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4 mai 2025
PAR Pierre Sané
LE FORCENÉ ET LE TRIBUNAL
En matière de droits humains, notre pays vit présentement un désastre que j’ai rarement expérimenté tout au long de ma vie d’engagement et de compassion pour les victimes de l’arbitraire et de la brutalité des États
Au Sénégal, le président de la République maintient Ousmane Sonko dans les liens de la détention sur la base de charges hautement fantaisistes.Or nous savons que cette détention n’est que la énieme manifestation d’un acharnement obsessionnel sécrété par l’angoisse d’une fin de règne annoncée : la perte du pouvoir en février 2024 et la fin de l’impunité.
Pis, quand le président de la République pousse sournoisement Ousmane Sonko à la mort, il commet la plus grande faute inexcusable (2) de toute sa vie politique. Une faute que le peuple sénégalais et l’Afrique toute entière (avec sa diaspora) ne lui pardonneront jamais ou qu’il aille et quoiqu’il fasse dans le futur.
Les tribunaux populaires africains quand à eux ont déjà unanimement tranché : coupable !
En effet, pour beaucoup d’Africains Macky Sall a déjà rejoint le camp des « pestiférés », le camp de ces présidents africains jugés, condamnés et emprisonnés pour des crimes abominables commis contre leurs propres peuples. Me viennent à l’esprit Moubarak, Ben Ali, Charles Taylor, Hissen Habré.. Ou de ces « pre-pestiférés » qui se morfondent dans un exil honteux et dans la hantise d’être rattrapés par la justice des hommes. Citons entre autres Blaise Compaoré, Yaya Jammeh, Alpha Condé.
Pire, quand on se remémore Thomas Sankara, on pense toujours à son bourreau le « beau Blaise ».Toujours ! Idem pour Lumumba et Mobutu. Ou pour Ernest Ouandié et Ahidjo. Ou encore Oumar Blondin Diop et Leopold Senghor. Malheureusement, la progéniture de ces bourreaux risquera d’être indexée elle aussi.
Si Sonko (ou tout autre prisonnier politique) meurt en prison ou après libération, ce sera le seul fait à retenir de la présidence de Macky Sall. Une marque indélébile d’infamie. Et rien d’autre si ce n’est le mandat du mal. Y compris pour sa descendance qui devra vivre dans l’ignominie d’un tel héritage.
En matière de droits humains, notre pays vit présentement un désastre que j’ai rarement expérimenté tout au long de ma vie faite d’engagement et de compassion pour les victimes de l’arbitraire et de la brutalité des États.
Au Sénégal nous avons aujourd’hui :
- plus de 1 500 détenus politiques.Trois fois plus qu’en Russie ! (3). L’Afrique du sud au pic de l’apartheid détenait 5 000 prisonniers politiques avec une population 4 fois supérieure à la nôtre. Et sans aucune prétention à appartenir au club des démocraties ;
- plus de 60 exécutions extrajudiciaires de jeunes manifestants en deux ans. Tous tués par balles réelles. Toutes enregistrées auprès des Nations Unies (4). Pas une seule enquête ouverte ! Ce qui bien sûr interpelle la CPI ;
- au moins deux disparitions forcées, (de gendarmes casamancais) probablement suivies d’exécutions extrajudiciaires. Le seul pays africain en 2022. Où en est l’enquête ?
- la torture qui se réinstalle renforcé par le retour de nos anciens tortionnaires avec leurs conseils français et israéliens ;
(Voir les inquiétudes des agences de l’ONU). Je rappelle que la torture est un crime international et que les tortionnaires peuvent être jugés partout. Et ils le seront.
- l’interdiction systématique de toute manifestation,
protestation ou expression de mécontentement (contrairement au Mali et au Burkina Faso pourtant supposés avoir versé dans la dictature) ;
Et maintenant le régime en est à traquer les chants de soutien à Ousmane Sonko dans les stades du pays. Que n’a-t-on pas dit à propos des effets du ridicule ?
Après les chanteurs, vont-ils nous couper les oreilles ?
- la dissolution de parti politique (seul pays en Afrique), faisant ainsi de l’expression politique dissidente une illégalité ;
- la déportation arbitraire d’une centaine de Guinéens lors des émeutes de juin 2023, en dépit des conventions de la CEDEAO. Et l’on s’étonne que la Guinée nous en veuille au point de suspendre sa participation à l’OMVS ;
- le harcèlement et l’emprisonnement à tout va de journalistes d’activistes et même d’« influenceurs » et autres rappeurs.
Tout cela s’inscrit dans la catégorie des « attaques généralisées » contre la population prévu dans les statuts de la CPI.
Et tout aussi grave sinon plus grave, la menace « d’intervention » au Niger, crime d’agression s’il en est, sanctionné par la Cour pénale internationale en son article 8. (voir notes). Le grand danger dans les régimes aux abois, c’est le triomphe de la bêtise.
Au lieu d’éveiller les Sénégalais et la jeunesse vers des lendemains qui chantent, Macky Sall a sciemment choisi de les faire déchanter. De leur faire renoncer à leurs rêves d’un Sénégal meilleur. Renoncements qui les contraignent à emprunter les chemins de l’émigration irrégulière. Encore pire, il tente d’éliminer celui-là même qui est porteur d’un espoir de changement : Ousmane Sonko. Étouffer l’espoir d’un peuple ? Ca devrait être un crime contre l’humanité.
Oui, « il est des hommes plus injustes que le mauvais sort. Ils te condamnent sans procès et te livrent aux enfers avant que tu sois mort » (5)
Ainsi donc, tel un forcené, Macky Sall fonce droit dans le mur. Or nul ne peut convaincre un forcené d’agir contre sa vraie nature. Peine perdue.
Assurons-nous seulement et organisons-nous pour que derrière ce mur se dresseront le Tribunal Pénal International (Statuts en 6) et des tribunaux de toutes les nations tenues par le principe de la compétence universelle. En appui au Tribunal africain des peuples.
Notes
1. Un forcené est un être méchant dénué de toute capacité d’écoute
La femme de lettres à succès revient avec un livre sous forme de plaidoyer pour la littérature et la liberté des écrivains. Elle y dénonce les directives de certains éditeurs et les injonctions à publier sur des sujets dans l’air du temps
La femme de lettres franco-sénégalaise à succès, traduite dans une vingtaine de langues, revient avec un livre sous forme de plaidoyer pour la littérature et la liberté des écrivains. Elle y dénonce les directives de certains éditeurs et les injonctions à publier sur des sujets dans l’air du temps. " Le verbe libre ou le silence" est publié aux éditions Albin Michel.
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UN ÉTAT VINDICATIF
Ndeye Fatou Blondin Diop évoque son parcours politique, ses opinions sur les enjeux actuels au Sénégal et sa vision d'un paysage politique plus inclusif et transparent, au micro de Baye Omar Gueye dans l'émission dominicale Objection de Sud FM
Ndeye Fatou Blondin Diop évoque son parcours politique, ses opinions sur les enjeux actuels au Sénégal et sa vision d'un paysage politique plus inclusif et transparent, au micro de Baye Omar Gueye dans l'émission dominicale Objection de Sud FM.
UNE DOCTRINE À REPENSER
La gestion des mouvements de foule et des manifestations populaires est problématique au Sénégal, aboutissant, de plus en plus, à des victimes
Le maintien de l’ordre au Sénégal a été souvent marqué par l’emploi abusif de la force qui aboutit le plus souvent à des bavures et des morts d’hommes. Cette doctrine doit être repensée pour garantir le droit de manifester des citoyens dans le cadre du respect de la sécurité publique.
La gestion des mouvements de foule et des manifestations populaires est problématique au Sénégal, aboutissant, de plus en plus, à des victimes. Des morts qui sont souvent la résultante d’un usage abusif de la force de la part des forces de défense et de sécurité. Les derniers évènements dans la commune de Khossanto, région de Kédougou, qui ont conduit à la mort de deux manifestants et fait huit blessés n’échappent pas à ce constat.
Des jeunes qui protestent contre la modification du processus de recrutement dans les entreprises minières de la région. Une décision du Préfet du département de Saraya qui sera ensuite suspendue par le ministre de l’Intérieur qui s’est finalement rendu sur les lieux. Cet incident a provoqué une levée de boucliers des organisations des droits de l’homme qui réclament une refonte du maintien de l’ordre au Sénégal.
Plusieurs organisations de protection des droits humains dont la Ligue sénégalaise des droits humains, Afrikajom Center, et la Rencontre africaine pour la défense des droits de l'homme (Raddho) demandent l’ouverture d’une enquête indépendante et impartiale. « Il n’est pas acceptable qu’une manifestation soit réprimée avec des tirs à balles réelles », dénonce Seydi Gassama d’Amnesty International.
Depuis les évènements de mars 2021, le Sénégal est entré dans une spirale négative concernant le maintien de l’ordre. La succession de morts, lors des derniers éléments politiques, en est devenue la parfaite illustration. Les dernières émeutes du 1 et 2 juin dernier ont entraîné la mort d’une trentaine de jeunes manifestants. On attend encore qu’une enquête soit diligentée, malgré les assurances de l’Etat. L’arrestation puis l’incarcération d’Ousmane Sonko en juillet 2023 a aussi entraîné une série de décès chez les manifestants, notamment à Dakar et la région de Ziguinchor.
En effet, l’agressivité des manifestants et les nouvelles techniques de guérilla urbaine poussent-elles les forces de l’ordre à faire un tel usage de la violence ? Il y a-t-il une absence d'entraînement et de formation parmi les forces de l’ordre qui favorise la multiplication des bavures ?
Selon plusieurs spécialistes, la doctrine d’emploi des armes létales de répression doit être mieux encadrée. Ils invitent aussi à pallier le manque d’effectifs des Forces de défense et de sécurité. Le gouvernement doit aussi renforcer le corps du Groupement d’Intervention mobile (GMI) chargé du maintien de l’ordre en équipements et personnels qualifiés pour lui permettre de réussir leur mission. Par ailleurs, le sentiment d’impunité participe aussi à renforcer ce climat de violence et répression aveugle des manifestations.
En France, le dispositif de maintien de l’ordre a été totalement repensé, après la mort de Malik Oussekine en 1986, tué lors d’une manifestation d'étudiants à Paris. Après ce décès, les méthodes de gestion de foules ont été repensées, afin d'éviter les bavures policières en privilégiant le dialogue, la réactivité et la mobilité des forces de l’ordre pour encadrer au maximum les manifestations. Il a aussi été décidé de limiter au strict minimum les situations de contact direct entre policiers et manifestants, préférant céder du terrain plutôt d’aller vers la confrontation.
Tandis qu’en Allemagne, on privilégie le dialogue avec une obligation de communication entre forces de l’ordre et protestataires, avant et pendant la manifestation. La police allemande exclut les lanceurs de balles de défense LBD et les grenades, contrairement à la France, et préfère avoir recours aux canons à eau pour repousser la foule.
Les carences structurelles du dispositif de maintien de l’ordre au Sénégal
Au Sénégal, on ne peut pas parler de doctrine de maintien de l’ordre. Une plus large de manœuvre est accordée aux officiers sur le terrain dans la mise en œuvre des opérations de maintien l’ordre. Le manque d’effectifs et la crainte d’être submergé par des vagues de manifestants peut accentuer le risque d’un usage plus généralisé d’armes létales de la part des forces de l’ordre qui peuvent se sentir menacer face à des masses en colère. Une situation qui à terme multiplie les risques d’abus et de bavures lors de rassemblements violents au Sénégal.
D’après Sadikh Niasse, Secrétaire Général de la Rencontre africaine pour la défense des droits de l’Homme (Raddho), ce bilan macabre à chaque manifestation ne peut être conjuré qu’en assurant une meilleure formation et un renforcement des capacités de nos forces de défense et de sécurité. ‘’Il nous faut travailler à pousser nos forces de l’ordre à mettre en place une réponse graduée par rapport au type de manifestations qu’ils rencontrent. Les forces de l’ordre doivent éviter d’avoir recours à des armes létales, lors de ces manifestations », préconise le droit de l'lhommiste.
Selon Sadikh Niasse, des circonstances exceptionnelles comme l’agressivité des manifestants et le caractère spontané des manifestations ne peuvent justifier cet usage abusif de la force. ‘’Les manifestations spontanées sont difficilement gérables par les forces de l’ordre. Toutefois, ils doivent faire preuve de sang-froid et éviter tout abus dans l’exercice du maintien de l’ordre. Des citoyens n’ont pas à mourir dans l’exercice de leur droit constitutionnel’’, dit-il.
LA PS APPELLE À L'UNITÉ DE BENNO
Le bureau politique du Parti socialiste a appelé toutes les composantes de Benno Bokk Yaakar (BBY), samedi, à Dakar, à faire preuve d’‘’unité’’ et de ‘’cohésion’’ autour d’Amadou Ba, le candidat de ladite coalition à la présidentielle
Le bureau politique du Parti socialiste (PS) a appelé toutes les composantes de Benno Bokk Yaakar (BBY), samedi, à Dakar, à faire preuve d’‘’unité’’ et de ‘’cohésion’’ autour d’Amadou Ba, le candidat de ladite coalition à l’élection présidentielle du 25 février 2024.
‘’Nous avons évoqué plusieurs questions au cours de cette réunion, l’obligation et l’exigence d’unité, de solidarité et de cohésion de toutes les composantes de Benno Bokk Yaakaar surtout’’, a déclaré le député Abdoulaye Wilane, porte-parole du PS.
M. Wilane s’adressait aux journalistes à la fin d’une réunion du bureau politique du Parti socialiste.
Le PS a demandé à ses coordinations d’organiser, partout dans le pays, des réunions de restitution de la réunion du bureau politique et de manifester leur ‘’engagement’’ à soutenir la candidature d’Amadou Ba.
Selon Abdoulaye Wilane, ces réunions de restitution ont pour objectif de faire comprendre à tout le monde que le PS reste fidèle à la parole donnée et à l’engagement pris d’accompagner le Premier ministre à l’élection présidentielle au nom de Benno Bokk Yaakaar.
‘’De fortes recommandations ont été faites à madame la secrétaire générale (Aminata Mbengue Ndiaye), qui ne manquera pas, au sein de la conférence des leaders de Benno, en accord et en parfaite intelligente avec le président Macky Sall et le candidat, de voir les modalités d’investiture de ce dernier’’, a ajouté M. Wilane.
Le PS ‘’approuve’’ la candidature d’Amadou Ba à l’élection présidentielle du 25 février 2024, a insisté son porte-parole.
‘’Amadou Ba mérite […] l’entière confiance de la coalition Benno Bokk Yaakaar et des électeurs sénégalais en raison de son parcours administratif exceptionnel, de ses atouts et de ses compétences, mais aussi de l’espoir que suscite son leadership’’, argue le bureau politique du PS dans une déclaration.
Les socialistes disent soutenir sa candidature dans le but de ‘’préserver le legs […] du président Macky Sall’’.
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DEUXIÈME CERTES, MAIS PAS VOLEUSE DE MARI
La polygamie est ancienne pratique de la société africaine que l'islam est venu restructurer pour lui donner un cadre plus légal. Traditionnellement, les femmes qui arrivent après la première épouse sont considérées comme des "voleuses de mari".
Traditionnellement, les femmes qui arrivent après la première épouse sont considérées comme des "voleuses de mari".
La polygamie est ancienne pratique de la société africaine que l'islam est venu restructurer pour lui donner un cadre plus légal. Traditionnellement, dans maintes sociétés africaines, les femmes qui arrivent après la première épouse sont considérées comme des "voleuses de mari".
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NIGER : EMBALO PRÉFÈRE-T-IL LA GUERRE AUX NÉGOCIATIONS?
Le président bissau-guinéen, l’un des va-t-en guerre dans la crise nigérienne, se moque de la proposition de sortie de crise de l’Algérie et invite les chefs religieux à rester à leur place : dans leurs mosquées et leurs églises. Stupéfiant !
Le président bissau-guinéen, l’un des va-t-en guerre dans la crise nigérienne, se moque de la proposition de sortie de crise de l’Algérie et invite les chefs religieux à rester à leur place : dans leurs mosquées et leurs églises. Stupéfiant !
Il fait partie de ceux qui rêvent d’un hypothétique retour du président déchu Mohamed Bazoum au pouvoir et serait favorable à une intervention militaire contre le Niger.
La médiation de l’Algérie qui a fait une proposition claire et précise de sortie de crise ou la mission des chefs religieux nigérians n’a aucune espèce d’importance.
Umaro Sissoco Embaló, considère que c’est une affaire de chefs d’État, de la CEDEAIO alors même que la solution de cette CEDEAO est de faire la guerre pour soit disant rétablir l’ordre constitutionnel. Stupéfiant ! Suivez son entretien sur France24.
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LIPTAKO-GOURMA : QUI VEUT LA PAIX PRÉPARE LA GUERRE
Ceux qui veulent faire une guerre gratuite au Niger, trouveront un répondant en chemin car Ouaga, Bamako et Niamey affutent aussi leurs armes
« Si vis pacem para bellum (Si tu veux la paix, prépare la guerre) », dit une locution latine. C’est selon toute vraisemblance cette vision que viennent de matérialiser le Mali, le Burkina et le Niger à travers une alliance stratégique.
Les trois pays sahéliens actuellement dirigés par des militaires ont scellé un traité dénommé la charte du Liptako-Gourma instituant entre eux l’alliance des états du Sahel (AES) ce samedi 16 septembre 2023 à Bamako. L’alliance Liptako Gourma permettra de faire face à toutes les formes d’agression.
Ils sont conscients d’avoir un ou plutôt des ennemis communs : le terrorisme et l’impérialisme occidental dont ils veulent se défaire vaille que vaille. La lutte contre le terrorisme va certainement prendre un nouveau tournant. Certainement que d’autres pays pourront être amenés à rejoindre cette alliance.
Quel avenir pour la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest qui a imposé des sanctions à chacun de ses pays suite à des coups d'État militaire dont le dernier en date est le Niger ? Pays que l’institution Communautaire veut aller attaquer pour prétendument amener la démocratie.
MALI, BURKINA FASO ET NIGER S'UNISSENT POUR UNE DÉFENSE COMMUNE
La charte signée des trois régimes de putschistes stipule que toute atteinte à la souveraineté et à l'intégrité territoriale d'un des pays membres sera considérée comme une agression contre les autres parties
Les régimes militaires du Mali, du Burkina Faso et du Niger ont signé une charte établissant une alliance défensive connue sous le nom de "Charte du Liptako-Gourma". Cette alliance, appelée "Alliance des États du Sahel" (AES), a pour objectif d'établir une architecture de défense collective et d'assistance mutuelle entre les trois pays. La charte stipule que toute atteinte à la souveraineté et à l'intégrité territoriale d'un des pays membres sera considérée comme une agression contre les autres parties, engageant ainsi un devoir d'assistance et de secours, y compris l'emploi de la force armée si nécessaire.
La création de cette alliance intervient dans un contexte où la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) maintient une position ferme, demandant aux autorités militaires du Niger de rétablir immédiatement l'ordre constitutionnel en libérant le président déchu et en le réinstallant dans ses fonctions. Les pays voisins, le Burkina Faso et le Mali, considèrent toute intervention militaire contre leur pays comme une "agression illégale et insensée" et ont promis une "riposte immédiate" en cas d'agression.
La lutte contre le terrorisme est présentée comme la priorité de cette alliance, notamment dans la région du Liptako-Gourma, qui a été durement touchée par le jihadisme ces dernières années. Les pays membres de l'alliance souhaitent également renforcer leur coopération militaire et économique pour faire face aux défis communs.
La "Charte du Liptako-Gourma" s'inscrit dans le contexte où les généraux au pouvoir au Mali et au Burkina Faso ont déjà exprimé leur solidarité envers les généraux de Niamey après le coup d'État au Niger. Ce dernier pays a été confronté à plusieurs attaques jihadistes depuis le 26 juillet, causant de nombreuses pertes en vies humaines.
MBALLING : L'ANCIENNE LÉPROSERIE A PANSÉ SES PLAIES
Soixante-huit ans après sa naissance et quarante-sept ans après s’être vu coller le statut de « village de reclassement social » qui ne sera abrogé qu’au mois d’avril dernier, beaucoup d’eau a coulé sous les ponts dans cette localité
El Hadji Ibrahima Thiam, Fatou Diéry Diagne et Moussa Sow |
Publication 16/09/2023
C’est le dernier né des villages qui longent la Petite Côte. Mais, quand les autres localités de cette partie du département de Mbour se prévalent toutes d’un mythe fondateur reposant sur des récits enchanteurs, Mballing, lui, doit se coltiner le narratif d’un enfantement dans la douleur du fait d’une maladie à cause de laquelle il a été, pendant longtemps, mis au ban de la société : la lèpre. Soixante-huit ans après sa naissance et quarante-sept ans après s’être vu coller le statut de « village de reclassement social » qui ne sera abrogé qu’au mois d’avril dernier, beaucoup d’eau a coulé sous les ponts. L’ancienne léproserie semble avoir pansé ses plaies, à force d’abnégation de ses habitants et n’est plus regardée de haut par les localités voisines. Même si quelques croyances ont toujours la peau dure…
On l’appelle « Boulevard des anciens ». Il s’agit d’une large route en terre séparée, au milieu, par une rangée de haies qui longe la façade latérale du Cem Moussa Kadam de Mballing. Sur ce long mur, des fresques immortalisent le visage de quelques vieilles personnes, au nombre de quinze. Parmi eux, le parrain du Cem, mais aussi Moussa Sène, Mbaye Badiane, Ibrahima Ngom, Babou Ndiaye Sine, Ilimane Sow… Ils ne sont plus de ce monde, mais leur figure et leur souvenir continuent de planer sur le village de Mballing, leur terre d’accueil, un matin de 13 juillet 1955, quand le monde entier les a rejetés, à cause de la lèpre. « Ils font partie des 122 personnes qui ont passé la première nuit à Mballing », précise Assane Kadam, le chef de village. Lui aussi fait partie du lot, alors qu’il n’avait pas encore deux ans. Le bâtiment dans lequel son père a logé, jusqu’à une vingtaine de jours de sa mort, est encore debout, sur la place publique du village, à l’ombre de grands fromagers. C’est l’un des cinq bâtiments originels du village, tous identiques, construits pour accueillir les malades. Chacun compte huit chambres à raison de quatre lits par chambre. Ils sont disséminés dans le village et se sont fondus dans le décor, happés par l’urbanisation galopante qu’a connue Mballing avec le temps. Le logement où résidait l’infirmier ainsi que l’ancien dispensaire où les malades étaient soignés, aussi, sont encore visibles sur le site. Assane Kadam précise que son père, Moussa Kadam, n’était pas atteint de la lèpre, mais faisait office d’intendant au sein de cette léproserie qui aura, plus tard, le statut de village de reclassement social des lépreux guéris ou mutilés par une loi de 1976 qui a été abrogée au mois d’avril 2023.
On en comptait neuf. Outre Mballing, il y avait Koutal (Kaolack), Diambo (Podor), Peycouck (Thiès), Némaba (Ziguinchor), Teubi (Bignona), Fadiga (Kédougou), Sowane (Fatick). L’idée était d’isoler les malades de la lèpre et de bloquer la chaîne de transmission de cette pathologie. Les autorités avaient alors créé des villages dits de « reclassement social », où, en vertu de cette loi, étaient rassemblés des lépreux et leurs familles.
Aujourd’hui, à Mballing, plus rien n’indique qu’on est dans une léproserie. La maladie a été presque vaincue, seuls quelques individus, souvent de vieilles personnes mutilées, traînent encore les séquelles de cette pathologie. « Avec l’avancée de la médecine, la maladie a été considérablement ralentie, de sorte que les enfants des malades n’étaient pas forcément malades, grâce aux mesures prophylactiques. Ceux qui ont fait l’histoire de ce village de reclassement, le noyau dur sont décédés, il ne reste que le vieux Mbaye Cissé et moi. Les quelques mutilés qu’on rencontre ici, actuellement, sont des malades qui ont rejoint le village après son installation, les années suivantes, au fil du temps pour bénéficier de soins et se loger », explique Assane Kadam.
Quand le sentiment de rejet se transforme en source de motivation
Mais, avant l’abrogation de cette loi, que de stigmatisations subies, de discriminations vécues, d’humiliations endurées par les populations de Mballing. Pourtant, elles se sont battues pendant longtemps pour que cette étiquette qu’on leur avait collée soit enlevée. Même si, dans leur tête, souligne Assane Kadam, ils ne vivaient pas ce statut. « C’était à l’angle mort de notre rétroviseur depuis longtemps. Les gens ont atteint un niveau de vie qui ne collait plus à l’état d’indigence sociale. Depuis 1992, on s’est battu pour que ce statut pesant qui nous rabaissait et poussait les gens à nous regarder d’un autre œil, comme si nous étions des bannis, soit cassé. On est en Afrique et au Sénégal où certaines croyances ont la peau dure, on sait donc que cette étiquette ne disparaîtra pas du jour au lendemain, mais c’est déjà un gros pas », souligne le chef de village qui occupe cette fonction depuis 1999, à la suite de son père Moussa Kadam.
Pour Abdou Cissé, responsable de « Leprahilfe », une association allemande qui soutient les lépreux et a mis en place une cuisine communautaire qui donne à manger aux malades qui vivent seuls, cette abrogation aura au moins le mérite de rendre à Mballing sa dignité de village comme tous les autres villages. « Auparavant, quand il s’agissait de lister le nombre de villages de la zone, on disait, par exemple, ‘’32 villages et Mballing’’, on n’était pas comptabilisé, une sorte de stigmatisation. Mais pour nous, ici, la maladie c’est dans la tête. Par exemple, on peut avoir des parents malades, mutilés, et pourtant on le vit bien », explique le natif de Guédiawaye, lui dont les parents étaient malades et internés à Mballing.
Ce sentiment de rejet et la stigmatisation, Mbaye Kandji, responsable du volet socio-scolaire de l’association allemande, l’a également vécu et, en a été témoin dans la vie de tous les jours. « Il y a quelques années, quand nos parents voulaient aller à Mbour, c’était tout un problème. Quand on était élève à Mbour, les véhicules qu’on prenait refusaient de s’arrêter à Mballing. On nous faisait descendre soit avant, soit après le village, et on marchait le reste du trajet. Lors des matchs navétanes, nos adversaires faisaient des signes de la main qui rappelle la main mutilée d’un lépreux », liste Mbaye Kandji. À Mballing, on raconte l’anecdote à propos d’un homme du nom de Omar Ka qui, à chaque fois qu’il quittait Mbour pour aller à Joal, une fois arrivé à hauteur de Mballing, se bouchait les narines de peur de choper le virus de la lèpre. Ironie de l’histoire, il est tombé malade par la suite et a séjourné à Mballing.
Ces préjugés qu’ils ont vécus, les populations de Mballing en ont fait une force, animées par la hargne du revanchard. « Nous ne nous sommes jamais apitoyés sur notre sort. Ce n’est pas parce que nous sommes un village de lépreux que nous sommes restés les bras croisés. Nous avons ici de braves travailleurs qui ont pris leur destin en main pour donner un avenir meilleur à leurs enfants en les inscrivant à l’école. Nous avons deux écoles primaires, un Cem, deux écoles arabes qui font même le baccalauréat, un poste de santé… Notre pêche est florissante avec un centre de transformation des produits halieutiques très dynamique, il y a aussi l’agriculture. Aucun village de la zone n’est plus florissant que Mballing », assure Assane Kadam.
En sport, ajoute Mbaye Kandji, malgré les moqueries, leur Asc est la meilleure du coin. « Nous avons transformé la stigmatisation en source de motivation. C’est comme ça que beaucoup de familles s’en sont sorties. Nous avons des administrateurs civils, des docteurs en pharmacie, des docteurs dans d’autres domaines, de hauts cadres… », ajoute-t-il. L’exemple le plus patent est Maguette Sène, le maire de Malicounda, commune à laquelle est rattachée Mballing, par ailleurs Directeur général du Coud. Il est originaire du coin et son père fait partie des anciens de la localité dont le visage orne le mur sur le boulevard des anciens.