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17 juin 2025
LE DERNIER COMBAT DES WADE
Le fils est exilé au Qatar, le père retiré dans sa résidence versaillaise. Officiellement, pourtant, Karim et Abdoulaye dirigent ensemble le Parti démocratique sénégalais (PDS). Mais avec quelle stratégie, et dans quel but ?
Jeune Afrique |
Marième Soumaré |
Publication 02/12/2021
Après une telle carrière politique, que peut-on encore désirer ? Ténor du barreau reconverti en opposant acharné, il est le premier à avoir réussi l’exploit de mener son pays à l’alternance démocratique, en 2000. Chef de l’État pendant une décennie, il a même su faire oublier sa tentative avortée de conserver le pouvoir au-delà du temps imparti. Patriarche respecté, monstre politique, Abdoulaye Wade a-t-il déposé les gants ? Ou joue-t-il, depuis sa résidence versaillaise, la dernière manche d’une interminable partie ?
En juillet 2020, Gorgui (« le Vieux ») taillait à Karim Wade un parti à son image. Propulsant son fils secrétaire-général adjoint du Parti démocratique sénégalais (PDS), il en faisait le numéro trois. Aujourd’hui, travaille-t-il encore à le faire revenir au Sénégal, après cinq ans d’exil au Qatar, au risque de nuire aux intérêts de la formation qu’il a fondée il y a presque un demi-siècle ?
Le 2 septembre dernier, le PDS s’est retiré avec fracas de la coalition censée faire front commun face à Macky Sall lors du scrutin municipal du 23 janvier prochain. Une décision officiellement prise à la suite de désaccords avec le Pastef, le parti d’Ousmane Sonko. Mais la stratégie d’Abdoulaye Wade interroge. « Cela semble insensé que l’opposition éclate à ce stade, soupire un membre de la coalition. Wade est le plus expérimenté d’entre nous. Ce n’est pas à lui que l’on va apprendre à faire de la politique. Il sait bien ce que son départ aura comme conséquence. »
Tous rechignent à critiquer ouvertement le patriarche mais, en coulisses, ils s’étonnent que le PDS, pour la deuxième fois consécutive après les législatives de 2017, fasse voler en éclat la perspective d’une alliance. Ils espéraient profiter de ce scrutin local pour déstabiliser Macky Sall puis renverser la majorité présidentielle à l’Assemblée nationale lors des législatives prévues en juillet 2022. « On pourrait penser que pour réhabiliter son fils, il aurait intérêt à fragiliser Macky Sall, ajoute ce responsable politique. Mais, comme en 2019, il a choisi la voie inverse. »
Un parti isolé
La stratégie jusqu’au-boutiste d’Abdoulaye Wade qui, faute d’avoir pu imposer la candidature de son fils, avait appelé au boycott de la dernière présidentielle, continue de susciter le trouble. « C’est un homme qui ne veut rien faire comme les autres, explique l’un de ses alliés historiques. Il adore se singulariser. » Au risque de s’exclure ? Pour cet opposant, le constat est sans appel : « Le PDS n’existe plus sur l’échiquier politique depuis 2019. »
Ces trois dernières années, le parti s’est en effet isolé. D’autant que ni son président-fondateur ni l’héritier de ce dernier ne résident dans le même pays. Abdoulaye Wade, de retour à Dakar en février 2019, a finalement rejoint son épouse en banlieue parisienne en 2021. Depuis sa retraite versaillaise, il continue de suivre avec attention la stratégie de son parti. C’est du moins le message que veulent faire passer ses proches. Ils assurent d’ailleurs qu’il rentrera bientôt au Sénégal – au début de l’année prochaine, pour le début de la campagne électorale.
En attendant, le parti bleu et jaune s’affaire autour d’une stratégie en trois axes : réorganisation, mobilisation, retour du candidat. Une source au sein du groupe précise que les instances ont été refondées, que la vente de cartes a été lancée (avec l’espoir d’une adhésion « massive de karimistes ») et que priorité est donnée à la préparation des locales. Comme au bon vieux temps, le PDS a finalement reconstitué autour de lui une coalition, Wallu Sénégal, avec laquelle il s’apprête à aller aux élections. S’y retrouvent l’ancien libéral Pape Diop pour la Convergence libérale et démocratique Bokk Gis Gis (BGG), le député Mamadou Diop Decroix pour And-Jëf/Parti africain pour la démocratie et le socialisme (AJ-PADS), le Congrès de la renaissance démocratique (CRD) d’Abdoul Mbaye et Mamadou Lamine Diallo, et la coalition Jotna, ancienne alliée d’Ousmane Sonko.
Quant à Karim Wade, il reste « au cœur de toutes les discussions », assure Cheikh Dieng, l’un des onze secrétaires-généraux adjoints du parti. Le fils du patron, promu au rang de « chargé de l’organisation, de la modernisation et de l’élaboration des stratégies politiques », discute quotidiennement avec les responsables de la formation. Au PDS, « c’est un peu Karim propose, Wade dispose », à en croire certains cadres du parti, où l’on assure que les décisions finales reviennent toujours au patriarche.
Fonctionnement rigide
Mais hors du parti, beaucoup estiment que c’est Karim Wade qui tire les ficelles depuis Doha. « Les choses sont d’ailleurs difficiles, glisse un membre de Wallu Sénégal. Le fonctionnement est très rigide. Mayoro Faye [mandaté pour représenter le PDS au sein de la coalition] vient aux réunions en apportant un point de vue dont il ne peut pas se défaire. Au moindre changement, il doit en référer à la hiérarchie. Cela complique les discussions. »
La Confédération africaine de football a pris une décision forte. Au centre des critiques depuis le match qui a opposé le Ghana à l’Afrique du Sud lors de la dernière journée des éliminatoires au Mondial 2022, l’arbitre Maguette Ndiaye est mis à l’écart
La Confédération africaine de football a pris une décision forte. Au centre des critiques depuis le match qui a opposé le Ghana à l’Afrique du Sud lors de la dernière journée des éliminatoires au Mondial 2022, l’arbitre Maguette Ndiaye est mis à l’écart par l’instance panafricaine. Information rapportée par Sundayworld, qui indique que l’officiel sénégalais est la cible de pressions de la part de l’Afrique du Sud, afin qu’il soit définitivement exclu de l’arbitrage international.
Si la CAF n’a pas accédé à cette demande, le temps de laisser la FIFA statuer sur le recours déposé par l’Afrique du Sud, l’arbitre est lui laissé en dehors des terrains. Décision prise afin d’éviter que cette situation n’influe sur ses performances. Il n’officiera pas ce week-end lors des matchs retour du tour de cadrage de la Coupe de la CAF.
MARIE MADELEINE DIOUF, MAGNIFIER LES TEXTILES AFRICAINS
À la tête de la marque NuNu Design by DK, la créatrice sénégalaise mise sur la recherche textile pour développer ses collections, entre création et engagement
Jeune Afrique |
Marième Soumaré |
Publication 02/12/2021
Sur le pagne, le dégradé de couleur s’étend du fuchsia profond au rose clair, avec des nuances de mauve. Il s’obtient en utilisant des bourgeons de cactus, que l’on fait tremper pendant des heures dans l’eau pour en retirer les épines, avant de les écraser au pilon et au mortier. On laisse ensuite le tissu s’imprégner de la substance obtenue, d’un rouge rose profond. « Une teinte comme celle-ci, c’est impossible à trouver en industrie », sourit Marie Madeleine Diouf. Encore faut-il parvenir à la fixer sur le pagne. « Qu’on fasse sécher les tissus à froid ou au soleil, la couleur a tendance à s’altérer. Il faudrait que l’on trouve un moyen de la conserver naturellement », ajoute la créatrice.
Depuis qu’elle a ouvert sa propre boutique, NuNu Design by DK, dans la capitale sénégalaise, la Dakaroise expérimente autant qu’elle le peut de nouveaux tissus et de nouveaux procédés de peinture pour créer ses pièces. Cette teinture au cactus, elle l’a testée au début de l’année lors d’un atelier réalisé au cours d’une résidence à Gandiol (Saint-Louis) avec des femmes de la région. Elle a également expérimenté la teinture à l’argile, qui est tamisée et qu’on laisse macérer avant de la mêler aux tissus, auxquels elle donne un ton ocre et naturel. « L’idée, c’est de partager notre expérience avec ces femmes, afin qu’elles puissent l’intégrer et l’utiliser pour leurs commerces », détaille Marie Madeleine Diouf. Une expérience qu’elle a elle-même acquise en autodidacte.
Tissus traditionnels et style moderne
Avant de se lancer dans la mode et le design, cette entrepreneuse de 41 ans était assistance médicale. En 2015, lassée par son domaine d’expertise, elle décide de démissionner pour lancer son propre business, en dépit des mises en garde de ses proches. « J’ai commencé sans vraiment savoir où j’allais, avec 60 000 F CFA de fonds de commerce et ma petite machine à coudre personnelle. Mais je n’ai pas hésité. J’avais envie de faire ce qui me plaisait. »
Avec une idée de départ : promouvoir à travers ses collections les tissus, les savoir-faire et l’héritage culturel du continent. Dans sa petite boutique nichée au cœur du centre-ville de Dakar, les pièces font la part belle aux tissus et aux coloris typiques de la sous-région. À l’arrière de la salle de vente et dans la cour intérieure, les couturiers s’affairent et les pagnes indigo, trempés dans l’eau et le vinaigre pour maintenir leur couleur, sèchent au soleil.
L’artiste musicien Wally Ballago Seck a accepté d’être l’ambassadeur du centre international du commerce extérieur du Sénégal (CICES), à l’occasion de la 29ème édition de la foire internationale de Dakar (FIDAK) prévue du 6 au 20 décembre, a appris l’APS
L’artiste musicien Wally Ballago Seck a accepté d’être l’ambassadeur du centre international du commerce extérieur du Sénégal (CICES), à l’occasion de la 29ème édition de la foire internationale de Dakar (FIDAK) prévue du 6 au 20 décembre, a appris l’APS des organisateurs. .
"Wally Ballago Seck a accepté aussi bien d’être l’ambassadeur du CICES, de la FIDAK, mais aussi il a accepté de venir jouer durant la foire’’, a annoncé, mercredi, à l’APS, le directeur commercial et partenariats du CICES, Jean-Claude Ngom.
Cette édition dont le Pakistan sera pays d’honneur, a pour thème "Promouvoir l’agrobusiness pour un développement économique et social durable".
Cet artiste, selon M. Ngom, fait partie des grosses pointures de la musique sénégalaise et ses concerts au CICES donneront au public la chance de payer moins que ce qu’ils ont l’habitude de débourser pour ce genre de spectacle.
"Tout ça permet à cette population, qui a été fortement impactée socialement par rapport à cette pandémie de pouvoir trouver un créneau pour se divertir", a-t-il fait valoir.
LE PRÉSIDENT SUD-AFRICAIN DÉNONCE UN APARTHEID SANITAIRE
Il a à nouveau jugé "regrettable, injuste et contraire à la science" l'interdiction de voyager en Afrique du Sud et en Afrique australe imposée par un grand nombre de pays, les appelant à revoir "d'urgence" leur position
Le président sud-africain Cyril Ramaphosa a dénoncé jeudi à Abidjan "toute forme d'apartheid sanitaire" dans la lutte contre la pandémie de Covid-19, en particulier son variant Omicron initialement détecté par son pays qui est depuis en partie isolé du reste du monde.
"Bien que nous respections le droit de chaque pays à prendre des mesures pour protéger sa population, la coopération mondiale et durable dont nous avons besoin pour venir à bout de la pandémie nécessite que nous soyons guidés par la science", a dit M. Ramaphosa à l'issue d'une rencontre avec son homologue ivoirien Alassane Ouattara. L'Afrique du Sud est "fermement opposée à toute forme d'apartheid sanitaire dans la lutte contre la pandémie", a-t-il ajouté. Le président Ramaphosa a affirmé être avec son homologue ivoirien "préoccupé que l'Afrique et le reste du monde en développement continue à se battre (contre la pandémie) en ayant un accès limité aux vaccins si nécessaires pour sauver des vies".
Il a à nouveau jugé "regrettable, injuste et contraire à la science" l'interdiction de voyager en Afrique du Sud et en Afrique australe imposée par un grand nombre de pays, les appelant à revoir "d'urgence" leur position. Il a en outre estimé que cette décision d'isoler son pays était "une gifle à l'expertise et l'excellence africaines", puisque ce sont "nos propres scientifiques qui ont les premiers détecté le variant Omicron". M. Ramaphosa a tenu à remercier Alassane Ouattara d'avoir fait preuve de "solidarité" en permettant que dans ces circonstances, sa visite d'Etat en Côte d'Ivoire - la première d'un président sud-africain depuis l'établissement de relations diplomatiques entre les deux pays en 1992 - puisse se tenir. "Je salue les mesures efficaces que vous avez prises pour lutter contre la pandémie de la Covid-19, ainsi que pour votre engagement en faveur de la vaccination", a de son côté déclaré le président Ouattara.
Il a exprimé sa "solidarité avec le gouvernement et le peuple sud-africains pour cette période difficile marquée par l'apparition du nouveau variant Omicron et l'incompréhension que nous avons notée chez certains pays".
En Afrique du Sud, où a été annoncée l'identification du variant Omicron la semaine dernière, et où moins d'un quart de la population est vaccinée, les autorités ont décrit devant le Parlement une propagation "exponentielle" du virus. Le nouveau variant, manifestement très contagieux, étant déjà dominant. La variant Omicron a pour l'instant été signalé dans quatre pays africains (Afrique du Sud, Ghana, Nigeria, Botswana).
Mémoriales, par elgas
KHADY SYLLA, ANGE TRAGIQUE
EXCLUSIF SENEPLUS - Écrivaine et cinéaste, elle a eu une vie mouvementée, faite de grands espoirs et de tragédies de l’infortune. Un ange aux prises avec ses démons
Écrivaine et cinéaste, Khady Sylla a eu une vie mouvementée, faite de grands espoirs et de tragédies de l’infortune. Un ange aux prises avec ses démons. Retour sur la trajectoire d’un esprit libre.
Cheveux courts, sourire angélique, regard perçant, charisme engageant, visage pictural. Elle ne passe pas inaperçue dans les couloirs de Vanvo malgré son jeune âge. L’adolescente en impose, par une simplicité et une grâce naturelles, qui soulignent davantage son engagement précoce dans la vie du lycée. Le lycée Van Vollenhoven, du nom de ce bref gouverneur de l’AOF, est un des temples dakarois du savoir, de ceux qui ont vu éclore nombre de talents nationaux, et sous-régionaux. Dans les années 60, il abrite une jeune élite et se fait caisse de résonance de l’activisme qui s’empare du pays. Un vent de fraicheur dégrise l’humeur nationale, les idées marxistes foisonnent et séduisent. La jeunesse des lycées est à la pointe des nouveaux combats politiques, notamment partie prenante de la grève générale de 68 qui embrase le pays.
Vanvo et Janson-de-Sailly, berceaux d’un engagement
Khady Sylla y entre une bonne dizaine d’années plus tard, elle sera une héritière de cette période faste. Profil en vue, militante dans les associations du lycée, toujours sur le pont à l’affût des AG, la bonne élève, férue de philosophie dont elle collectionne les tableaux d’honneur, a une allure de favorite. Protégée de la terrible et inénarrable madame Kodjo, professeur excentrique de philosophie et épouse de l’éminent Edem Kodjo, la jeune élève se distingue particulièrement et manifeste un goût prononcé pour la liberté. Quels rêves peuplent alors la tête de cette jeune fille, qui marque et séduit presqu’unanimement ceux qu’elle rencontre ? La culture large de cette grande lectrice, qui voit aussi le cinéma s’épanouir dans la capitale avec l’ouverture et la vie des premières salles de projections, lui ouvre le champ des possibles.
C’est à Janson-de-Sailly, prépa prestigieuse de Paris, tout juste moins courue qu’Henri IV ou Louis-le-Grand, qu’elle prend ses quartiers en hypokhâgne à l’automne 1981. Récompense de l’élite scolaire sénégalaise qui y est envoyée avec de grands espoirs, la prépa en France a ses mythes. De Senghor à Bachir Diagne, c’est une fabrique de la crème nationale, avec ses splendeurs et ses misères, ses tragédies et ses mirages, ses solitudes aussi. L’aube des promesses. La gloire s’y esquisse comme l’anonymat pourtant. Dans cette loterie à plusieurs inconnues, les nouveaux impétrants ont le temps de l’insouciance et du rêve.
Dans la compétition humaine
Khady Sylla y débarque, jeune, candide, dynamique, avec dans ses bagages de solides acquis. Au sein de l’établissement sis rue de la Pompe, dans le 16e arrondissement parisien, il faut côtoyer les forts en thème et autres cracks d’extraction bourgeoise, et se soumettre au régime drastique de cette usine à produire les meilleurs. D’autant plus compliqué que la jeune fille change d’environnement, découvre un pays, et est sans attache.
La sénégalaise est toutefois chanceuse, elle fait très vite la rencontre d’une camarade, venue du Sud de la France, qui deviendra une amie, Anne Villacèque. Les deux camarades habitent au foyer des lycéennes de la rue du docteur Blanche où toutes les filles des classes préparatoires parisiennes faisaient leur internat : elles sont environ 500. Elles découvrent ensemble la coloration monochrome de cet environnement. Anne Villacèque se souvient avec précision de cette classe, berceau français de son amie : « ce qui frappait au premier abord, ce n’était pas tant son élitisme intellectuel que sa composition sociale : il y avait là beaucoup d’élèves qui habitaient le quartier, et ce quartier, c’était le 16ème arrondissement de Paris, un arrondissement très chic, avec des élèves qui venaient de familles aisées ou même très aisées, et pour la plupart d’un milieu bourgeois traditionnel et catholique. » Mais Khady Sylla a de la ressource pour tenir la comparaison sur ce qui compte : les études.
Les prémisses d’une solitude, une souffrance silencieuse
L’arrachement, la solitude, le rythme frénétique ne lui font pas peur. D’autant que sa culture est là, présente, multiple : fine connaissance de la politique, des forces en présence, intérêt pour le cinéma, amour des livres. Elle fait bonne impression, participe en classe, prend la parole. Sans doute les AG de Vanvo, sa curiosité intellectuelle, lui ont déjà donné un certain aplomb, de l’expérience et une certaine assurance. Elle tient le rang dans cette compétition feutrée de la prépa, se remémore encore Anne Villacèque : « je crois sincèrement que le niveau de Khady était bien supérieur à la plupart de celui des autres élèves de cette classe : elle avait déjà une culture philosophique et littéraire très solide. Il me semblait qu’elle avait déjà tout lu ! Qu’il s’agisse de Nietzsche, de Platon, ou de Spinoza, elle voyait toujours très bien de quoi il retournait. Et au début de l’année, je m’en souviens, elle prenait volontiers la parole en classe, sans aucune timidité. C’était plutôt les autres qui ramaient »
Pendant deux ans, la jeune Khady Sylla, sous la protection de monsieur Renou, professeur « post-soixante-huitard avec des idées de gauche et un comportement attentif et courtois » qui l’encourage, est pleine de promesse. La voie des brillantes études s’ouvre pour elle : elle a en ligne de mire la prestigieuse École Normale Supérieure. Mais la discipline militaire qu’exige ce parcours, la compétition féroce pour les places, l’usent. Même si elle fait face avec honneur, dans ce panier de crabes, elle doit endurer une souffrance supplémentaire, silencieuse : la solitude, le manque de sa famille. Père enseignant, mère dans le monde du cinéma, c’est en mars 63 que Khady Sylla voit le jour. Le bain familial lui permet vite de côtoyer les livres mais aussi les films, via la mère, monteuse. Elle grandit dans une famille aimante et très vite s’émancipe, librement et sans tapages, des conventions traditionnelles de la société sénégalaise. L’ancrage familial est pour elle important, et ce manque la mine. Donnée commune de l’exil, elle est pourtant plus lourde sur les épaules fragiles de ces profils brillants, sur qui pèsent des attentes démesurées, et qui vivent l’angoisse de décevoir. Sous la carapace, sa sensibilité est pourtant là, souffrance tue, qu’Anne Villacèque ne découvrira que plus tard. « L’isolement prolongé par rapport à sa famille et à son pays a été très difficile à supporter pour elle. Elle était très jeune, c’était la première fois qu’elle s’en allait loin de chez elle, et sa mère en particulier lui a beaucoup manqué. Et puis, la société française, l’individualisme forcené qui y régnait, la dureté des rapports humains, tout ça elle ne l’a pas supporté. »
Sortie de prépa et début d’une période incertaine
À la sortie de cette prépa, elle s’inscrit finalement en licence de philosophie. Période tantôt faste, tantôt sombre, son compagnon d’alors, Lamine Badian Kouyaté, se souvient de leurs galères, entre Strasbourg et Paris. Fils du grand écrivain malien Seydou Badian Kouyaté, il a rencontré Khady Sylla sur les bancs de Vanvo. Ils vivotent dans la vie de bohême des milieux artistiques de la capitale, sans le sou, avec des rêves grondants. Khady Sylla tombe enceinte. C’est l’entrée d’un tunnel de fragilité, d’incertitude. La maternité, ses contraintes, deviennent la trajectoire de cette jeune fille qui voit déjà les grandes promesses entre aperçues s’enténébrer sur son horizon. Si l’amour pour son fils contrebalance cette situation, la jeune femme doit faire face à ce qui deviendra la longue ambiguïté de sa vie. Cette perpétuelle dualité qui la suit entre des ressources certaines, des aptitudes au-dessus de la moyenne et la réalité des entraves, des écueils, créent les conditions d’une insatisfaction chronique et désarmante qui entamera sérieusement sa psychologie. Lamine Badian Kouyaté se souvient « d’un esprit libre dans un carcan ». Toute l’ambition, l’appétit de découverte mais aussi de conquête de la jeune femme doivent affronter cette providence hostile. La fragilité de cette condition mine ses rêves.
Pour cette fille à la culture vaste et éclectique, qui navigue de registre en registre, la littérature est un refuge, et ses mentors des boussoles. Elle voue un culte à l’argentin Borges. Aime l’œuvre naissante du congolais Sony Labou Tansi. L’écriture s’esquisse comme la voix naturelle, celle pour laquelle, elle semble faite, celle pour laquelle elle a nourri un rêve continu. Elle fait par la suite une rencontre décisive, qui marquera un tournant dans sa vie personnelle et professionnelle. « Pendant quelques années, les dernières qu’elle a passées à Paris, Khady a vécu aux côtés d’un photographe de presse français qui avait vraiment compris sa valeur littéraire, Stéphane Weber. Ce photographe avait aussi une vraie connaissance de l’Afrique et du Sénégal, et il l’a encouragée à écrire sans qu’elle ait le souci permanent de trouver de l’argent. C’est comme ça qu’elle a pu terminer le « Jeu de la Mer » », se souvient Anne Villacèque.
Le Jeu de la mer, l’entrée en littérature
En 92, dans la collection Encres Noires des éditions l’Harmattan, parait cet ouvrage. On y note toute la pratique littéraire, un style riche, enjoué et porté sur le détail. De généreuses, pointues et belles descriptions, et un symbolisme à travers la mer, miroir, mythe fondateur légendaire, échappée, source d’équations irrésolues. Elle y agglomère toutes ses passions, le journalisme, le féminisme, et donne à voir dans cette saga, cette enquête, une palette, autour de Assane, un personnage central chargé d’élucider le mystère. Ainsi, page 154 : « Simplement, il se tint face à la mer. La braise s'était emparée de la totalité des flots. Les écailles d'or du crépuscule coulaient sur la face des eaux. Ce vide abyssal, paré de sa plus belle peau du soir, répercutait ses pensées. L'écheveau du doute s'était défait, avait cédé la place à la ligne droite et brève de la vérité. Ce qu'il venait de découvrir le ramenait vers son passé. La mer et le ciel embrasés se mettaient à ressembler à ce territoire intérieur, illuminé par une nouvelle et violente émotion. Il tourna le dos aux deux déserts éternels, reprit l'allée cernée de fleurs. »
Reçu timidement, Le Jeu de la Mer ne permet pas de vaincre le signe indien de l’infortune. Le texte séduit pourtant des professionnels du milieu littéraire, par sa force, ses images, son potentiel. Son texte est au cœur d’une querelle, elle est pressentie pour être primée, mais Khady, avec son inexpérience, suscite les moqueries et les jalousies. Dont celle d’un monstre comme Ousmane Sembène qui n’est pas avare en mots durs sur elle. L’épisode va la meurtrir. Elle décide peu après, en 94, de rentrer au Sénégal. Vivant désormais entre le Sénégal et la France, elle continue son errance. Son livre attire l’attention de Jean Rouch, grand cinéaste et lecteur attentif. Il est séduit, et ils envisagent ensemble de le mettre en image. Au gré des rencontres, elle se fera de nombreux contacts plus ou moins proches dans ce monde du 7ème art. Anne Villacèque se souvient bien de cette période, elle qui continuera malgré le temps qui passe à garder une complicité et des liens forts avec Khady Silla : « j’ai le souvenir de sa rencontre avec Alain Cuny, un acteur presque mythique en France, et qui était déjà alors très âgé. Il avait une sorte de vénération pour Khady. » Si l’écriture, son rêve premier, ne l’a pas conduite à la reconnaissance franche, et si sa situation reste précaire, ces retours et ces discussions aiguisent son appétit cinématographique. Elle se lance ainsi en tant que réalisatrice, et en 1999 puis 2005, sortent dans les salles obscures Colobane express, puis Une fenêtre ouverte.
Le bref salut du cinéma avant la plongée
Le premier film est remarqué, salué. On y sent les aptitudes qu’elle avait démontrées dans son travail littéraire, un regard, une vision du monde, un sens du détail, une esthétique. Ousmane Ndiaye, journaliste et grand admirateur de son travail, évoque son œuvre cinématographique marquante : « le cinéma de Khady Sylla m'a bouleversé en 2005 avec "Une fenêtre ouverte". C'est une parole puissante et touchante car profonde, simple, dépouillée d'artifice. Nulle posture chez la réalisatrice ! J'ai l'impression que dans chaque plan, chaque séquence, elle met en scène, en jeu, non pas des vies, un réel mais sa propre sa vie. C'est une mise à nu, de soi d'abord, courageuse et juste. Jamais nombriliste car elle n'est que prétexte pour parler des autres, de sa société.... Dans ses documentaires, elle s'affranchit, avec bonheur doublement : d'abord des tabous de sa société, ensuite du formatage esthétique et artistique. Rien de corseter, ni de formater dans son geste cinématographique. J'espère que son travail sera vu ou revu. » Même admiration chez Rama Thiaw, cinéaste qui a bien connu Khady Sylla : « elle avait une manière de filmer qui lui était propre, singulière et poétique. Inclassable et iconoclaste. Lorsqu’on évoque le travail de Khady de « Colobane Express », avec la vitalité d’une ville toujours en mouvement, de car rapide en car rapide. On y voit le fruit de beaucoup d’humour, car Khady aimait rire, non pas au dépend mais toujours avec… Avec une certaine tendresse, car elle en avait également pour les laissés-pour contre, pour les gens du Peuple, pour ceux que Djibril, l’un de ses mentors, surnommait avec cœur « les petites gens » ». Dans ses nombreuses quêtes, Khady Sylla aura aussi eu des amies chères, comme Aminata Sophie Dieye, Ken Bugul, deux écrivaines d’une certaine école de la liberté. Comme l’évidence d’un esprit de camarades à l’assaut des carcans d’une société figée.
Au milieu des tumultes, de la reconnaissance qui s’est jouée d’elle, de la solitude, des ennemis plus forts qu’elle, Khady Silla a tracé sa route tant bien que mal. Vers la fin de sa vie, ses troubles psychologiques l’ont davantage affaiblie et accablée. Elle qui avait encore des projets à venir, a dû se battre contre la maladie mentale, jusqu’à y rendre son dernier souffle en 2013. Une fin douce-amère sur la même tonalité qu’aura été sa vie, faite de clair-obscur et d’hésitation. Son œuvre et son parcours gardent cet écho des voix qui s’éloignent, tant le goût d’inachevé et le sentiment d’injustice persistent. Trace des souffrances de cet esprit brillant, bâillonné par les circonstances, qui endolorissent plus encore ceux qui l’ont connue. Autant d’ombres qui, jetées sur le parcours de sa vie, ont éteint sa voix sans jamais la faire taire.
Le capitaine des lions n’est pas au mieux de sa forme. L’international sénégalais évoluant à Naples est sorti sur blessure à 10 minutes de la fin de la rencontre opposant son équipe au club Sassuolo Calcio.
Le capitaine des lions n’est pas au mieux de sa forme. L’international sénégalais évoluant à Naples est sorti sur blessure à 10 minutes de la fin de la rencontre opposant son équipe au club Sassuolo Calcio.
Match comptant pour la quinzième journée de Série A le défenseur central est sorti en cours de jeu pour douleur à la hanche. Pour le moment, aucun diagnostic n’est encore établi pour identifier le niveau de gravité de sa blessure.
Toujours est-il que Kalidou Koulibaly est le troisième joueur de la sélection nationale à être blessé après Ismaila Sarr et Krepin Diatta, forfait confirmé pour la CAN Cameroun 2022.
MACKY SALL APPELLE A UNE COLLABORATION ENTRE CIVILS ET MILITAIRES POUR LA SECURITE ET LA DEFENSE
La sécurité et la défense ne peuvent exister sans une collaboration entre militaires et civils, a laissé entendre, jeudi, à Dakar, le président de la République, Macky Sall.
Dakar, 2 déc (APS) – La sécurité et la défense ne peuvent exister sans une collaboration entre militaires et civils, a laissé entendre, jeudi, à Dakar, le président de la République, Macky Sall.
‘’La sécurité et la défense, impératifs nationaux par essence, nécessitent la collaboration entre militaires et civils, deux versants de notre commun vouloir de vivre ensemble’’, a-t-il dit en inaugurant l’Institut de défense du Sénégal (IDS), au camp militaire Idrissa-Fall (ex-camp Leclerc).
Le chef de l’Etat s’est réjoui, par ailleurs, de la collaboration de l’IDS avec l’université Cheikh-Anta-Diop de Dakar, pour la préparation des enseignements académiques de la nouvelle institution militaire.
Il a encouragé ‘’vivement’’ sa direction à entretenir cette collaboration en faisant appel à des ressources humaines de qualité, militaires et civiles.
Avec leur expérience reconnue des ‘’affaires nationales et internationales’’, elles vont apporter une valeur ajoutée au contenu des programmes du nouvel institut, a-t-il dit.
‘’N’oublions pas que le concept armée-nation nous renvoie toujours à la construction d’une osmose intelligente entre les forces de défense et de sécurité et [la société]’’, a ajouté Macky Sall.
L'AFREXIMBANK ET LE FONSIS SCELLENT LEUR PARTENARIAT
La Banque africaine d’Import-Export (Afreximbank) et le Fonds Souverain d’Investissements Stratégiques (FONSIS) ont signé un protocole d’accord pour accompagner les investisseurs des secteurs public et privé dans le développement de projets au Sénégal.
Dakar, 30 nov (APS) – La Banque africaine d’Import-Export (Afreximbank) et le Fonds Souverain d’Investissements Stratégiques (FONSIS) ont signé un protocole d’accord pour accompagner les investisseurs des secteurs public et privé dans le développement de projets au Sénégal.
Dans un communiqué parvenu à l’APS, le FONSIS indique que cet accord a été signé récemment à Durban, en Afrique du Sud, en marge de la deuxième Foire commerciale intra-africaine (IATF 2021).
Afreximbank et le FONSIS ’’ont mis en place un instrument conjoint de financement de la préparation de projets’’, explique la même source.
Ce mécanisme, précise-t-elle, vise à ’’mobiliser jusqu’à 50 millions de dollars US’’, soit 25 milliards de francs CFA, pour ’’accélérer la mise en œuvre de projets prioritaires inscrits dans le plan de développement national du gouvernement du Sénégal, dénommé Plan Sénégal émergent (PSE)".
Ainsi, ‘’les deux institutions aideront conjointement les investisseurs des secteurs public et privé à réduire les risques liés aux marchés et aux secteurs en proposant des services de financement et d’assistance technique qui déboucheront sur une offre régulière de projets bien structurés et prêts à l’emploi’’.
Elles comptent travailler ’’ensemble pour aider les investisseurs à préparer des projets dans différents secteurs liés au commerce et aux investissements, dont le secteur de l’énergie, des transports et de la logistique, des plates-formes logistiques, de l’industrie manufacturière, de l’agroalimentaire, de l’hôtellerie et du tourisme, de l’exploitation minière, et des services, notamment de la santé, des TIC et de l’économie créative’’.
Le communiqué indique par ailleurs qu’Afreximbank ’’renforcera également les capacités du FONSIS afin que cette institution puisse, de manière indépendante, réaliser des activités de préparation de projets, de mobilisation des ressources tout en faisant du Sénégal une destination d’investissement attrayante’’.
PRESIDENTIELLE EN GAMBIE, LA MONTEE DE L'ADRENALINE
Banjul, la capitale gambienne, est saisie d’une puissante fièvre électorale, ce jeudi, le dernier jour d’une campagne électorale timide au début, mais qui prend de plus en plus des couleurs, au fur et à mesure
Banjul, 2 déc (APS) – Banjul, la capitale gambienne, est saisie d’une puissante fièvre électorale, ce jeudi, le dernier jour d’une campagne électorale timide au début, mais qui prend de plus en plus des couleurs, au fur et à mesure que le scrutin présidentiel ouvert et indécis de samedi approche, a constaté l’envoyé spécial de l’APS.
Dès les premières heures de la journée, le marché central de Yundum, près de Banjul, grouille de monde. Des rangées de tables et d’étals rétrécissent la voie principale. Le concert de klaxons des véhicules se mêle aux cris des marchands ambulants. Yundum plonge dans un méli-mélo, une ambiance indescriptible.
Les cortèges de voitures des partis politiques rendent plus dense un trafic automobile déjà peu fluide. Les effigies des principaux candidats sont visibles un peu partout. De petits groupes de personnes à chaque coin de rue.
‘’C’est très difficile de se déplacer dans la ville. Le trafic est très dense’’, fait remarquer Shek Cissey. Ce chauffeur de taxi multiplie les va-et-vient entre les stations d’essence et de gasoil. Il s’inquiète beaucoup et craint un ralentissement de son travail.
‘’Il n’y a presque pas de réserves dans les stations-service. Certains chauffeurs vont jusqu’à la frontière sénégalaise pour se procurer du gasoil ou de l’essence’’, s’alarme Shek Cissey.
Mercredi soir, à Boufazon, une célèbre place de la banlieue de Banjul, Adama Barrow, le candidat du Parti national du peuple (NPP), le parti au pouvoir, a tenu un grand rassemblement. Lors du meeting, il a tenté de persuader les électeurs de l’opportunité de lui faire encore confiance, confie à l’APS Hounda Nyang, le coordonnateur national du NPP.
Cette formation politique tiendra son meeting de clôture cet après-midi, dans le centre-ville de Banjul. ‘’Nous sommes en train de nous affairer autour des derniers détails, pour la dernière mobilisation de ce soir. Nous allons terminer en beauté en laissant une dernière belle impression à l’électorat gambien’’, promet M. Nyang, un brin confiant.
Le leader du Parti démocratique unifié (UDP), l’avocat Oussainu Darboe, opposant durant de longues années, vice-président de la Gambie en 2018-2019, compte se déployer dans les plus grandes artères de la capitale, pour ‘’une grande procession électorale’’. Il va boucler sa campagne électorale avec un meeting prévu au terrain de football de Bakau, selon Bintou Camara, la responsable de la communication de l’UDP, le principal parti d’opposition du pays.
Le candidat du Parti socialiste, le député Halifa Sallah, a choisi Serrekunda, l’une des principales circonscriptions électorales de la Gambie, pour y tenir son meeting de clôture. ‘’Il va beaucoup insister sur son programme politique, les réformes qu’il propose en vue d’une nouvelle Gambie. Il est important qu’il se fasse comprendre par les électeurs’’, souligne Umar Djassey, un de ses proches. Le leader du Parti socialiste est un ancien allié d’Adama Barrow.
D’autres candidats, qui ont déroulé meetings et tournées en dehors de Banjul, ont presque tous regagné la capitale pour les derniers rassemblements qui doivent prendre fin à minuit au plus tard.
Six candidats sont en lice pour l’élection présidentielle gambienne prévue samedi. Plus de 900.000 électeurs doivent prendre part au vote, dans les sept régions du pays.
C’est le premier scrutin présidentiel de la Gambie après celui remporté en 2016 par Adama Barrow aux dépens de Yahya Jammeh. Ce dernier, après vingt-deux ans au pouvoir, vit en exil en Guinée Equatoriale, depuis l’échec de sa tentative de confiscation de la victoire de son adversaire.
Des organisations de défense des droits de l’homme et des familles de victimes présumées de violences commises par son régime réclament des poursuites judiciaires contre M. Jammeh. Il a quitté la présidence gambienne sous la pression de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest.