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21 juin 2025
par l'éditorialiste de seneplus, ibe niang ardo
QUAND UN LOUP HURLE DÉMOCRATIE, C’EST L’AGNEAU QU’IL LEURRE
EXCLUSIF SENEPLUS - Crier haro sur les dérives verbales, les invectives et insultes, c'est ce qu’il nous faut si on veut substituer notre situation délétère à une stabilité sociale durable
Ibe Niang Ardo de SenePlus |
Publication 06/07/2022
L’on a une classe politique qui au cri « démocratie ! démocratie ! » s’oppose et, au nom de ce concept gage de paix sociale, se donne paradoxalement le droit d’exercer la violence à l’encontre de frères rivaux, rabaissés au rang d’ennemis. Tout cela aux fins de s’aliéner les agneaux (en l’occurrence les forces vives de la nation, la jeunesse, les électeurs) et les mener dans la gueule des loups (les politiciens qu’ils sont). Gare ! La motivation de la plupart des hommes politiques est leur propre intérêt matériel et non ce qu’ils brandissent comme slogan fallacieux.
Comment comprendre sinon que le Sénégal, pionnier de l’État de droit démocratique en Afrique en soit aujourd’hui à reproduire à chaque échéance électorale les mêmes conflits maintes fois renégociés, alors que notre Code électoral a permis deux alternances par le verdict des urnes. Ce n’est point faute d’intelligence des protagonistes politiques mais tout simplement parce qu’aux moments de ces négociations, ils sont sous l’emprise de la même motivation : leur propre intérêt et non l’intérêt général. Tous les politiques, ilne faut pas s’y méprendre ! Les opposants d’aujourd’hui veulent le pouvoir pour se servir de la même permissivité d’un État régalien qui pour rien au monde pour eux, ne doit perdre de son lustre.
Il faudrait penser à instituer les principes du sacerdoce pour toutes les fonctions politiques : beaucoup de dévouement pour un salaire modeste et une rigueur dans les procédures dirimante à l’enrichissement illicite. Renforcer notre dispositif législatif et les procédures d’application des peines à l’effet d’une parfaite efficacité à l’encontre des forfaitures.
La démocratie est plurielle, évolutive et flexible
L’on se plaît à nous asséner abusivement la démocratie comme une panacée sociale avec comme référence les États-Unis d’Amérique ou la France. Pourtant nous n’avons rien à envier à ces pays au regard de l’Histoire, car ils ne sont pas nés avec de solides normes démocratiques. S’agissant des États-Unis il me plait de relever des faits politiques marquants de leur histoire qui donnent à relativiser les condamnations de notre jeune démocratie :
- savez-vous qu’en 1798 pour mettre fin à un climat politique invivable, fait d’hostilité et de méfiance extrêmes entre fédéralistes et républicains, les premiers avaient eu recours à la « Sedition Act » : une loi pour soi-disant criminaliser les diffamations à l’encontre du gouvernement, mais qui du fait de son ambiguïté avait virtuellement inclus toutes critiques extrêmes du gouvernement, de sorte à entraîner une grande retenue des commentateurs politiques, activistes et même journalistes. De nombreux historiens contemporains sont convaincus que cela a été très bénéfique et permis de stabiliser durablement le climat politique.
Plus tard en 1864 il s’est passé au terme d’un débat long et crucial à propos de l’abolition de l’esclavage, une élection à laquelle un tiers des États qui composaient l’Amérique n’avaient pas participé. Abraham Lincoln au pouvoir à l’époque, s’était retrouvé avec 22 des 50 sièges du Sénat et un quart des sièges du parlement vacants. Cela ne l’avait pas empêché de gouverner tranquillement. Il avait tout simplement suspendu la “Habeas Corpus Act”, cette loi fondamentale qui garantit la liberté individuelle des citoyens en remédiant aux dangers des arrestations et détentions arbitraires. Il s’était alors mis à prendre des ordres exécutoires pour la marche du pays comme il l’entendait. C’est d’ailleurs à l’un de ces ordres exécutoires que l’on doit la fameuse loi de l’abolition de l’esclavage aux USA
-Franklin Roosevelt, élu dans les années les plus sombres de la grande dépression, avait à la grande surprise des Américains, dit dans son allocution inaugurale au matin du 4 mars 1933 : « ... pour faire face à cette crise domestique grave, je vais demander au Congrès de m’accorder les pouvoirs exécutifs les plus étendus, pareils à ceux donnés pour braver une guerre... ».
Ce bref rappel d’événements qui ont marqué la démocratie américaine confirme que la démocratie est évolutive, mais également nous renseigne sur la flexibilité possible en cas de péril. Il y a des circonstances cruciales où l’urgence commande de rétablir l’ordre et la discipline, le respect mutuel et celui des institutions ; auxquels cas peuvent prévaloir les mêmes armes de défense de la République qu’en situation d’agression par un ennemi venant de l’extérieur.
Pour ce qui est de la France, je me contenterai ici de ne relever qu’un seul acte récent qui réaffirme la responsabilité de l’État face aux dégâts que causent les manifestations publiques : c’est la décision prise le 23 juin par le tribunal administratif de Rouen, qui a reconnu le préjudice financier subi par la société des autoroutes du Nord et de l’Est de la France lors des manifestations des gilets jaunes et condamné l’État à verser respectivement 557 300 et 27 687 euros à deux sociétés d’autoroutes, juste parce que des automobilistes n’avaient pu accéder aux péages et payer leurs tickets, du fait des blocages de manifestants. N’est-ce pas là une claire mise au point pour ceux qui prônent captieusement la liberté totale de manifester où et quand l’on veut au nez de l’État ?
Normes et règles non écrites, réels gages de la démocratie
Ce que l’Amérique, après être passé par une guerre civile qui lui a coûté des centaines de milliers de morts et causé de graves traumatismes avait fini par apprendre, était que les lois ne suffisaient pas pour vivre une démocratie pacifique. Au-delà, il était nécessaire de bannir la rhétorique agressive en politique et convenir de normes non écrites de mutuelle tolérance en lieu et place de l’animosité partisane et l’opposition permanente. Une résolution salutaire devenue une solide culture politique.
Crier haro sur les dérives verbales, les invectives et insultes, est ce qu’il nous faut si on veut substituer notre situation délétère à une stabilité sociale durable. Des hommes politiques raisonnables, quel que soit leur camp, qui respectent leurs pairs, respectent les institutions, l’administration publique, les magistrats, les militaires, policiers et gendarmes et qui ont l’impérieux soucis de l’équilibre des pouvoirs de la République dans toutes les décisions qu’ils prennent. C’est de cela dont on a besoin là et tout de suite ; d’hommes et de femmes au comportement éthico-religieux indubitable, capables d’amorcer ce virage et non de pyromanes qui agitent en permanence un déluge de feu et de sang à leur bon gré.
LES ÉTATS-UNIS METTENT À LA DISPOSITION DU SÉNÉGAL UN LOT SUPPLEMENTAIRE DE VACCINS
Le gouvernement des États-Unis, en partenariat avec l’initiative COVAX et l’Union africaine, a remis au Sénégal, le 2 juillet, un lot de 400 140 doses de vaccins Pfizer à titre de contribution supplémentaire à la lutte contre la Covid-19
Le gouvernement des États-Unis, en partenariat avec l’initiative COVAX et l’Union africaine, a remis au Sénégal, le 2 juillet, un lot de 400 140 doses de vaccins Pfizer à titre de contribution supplémentaire à la lutte contre la Covid-19 à travers le pays. Selon un communiqué parvenu à Emedia, « ces vaccins fiables et efficaces contribueront à protéger des vies au Sénégal et à prévenir l’émergence de nouvelles variantes de la maladie ».
« La Covid-19 sévit encore au Sénégal. Par conséquent, il est important que des vaccins soient disponibles et accessibles à toutes les personnes éligibles. », a déclaré Nora Madrigal, Directrice du Bureau Santé, Population et Nutrition de l’Agence des États-Unis pour le développement international (USAID). « Le gouvernement des États-Unis reste engagé à travailler avec le ministère de la Santé du Sénégal et d’autres partenaires du secteur de la santé, pour réduire l’impact de la maladie de Covid-19, et maintenir la population sénégalaise en bonne santé et en sécurité. », a-t-elle ajouté.
Ce don vient s’ajouter aux 1 939 980 doses de vaccins anti-Covid-19 approuvés par l’OMS que les États-Unis ont déjà fournies au Sénégal.
PAR FARID BATHILY
LIVERPOOL CASSE LA TIRELIRE POUR MOHAMED SALAH
L’international égyptien devient, grâce à son nouveau contrat, le joueur le mieux payé de l’histoire des Reds. Une réelle marque de reconnaissance de la part de ce club réputé réticent à la dépense
Déjà exceptionnel sur le terrain, Mohamed Salah est désormais propulsé à une échelle supérieure au niveau salarial dans le monde pourtant si dépensier du football de haut de niveau. L’Égyptien vient en effet de prolonger son contrat pour les trois prochaines saisons avec Liverpool contre 350 000 livres sterling de salaire au minimum par semaine. Cette enveloppe pourrait même dépasser 400 000 livres hebdomadaires si l’on y inclut les primes de performance et autres bonus généralement adossés aux rémunérations des sportifs.
Approche rigide
C’est une somme exceptionnelle consacrée à un joueur par les Reds. Jamais dans son histoire, le club phare du Merseyside – comté de la ville de Liverpool – n’avait rémunéré autant un de ses footballeurs. L’équipe du nord-ouest du Royaume-Uni n’est pourtant pas la moins nantie de la Premier League, le championnat de première division du football anglais. Mais le modèle économique de ses propriétaires américains, fondé sur l’autosuffisance, lui interdit toute dépense superflue.
Son vestiaire repose par conséquent sur une grille salariale strictement respectée, parfois même contre le souhait de l’entraîneur. Ce fut notamment le cas l’année écoulée avec le Néerlandais Georginio Wijnaldum, désormais transféré au PSG. Cette approche rigide des dirigeants de Liverpool a éternisé les négociations avec Salah. Ce dernier exigeant avant toute prolongation au-delà de 2023, une nette augmentation par rapport aux 200 000 livres sterling de salaire que lui conférait le précédent contrat signé en 2018, un an après son recrutement en provenance du club italien de la Roma.
Le jackpot
Il finira par obtenir gain de cause au bout d’une saga contractuelle de 18 mois, marquée par des assauts réguliers contre la hiérarchie de Liverpool de son avocat et conseiller, Ramy Abbas , qui ne cessait de répéter que les revendications salariales de son client étaient tout à fait légitimes et méritées.
Ramy Abbas s’est d’ailleurs fort opportunément fendu, sur Twitter, d’un emoji aux rires larmoyants peu avant l’annonce officielle de la prolongation de son poulain par le club, vendredi dernier. Et pour cause, Salah venait de parapher un nouveau contrat record, le plaçant notamment en haut de la hiérarchie pour un footballeur africain.
À l’échelle du monde, seuls Mbappé, Messi, Neymar, Ronaldo, De Bruyne et Haaland peuvent prétendre gagner davantage que le natif de Nagrig, dans le Delta du Nil.
Liverpool ne pouvait imaginer, à court terme du moins, l’avenir sans son numéro 11. Surtout après avoir échoué à convaincre le Sénégalais Sadio Mané, son ex-compère d’attaque, de continuer sous le maillot rouge. Le club fait donc entorse à son principe salarial pour un joueur de 30 ans. Mais pas n’importe lequel.
Il s’agit de celui qui vient d’être couronné à la fois par la presse et ses pairs, meilleur joueur du championnat. Un doublé déjà réalisé par l’intéressé en 2017-2018 et que l’entraîneur Jurgen Klopp espère le voir rééditer pour quelques saisons additionnelles.
QUEL BILAN POUR L'UNION AFRICAINE, 20 ANS APRÈS SA CRÉATION ?
Créée à l'initiative de plusieurs chefs d'États africains, elle compte aujourd'hui 55 membres. Terrorisme et djihadisme au Sahel, coups d'État sur le continent ou encore guerre russo-ukrainienne : l'Union africaine doit faire face à de nombreux défis
L'Union africaine a 20 ans. Créée à l'initiative de plusieurs chefs d'États africains, elle compte aujourd'hui 55 membres. Terrorisme et djihadisme au Sahel, coups d'État sur le continent ou encore guerre russo-ukrainienne : l'Union africaine doit faire face à de nombreux défis. Quelle bilan pour l'Union africaine ? Réponse avec le journaliste Seidik Abba.
Lors de sa création il y a vingt ans, l’Union africaine, née en 2002 des vestiges de l’Organisation de l’unité africaine (OUA), devait permettre aux États africains de s’unir durablement afin de peser sur la scène internationale. Mais les conflits qui ont éclaté sur le continent ont poussé l’organisation à se réorganiser progressivement. En quelques années, elle a fini par devenir un acteur majeur dans la résolution des crises politiques, sociales et économiques sur le continent africain.
Journaliste et écrivain, Seidik Abba a été rédacteur en chef central de l'hebdomadiare Jeune Afrique. Durant sa carrière, il a principalement travaillé sur le bassin du Sahel et sur le groupe terroriste Boko Haram.
Dans son dernier ouvrage"Mali-Sahel, notre Afghanistan", l’observateur a notamment analysé l’action de l’Union africaine dans la résolution du conflit sahélien. Il en dresse aujourd’hui le bilan.
TV5MONDE : L’Union africaine a 20 ans. Vous suivez le dossier de près depuis toutes ces années. Quel est, selon vous, le bilan de cette institution ? Comment pourrait-on le qualifier ?
Seidik Abba : À mon avis, le bilan part d’un constat. Les choses sont lentes mais elles avancent. Il y a beaucoup de résultats qui ont été obtenus depuis que l’Union africaine a remplacé l’organisation de l’unité africaine en 2002.
Notamment sur le plan de l’intégration des communautés économiques régionales, de la volonté politique des états membres. Donc ça prend du temps, parfois même tout est bloqué, notamment au Maghreb avec le conflit entre l'Algérie et le Maroc sur le Sahara occidental. Les choses avancent, peut-être pas au rythme auquel on aurait voulu, mais je pense que l’espoir est encore permis.
TV5MONDE : Quelle a été son action sur la résolution des conflits armés notamment au Sahel, en RDC ?
S.A : Il y a eu beaucoup de progrès et il en reste encore à faire. Il est évident que l’Afrique doit être mieux présente et mieux investie dans la résolution des conflits. L’Union africaine a encore beaucoup de chantiers qu’elle doit mener. Mais son bilan n’est pas négatif. Je pense qu’il y a surtout beaucoup d’impatience de la part des Africains.
Peut-être aussi de l'incompréhension concernant certaines positions de l’UA notamment dans le conflit sahélien. J’entends parfois que la solidarité africaine n’est pas à la hauteur. Ce n’est pas faux, mais contrairement à ce que certains pourraient dire sur l’Union africaine, je pense que l’Union africaine agit.
TV5MONDE : Quelles sont les critiques qui visent l’Union africaine ? Qui les formule ?
S.A : Les critiques, vous les trouvez dans l’opinion africaine elle-même. C’est là que les critiques sont assez sévères vis-à-vis de l’UA. On dit par exemple que c’est un “syndicat de chefs d’États” qui protège les uns et les autres. Mais je pense que c’est tout à fait normal. Si vous demandez aux Roumains ou à d’autres Européens ce qu’ils pensent de l’Union européenne, vous risquez d’entendre les mêmes critiques.
Certaines choses sont critiquables, il peut y avoir de la frustration sur certains dossiers. Mais il faut aussi signaler les améliorations, les progrès et les avancées et je pense que l’Union africaine est un cadre qu’il faut garder parce que ça permet d’avoir des positions communes.
TV5MONDE : Sur quels points l’Union africaine a réellement progressé et avancé ces dernières années ?
S.A : Sur l’intégration économique et la libre circulation des personnes. Mais sur ce dernier point il y a un passeport africain qui est à l’étude. Certains pays africains ont déjà supprimé les visas. Si vous êtes Africain et que vous voulez vous rendre au Rwanda ou au Bénin, vous n’avez pas besoin de visa. C’est une volonté de l’Union africaine. Donc il y a des choses qui se font.
TV5MONDE : En 2002, l’Union africaine est créée. Quel est le contexte sécuritaire sur le continent africain ?
S.A : À cette époque, il n’y avait de crise à proprement parler comme aujourd'hui. Au début des années 2000, il n’y avait pas de crise aussi grave que celles qu'on connaît au Sahel aujourd'hui. À ce moment précis, le défi de l’Union africaine était de tirer les leçons là où l’OUA n’avait pas pu avancer. Notamment sur le plan de l’intégration africaine. C’est pour cette raison que dès sa création, l’UA avait prévu la création d’une banque centrale africaine, un fonds monétaire africain ainsi qu’une armée africaine. Toutes ces choses devaient symboliser l’intégration africaine. À l’origine, l’agenda de l’UA n’était pas dominé par les crises. Mais il était dominé par la volonté de poursuivre une intégration africaine et de lui donner une dimension nouvelle qu’elle n’avait pas pu avoir sous l’ère de l’OUA.
TV5MONDE : Selon vous, à partir de quand l’Union africaine s’est-elle emparée des questions sécuritaires ?
S.A : Dès que les conflits sont nés. Quand le conflit au Sahel a pris la dimension qu’on lui connaît, entre 2012-2013-2014, c’est à partir de ce moment que l’Union africaine a créé une mission permanente au Sahel. Cette mission permanente dédiée, la Misahel (Mission de l'Union africain au Sahel), est basée à Bamako. Elle est aujourd’hui dirigée par Maman Sidikou, l’ancien ministre des Affaires étrangères du Niger. Il y a cette volonté d'être présent, de participer, de s’impliquer dans la résolution de la crise au Sahel. C’est une évolution.
TV5MONDE : Pourquoi est-ce une évolution ? À sa création, l’Union africaine n’avait pas pour ambition de résoudre les conflits sur le continent ?
S.A : Disons qu'à sa création, le credo de l’Union africaine était de permettre la résolution des conflits africains par les Africains. Il fallait apporter des solutions africaines aux crises africaines. Pendant très longtemps, c’était les Nations Unies, c’était l’Union européenne qui étaient les acteurs pour gérer les crises en Afrique et qui intervenaient pour y mettre fin. Et ce n'était pas le cas de l'OUA en 1963. À la différence de l’Organisation de l’Union africaine, l’Union africaine, a sa naissance, avait créé un département de sécurité pour son conseil de sécurité et pour gérer les questions de sécurité en Afrique. Elle s’est depuis, beaucoup impliquée dans la résolution du conflit au Sahel.
TV5MONDE : Peut-on s’attendre à des effets concrets des tentatives de l’Union africaine sur la résolution de ces conflits ?
S.A : Je pense que ça peut toujours servir. L’Union africaine est encore utile, mais elle peut encore faire davantage. Si on prend l’exemple du conflit qui touche la CEAC, la communauté économique des États d’Afrique centrale, je crois que l’Union africaine n’a pas une grande implication dans ce qui s’y passe. Objectivement dans certaines parties d’Afrique, l’Union africaine ne fait pas assez.
En tout cas, pas autant qu’elle aurait pu. Mais par exemple, on vient d’obtenir une légère amélioration de la crise politique au Mali et ce résultat a été obtenu grâce à l’implication de l’Union africaine et de la CEDEAO. Elles ont fait en sorte que le Mali soit obligé de publier un calendrier pour la tenue d’élections. Dans certains cas, on a de vrais résultats et dans d’autres cas on peut encore faire mieux.
TV5MONDE : Quelle a été son action dans les autres conflits qui touchent le continent ?
S.A : On peut parler de son action en Somalie. C’est vraiment un moment important pour l’UA. L’Union africaine est intervenue dès le début de la crise. C’était d'ailleurs la toute première fois que l’on avait une force africaine qui intervenait dans un pays africain en crise pour tenter de résoudre un conflit. ça a été une vraie expérience. Après cette intervention, la force de l’Union africaine est devenue une “force mixte”, avec à la fois l’Union africaine et les Nations Unies. Après la Somalie, l’Union africaine a pu prendre en charge d’autres dossiers comme la Libye.
Là aussi, dès que la crise est née, l’Union africaine s’est beaucoup impliquée. C'est encore le cas aujourd'hui, au Soudan et en Ethiopie. Il y a quelques années c'est l'UA qui avait eu l’idée de réunir des chefs d'États africains qui s’étaient réunis à Nouakchott et qui devaient se rendre en Libye.
TV5MONDE : Aujourd'hui, que représente la gestion des conflits en Afrique au sein de l’Union Africaine ?
S.A : L’Union africaine a pris en charge les conflits au fur et à mesure. Elle a crée un département clé, celui de la sécurité. Il s’occupe aujourd’hui de la gestion des crises en Afrique. Il cherche des solutions comme le fait le conseil de sécurité des Nations Unies.
TV5MONDE : Cette action-là peut-elle avoir des conséquences réelles sur les conflits ? Ces tentatives de résolution sont-elles jugées suffisantes et efficaces ?
S.A : Oui. Bien sûr que oui. Les résultats sont là. Il y a eu des évolutions. On ne peut pas parler d’échec. Mais gérer toutes ces crises reste très compliqué. Aujourd’hui, pour prendre un exemple d’actualité, on voit l’action de l’Union africaine sur la crise en Ethiopie. L’ancien président du Nigeria Olusegun Obasanjo a fait des médiations pour l’Union africaine avec l’organisation de réunions entre les parties.
Donc on le voit bien : il y a une volonté concrète de la part de l’Union africaine de trouver des solutions. Alors certes, ça ne peut pas marcher à tous les coups, mais ça marche souvent. On peut obtenir des résultats mais à mon avis il faut absolument que l’Afrique prenne en charge toutes ces crises et qu’elle soit présente dans la gestion des crises.
TV5MONDE : Justement, au sujet des crises en Afrique, après les coups d'État au Mali, au Burkina Faso, en Guinée, l’Union africaine a-t-elle encore des interlocuteurs au Sahel ?
S.A : Oui. Notamment grâce au principe de la suspension d’un pays de l’Union africaine dès qu’il est en rupture avec l’ordre constitutionnel ou que des gens prennent le pouvoir par la force ou à la suite d’une rébellion. C’est automatique. Ce principe a été créé à l’origine par l’Union africaine et la CEDEAO l’applique aussi aujourd’hui. Grâce à la suspension, l’Union africaine s’attend à ce que des pressions soient exercées pour que les pays retrouvent une situation et qu’ils récupèrent leur place.
Le Niger a connu cette situation : il a été suspendu puis réintégré après des élections. Même lorsqu’un pays est sanctionné par l’Union africaine, il y a une volonté d’accompagner, d’être présent. Parce qu’un pays suspendu ne veut pas dire qu’il est exclu de l’Union africaine. Elle ne se désintéresse pas de la situation du pays. Elle aide, accompagne, tente de lui faire retrouver une situation stable.
TV5MONDE : Faire partie de l’Union africaine, aujourd’hui, ça représente quoi pour un pays africain ?
S.A : Vous savez, le Maroc avait quitté l’organisation de l’unité africaine au moment de la reconnaissance de la République arabe sahraouie au Sahara occidental. C’était en 1984. En 2017, le Maroc a fini par réintégrer l’Union africaine. Parce que ce pays a bien vu que l’Union africaine a fait des choses et que sa place était plus au sein de l’UA qu’en dehors.
TV5MONDE : Que peut illustrer l’exemple du Maroc ? Que si un pays africain veut peser sur le continent et sur le monde, il faut qu’il fasse partie de l’Union africaine?
S.A : Absolument. Je crois que le Maroc a fini par comprendre cela. Il a compris que ce n’était pas dans son intérêt de se tenir à l’écart de l’Union africaine. Vous savez, dans certaines instances aujourd’hui, pour qu’un pays africain soit représenté et entendu, il faut faire partie de l’Union africaine. Si vous n’en faites pas partie, vous ne pouvez pas assister à certains sommets.
Dans certaines autres instances, comme par exemple le G7 qui vient de se tenir en Allemagne, il a été décidé que l’Union africaine puisse être représentée en tant que membre au niveau du G20. Aujourd’hui, quelle que soit sa puissance, un pays africain n’a pas intérêt à ne pas être intégré à l’Union africaine.
TV5MONDE : Quand le président en exercice de l’Union africaine, Macky Sall, se rend en Russie pour rencontrer le président russe Vladimir Poutine, quand il annonce vouloir négocier et permettre le déblocage du blé à la frontière russo-ukrainienne, à quoi peut-on s’attendre ? Est-ce que l’Union africaine peut peser dans la résolution du conflit ?
S.A : Il est absolument important que le président du Sénégal, Macky Sall, se soit déplacé en Russie. Avant de s’y rendre, il avait téléphoné au président Poutine. C’est dire l’importance qu’il a en tant que président de l’Union africaine. Aujourd’hui Macky Sall a une légitimité, une voix qui dépassent largement le cadre du Sénégal. Il a été reçu parce que c’est le président de l’Union africaine. Donc il y a une volonté de l’Union africaine de peser dans les affaires internationales. Personne n’aurait pensé, il y a quelques années, que l’Afrique puisse prendre une telle initiative dans un conflit qui se passe au centre de l’Europe. Un conflit, qui a priori, ne la regarde pas. Cette volonté de peser sur le conflit russo ukrainien peut faire avancer les choses, à mon avis.
TV5MONDE : Et aujourd’hui, au-delà des conflits et de leur résolution, à quoi peut servir l’Union africaine ?
S.A : À mon avis, aider les États africains qui se battent pour la création des États unis d’Afrique. Et surtout parce que l’Afrique continue de se battre pour obtenir un siège permanent au conseil de sécurité des Nations unies. L’ordre international actuel est issu de la Seconde Guerre mondiale qui a pris fin en 1945. Mais les réalités de 1945 ne sont pas celles de 2022. Donc certains pays de l’Union africaine veulent faire une réforme du conseil de sécurité et c’est aussi ce que tente d’obtenir Macky Sall. Il veut montrer que l’Union africaine peut peser sur le nouvel ordre mondial.
TV5MONDE : L’Union africaine peut-elle prétendre à intégrer le conseil de sécurité permanent des Nations unies alors que certains pays sont en guerre ?
S.A : Les deux peuvent se faire en même temps. Les conflits sont tellement difficiles à régler. On ne peut pas attendre qu’il y ait la paix pour faire avancer le continent et améliorer sa présence dans les instances. Dans quelques années, dans le monde, un habitant sur cinq sera Africain. C’est le continent où la démographie avance le plus. On ne peut pas ne plus tenir compte d’une population qui représente presqu’un quart de la planète dans les décisions internationales. L’Afrique a donc des revendications légitimes pour être mieux pris en compte dans les affaires internationales.
SACCAGE DU LYCEE DE YOFF, LES PRESUMES AUTEURS TRADUITS EN JUSTICE
13 sur 17 élèves présumés auteurs de la mise à sac de salle de la 4e C seront déférés au parquet ce matin. La gendarmerie de la Foire traque 4 apprenants qui auraient quitté Dakar
13 sur 17 élèves présumés auteurs de la mise à sac de salle de la 4e C seront déférés au parquet ce matin. La gendarmerie de la Foire traque 4 apprenants qui auraient quitté Dakar.
Petit à petit, la gendarmerie réunit les pièces du puzzle relatif au saccage de la salle de la 4e C du Lycée Ousmane Sembène de Yoff. Bes bi Le Jour a appris, de sources proches du dossier, que des 17 auteurs présumés de la casse, survenue la semaine dernière, 8 ont été convoqués hier et finalement placés en garde à vue. Nos informateurs font aussi savoir que 4 élèves auraient refusé de déférer à la convocation de la gendarmerie de la Foire même s’ils se sont en définitive ravisés. « Des élèves ont été cueillis de force par des gendarmes », nous souffle-t-on. 4 autres seraient en vacances anticipées pour échapper aux foudres de la loi. Le groupe devrait rejoindre Ousmane Dièye, présenté comme le cerveau de l’affaire, afin de s’expliquer devant le procureur de la République, ce matin.
Nous avons consulté la liste dressée par la gendarmerie identifiant clairement les fauteurs de trouble. Il s’agit de Ousmane Dièye, Ousmane Mbaye, Ousmane Ndiaye Dioya Laye Samb, Mohamed Sangaré, Mohamed Lamine Diallo, Mohamed Sall, Moustapha Diop Faye, Ndèye Maguette Ndiaye, Mame Diarra Bousso Kharma, Elimane Madiaye Diop, Amadou Ndao, Mamadou Kébé, Serigne Mbacké Sène, Madaga Diouf, Abdoulaye Guèye Sylla, Mohamed Fall et Libasse Seck.
4 élèves en fuite
Ils sont tous poursuivis pour « destruction de biens publics » au sein de cet établissement créé en 1986. Statuant sur les faits, la réunion du Conseil de discipline s’est poursuivie jusque tard dans la nuit. D’après nos informations, les parents d’élèves ont certes regretté l’attitude des élèves, mais déplorent l’absence de surveillance au niveau du Lycée. « Comment des gens peuvent passer des minutes à semer le trouble dans cette classe sans que personne n’intervienne pour remettre de l’ordre ? », s’est interrogé Mamadou Mbengue, président de l’Association des parents d’élèves du Lycée, absent de la rencontre du Conseil de discipline. Il a aussi été dénoncé le fait d’accepter au sein de l’école un garçon de 18 ans qui fait la classe de 4e.
Au finish, le dernier mot va revenir au Conseil de discipline qui va rédiger un rapport qui sera transmis à l’inspecteur d’académie de Dakar avant d’atterrir sur la table du ministre de l’Éducation nationale, Mamadou Talla, décidé à frapper fort contre les potaches.
48. 081 TÊTES DE MOUTONS ENREGISTRES DANS LA REGION DE TAMBACOUNDA
Au total, 48. 081 têtes de moutons ont été comptabilisées dans les marchés de la région de Tambacounda à quatre jours de la célébration de la Tabaski
Tambacounda, 6 juil (APS) - Au total, 48. 081 têtes de moutons ont été comptabilisées dans les marchés de la région de Tambacounda à quatre jours de la célébration de la Tabaski, a annoncé à l’APS, l’Inspecteur régional de l’élevage et des productions animales.
’’Nous avons reçu 48.081 têtes à la date du 6 juillet réparties entre les deux portes d’entrée de la région en frontière avec le Mali. Il s’agit du poste de Kidira et de Balou dans le département de Bakel", a déclaré Dr Abdou Sané lors d’un entretien avec l’APS.
A la date du 15 juin, le poste de Kidira a enregistré un record de 6. 478 têtes de moutons, a-t-il relevé, soulignant que la porte d’entrée de Balou a reçu 995 moutons.
En 2021, 160. 592 têtes ont été comptabilisées dans le département de Bakel, frontalier avec la Mauritanie, et à Kidira, à la frontière avec le Mali.
PLUS DE 60% DES MALADIES INFESTIEUSES HUMAINES SONT D'ORIGINES ANIMALES
Plus de 60% des maladies infectieuses humaines connues sont d’origine animale, a déclaré, mercredi, Amadou Bassirou Fall, docteur vétérinaire et spécialiste national du programme One Health.
Dakar, 6 juil (APS) – Plus de 60% des maladies infectieuses humaines connues sont d’origine animale, a déclaré, mercredi, Amadou Bassirou Fall, docteur vétérinaire et spécialiste national du programme One Health.
"One Health favorise une meilleure gestion des maladies zoonotiques car plus de 60% des maladies infectieuses humaines connues et 75 % des maladies émergentes sont d’origine animale’’, a-t-il dit.
Il s’exprimait lors d’un atelier de mise à niveau et d’engagement des organisations de la société civile sur le programmes de sécurité sanitaire mondial "One Health’’.
Ce programme vise une approche collaborative, multisectorielle avec une mise en œuvre sur le plan local, régional, national et mondial, pour obtenir des résultats optimaux en matière de sécurité sanitaire et de bien-être.
’’Cette réflexion appelle à élargir les collaborations au-delà de l’implication traditionnelle du secteur médicale et vétérinaire en incluant d’autres disciplines notamment les sciences sociales, animales et surtout environnementales’’, a plaidé Dr Fall.
Selon lui, il s’agit aujourd’hui de lutter contre la résistance aux antimicrobiens et maladies infectieuses pour sauver l’humanité car ces zoonoses constituent une menace.
Il a fait savoir que le programme de sécurité sanitaire mondial a été initié en vue de "fédérer de manière coordonnée la gestion des risques sanitaires et biologiques découlant notamment des changements climatiques".
"Il nous faudra des courroies de transmission parmi lesquelles, la société civile, les partenaires techniques mais également les réseaux sociaux et les médias pour pouvoir disséminer cette approche", a-t-il souligné.
"Il est de notre devoir de veiller à la synergie et à la complémentarité des secteurs en charge de la santé humaine, animale, de la sécurité alimentaire nutritionnelle, etc", a encore plaidé le docteur vétérinaire.
Il a souligné que la société civile, les organisations publiques et privées ont toutes un rôle essentiel à jouer plutôt que d’être considérées uniquement comme des bénéficiaires.
FIN DE REGNE POUR BONIFACE NDONG
La Fédération sénégalaise de basket-ball (FSBB) a annoncé avoir mis fin aux fonctions de sélectionneur national de Boniface Ndong, qui dirigeait l’équipe masculine depuis février 2020.
Dakar, 6 juil (APS) – La Fédération sénégalaise de basket-ball (FSBB) a annoncé avoir mis fin aux fonctions de sélectionneur national de Boniface Ndong, qui dirigeait l’équipe masculine depuis février 2020.
‘’Après analyse de la participation de notre équipe nationale à la fenêtre 3 des éliminatoires de la Coupe du monde, qui vient de se dérouler à Alexandrie, la Fédération sénégalaise de basket-ball a décidé de rompre les négociations avec Boniface Ndong et de chercher un autre entraîneur dans les meilleurs délais’’, déclare la FSBB dans un communiqué.
Les Lions du Sénégal ont perdu deux (contre l’Egypte et la RD Congo) de leurs trois matchs lors de la fenêtre internationale jouée à Alexandrie, en Egypte, tout au début de juillet.
L’ancien pivot a conduit les Lions à l’Afrobasket 2021 au Rwanda, où ils avaient pris la troisième place.
Ndong était en discussion avec la Fédération sénégalaise de basket-ball en vue de la prolongation de son contrat.
VERS LA CREATION D'UNE FONDATION AFRICAINE POUR LA TECHNOLOGIE PHARMACEUTIQUE
Le Conseil d’administration de la Banque africaine de développement (BAD) a validé la création de la Fondation africaine pour la technologie pharmaceutique qui sera basée au Rwanda, annonce un communiqué
Dakar, 6 juil (APS) – Le Conseil d’administration de la Banque africaine de développement (BAD) a validé la création de la Fondation africaine pour la technologie pharmaceutique qui sera basée au Rwanda, annonce un communiqué reçu ce mercredi à l’APS.
Cette institution novatrice va considérablement améliorer l’accès de l’Afrique aux technologies qui sous-tendent la fabrication de médicaments, de vaccins et d’autres produits pharmaceutiques, salue la même source.
Les dirigeants africains avaient appelé la BAD à aider à créer cette Fondation africaine pour la technologie pharmaceutique, lors du sommet de l’Union africaine à Addis-Abeba en février dernier.
’’Entité à bénéfices communs, la Fondation jouira de ses propres structures de gouvernance et de fonctionnement. Elle encouragera et conclura des alliances entre sociétés pharmaceutiques étrangères et africaines’’’, indique-t-on dans le communiqué.
Selon le texte, la Fondation a pour objectifs de renforcer les entreprises pharmaceutiques africaines pour qu’elles puissent s’engager dans des projets de production locale, dans une démarche d’apprentissage systématique de la technologie et de mise à niveau technologique des sites de production.
De concert avec les gouvernements africains et les centres d’excellence en recherche et développement, la Fondation œuvrera à renforcer l’écosystème d’innovation pharmaceutique et vaccinale en Afrique et à développer les compétences nécessaires à l’essor du secteur.
Elle permettra une coordination plus étroite des différentes initiatives de fabrication de médicaments et de vaccins existantes au niveau régional, en tirant parti des synergies et des partenariats engagés à l’échelle panafricaine.
La Fondation africaine pour la technologie pharmaceutique travaillera en étroite collaboration avec la Commission de l’Union africaine, la Commission de l’Union européenne, l’Organisation mondiale de la santé, la Communauté de brevets sur les médicaments.
L’Organisation mondiale du commerce, les organisations philanthropiques, les agences et institutions bilatérales et multilatérales en font également partie, tout comme les secteurs public et privé des pays développés et des pays en développement, qui seront, eux aussi, fortement incités à collaborer.
Le président du Groupe de la Banque africaine de développement, Akinwumi Adesina, cité dans le communiqué, a déclaré qu’"il s’agit d’une grande avancée pour l’Afrique’’.
"L’Afrique doit se doter d’un système de défense sanitaire, basé sur trois grands domaines : la relance de l’industrie pharmaceutique africaine, le renforcement des capacités africaines de fabrication de vaccins et la mise en place d’infrastructures de soins de santé de qualité en Afrique’’, a estimé Adesina.
POURQUOI BLAISE COMPAORÉ REVIENT-IL AU BURKINA FASO ?
Comment interpréter le retour de l'homme chassé du pouvoir par un soulèvement populaire en 2014 ? Réponse du journaliste spécialiste de l’Afrique Antoine Glaser
L’ex-président du Burkina Faso Blaise Compaoré est attendu le 7 ou le 8 juillet 2022 dans la capitale du pays Ouagadougou. Il vit actuellement en exil en Côte d’Ivoire. Comment interpréter le retour de l'homme chassé du pouvoir par un soulèvement populaire en 2014 ? Réponse du journaliste spécialiste de l’Afrique Antoine Glaser.
Cela fait huit ans qu’il ne s’est pas rendu dans son pays. L’ancien président du Burkina Faso Blaise Compaoré est attendu à Ouagadougou en fin de semaine. Il doit rencontrer les autorités militaires, au pouvoir depuis le coup d’État du mois de janvier. « Il doit arriver jeudi ou vendredi pour un court séjour », détaille une source proche du pouvoir burkinabè. Il doit aussi « être reçu par le chef de l’État dans le cadre de la réconciliation nationale », poursuit cette source. L’entourage de l’ancien président confirme toutes ces informations.
Ce retour est-il synonyme d’une nouvelle ère politique au Burkina Faso ? Il semble que le lieutenant Damida, chef de la junte militaire au pouvoir, cherche à créer une « union sacrée » autour de lui pour l’aider dans la lutte contre les groupes djihadistes, qui ensanglantent le Burkina Faso depuis 2015 et dont les attaques sont de plus en plus nombreuses et meurtrière ces dernières semaines. Pour rappel, en 27 ans de règne, Blaise Compaoré a réussi à préserver son pays des attaques djihadistes.
Antoine Glaser est journaliste spécialiste de l’Afrique. Son dernier ouvrage, Le piège africain de Macron, co-écrit avec Pascal Airault, est paru aux éditions Fayard en 2021. Selon lui, le retour de Blaise Compaoré au Burkina Faso vise à permettre une meilleure coopération du pays avec la Côte d’Ivoire, sur le plan sécuritaire mais aussi sur le plan économique.
TV5MONDE : Quelles sont les raisons du retour de Blaise Compaoré au Burkina Faso ?
Antoine Glaser : Depuis un certain temps, on voit que l’ancien ministre des Affaires étrangères Djibril Bassolé, qui est une sorte d’émissaire pour Blaise Compaoré, est la cheville ouvrière des négociations avec le chef de la junte. D’après Africa Intelligence, il joue un rôle extrêmement important dans les relations entre la Côte d’Ivoire et le Burkina Faso. Il y a deux raisons qui justifient ces discussions.
D’abord, quelqu’un comme Djibrill Bassolé, qui connaît très bien la Cédéao, peut faire office d’intermédiaire un peu secret entre la Cédéao (NDLR : Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest) et la junte au pouvoir au Burkina Faso. Il a tout intérêt à ce que la pression de la Cédéao soit moins forte. Dans un cadre général de lutte contre le terrorisme et le djihadisme, mais aussi pour améliorer les relations de la junte avec la Cédéao, la Côte d’Ivoire peut jouer un rôle important.
Antoine Glaser : Il faudrait déjà que Blaise Compaoré bénéficie d’une forme d’amnistie. Pour rappel, il est toujours poursuivi, non seulement pour tentative de coup d’État, mais surtout pour pour sa condamnation pour avoir œuvré dans l’assassinat de Thomas Sankara. Il faudrait qu’il ait un accord au plus haut de l’État pour pouvoir rentrer définitivement dans son pays.
À mon avis, il ne fera qu’un aller-retour au Burkina Faso. En plus, il est très fatigué. Physiquement, il n’est pas bien. Son retour pourrait déclencher un rapprochement avec la Côte d’Ivoire, qui est compliqué du fait que Blaise Compaoré a la nationalité ivoirienne, ce qui fait qu’il ne peut pas être extradé du pays.
Depuis le coup d’État du mois de janvier, la situation a changé. Autant Roch Kaboré bénéficiait de l’appui de la société civile, il n’avait pas les marges de manœuvres qu’a la junte militaire. Actuellement, Paul-Henri Sandaogo Damiba fait quasiment ce qu’il veut. Dans une situation de crise, comme celle que connaît le Burkina Faso sur la pression sécuritaire des djihadistes, il a une marge de manœuvre plus grande que son prédécesseur.
Paul Henri Damiba est donc libre d’acter le retour de l’ancien président. D’autant plus que Blaise Compaoré peut lui apporter des connaissances par tous ses réseaux djihadistes. Il avait lui-même des relations étroites avec un certain nombre d'entre eux. Cela dit, ce n’est pas le président Compaoré tout seul qui peut tout changer en revenant au Burkina Faso. Mais ce sont toutes ses anciennes équipes qui peuvent participer à la stabilisation sécuritaire du pays et aussi améliorer les relations de la junte avec la Cédéao.
TV5MONDE : Qu’est-ce que que le retour de Blaise Compaoré dit de la situation politique du Burkina Faso ?
Antoine Glaser: Cela montre que la situation est extrêmement difficile et compliquée sur le plan économique et social. Du côté sécuritaire, c’est une évidence. Et cette instabilité sécuritaire provoque, en dehors de tout ce qui peut avoir trait à des embargos, des restrictions de la Cédéao sur le commerce.
Il ne faut jamais oublier qu’il y a à peu près 3 ou 4 millions de Burkinabè qui travaillent dans les plantations en Côte d’Ivoire, donc les deux pays ont besoin de fonctionner ensemble. Avant tout pour l’économie. Les principaux travailleurs dans les plantations de cacao en Côte d’Ivoire, ce sont les Burkinabès. Parce que c’est un pays enclavé qui a très peu de ressources. Le retour de Compaoré au Burkina Faso pourrait renforcer les liens entre les deux pays.