comme tout le monde, et ce serait jeter le bébé de la démocratie et du système institutionnel du Sénégal avec l’eau du bain. Ce ne sera sans doute pas étonnant qu’ils adoptent à nouveau cette propension au suicide collectif, car ils avaient déjà maintes fois appelé à un coup d’Etat militaire, notamment le 1er juin 2023. Ces incartades avaient conforté la nécessité de dissoudre le parti politique Pastef et devraient disqualifier ses responsables de toute compétition politique et électorale démocratique. C’est là qu’on peut légitiment avoir en travers de la gorge, l’acceptation par le Conseil constitutionnel de candidatures de personnes prônant des coups d’Etat militaires. De telles personnes n’ont indubitablement pas leur place dans le dispositif institutionnel et démocratique, et aucun compromis ou aucune compromission avec elles ne saurait être acceptable. La démocratie ne saurait s’accommoder de putschistes velléitaires.
LE TISSERAND DU TEMPS
Ousmane William Mbaye a toujours filmé à Dakar. Il prend ici le parti de déplacer sa caméra tout en restant dans sa logique de gardien de la mémoire, partisan de la réécriture en zigzague de l’histoire africaine à hauteur d’Homme.
Dans les années 1970 - 80, la génération de Ousmane William Mbaye avait entrepris de déconstruire le récit filmique, de l’éclater et d’en faire un récit discontinu en forme de puzzle. Ndar, Saga Waalo le documentaire sur la ville de Saint Louis du Sénégal, 5ième documentaire de Ousmane William Mbaye reflète bien cet esprit. Diverses thématiques traversent le film, s’entrechoquent, s’entrelacent, se décroisent, s’accouplent, se contredisent pour finalement tisser une toile dont les fils de chaine sont : le fleuve, le métissage, le cheval, le pont Faidherbe et les fils de trame : la grande et la petite histoire, l’esclavagisme, le commerce de la gomme arabique, les signares, l’acte de bravoure des femmes de Nder.
Au tout début de sa carrière, Ousmane William Mbaye nourrissait le désir de faire sa grande entrée en cinéma avec son projet de film Talatay Nder, dédié aux résistantes du Waalo et voici que la banque dans laquelle était logée une partie de l’argent de la production ferme boutique entravant ainsi le projet. Ce fut la grande déception. Ces dernières années, un autre projet le taraudait, celui d’un documentaire sur le boxeur sénégalais Battling Siki, champion du monde poids mi-lourds (1922-1923). Mais à la vue du documentaire Siki du réalisateur hollandais Niek Koppen et dont il dit qu’il est un admirable film, cela l’a refréné. Qu’à cela ne tienne ! Avec ses fragments de déception William Mbaye en fera bien quelque chose. Ndar Saga Walo porte les marques de ces déceptions recyclées puisque dans le film sont convoqués et les femmes de Nder avec Natté Yalla comme figure de proue de la résistance et Batting Siki en peinture murale.
Le film de Ousmane William Mbaye replace l’histoire de la ville de Saint-Louis du Sénégal dans ce que l’historien Mamadou Diouf appelle le Temps du Monde à savoir penser l’histoire autrement. L’histoire de cette ville tricentenaire n’est pas à exclure de la grande histoire de l’humanité. C’est ce que dit entre autres le film dont l’épine dorsale est le fleuve aux eaux limoneuses, tantôt tumultueuses, tantôt indolentes voire lascives. Pour calmer le courroux de Mame Coumba Bang, génie des eaux, il faut du sucre et du lait caillé. Mais le film insiste sur le métissage assumé et revendiqué des Saint-Louisiennes et Saint-Louisiens. Le métissage comme terrain commun entre le colonisateur et les natifs. Des métis qui mettent plus l’accent sur leur appartenance africaine qu’européenne. Mais cette appartenance à deux cultures bien qu’avantageuse renferme des contradictions et des incohérences qu’explore la caméra, qui souffle sur l’épaisse couche d’omerta qui ensevelissait le passé esclavagiste de la ville dont les pratiquants n’étaient pas seulement des français mais également des Saint-Louisiens bon teint bon genre. Ndar ville religieuse avec sa mosquée nantie d’une grosse cloche comme à la cathédrale. La ville est semblable à un bateau immobile avec sur son flan, accroché le Bou El Mogdad, bateaux de croisière jumeau de celui du Fizcarraldo de Werner Herzog.
Ousmane William Mbaye tisse à sa manière le temps de l’histoire. Ndar Saga Waalo place le passé de la ville dans le présent, entortille les préoccupations anciennes autour de celles actuelles et futures sous la voix de la jazzwomen Aminta Fall et celle de Baaba Maal. Documentaire d’archives aux images contemplatives, le film recourt à la photographie, au dessin animé, aux archives filmiques, à l’iconographie, au coloriage, aux rushs de son film Mère-bi. Le montage joue avec le transparent qui fait naitre des images fantômes par dédoublement.
, Les personnes qui interviennent sont fascinés par cette ville, qu’ils refaçonnent de manière contradictoire. Ils sont historienne, historien, conservatrice de musée, propriétaire d’hôtel, enseignant, citoyen. Le réalisateur oblitère leur profession en ne mettant sur écriteau que leur nom. Il les ravale au rang de gens ordinaires qui conversent entre eux.
Ousmane William Mbaye a toujours filmé à Dakar. Il prend ici le parti de déplacer sa caméra tout en restant dans sa logique de gardien de la mémoire, partisan de la réécriture en zigzague de l’histoire africaine à hauteur d’Homme. Disons !