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24 août 2025
À DAKAR, UN GROUPE DE PRESSE ENTIÈREMENT FINANCÉ PAR LE PUBLIC
Basée sur un modèle similaire à celui de Mediapart, la maison des reporters regroupe de jeunes reporters produisant du contenu qui se veut indépendant, sur la base du financement du public et des abonnés
VOA Afrique |
Seydina Aba Gueye |
Publication 26/04/2022
Au Sénégal, le premier groupe de presse indépendant entièrement financé par le Public. Basée sur un modèle similaire à celui de Mediapart, la maison des reporters regroupe de jeunes reporters produisant du contenu qui se veut indépendant, sur la base du financement du public et des abonnés.
POURQUOI MACKY NE SUPPORTE PAS MA NOMINATION A LA VILLE DE DAKAR
Guy Marius Sagna réagit pour la première fois depuis son recrutement à la mairie de Dakar comme conseiller technique en charge des affaires sociales et de la réinsertion.
Guy Marius Sagna réagit pour la première fois depuis son recrutement à la mairie de Dakar comme conseiller technique en charge des affaires sociales et de la réinsertion.
Dans un post publié sur sa page Facebook, le secrétaire administratif du Front pour une Révolution Anti-impérialiste, Populaire et Panafricaine, (Frapp France Dégage) est revenu sur sa nomination à la Ville de Dakar par Barthélémy Dias.
Guy Marius Sagna explique d’abord pourquoi son recrutement « dérange » le Président Macky Sall et les conseillers APR de la Ville de Dakar. « Je vais lever un coin du voile aujourd’hui. En fin décembre 2021 comme je vous l’avais annoncé j’ai déposé en bonne et due forme une demande de mise en position de disponibilité pour 3 ans à partir du 5 janvier 2022 », a-t-il révélé.
Avant d’ajouter : «Cela fait 4 mois que l’administration Macky Sall ne m’a pas répondu par écrit pour me dire si oui ou non ma demande avait été acceptée. » Mais, poursuit l’activiste, « le parti-État de Macky Sall m’a répondu en coupant mon salaire depuis janvier 2022. » «Leur plan depuis 2014 est de m’étrangler, de m’asphyxier financièrement afin que je ne puisse plus avoir ni les moyens ni le temps de mon engagement citoyen et politique », déclare-t-il.
Autrement dit, signale Guy Marius, «pour Macky Sall et ses cerbères, après avoir coupé mon salaire je dois mourir à petit feu. » «Ma nomination par le Maire de Dakar déjoue leur plan.»
Il conclut en sermonnant le chef de l’Etat : « Je veux vous rappeler monsieur le président Macky Sall – vous semblez n’avoir pas retenu la leçon – que la vengeance ne saurait être un programme politique. Vous avez emprisonné Karim Wade et Khalifa Ababacar Sall et comploté contre Ousmane Sonko, le résultat est là : il y a au moins 1 sénégalais sur 4 c’est à dire 4.250.000 (quatre millions deux cent cinquante mille) sénégalais qui sont au chômage. »
LE SILENCE ASSOURDISSANT DE L’UMS
Violation du secret d‘instruction, vidéo fuitée dans la prison de Reubeuss
La vidéo du Pr Omar Diagne en prison qui circule dans les réseaux sociaux a provoqué l’ire des Sénégalais. Une anomalie qui vient se greffer sur la vidéo fuitée de l’audition de Adji Sarr-Ndèye Khady Ndiaye. Le tout dans un contexte marqué par le silence assourdissant de l’Union des magistrats du Sénégal (Ums).
L’Union des Magistrats du Sénégal(Ums) n’avait pas manqué, il y a quelques semaines, de monter au créneau pour fustiger la sortie du leader de Pastef, Ousmane Sonko, contre la justice et certains magistrats. Toutefois, jusqu’à présent, personne n’a entendu l’Ums se prononcer sur les agissements de Adji Sarr lors de sa dernière audition. Cette dernière qui était dans le bureau du Doyen des Juges d’Instruction (Dji), Oumar Maham Diallo, avec Ndèye Khady Ndiaye pour une confrontation, le greffier, le représentant du parquet, les avocats des deux parties et, pendant un moment, l’époux de la patronne de Sweet Beauty, a filmé une partie de l’audition. Ce que confirme d’ailleurs l’une de ses plus grandes protectrices, la féministe Gabrielle Kane.
En effet, sulfureuse activiste a révélé qu’elle a même sermonné Adji Sarr par rapport à la publication de cette vidéo. D’ailleurs, les conseils de Ndèye Khady Ndiaye ont porté plainte devant le procureur de la République. Si cet épisode regrettable au niveau de la justice a ému une bonne partie de l’opinion, ce n’est malheureusement pas le cas de l’UMS qui a préféré s’emmurer dans un silence inexplicable.
Et pourtant, ces écarts fragilisent la justice et les magistrats qui sont tout le temps voués aux gémonies par de nombreux justiciables et les hommes politiques, surtout de l’opposition. Ces pratiques sont d’autant plus inquiétantes que l’activiste et écrivain Cheikh Omar Diagne a subi le même sort. En effet, une vidéo de son quotidien en prison fait, depuis deux jours, le tour des réseaux sociaux. On le voit assis à côté d’une dahira mouride qui psalmodiait les écrits de Cheikh Ahmadou Bamba. Qui a filmé cette séance ? Qui a rendu publique cette vidéo de Pr Omar Diagne? Une enquête manifestement ne serait pas de trop. Car ce sont des précédents dangereux qui peuvent aboutir à des conséquences insoupçonnées. Autant de problématiques qui interpellent l’Ums qui ne doit pas simplement attendre des attaques sensationnelles pour réagir. Ces agissements sont des goulots qui étranglent une justice déjà tant décriée. Et il faut rappeler que dans ses statuts, l’Ums a pour objet de défendre et d’illustrer l’indépendance de la Magistrature telle qu’elle a été proclamée par la Constitution. Et il est attendu de cette association des magistrats de jouer pleinement son rôle.
ALUNE WADE, MAAH KEÏTA, MARIAA SIGAA ET SENNY CAMARA, AU CŒUR DES FESTIVITÉS DE LA JOURNÉE INTERNATIONALE DU JAZZ
Le 30 avril prochain, le monde célèbre la journée qui est consacrée au Jazz. Ce sera à l’occasion d’un concert exceptionnel qui se tiendra aux Nations unies, à New York.
Le 30 avril de chaque année, est célébrée la Journée internationale du jazz. Cette année, sous la houlette de Herbie Hancock, une sélection internationale d’artistes donnera un concert exceptionnel au siège des Nations unies à New York. Parmi les heureux élus, le Sénégalais Alune Wade. A cette même occasion, l’Unesco va célébrer des femmes artistes dont les Sénégalaises Maah Keïta, Mariaa Sigaa et Senny Camara.
Le 30 avril prochain, le monde célèbre la journée qui est consacrée au Jazz. Ce sera à l’occasion d’un concert exceptionnel qui se tiendra aux Nations unies, à New York. Ce concert dénommé All-Star Global Concert, rassemblera des stars de la scène internationale dont le Sénégalais Alune Wade. Le concert se tiendra dans la salle de l’Assemblée générale des Nations unies à New York, a annoncé l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, les arts et la culture (Unesco) en commençant le décompte des 10 jours qui séparent de l’évènement. «Ce concert souligne l’importance du jazz en tant qu’instrument d’unité et de paix à travers le dialogue et la diplomatie. Certains des plus grands noms du jazz s’y produiront», annonce l’organisation internationale. La Directrice générale de l’Unesco, qui s’est exprimée dans un message, a formulé des vœux de paix. «Le jazz est porteur d’un message universel qui a le pouvoir de renforcer le dialogue, la compréhension et le respect mutuels. Alors que le monde fait face à de multiples crises et conflits, cette journée internationale met en lumière la contribution essentielle de la musique et de la culture à la paix», indique Audrey Azoulay.
Jazzman de renommée internationale et président du Jazz Institute qui copréside la Journée internationale du jazz, Herbie Hancock a pour sa part émis l’espoir que cette célébration puisse favoriser la paix dans le monde. «De nombreuses régions du monde sont actuellement en proie aux conflits et aux divisions, j’ai l’espoir qu’à travers le langage universel du jazz, notre célébration cette année encouragera les peuples de toutes les nations à se réconcilier, à espérer et à travailler main dans la main pour favoriser la paix», rappelle le virtuose qui, avec John Beasley, assure la direction artistique de ce concert qui réunira les plus grands noms du jazz contemporain. Outre le bassiste sénégalais, Alune Wade, on y retrouve les noms de Helio Alves du Brésil, Shemekia Copeland, José James, Youn Sun Nah, le Congolais Ray Lema, Tarek Yamani du Liban, les saxophonistes Ravi Coltrane, David Sanborn, Erena Terakubo, etc…
Hommage aux femmes musiciennes
Plus tôt dans la soirée du 30 avril, l’Unesco célèbrera les talents musicaux de femmes issues de toute l’Afrique, lors de la seconde édition de sa série de concerts intitulée JazzWomenAfrica. Cet événement, accompagné d’un débat auquel participeront des femmes artistes et des producteurs de musique, contribue à lutter contre la sous-représentation et le manque de reconnaissance des femmes dans l’industrie musicale, souligne l’Unesco. Maah Keïta, l’ancienne bassiste des Takeifa, Mariaa Sigaa et la compositrice et joueuse de kora, Senny Camara, seront de la partie.
LE PREMIER PRESIDENT DE LA COUR SUPREME INSISTE SUR LE ROLE DE LA PRESSE
Fonctionnement de la démocratie, le premier président de la Cour suprême intervenait à un atelier d’échanges sur la liberté d’expression et la sécurité des journalistes
Le Premier président de la Cour suprême, Cheikh Ahmed Tidiane Coulibaly, a insisté, lundi à Dakar, sur le rôle important de la presse dans le fonctionnement démocratique, estimant qu’il ne pouvait pas y avoir de démocratie sans la liberté d’expression. «Sans liberté d’expression, il ne peut y avoir de démocratie. Elle est indispensable à la stabilité de la société puisqu’elle participe à la libre circulation des idées et la presse joue un rôle essentiel dans le bon fonctionnement de la démocratie», a-t-il déclaré.
Le Premier président de la Cour suprême intervenait à un atelier d’échanges sur la liberté d’expression et la sécurité des journalistes. Une rencontre s’inscrivant dans le prolongement des actions de l’Unesco. L’agence onusienne est notamment chargée d’assurer la mise œuvre d’un plan d’action consacré à la sécurité des journalistes et la question de l’impunité adoptée par l’Assemblée générale des Nations unies lors de sa séance du 18 septembre 2013. «La liberté d’expression, le droit d’exprimer librement ses opinions, fait partie des libertés fondamentales, piliers de notre démocratie», a rappelé M. Coulibaly, assurant que «sa garantie et son respect», gages de «l’émergence d’une société ouverte, tolérante et respectueuse de l’Etat de droit», étaient largement pris en compte par la législation internationale. Il a ainsi évoqué l’article 11 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen de 1789, lequel dispose que «la libre communication des pensées et opinions est un des droits les plus précieux de l’homme : tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l’abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi», a ajouté le magistrat
Il a également rappelé les dispositions de l’article 19 de la Déclaration universelle des droits humains relevant que «tout individu a droit à la liberté d’opinion et d’expression, ce qui implique le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions et celui de chercher, de recevoir et de répandre sans considération de frontières, les informations et les idées par quelque moyen d’expression que ce soit». Le Premier président de la Cour suprême n’a pas manqué de citer l’article 9 de la Charte africaine des droits de l’Homme et des peuples qui prévoit que «toute personne avait le droit d’exprimer et de diffuser ses opinions dans le cadre des lois et règlements». A ces instruments internationaux s’ajoutent, selon lui, «les articles 8 et 10 de notre Constitution, qui garantissent la liberté d’expression, qui est citée au titre des libertés civiles et politiques, et le droit d’exprimer librement ses opinions par la parole, la plume, l’image, la marche pacifique». Ces dispositions juridiques n’empêchent pas les journalistes, dans le cadre de leur travail, «en temps de paix, comme en temps de conflit», de faire parfois l’objet d’intimidation, de meurtres, de tortures, de harcèlements, d’enlèvements, de prises d’otages et d’arrestations arbitraires, sans que les auteurs de ces graves infractions ne fassent l’objet le plus souvent de poursuites pénales appropriées et sanctionnés, a analysé Cheikh Tidiane Coulibaly.
S’appuyant sur des statistiques disponibles, il a déploré le nombre record de 488 professionnels des médias emprisonnés dans le monde, 65 étant otages et 46 autres tués en 2021 et 24 déjà depuis le début de l’année 2022. A l’en croire, «dans 90 % des affaires ayant trait à des assassinats de journalistes, les auteurs de tels sévices bénéficient d’une impunité totale, réduisant ainsi les journalistes au silence». Il en résulte, selon le Premier président de la Cour suprême, «une incapacité des gouvernements et des autorités du monde entier d’empêcher l’assassinat de journalistes et les attaques subies par les médias. Cela a pour conséquence de nous priver d’un droit fondamental qui nous est garanti par la Déclaration universelle des droits de l’Homme, celui d’avoir connaissance d’informations et d’idées et de les communiquer librement à d’autres», a-t-il fait valoir. Pour le magistrat, «chaque journaliste tué ou neutralisé par la terreur est un observateur de la condition humaine en moins. Chaque attaque déforme la réalité en créant un climat de peur et d’autocensure». Il a ainsi souligné la nécessité pour les juges de mettre à profit la portée normative de leurs décisions dans le cadre de la protection de la liberté d’expression.
Protéger la liberté d’expression et l’accès à l’information
«La protection de la liberté d’expression et de l’accès à l’information et la sécurité des journalistes doivent être encouragées et soutenues par les acteurs judiciaires, comme gardiens des libertés», a-t-il de nouveau souligné. «Nous devons être conscients aussi qu’aucune liberté n’est absolue et certaines limites s’imposent à cette liberté d’exprimer librement ses idées», a tenu à rappeler M. Coulibaly, en évoquant les restrictions nécessaires prévues par le droit sous le contrôle du juge telles que «l’incitation à la discrimination ou à la violence qui ne peut être considérée comme l’exercice légitime du droit à la liberté d’expression». En Afrique de l’Ouest, «le Sénégal est le premier pays à bénéficier de l’initiative pour les juges avec l’organisation du présent atelier qui marque le début d’une série à organiser à travers le pays, ainsi qu’une collaboration avec le centre de formation judiciaire pour une meilleure promotion des normes internationales en matière de liberté et de sécurité des journalistes», a pour sa part déclaré le directeur du Bureau régional de l’Unesco pour l’Afrique de l’Ouest-Sahel, Dr Dimitri Sanga.
Par Roger Koudé
POUR UNE CULTURE DEMOCRATIQUE INTERIORISEE DANS L’ESPACE FRANCOPHONE
Plus de 50 ans après la création de l’organisation internationale francophone, la nécessité d’un débat de fond en vue d’une Francophonie du XXIe siècle s’impose.
L’un des engagements majeurs de l’Organisation internationale de la Francophonie (Oif), notamment aux termes de la Déclaration de Bamako du 3 novembre 2000, est d’œuvrer pour «la promotion d’une culture démocratique intériorisée et le plein respect des droits de l’Homme» (§ 4D).
En effet, tout en restant attachée à sa mission première qui est celle de promouvoir la langue française, considérée elle-même comme un vecteur de transmission des valeurs universelles et des principes fondamentaux auxquels se réfère systématiquement la Francophonie, le champ d’intervention de cette organisation internationale s’est considérablement étendu à la quasi-totalité des principaux défis auxquels la Communauté internationale fait face aujourd’hui. La Francophonie a ainsi développé progressivement et consolidé une pratique multidimensionnelle qui se rapporte principalement à trois domaines de grande importance, notamment :
La promotion des droits de l’Homme, de la démocratie et de l’Etat de droit ;
La solidarité face aux défis communs ;
Et la gestion des conflits.
La Francophonie, une communauté politique porteuse de valeurs
La Francophonie se positionne clairement comme une communauté politique porteuse de valeurs, de principes et d’exigences universels, entre autres en matière de droits de l’Homme et de libertés fondamentales, de démocratie pluraliste et d’Etat de droit, qui doivent être consolidés et préservés à toute épreuve.
C’est à l’aune de ce positionnement stratégique que l’on comprend le développement institutionnel et l’action politique de la Francophonie, au travers notamment de ce qui constitue le socle de la philosophie politique de cette organisation internationale, à savoir :
La Déclaration de Hanoï du 16 novembre 1997, une étape importante dans le processus évolutif des institutions de la Francophonie ;
La Déclaration de Bamako du 3 novembre 2000, le texte normatif de référence de la Francophonie, qui dote cette organisation de moyens d’action en cas de rupture de la légalité démocratique ou de violations graves des droits de l’Homme dans un Etat membre. En effet, en se fondant sur les dispositions de la Charte de la Francophonie, qui consacrent comme des objectifs prioritaires l’aide à l’instauration et au développement de la démocratie, la prévention des conflits et le soutien à l’Etat de droit et aux droits de l’Homme, les Etats membres de l’organisation francophone ont clairement pris l’engagement en faveur d’une culture démocratique intériorisée et du plein respect des droits de l’Homme ;
La Déclaration de Saint-Boniface du 14 mai 2006 vient compléter utilement le dispositif de Bamako, en amplifiant la dimension politique de la Francophonie.
La promotion de la démocratie et l’enracinement de l’Etat de droit étant au cœur du projet francophone, se traduisant par les engagements susmentionnés, les célébrations an-nuelles de la Journée internationale de la Francophonie doivent aussi être des occasions appropriées pour interroger en profondeur la réalité des pratiques démocratiques ainsi que de l’Etat de droit dans tout l’espace francophone, sans exception ou mansuétude.
Il s’agirait alors d’une sorte d’examen périodique universel de l’Etat de droit et de la démocratie dans tous les pays de l’espace francophone.
En effet, «la promotion d’une culture démocratique intériorisée et le plein respect des droits de l’Homme», voulus comme tels par la Francophonie, ne peuvent se traduire dans les faits autrement que par des actions concrètes en faveur de la consolidation de l’Etat de droit, la tenue d’élections libres, fiables, régulières et transparentes, l’instauration d’une vie politique apaisée, etc., qui sont aussi parmi les aspirations profondes des peuples du monde francophone.
Pour une Francophonie du XXIe siècle
Pour dire les choses sans détour, il faut admettre que la banalisation des changements politiques anticonstitutionnels dans l’espace francophone, principalement en Afrique, notamment sous forme de coups d’Etat militaires, de modifications grossières des constitutions pour des mandats supplémentaires, voire illimités, de patrimonialisation du pouvoir de l’Etat…, sont des défis majeurs et de grande actualité tant pour les peuples que pour l’institution internationale chargée de la Francophonie.
Ces pratiques sont intrinsèquement inacceptables pour au moins trois raisons majeures :
D’abord, alors qu’on les croyait à jamais révolues, elles se situent ouvertement en amont des valeurs essentielles prônées par la Francophonie et des aspirations des citoyens. Ces pratiques tendent également, et invariablement, à discréditer injustement les peuples et les cultures démocratiques francophones ;
Ensuite, elles compromettent systématiquement les efforts engagés en vue de promouvoir «[…] une culture démocratique intériorisée et le plein respect des droits de l’Homme» dans l’espace francophone, d’instaurer une vie politique apaisée…
Enfin, elles sont intrinsèquement dangereuses en raison notamment des violences récurrentes et de l’instabilité politique qu’elles génèrent, avec leur cortège de malheurs pour les peuples.
Plus de 50 ans après la création de l’organisation internationale francophone, la nécessité d’un débat de fond en vue d’une Francophonie du XXIe siècle s’impose. Or, parler d’une Francophonie du XXIe siècle, c’est aussi souscrire à l’idée fondamentale d’une Francophonie résolument tournée vers l’avenir et davantage vers les peuples, fidèle à ses nobles objectifs, exigeante avec elle-même et avec tous ses membres quant au respect effectif des valeurs et des principes qui la fondent. Autrement dit, œuvrer activement pour une Francophonie qui soit véritablement au service des aspirations profondes des peuples, au rang desquelles figurent bien évidemment l’Etat de droit et la démocratie. Ce qui, une fois encore, doit concrètement se traduire par la tenue d’élections libres, transparentes, crédibles et régulières, ainsi que par l’instauration d’une vie politique apaisée, etc.
Roger Koudé
Professeur de Droit international
Titulaire de la Chaire Unesco «Mémoire, Cultures et Interculturalité» à l’Université catholique de Lyon. Son dernier ouvrage, intitulé Discours sur la Paix, la Justice et les Institutions efficaces, est publié aux Editions des Archives Contemporaines (Paris, 3/2021), avec la préface du Docteur Denis Mukwege, Prix Nobel de la Paix 2018.
UN MATCH AMICAL «ENTRE LE 11 ET LE 13 JUIN» AU STADE ABDOULAYE WADE
A l’image des autres sélections africaines qualifiées pour le Mondial 2022, au Qatar en novembre prochain, la Fédération sénégalaise de football s’active pour trouver des matchs amicaux à l’Equipe nationale.
Après leurs deux premiers matchs des éliminatoires de la Can 2023, contre Bénin (3 juin) et Rwanda (7 juin), les Lions, avant d’aller en vacances, vont terminer leur marathon par un match amical à domicile, calé entre le 11 et le 13 juin
A l’image des autres sélections africaines qualifiées pour le Mondial 2022, au Qatar en novembre prochain, la Fédération sénégalaise de football s’active pour trouver des matchs amicaux à l’Equipe nationale. Une volonté d’ailleurs affichée par le président de la Fédération sénégalaise de football, Me Augustin Senghor. «Avec le Dtn (Mayacine Mar) et le coach (Aliou Cissé), nous cherchons à profiter de ces dates. C’est sûr, en juin, on aura un match», a promis récemment Me Senghor. Un vœu qui est sur le point de se réaliser. En effet, Le Quotidien a appris que l’instance fédérale est sur le point de signer pour un match amical pour la période calée entre «le 11 et le 13 juin» prochain. Un match prévu au Stade Me Abdoulaye Wade de Diamniadio et qui tombe juste après le déplacementde Kigali du 7 juin. Un choix de jouer à domicile qui s’explique par le souhait des champions d’Afrique et des Fédéraux qui veulent récompenser à nouveau le public sénégalais suite à son soutien retentissant lors du barrage retour contre l’Egypte. Une occasion aussi pour la bande à Sadio Mané de retrouver ce nouveau temple du football sénégalais, apprécié partout sur le continent. Justement sur le choix de jouer à domicile, une source avance : «Il était important de discuter avec un adversaire qui accepte de venir jouer au Sénégal. On n’a pas voulu jouer à l’extérieur. Il faut qu’on arrive à évoluer par moments à domicile, devant notre public qui mérite cela et face à de grandes nations du football. Surtout qu’on a aujourd’hui un stade moderne qui fait la fierté de toute l’Afrique.».
Brésil, Colombie, Chili, Paraguay…
Pour les pays ciblés, la Fédération aurait pris contact avec plusieurs pays sud-américains. C’est le cas du Brésil, de la Colombie, du Chili, mais aussi du Paraguay. Notre interlocuteur de préciser que les discussions se poursuivent et elles seraient très avancées avec une des quatre nations citées. «Mais vous comprendrez qu’il est donc un peu prématuré d’avancer le nom du pays choisi. Tant que rien n’est signé, on ne peut pas dire que c’est fait. Mais on est vraiment très avancé sur le dossier.» Le contexte de ce match de préparation est d’ailleurs bien choisi. Car juste après le 13 juin, les Lions pourront tranquillement aller en vacances pour un repos bien mérité après une saison marquée par le sacre historique lors de la Can et cerise sur le gâteau, une seconde qualification consécutive à une Coupe du monde. Il faut noter que le choix d’une Nation sud-américaine ne serait pas fortuit pour les Lions qui, pour les besoins du Mondial, sont logés dans la même poule que les Pays-Bas (21 novembre), le Qatar (25 novembre) et l’Equateur (29 novembre).
L’impossibilité d’avoir un adversaire européen
En fait, il est «difficile de trouver un adversaire européen» plutôt occupé par la Ligue des Nations, depuis sa création en 2018, par l’Uefa, l’instance dirigeante du football européen. Une compétition assez lucrative et susceptible d’attirer plusieurs diffuseurs et sponsors, pour remplacer les matchs amicaux, et qui réunit tous les deux ans, les 55 sélections européennes. D’ailleurs, l’édition 2022-23 sera lancée en juin 2022 et se poursuivra en septembre. L’Equipe des Pays-Bas, adversaire des Lions au Qatar, fait partie des nations candidates à l’organisation de la phase finale de la prochaine édition de la Ligue des Nations, prévue du 14 au 18 juin 2023. La Belgique, la Pologne et le Pays de Galles sont aussi candidats. Du coup, et à cause de cette compétition, il devient de plus en plus difficile pour les nations africaines de trouver un adversaire européen pour des matchs amicaux. Sur ce chapitre, notre source confirme : «Nous avons essayé, mais il est difficile maintenant d’avoir un adversaire européen depuis que l’Uefa a créé cette Ligue des Nations. Cette compétition leur serve de matchs amicaux.» A noter que le début des éliminatoires de la Can 2023 est prévu en juin prochain. Le Sénégal va ouvrir le bal à domicile contre le Bénin le 3 juin, avant d’effectuer un déplacement à Kigali, le 7 juin. Les autres journées étant calées en septembre prochain et mars 2023.
SOHAM EL WARDINI PROCHE DE LA RETRAITE POLITIQUE
A bientôt 70 ans, l’ancienne maire de Dakar (2018-2022), candidate malheureuse lors des dernières élections locales, songe à mettre un terme à son parcours politique commencé en 1999
D’ici quelques jours, Soham Wardini va annoncer la fin de sa carrière politique, selon des membres de son entourage. Contactée, l’ancienne maire de Dakar dit être en pleine réflexion. En attendant, l’ancienne responsable de Taxawu Dakar ne fera pas de liste pour les Législatives.
Soham El Wardini se rapproche de la retraite politique. A bientôt 70 ans, l’ancienne maire de Dakar (2018-2022), candidate malheureuse lors des dernières élections locales, songe à mettre un terme à son parcours politique commencé en 1999.
Lorsque Le Quotidien a appris cette révélation de l’entourage de l’ex-collaboratrice de Khalifa Sall, nous avons essayé de joindre l’intéressée. Qui cependant entretient le mystère. «D’ici une semaine, je vais parler mais je réfléchis à quitter la politique. Pour les Législatives, les gens m’appellent, pouvoir comme opposition, mais franchement.... Je peux changer de décision mais je suis plus proche de sortie», a soufflé l’ancienne maire de Dakar. Si la native de Latmingué maintient le flou, des membres de son entourage sont catégoriques : Mme Wardini et la politique, c’est fini. «Elle a mal vécu le fait que Taxawu Dakar ne l’ai pas choisie comme candidate à la Ville de Dakar lors des dernières élections locales. Elle l’a perçu comme une trahison malgré tout ce qu’elle a vécu aux côtés de Khalifa Sall», justifie un proche. Pour d’autres interlocuteurs, Soham El Wardini ne se plaît plus dans cet environnement politique marqué par des «invectives et des tensions permanentes entre le pouvoir et l’opposition».
«Je ne ferai pas de liste pour les Législatives»
Aux dernières nouvelles, celle qui était investie à la 8ème place dans la liste de Manko taxawu Senegaal lors des Législatives de juillet 2017, devrait consacrer le reste de sa vie dans des activités de fondation. Pourtant sur les réseaux sociaux, des rumeurs hier disaient que la candidate de l’Union citoyenne Bunt-bi lors des dernières Locales à Dakar a décidé de faire cavalier seul. «C’est faux ! Je ne ferai pas de liste pour les Législatives. Je suis très loin de ça», nous a confié Soham El Wardini. Même si son nom sonne libanais, Mme Wardini est née à Latmingué où elle a grandi, le 18 octobre 1952.
Ancienne enseignante de Lettres au Lycée Blaise Diagne, elle fera une retraite anticipée avant de s’engager en politique derrière un fils du Saloum, en l’occurrence Moustapha Niasse. Elle répond à l’Appel du 16 juin du Secrétaire général de l’Alliance des forces de progrès (Afp). Mais Soham El Wardini est plus connue dans son combat derrière Khalifa Sall. Elu maire de Dakar en 2009, l’ancien responsable du Ps développe une proximité avec la présidente des femmes de l’Afp dans le département de Dakar.
En 2014, Mme Wardini, après avoir dirigé avec brio la liste de Taxawu Dakar à Mermoz Sacré Cœur devant le maire sortant Barthélemy Dias, décide d’abandonner tout pour devenir première adjointe au maire de Dakar.
Le 30 septembre 2018, elle est élue maire de Dakar par le Conseil municipal de la Ville après la révocation de Khalifa Sall, condamné à 5 ans de prison à cause de sa gestion de la caisse d’avance de la Ville de Dakar. Mais si pratiquement tous les maires sortants ont été réinvestis, l’édile sortant de la capitale voit la coalition Yewwi askan wi lui préférer Barthélemy Dias. Classée 4ème lors de ces élections derrière Barthélemy Dias (Yaw), Abdoulaye Diouf Sarr (Bby) et Doudou Wade (Wallu Senegaal), la candidate de l’Uc Bunt-bi jouait vraisemblablement sa dernière carte en politique. L’heure de la retraite semble sonner…
LE PARIIS, UNE RÉPONSE À LA TRANSFORMATION DU SECTEUR ARACHIDIER
Aifa Fatimata Ndoye Niane visitait les premières réalisations du Pariis Sénégal dans le bassin arachidier
«Le Projet d’appui régional à l’initiative pour l’irrigation au Sahel (Pariis) constitue une réponse assez adéquate par rapport à une contrainte majeure de notre agriculture qui est l’accès à l’eau», a déclaré hier l’économiste principal de l’Agriculture à la Banque mondiale. Dr Aifa Fatimata Ndoye Niane visitait les premières réalisations du Pariis Sénégal dans le bassin arachidier, notamment les périmètres maraîchers féminins de Nemah Ba (3,5ha) et de Dassilamé Sérère (4ha), dans la commune de Toubacouta, pour apprécier de visu les résultats et les impacts de ces aménagements sur le terrain.
L’économiste principal de l’Agriculture à la Banque mondiale se félicite des premières réalisations du Projet d’appui régional à l’initiative pour l’irrigation au Sahel (Pariis) Sénégal dans le bassin arachidier. En visite hier dans les périmètres maraîchers féminins de Nemah Ba (3,5ha) et de Dassilamé Sérère (4ha), dans la commune de Toubacouta, Dr Aifa Fatimata Ndoye Niane, accompagnée du coordonnateur national du Pariis, Aly Sané Niang, et des services techniques, a découvert avec «satisfaction et une impression positive» que les femmes bénéficiaires de ces réalisations ne passent plus la nuit ou ne se réveillent plus à 2 heures du matin pour aller puiser de l’eau.
En effet, avec l’intervention du projet, ces périmètres maraîchers ont connu «une évolution considérable avec des infrastructures/équipements modernisés, constitués notamment de mini-forages munis de pompes immergées et alimentées par une source d’énergie solaire permettant une irrigation sous pression au goutte-à-goutte ou à l’aspersion de parcelles viabilisées à la herse mécanique et sécurisées par des clôtures en grillage. Grâce à ces aménagements, les femmes bénéficiaires des périmètres ont aujourd’hui, retrouvé le sourire avec une amélioration de leurs revenus due à un accroissement et une diversification de la production».
Suffisant pour que l’agro-économiste, en charge du Pariis au Sénégal à la Banque mondiale, considère que «le Pariis constitue une réponse assez adéquate par rapport à une contrainte majeure de notre agriculture qui est l’accès à l’eau, en permettant à ces bonnes dames d’avoir accès à l’eau, mais également à une solution d’irrigation. En plus les autorités sont engagées dans le système pour assurer une bonne appropriation, mais aussi une pérennisation de l’investissement. Ce qui est salutaire en termes de démarche, en plus de la dimension technologique». Dr Aifa Fatimata Ndoye estime ainsi que le Pariis «est un bon modèle, un projet exemplaire qui doit pouvoir ouvrir l’œil en termes d’appui au secteur».
1 milliard d’hectares à emblaver
Elle rappelle que l’initiative Parris est un projet sous régional qui couvre cinq pays de l’Afrique de l’Ouest et du Sahel avec un objectif global d’1 milliard d’hectares à emblaver. «Nous sommes juste au début, c’est une phase-pilote que nous sommes en train de mettre en œuvre et qui porte ses fruits et qui pourra ouvrir d’autres opportunités en termes de financements au niveau de la Banque mondiale ; mais également au niveau de nos partenaires. Nous avons la coopération espagnole, qui a mobilisé 15 millions d’euros pour le Sénégal, au-delà des 25 millions de dollars de la Banque mondiale. Et je suis sûre qu’avec les résultats que nous sommes en train de voir, il y aura d’autres opportunités pour étendre encore cette belle initiative pour assurer la transformation durable de notre système alimentaire et construire toute la résilience par rapport au changement climatique», assure l’experte de la Banque mondiale. Laquelle précise également que le projet a signé une convention avec l’Ancar, afin de faire face aux problèmes liés à l’accompagnement, l’encadrement, au stockage, la mise en marché, entre autres. «Il faut une démarche chaîne de valeur. Aujourd’hui, les femmes sont contentes d’avoir augmenté considérablement leur production, mais si elles n’arrivent pas à trouver un marché, ça sera une autre source de démotivation. Ce qui fait que tous les problèmes liés à la chaîne de valeur, notamment le stockage, la conservation, la mise en marché, font partie intégrante du projet. Le maximum sera fait pour répondre à ces exigences et motiver davantage l’accroissement de la production et de la productivité», promet Mme Niane.
Pour rappel, le Pariis Sénégal a aménagé, avec l’appui de la Direction des bassins de rétention et des lacs artificiels (Dbrla), vingt-deux ha de périmètres maraîchers au profit de 600 femmes des régions de Thiès, de Fatick et de Kaolack
Par Hamidou ANNE
LE CORPS SAIT-IL CE QU’IL DIT ?
L’Ecole des Sables, ses occupants et les artistes de passage, constituent une poétique du lien, de la mémoire, des mythes et de leur sacralité afin d’ancrer une exigence de la liberté créatrice face au dogme du concret
A Toubab Dialao, les vents continuent de souffler et les vagues perlées échouent sur des rochers de cette côte, témoin du temps qui, inexorablement, passe. Les pêcheurs partent en mer et reviennent livrer leur prise aux femmes du village. L’économie de la mer, sous des dehors artisanaux, montre à l’observateur toute la complexité de son mélange, entre le matériel et l’immatériel, le disable et ce qui est appelé à échapper à la prison du verbe. Le récit de centaines d’années va bientôt s’estomper, car Toubab Dialao sera une terre outragée par le fer et l’acier, qui viennent promettre la croissance par le saccage des imaginaires qui fondent la poétique de ce lieu.
Dans l’attente fébrile du «monstre», on danse pour résister et exorciser le lieu des ombres qui rôdent avec comme moteur la victoire de la mort sur la vie. Germaine et Helmut résistent. Ils forgent une armée heureuse en misant sur le lien et sur les corps qui s’expriment. Ainsi est leur arme miraculeuse.
Des hommes et des femmes de diverses nationalités, de plusieurs horizons, de nuances et de sensibilités différentes se mêlent dans une langue commune : celle de la fraternité universelle, ciment face à la finitude triste. Dans ce petit bout de terre sobre de Toubab Dialao, face à l’océan, les esprits et les corps féconds ne cessent de représenter la vie à travers un discours optimiste ; comme si on se prémunissait de la laideur du monde extérieur.
Depuis un quart de siècle, l’Ecole des Sables de la danseuse et chorégraphe, Germaine Acogny, tente d’inventer une possibilité de la rencontre. La prophétie du sage de Yoff a pris forme : le monde entier vient tisser les petits fils d’humanité qui font la grande histoire de la fraternité humaine. L’école de danse qui trône entre la lagune et la mer offre une vue sur les baobabs qui accueillent les esprits et gardent la nuit leur progéniture. Ces esprits des ancêtres que l’on croise quand la nuit baisse son rideau sombre sur les vides entre les bungalows dispersés, au milieu des chuchotements des vents qui viennent rendre compte de la torpeur du monde. L’Ecole des Sables, ses occupants et les artistes de passage, constituent une poétique du lien, de la mémoire, des mythes et de leur sacralité afin d’ancrer une exigence de la liberté créatrice face au dogme du concret. La musique du lieu étale sa grâce sur des corps en mouvement qui récitent une autre musique, elle silencieuse et surprenante.
Un soir, durant mes déambulations nocturnes, au milieu des figures et des formes qui se mêlent, questionnant le sens de ce lieu, de ce qui s’y fabrique et du pouvoir du corps qui y danse, j’ai posé la question aux esprits : le corps sait-il ce qu’il dit ? Réponse : «Il ne suffit pas de se connaître pour appréhender la justesse de son récit. Le corps doit dire pour rendre. Il doit donner à voir et garder l’intimité de son en-soi pour éprouver le présent. Le corps, dans les ultimes instants avant l’acte d’expression, dans cette frontière entre l’inertie et le mouvant, pour se dépouiller de sa vanité, accepte de ne pas savoir ce qu’il sait, il se prive de son éloquence.
Il s’ouvre à l’ignorance pour être dans la transparence de soi-même. Le corps est véhicule, comme la parole, comme le sens, comme le lien qui délie. Imaginaire de la relation, symbole d’un universel ancré, le corps parle la langue de sa torpeur pour se libérer du poids de la morsure initiale. Parole porteuse, entre émetteur et récepteur, dans un corps qui s’ancre dans une temporalité sienne.
Il a fustigé les affres de la mesure ; il lie les abymes du silence aux mots qui délient la poésie sombre de la vie. La parole germe dans le corps, antre outragé, fécondant par petits bouts de rêves la langue qui devient ultime voyage vers la solitude du mouvement ; ce mouvement qui déchire le réel. Les mots libérés du corps qui danse drainent une nuée de songes qui s’entrelacent à l’ombre des dieux souriants. Rire profane. Danse païenne. Le sacré se mêle au profane comme le désir se joint à l’interdit.
La parole est passagère du corps tel ce messager des songes d’été qui retracent les contours d’un silence-clameur. Le corps dit la parole comme acte de rupture des temps suppliciés.» «Danser c’est résister» ont conclu les esprits, avant de retourner se lover dans les baobabs, laissant le soleil imposer à nouveau sa souveraineté sur les corps et les espaces entre eux. Une nouvelle journée commence à Toubab Dialao avec les mêmes gens, le même rythme et la même interrogation, fatale et implacable. Le corps sait-il ce qu’il dit ?