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27 juin 2025
LA PRISON REQUISE CONTRE LE PÈRE DE DOUDOU, ACCUSÉ D'AVOIR FAIT EMBARQUER SON FILS POUR L'EUROPE
Deux autres pères, dont les enfants sont revenus vivants d'une tentative de traversée, étaient jugés à ses côtés, tous trois pour "mise en danger de la vie d'autrui" et "complicité de trafic de migrants", selon l'avocat, qui les défend également
Des peines de deux ans de prison ferme ont été requises mardi au Sénégal à l'encontre de trois hommes accusés d'avoir fait embarquer leurs fils dans une pirogue en partance pour l'Europe, dont un est mort en mer, a-t-on appris auprès de leur avocat.
Le sort de "Doudou", le surnom du jeune de 15 ans qui avait embarqué mi-octobre, a particulièrement retenu l'attention au moment où l'émigration clandestine et les pertes humaines qu'elle cause suscitent un vif émoi au Sénégal. Son père avait remis 250.000 francs CFA (environ 380 euros) à un passeur qui devait l'emmener clandestinement en Espagne, d'où un autre correspondant devait l'acheminer en Italie pour qu'il s'y inscrive dans un centre de formation pour footballeurs, avait affirmé à l'AFP une source proche du dossier. Mais l'adolescent est mort pendant la traversée "après avoir eu des problèmes pour manger", avait précisé cette source. Selon la presse locale, son corps a été jeté en mer.
Son père, arrêté début novembre par la gendarmerie, a comparu mardi devant le tribunal de grande instance de Mbour, à environ à 80 km au sud-est de Dakar, a indiqué son avocat, Adoulaye Tall.Deux autres pères, dont les enfants sont revenus vivants d'une tentative de traversée, étaient jugés à ses côtés, tous trois pour "mise en danger de la vie d'autrui" et "complicité de trafic de migrants", selon l'avocat, qui les défend également. Le parquet a requis contre eux la même peine, deux ans de prison ferme, et le jugement a été mis en délibéré au 8 décembre, selon l'avocat, qui a plaidé la relaxe. "Le procureur est dans son rôle. Il est dans une dynamique de dissuasion" de l'émigration clandestine, mais "j'ai bon espoir qu'ils seront libres le 8 décembre", a déclaré Me Tall.
UN DOUZIÈME ANNIVERSAIRE DE L'APR CÉLÉBRÉ DANS LA SOBRIÉTÉ
La cérémonie officielle qui s’est déroulée au siège du parti à Mermoz a été marquée par l’absence du chef de l’Etat, Macky Sall,
Le douzième anniversaire de l’Alliance pour la République (APR, au pouvoir) a été célébré ce mardi, dans la sobriété, pour cause de la pandémie à coronavirus, a constaté l’APS.
La cérémonie officielle qui s’est déroulée au siège du parti à Mermoz a été marquée par l’absence du chef de l’Etat, Macky Sall, par ailleurs président de l’APR. Il a été représenté par le ministre d’Etat, Mbaye Ndiaye.
’’1er décembre 2008-1er décembre 2020, il y a de cela douze ans jour pour jour des sénégalais de tout âge et de toute horizons (…), nous ont permis, grâce à la bravoure et un engagement constant d’ouvrir une nouvelle page de l’histoire politique du Sénégal’’, a ainsi déclaré le ministre d’Etat Mbaye Ndiaye.
’’L’optimisme, la volonté en bandoulière et la conviction à toute épreuve nous ont permis, d’accéder au pouvoir après seulement trois ans d’expérience’’, a t-il ajouté.
Depuis lors, a-t-il dit, ’’des liens forts ont été tissés au cours de cette épopée où nous avons dû faire face à des épreuves et à beaucoup d’adversité pour semer les graines de l’APR Yaakaar qui nous ont permis aujourd’hui d’inscrire le Sénégal sur les rampes de l’émergence’’.
Il a par ailleurs souligné que l’APR qui a toujours privilégié la coalition, dans sa démarche politique, continuera à tendre la main à l’ensemble des citoyens pour qu’ils viennent apporter leurs contribuations dans la bonne marche de la société.
’’Douze ans après sa création, l’APR se doit d’accroître son capital de sympathie et également se massifier autour des valeurs qui fondent’’ la formation présidentiellen, a pour sa part soutenu le directeur de l’Ecole du parti, Me Djibril War.
Il a ainsi appelé ses partisans à une citoyenneté républicaine au tour des valeurs communes, poursuivant sur ce point que les jeunes dont dispose l’APR lui donnent raison de croire que la bonne graine germera pour un meilleur avenir du parti.
Me War a en outre invité les cadres du parti à organiser des cercles de réflexion pour apporter des réponses alignées à la pensée du président Macky telle que matérialisée à travers le plan Sénégal émergent (PSE).
Des sessions par visioconférences ainsi que d’autres activités parallèles de formation et de concertation seront organisées à cet effet par l’Ecole du parti, a-t-il annoncé.
Prononçant le discours d’ouverture de la cérémonie, le ministre de la femme, de la famille du genre et de la protection des enfants, Ndèye Salimata Diop Dieng, a pour sa part salué la volonté du chef de l’État de ’’mettre la femme au cœur de son engagement’’.
’’Cet anniversaire est certes une fête, mais nous avons privilégié de fêter avec sobriété cet anniversaire, car, nos regards sont tournés vers l’avenir, dans l’optique de construire notre pays dans la voie de l’émergence’’, a-t-elle fait savoir.
LENS PLEURE SON PAPA
En s’éteignant à seulement 42 ans des suites de la maladie de Charcot, Papa Bouba Diop n’a pas seulement laissé orpheline la nation sénégalaise. Dans le bassin minier aussi, le Lion est mort dimanche soir
En s’éteignant à seulement 42 ans des suites de la maladie de Charcot, Papa Bouba Diop n’a pas seulement laissé orpheline la nation sénégalaise. Le colosse taillé dans l’ébène a aussi laissé sa trace dans l’Artois, où, l’espace de deux saisons et demie (2002-2004), cette « force de la nature » , dixit Jean-Guy Wallemme, avait su conquérir le cœur de Bollaert. Dans le bassin minier aussi, le Lion est mort dimanche soir.
Il est de ces dimanches d’automne dont on n’oubliera jamais la teneur. Celui d’hier en fait partie. Gervais Martel, l’ancien boss du Racing Club de Lens (1988-2012, 2013-2017), était sur la route du retour de Bollaert, après le logique revers des hommes de Franck Haise devant Angers (1-3), lorsque le téléphone a sonné. « C’était Éric Sikora, livre l’ex-président. Il m’annonçait la triste nouvelle de la disparition de Papa. J’ai été fauché... » Gervais n’avait plus de nouvelles de Bouba Diop depuis quatre-cinq mois et pensait « qu’il était en train de s’en sortir, mais avec cette maladie, on connaissait la seule fin possible... » Apprendre la disparition de « ce roc impressionnant » aux dires de Joël Muller qui l’a fait venir du Grasshopper Zurich à l’hiver 2002, en a ébranlé plus d’un dans l’Artois. À commencer par Jean-Guy Wallemme, passé lui aussi avec Bouba Diop de l’espoir aux larmes un soir de mai 2002 à Gerland, lorsque le titre leur fila sous le nez : « C’était une force de la nature et malgré tout, ça ne protège de rien. Je suis sous le choc. » Immédiatement à l’esprit de Wallemme, un flash, « celui de Marc-Vivien Foé, lui aussi un monstre de physique, d’attitude, un colosse, terrassé bien avant l’heure. Je ne dis pas que les gens les plus costauds sont les moins fragiles, mais quand on a en face de soi un garçon comme Papa Bouba Diop, le voir disparaître si jeune est un étonnement énorme. » Pour Dagui Bakari (2002-2005 au Racing) aussi, la peine est de taille : « J’ai essayé de le contacter dernièrement sans parvenir à l’avoir. On m’avait dit que c’était très difficile pour lui la gestion de cette maladie. En tant qu’Africains, nous avions forcément des attaches. Je pense à sa femme, ses enfants, ses frères et sœurs. C’est une grosse perte pour le football africain, mais pas que. »
Un voyage en Suisse, l'affaire est dans le sac
À Lens, aussi, son ombre flottera, des vestiaires de Bollaert aux pelouses d’entraînement de la Gaillette. C’est là, durant le mercato hivernal 2002, que « le grand Bouba » , comme aime à le rappeler tonton Gervais, vient poser son baluchon. Le milieu de terrain déboule de Suisse pour un peu plus de 3 millions d’euros et cinq années et demi de contrat dans la valise. Le convaincre a été une mince affaire. « Tout s’est fait en une quinzaine de jours à peine, resitue François Brisson, ancien joueur et entraîneur artésien, alors au recrutement. Jean-Luc Lamarche, directeur sportif me dit : "Viens en Suisse, j’ai quelqu’un à te montrer." » Direction Zurich, Bouba Diop est sur le pré et ne laisse pas vraiment le doute s’installer chez François Brisson. « Très rapidement, j’ai dit à Jean-Luc qu’il avait sa place à Lens. Par son physique un peu à la Foé même s’il est davantage relayeur, Papa Bouba Diop impressionnait. Il était costaud, perdait peu de ballons, venait mettre son coup de boule sur les coups de pied arrêtés. Ce n’était pas un animateur de jeu, mais il avait une solidité régulière. Ce n’est pas le mec qui va tout te faire sur un terrain, mais il a son importance dans un collectif » . La seule crainte de François Brisson, Bouba Diop évolue en numéro 10, « mais ça n’en était pas un. Il n’était pas capable de te faire une transversale à la Steven Gerrard et ne va pas vite vers l’avant. »
JOB BEN SALOMON, MARABOUT NÉGRIER ET ESCLAVE AFFRANCHI (6/6)
EXCLUSIF SENEPLUS - Bien que la Sénégambie fût, de l'avis général des historiens, une des régions les moins productrices d'esclaves, ses structures économiques, sociales et politiques ont été profondément marquées par la traite
Au contraire de l'aristocratie et de la paysannerie, les marchands se trouvent enrichis par la traite. Les sources du XVIIIe siècle nous montrent généralement ces négociants comme des « gens riches, policés et de bon commerce ». A la faveur de l'essor de la traite atlantique, ils ont établi tout le long des routes caravanières, du Niger à l'Atlantique, de gros bourgs commerciaux. Ces bourgs jouent le double rôle de marché et de sanctuaire religieux. Ils sont, la plupart du temps, entourés de villages et de hameaux où une population essentiellement composée de captifs domestiques se livre à la culture et à l'artisanat. En vertu de la puissance économique qu'ils détiennent et du pouvoir surnaturel que leur connaissance du coran et des textes sacrés de l'islam est censé leur conférer, les marchands musulmans font l'objet d'une vénération très grande de la part du peuple. L'insécurité qui règne dans la région à ce moment joue en faveur de l'influence grandissante des communautés musulmanes dans la société sénégambienne. Les musulmans jouissent de l'immunité : en cas de conflits armés, leurs demeures sont inviolables ; si l'un d'entre eux vient à être prisonnier ils paient une rançon pour obtenir sa libération. L'islam leur sert dans la pratique de ciment idéologique pour affirmer leurs intérêts de classe. Tous ceux qui se mettent sous leur protection bénéficient de cette immunité. Ainsi, de proche en proche, réunissent-ils à grossir au détriment de l'aristocratie leur clientèle recrutée parmi les paysans. Des villes musulmanes comme Koki dans le kayor, Setuko sur la Gambie, et Gunjuru et Daramanne sur le Haut Sénégal voient ainsi leur population croître prodigieusement au cours de cette période. Contrairement à la thèse souvent reprise de Spencer Trimingham40, qui voit un recul de l'islam en Afrique de l'Ouest entre le XVIe et le XVIIIe siècle, la Sénégambie de cette période témoigne de progrès rapides dans la diffusion de cette religion.
Les musulmans avaient acquis tant de puissance qu'ils étaient à même de revendiquer la direction politique de plusieurs Etats de la région :
« Ils étoient assez forts avec leurs voisins, leurs alliez, non seulement pour résister à toute la puissance de l'Etat ; mais encore, parce qu'on étoit assuré dans tout le pays que ceux qui ozeraient leur faire le moindre déplaisir devoient s'attendre à mourir sans rémission dans trois jours »41.
C'est cette politique qui leur permettra de réaliser comme au Bundu vers 1690, et plus tard au Fuuta Toro (1775), une révolution politique qui, comme d'autres tentatives plus ou moins réussies au Kayor, Waalo, etc..., a pris la forme de véritables révoltes bourgeoises. Bien que les mots d'ordre de ses révoltes aient varié selon les époques et les localités, ils n'en ont pas moins revêtu dans l'ensemble un contenu identique, à savoir la condamnation de l'attitude de l'aristocratie traditionnelle, notamment les exactions de cette dernière et sa collusion avec les négriers. C'est cette politique des marabouts qui leur a valu l'alliance des paysans ; alliance qui se renforcera davantage au XIXe siècle avec les guerres de conquête coloniales et dont nous voyons encore les traces si vivaces dans la société sénégambienne d'aujourd'hui. En utilisant Yuba Jallo, musulman fervent, comme instrument de sa politique d'expansion, la Royal African Company optait pour les forces montantes de la société sénégambienne. Cependant, on a vu que ce choix n'avait abouti qu'à de maigres résultats pour la période considérée. En dépit de cet échec relatif des Anglais, la traite dans ensemble n'en a pas moins contribué de façon décisive au déclin des formations sociales sénégambiennes. Bien que la Sénégambie fût, de l'avis général des historiens, une des régions les moins productrice d'esclaves, ses structures économiques, sociales et politiques ont été profondément marquées par la traite.
Contrairement aux assertions de P.D. Curtin42 l'empreinte de ce phénomène est très durable puisque nous en voyons les stigmates encore aujourd'hui dans notre société contemporaine. D'où le grave danger de vouloir analyser l'esclavage par les données quantitatives.
L'évocation de la vie et des mésaventures de Yuba Suleyman Jallo, et surtout l'ambiance sociale qui en constitue la toile de fond apparaît donc digne d'intérêt. Pour le lecteur non averti, l'attitude de collaboration de Yuba avec les négriers pourrait surprendre de prime abord. En présentant une analyse des conflits sociaux qui régnaient en Sénégambie dans la première moitié du XVIIe siècle, on a voulu montrer que le comportement de l'homme était conforme à celui d'un groupe social plus large : l'aristocratie, traditionnelle. Celle-ci constituait la classe dirigeante qui, pour ses propres intérêts, se rangeait du côté des négriers. Ce comportement était la traduction sur le plan politique et social de la dépendance de l'économie sénégambienne vis-à-vis du marché occidental en cette phrase de capitalisme mercantile, qui contribuait à dissoudre par la violence les rapports sociaux traditionnels, conformément au modèle général des relations entre le capitalisme et les formations sociales précapitalistes :
«... Pour les dépouiller de leurs moyens de production, leur prendre les forces de travail et les transformer en clients de ses marchandises, il [le capitalisme] travaille avec acharnement à les détruire en tant que structures sociales autonomes. Cette méthode est du point de vue du capital la plus rationnelle, parce qu'elle est fois la plus rapide et la plus profitable. »43
40. S Trimingham. A History of Islam in West Africa. Londres, Oxford University Presse, ed. 1970, pp 141 – 154.
41. J.B. Labat. Op. cit. vol.2.p. 335
42. P. D. Curtin est d’ailleurs conscient de la faiblesse de sa thèse sur ce point, puisqu’en conclusion de son ouvrage The Atlantic slave trade, 1969.p.273, il écrit : « even if the dimensions of the slave outlined here were as accurate as limited sources will ever aloow and they are not, still other dimensons of far greater significance for African and atlantic history remain to the explored. »
43. R. Luxembourg. L’accumulation du capital, Paris, Maspero, 1969. Vol 2 p 43.
Texte préalablement paru en 1978 dans la collection "Les Africains" de Jeune Afrique qui a autorisé SenePlus à le republier.
Avec la récente implantation d’usines de farine de poisson au Sénégal, en plus des fabriques exportatrices de cette ressource, le petit pélagique se fait de plus en plus rare
Avec la récente implantation d’usines de farine de poisson au Sénégal, en plus des fabriques exportatrices de cette ressource, le petit pélagique se fait de plus en plus rare. Les femmes revendeuses et les transformatrices ont toutes les difficultés à mettre la main sur cette ressource, principal apport en protéine animale des Sénégalais. Faisant face à la concurrence de ces industries, l’activité de transformation risque de disparaitre sans compter toutes les difficultés pour les ménages modestes de s’approvisionner en poisson.
En cette après-midi du samedi 14 novembre, le quai de pêche de Hann fourmille. L’ambiance est très animée. Tous les acteurs attendent, sur le rivage, le débarquement des premières pirogues qui étaient en mer. Malgré l’odeur nauséabonde née du mélange des résidus de poisson avec des algues, des égouts et des rejets industriels sur la baie, les habitués des lieux vaquent tranquillement à leurs occupations. Les mareyeurs jouent à la belote en attendant l’arrivée des pirogues traditionnelles. Plusieurs camions stationnés attendent d’être chargés pour prendre la direction des usines de transformation des produits halieutiques pour l’exportation etcelles de fabrication de farine de poisson. Depuis quelques années, ces fabriques de farine de poisson ont commencé à s’implanter au Sénégal. Ces dernières utilisent les petits pélagiques comme matière première pour fabriquer cette farine qui sert d’aliment de base aux poissons élevésdans le cadre de l’aquaculture, activité de plus en plus développée dans des pays comme la Chine mais aussi en Europe et même au Sénégal.Le poisson du richedévore ainsi celui du pauvre. Les petits pélagiques sont la principale source de protéinedes populations en Afrique de l’Ouest, spécialement au Sénégal. Selon une étude du Partenariat régional pour la conservation de la zone côtière et marine en Afrique de l’Ouest (Prcm), chaque Sénégalais consomme, en moyenne,20 kilogrammes de petitspélagiquespar an.
Détournement de la consommation humaine vers la consommation animale
Du fait de la présence deces usines de fabrication de farine de poisson et des quantités dont elles ont besoin pour fonctionner,beaucoup depêcheurs et mareyeurs ont choisi de travailler avec ces industriels pour y écouler les prises de petitspélagiques. Le Dr Moustapha Kébé, spécialiste en économie rurale et expert du Prcm,révèle qu’avec ces industries la ressource est menacée, car il faut cinq tonnes de petits pélagiques pour produire un kilogramme de farine de poisson. Cela se fait au détriment des femmes transformatrices de poisson ou tout simplement de l’approvisionnement des ménages. Dieynaba Sarr est appelée,au quai de pêche de Hann, mini-mareyeuse par ses collègues. Chaque jour, elle quitte son quartier de Castorset vient attendre le débarquement des pirogues pour avoir du poisson à revendre au marché. Cependant, de plus en plus, elle a du mal à mettre la main sur les petits pélagiques. Elle renseigne que les pêcheurs et grands mareyeurs préfèrent vendre l’essentiel des prises aux industriels et maintenant aux usines de fabricationde farine de poisson. Assise sur un pieuen ciment sous le hangar du quai, sa bassine entre les pieds, cette femme âgée d’une quarantaine d’année espèredésespérément avoir quelques poissons à revendre.«Les mareyeurs qui ont plus de moyens appellent les pêcheurs en mer au téléphone. Avant que ces derniers ne débarquent au quai, ils s’engagent à tout acheter pour revendre cela aux usines de poisson. Maintenant, il y a deux menaces contre nous : les usines d’exportation de poisson et les fabricants de farine de poisson», lanceDieynaba Sarr, mélancolique. Cette dernière qui a fait « plus de 10 ans dans le secteur entre Dakar, Mbour et Joal»martèle que la situation n’a jamais été aussi compliquée pour disposer du petit pélagique. Elle fait savoir qu’actuellement la caisse de petitspélagiquesest échangée jusqu’à 50 000 FCfa entre Hann et le marché au poisson de Pikine ; ce qui exclut les femmes revendeuses et transformatrices. De ce fait, beaucoup de ménages à revenus modestes ont du mal à voir le poisson. Même le petit pélagique qui était plus accessible est presque hors de portée.
Risques sur la transformation de poisson
Non loin du quai de débarquement de Hann, on rencontreMariama Ngom, revendeuse de poisson mais aussi transformatrice, qui s’active dans la préparation du poisson fumé.À notre passage à son lieu de vente, ce 18 novembre, elle nous assure que ces temps-ci, ellene trouve que quelques poissons à revendre pour avoir juste la dépense quotidienne. Stoïque, la dame, en sueur,les habits imbibéspar le liquide suintant de sa bassine coincée entre son bras droit et ses reins,avoue son impuissance à concurrencer ces acteurs qui ont « plus de moyens ». «Cela se comprend. Nous n’achetons qu’une caisse ou, des fois, des bassines pour revendre ou transformer, alors que les usines commandent en tonnes. Les mareyeurs ont ainsi intérêt à traiter avec eux», concède-t-elle d’un ton triste. Mariama Ngomconstate que beaucoup de femmes transformatricesqui n’ont plus accès à la ressourceont abandonné cette activité. Évoluant dans le secteur depuis 2003, elle continue, pour sa part, de s’accrocher à son gagne-pain, refusant de jeter l’éponge.
Même si elle n’écarte pas la concurrence qu’imposent ces puissants acteurs, Mariama est d’avis que la principale cause des difficultés que rencontrent les femmes transformatrices réside dans la rareté du poisson. D’après elle, si le poisson n’était pas rare, elle et ses collègues pourraient tirer leur épingle du jeuet vendre aux ménages mais aussi avoir de quoi transformer.Dans son récit, Mariama Ngom se remémore,par intermittence etavec allégresse,de la bonne ambiance sur les quais de débarquement de poisson de Dakar il y a quelques années. À cette époque,à la fois si récente et si lointaine, «avec300 FCfa, on avait un sceau rempli de petits pélagiques qui étaient mêmeparfois donnés gratuitement par les pêcheurs». Hélée par une de ses collègues qui se plaignait aussi de la rareté du poissondepuis des mois, Mariama Ngom revient à la dure réalité du présent. Cette rareté de la ressource,accentuée par la concurrence des fabriques de farinede poisson,fait que ce produit est devenu un luxe dans les marchés pour les ménages à revenus faibles, ajoute la vendeuse.
Les acteurs du secteur ont fait le même constat. Babacar Sarr, secrétaire général de la Fédération nationale des mareyeurs du Sénégal, confie que 80% des débarquements des pêcheurs artisanaux sont constitués de petits pélagiques.Il a toutefois remarqué pour le regretter la rareté de la ressource causée, entre autres, par une surexploitation, l’exportation de cette espèce mais aussi par la concurrence des usines de production de farine de poisson qui accaparent toutes les prises au détriment des populations.
par Armelle Mabon
LES FOSSOYEURS DE LA VÉRITÉ
Le règne des mensonges, des tromperies et de l'indécence n'est pas révolu à propos du massacre de Thiaroye. Une commission d'enquête parlementaire française doit être saisie pour décrypter et stopper un tel acharnement à s'éloigner de la justice
Le Blog de Mediapart |
Armelle Mabon |
Publication 01/12/2020
La commission de la Défense nationale et des forces armées a, par un vote le 21 octobre 2020, approuvé la publication du rapport du député Philippe Michel-Kleisbauer à l’issue de sa présentation orale.
Ainsi Thiaroye fut nommé massacre par nos représentants élus. C'est assurément un grand pas. Dans mon précédent billet, je n'ai pas caché la désagréable suprise en découvrant la présentation de ce fait historique dans ce rapport. Désormais je suis sidérée depuis que j'ai compris que le député, après avoir auditionné trois historiens, avait fait un plagiat de wikipédia qui, pour Thiaroye, est un ramassis de contre-vérités, d'approximations et d'erreurs de sources. Le député parle pourtant de deux années de travail sur Thiaroye. L'Assemblée nationale a publié ce rapport désormais non modifiable, avec la partie sur Thiaroye plagiée à 53% selon le logicel anti-plagiat de mon université. Un étudiant serait lourdement sanctionné. Le code de déontologie des députés devrait insérer un chapitre sur les règles éthiques à respecter vis à vis des personnes auditionnées et dans l'écriture des rapports.
Autre surprise, la révélation de la présence de trois fosses communes sous les tombes anonymes du cimetière militaire redevenu français depuis 2014. La souveraineté de la France serait alors pleine et entière pour décider de l'exhumation des corps alors que le député prétend que les sépultures relèvent de la seule souveraineté de l'Etat sénégalais.
Le retournement du ministère des armées sur les fosses communes
Jean-Pierre Vernant : Le vrai courage, c’est au-dedans de soi, de ne pas céder, ne pas plier, ne pas renoncer. Être le grain de sable que les plus lourds engins écrasant tout sur leur passage ne réussissent pas à briser.
Pour pouvoir annoncer une telle information inédite et inconnue des historiens, il faut une archive qui prouve l'existence de ces fosses communes. C'est la direction des patrimoines, de la mémoire et des archives (DPMA) du ministère des armées qui a informé le député mais, apparemment, sans le moindre document à l'appui. En tant qu'historienne, j'ai demandé à la ministre des armées de pouvoir consulter cette archive ainsi qu'à la DPMA qui ne m'a pas répondu. La DPMA a cependant apporté un éclairage suite à la démarche d'un journaliste. Elle rejette la responsabilité, dans un premier temps, sur le député qui aurait dû employer le conditionnel dans son rapport.
Le chiffre "trois" est suffisamment explicite pour estimer qu'un document en fait état. Dans un deuxième temps, la DPMA écrit : "Ce sont des « informations » recueillies localement lorsque le ministère des armées a pris en charge l’entretien de ce cimetière. Elles ne sont fondées sur aucune source fiable.", rejetant la responsabilité sur les autorités sénégalaises. Dans le cadre d'un rapport publié à l'Assemblée nationale revêtant un caractère des plus officiel, le ministère des armées apporte une indication sur l'emplacement des fosses communes d'après une source non fiable. Je tiens à préciser que le ministre des forces armées sénégalaises, déjà en poste en 2014, a mentionné dans un courrier du 26 décembre 2017 au président de l'Assemblée nationale du Sénégal, qu'aucune fosse n'a été trouvée, ni située. Ce ministre sénégalais ne prétend pas pour autant que des fouilles ne sont pas envisageables. En effet, il suggère que ce travail nécessitant des moyens technologiques modernes importants pourrait se faire en lien avec le département Histoire de l'Université Cheikh Anta Diop (UCAD) et des partenaires au développement du gouvernement de la République du Sénégal.
Un des partenaires ne serait-il pas la France ? Mais c'est sans compter sur la velléité de la DPMA de couper court à toute idée d'exhumation des corps. Elle prétend que des fouilles seraient difficilement envisageables, les règles de l’islam prohibant les exhumations.
Non, l'Islam ne prohibe pas les exhumations dans des cas particuliers comme pour faire valoir des droits ou lorsque des personnes ont été enterrées sans respecter les usages ou dans un endroit indu, ce qui est le cas lorsque des êtres humains ont été jetés dans des fosses communes.
La DPMA nous fait comprendre que les fosses communes ne sont donc pas sous les tombes du cimetière militaire de Thiaroye alors qu'un rapport officiel de l'Assemblée nationale en fait désormais état. Il y a lieu de s'interroger sur son obstination à rejeter l'exhumation des corps après avoir prétendu que les fosses communes étaient sous des tombes. N'y a t-il pas obstruction à la manifestation de la vérité sur un crime commis ?
Sur ce plan de l'opération du massacre a été rajouté -vraisemblablement après le 1er décembre 1944 - un cercle en pointillés mais aussi "camp des 300" et "camp des 1000" pour faire 1300 rapatriés alors qu'ils étaient plus de 1600.
Ces pointillés correspondent à cet endroit que l'autoroute longe au niveau du péage de Thiaroye. Auparavant ce lieu était un dépôt d'ordures. Le dernier commandant des forces françaises au Sénégal a affirmé, en 2016, connaître l'endroit des fosses communes qui a été recouvert d'un dépôt d'ordures.
Une association d'aide aux jeunes de Thiaroye a obtenu l'autorisation d'occuper ce terrain à la condition de ne pas creuser, ni construire. A l'endroit de la croix rouge, j'ai vu une dalle de béton qui pourrait correspondre à une des trois fosses communes.
Il est d'usage de couvrir ainsi les fosses communes afin d'éviter que les familles ne viennent chercher les corps. Il ne s'agit pas de réservoir d'eau construit par les Américains, ni des vestiges d'une baraque du camp militaire comme cela a pu être dit, toujours pour éviter la confrontation avec la cruelle réalité. C'est bien à cet endroit que les efforts communs de la France et du Sénégal doivent se concentrer pour chercher les corps et les compter avant de leur offrir une sépulture perpétuelle au cimetière militaire. Les tombes sont en nombre suffisant et sans doute vides. Dans la lettre du ministre des forces armées du Sénégal, c'est un appel à l'aide qu'il faut entendre pour exhumer les corps des fosses communes. Le terrain est devenu sénégalais mais qui a commis le crime au sein d'un camp militaire français alors que le Sénégal était une colonie française et qui a travesti durant toutes ces années la réalité des faits ?
De la nécessité d'une commission d'enquête parlementaire
Jean Jaures : Le courage c'est de chercher la vérité et de la dire. Ce n'est pas de subir la loi du mensonge triomphant
L'endroit des sépultures de ceux qui ont été exécutés pour avoir réclamé leur solde de captivité a connu plusieurs versions depuis ce funeste 1er décembre 1944. Ce serait faire injure à l'Armée française que de prétendre son amnésie quant à l'endroit de l'inhumation des hommes qu'elle a tués. Le 2 novembre 2020, devant la ministre des armées, le terme de "massacre de Thiaroye" a résonné dans l'hémicycle de l'Assemblée nationale. Désormais les députés doivent s'interroger, questionner et enquêter sur la prégnance d'une rébellion armée et d'une mutinerie jusqu'à récemment. Comment expliquer qu'en 2020, la DPMA fasse un volte-face après avoir informé un député de l'emplacement des fosses communes ? Que s'est-il passé à Dakar lors de la mission de la DPMA en 2010 avant la dissolution des forces françaises au Sénégal alors qu'il a été question des archives de Thiaroye ? Comment expliquer qu'un directeur de Cabinet, directeur de la DPMA en 2010, puisse mentionner, en 2019, que M'Bap Senghor n'était pas déserteur alors que le directeur du service historique de la Défense (SHD) a indiqué qu'il ne possédait pas d'archives permettant de modifier l'état signalétique et des services ?
Comment expliquer que l'ONACVG produise une archive non classée au tribunal administratif alors qu'elle aurait dû se trouver dans le dossier personnel de M'Bap Senghor ? Comment expliquer aussi que le président Hollande ait pu déclarer solennellement le 30 novembre 2014 devant les tombes du cimetière militaire de Thiaroye : « Aujourd’hui les interrogations demeurent : celles des historiens, celles des familles, celles finalement de tous ceux qui veulent comprendre. D’abord sur le nombre exact de victimes, mais aussi sur l’endroit où ils furent inhumés qui reste encore mystérieux » ? En 2014, l'endroit est inconnu mais en 2020, cet emplacement mystérieux est enfin révélé mais avec un retournement prévisible. Les contrôleurs des armées sont aussi habilités pour faire des enquêtes en cas de dysfonctionnement, conseiller la ministre, avec un souci d'intégrité.
Le manque de respect, de considération, de loyauté, de rigueur, de transparence est devenu la norme au ministère des armées sur ce fait historique y compris vis à vis des parlementaires. Quand le mensonge d'Etat a été révélé en 2014, pourquoi et par qui le ministère de la Défense s'est enferré dans la négation du massacre, dans le mensonge sur les sépultures et dans le refus de prendre en compte les réclamations des familles de victimes ? L'enquête parlementaire rejetée en 1945 est indispensable aujourd'hui pour comprendre et déterminer les responsabilités de cette machination sans fin. Combien de faux en écriture publique ont été commis depuis le 1er décembre 1944 ? L'amnistie du 16 août 1947 ne couvre pas ces graves dysfonctionnements de l'Etat. Ce massacre, de plus en plus connu y compris à l'étranger, peut devenir le symbole d'un crime raciste, impuni et commis par une France redevenue libre. Il peut aussi devenir le symbole d'une réparation même tardive avec la reconnaissance de la même valeur pour tout être humain en considérant leur engagement et leur droit, notamment à réclamer le paiement des sommes dues. La création d'une commission d'enquête permettra d'éclairer les différentes communautés concernées sur des dysfonctionnements, dans le respect de la séparation des pouvoirs et des procédures judiciaires.
Histoire et politique
Chateaubriand : Si le rôle de l'historien est beau, il est parfois dangereux
Il n'est pas nécessaire de mettre en place une commission d'historiens qui peut facilement évincer les historiens les plus compétents par leurs connaissances, nous le savons avec la commission Duclert sur le génocide du Rwanda. En décembre 2014, Julie d'Andurain suggérait une liste d'historiens pour une éventuelle commission sur Thiaroye dans un article publié sur le site de l'AHCESR. Pas un seul de ces historiens n'a fait des recherches sur Thiaroye... Il suffit d'écouter et de respecter les historiens qui émettent des hypothèses mais aussi des certitudes fondées sur leurs recherches et sur lesquelles le politique peut s'appuyer pour prendre des décisions. Il n'existe pas de polémique ou de controverse dès lors que l'histoire de Thiaroye est visitée par trois sortes d'historiens : ceux qui font de la fraude scientifique au service d'un mensonge d'Etat, ceux qui font de la compilation orientée en minimisant la responsabilité des auteurs de la tragédie et ceux qui fouillent les archives, interrogent les sources et questionnent le récit officiel. Les conclusions de ces derniers peuvent déranger quand elles fissurent un mensonge d'Etat soigneusement conservé. Un historien travaille sur des archives et leur absence est révélatrice de ce que certains veulent encore camoufler. L'entrave à la recherche par l'empêchement de consulter des archives doit cesser. C'est le courage politique qui doit désormais prévaloir. Les décisions politiques responsables s'imposent pour rompre avec ce qui s'apparente aujourd'hui à un racisme d'Etat.
Le retournement attendu
Pierre Vidal-Naquet : Si la vérité n’a aucun besoin de la police ou des tribunaux, elle a assurément besoin des historiens
En 2019, j'ai rencontré des étudiants de l'université Rennes 2 lors d'un atelier chorégraphique avec leur enseignante Hélène Paris. Leur choix s'était porté sur le massacre de Thiaroye avec l'idée de "retournement" qu'ils ont magnifié dans leur création. Ce terme m'a percutée parce que depuis 2014, je suis effectivement en attente d'un retournement afin d'effacer la négation d'un crime commis.
Mais six ans plus tard, je ne vois que des soubresauts et de légères avancées contrecarrés par des retournements vers les abîmes du mensonge. Il faut retourner cette terre de sang pour honorer la mémoire de ces hommes. L'exhumation des corps permettra à la justice d'accomplir son œuvre pour les réhabiliter. Mais la justice doit aussi accepter la confrontation avec un mensonge d'Etat et prendre en compte les travaux des historiens. La justice n'a pas vocation à dire la vérité historique mais les jugements ne doivent pas contourner des faits désormais établis qui prouvent les préjudices et une terrible injustice. Faire mon métier d'historienne, c'est de ne pas renoncer à appeler la vérité et la responsabilité.
Une pétition réclamant l'exhumation des corps
Une nouvelle pétition a été lancée à destination du président de la République Emmanuel Macron et de trois ministres concernés : Florence Parly, Jean-Yves Le Drian et Eric Dupond-Moretti.Qu'ils puissent entendre et réagir : il y a urgence pour Biram Senghor avec son combat pour la mémoire de son père M'Bap Senghor entamé depuis plus de 40 ans et désormais connu dans le monde. D'après l'acte d'accusation pour les faits de rébellion armée établi le 15 février 1945, il y a eu 35 morts du côté des "mutins". Si, avec les fouilles des fosses communes, il est dénombré plus de corps, le procès en révision pourra alors aboutir pour innocenter les 34 condamnés. C'est un fait nouveau et le Garde des Sceaux pourra, d'après la loi, saisir la commission de la Cour de Cassation.
Le révisionnisme historique explique la tuerie par une supposée mutinerie. Ils sont coupables d’avoir refusé l’arbitraire, de s’être indignés face à l’impunité, d’avoir fait valoir leur humanité. Les oublier serait accepter qu’ils meurent une seconde fois
Il est 10h du matin. L’air est suffoquant. Les éclats du soleil n’y peuvent rien. Au loin, un chant : Thiaroye.
Des centaines de corps gisent sur la terre ensanglantée de Thiaroye. 1er décembre 1944.
5h30. A l’aube, l’armée française prépare son crime. L’axe Dakar-Rufisque est bloqué ; les villageois autour ne doivent pas savoir ce qui va s’y passer.
9h20. Les forces armées réunissent, sur une esplanade, plusieurs centaines de tirailleurs. Trois automitrailleuses, un char, deux autochenilles et des voitures équipées de fusils mitrailleurs. L’armement est sophistiqué, le massacre est prémédité.
Au cours de la Seconde Guerre mondiale, ce sont des centaines de milliers de soldats africains qui combattent dans l’armée française. Enrôlés, souvent de force, ils provenaient de tous les territoires sous occupation coloniale française : du Sénégal au Cameroun, du Congo au Togo. Regroupés sous l’appellation de « tirailleurs sénégalais ».
En juin 1940, la France capitule ; jusqu’en 1944, le pays sera sous occupation allemande. Les soldats sont faits prisonniers de guerre, de l’autre côté de la frontière. Mais l’armée du 3ème Reich, animé par un violent racisme qui motive des tueries comme celle de Chasselet du 20 juin 1940, refuse que ces soldats noirs foulent leur sol. Des dizaines de milliers de tirailleurs sont capturés et détenus, non pas en Allemagne mais en France. Et à partir de 1943, par leurs propres officiers, sous les ordres du régime de Vichy.
À partir de l’automne 1944, de nombreuses opérations de rapatriement sont enclenchées. C’est le cas des 1950 tirailleurs rassemblés à Morlaix qui embarquent sur le navire Circasia en direction de Dakar. Environ 300 d’entre eux refusent ; l’intégralité de leurs dûs ne leur a pas été reversée. Le 11 novembre 1944, ils sont transférés au camp de Trévé, emprisonnés pendant deux mois.
Le 21 novembre 1944, le Circasia arrive à Dakar ; les anciens prisonniers de guerre sont immédiatement transférés au camp militaire de Thiaroye. L’objectif est le rapatriement de chacun d’entre eux, au cours de la dizaine de jours suivante, en direction de leur territoire d’origine. Mais il est hors de question de rentrer chez soi sans compensation. Toutes ces promesses auraient donc été un mensonge murement maintenu…
Le terrorisme colonial s’y interpose. Marcel Dagnan (responsable de la division Sénégal-Mauritanie) et Yves de Boisboissel (commandant militaire de l’Afrique Occidentale Française) se concertent, la veille du drame. À l’aube du 1er décembre 1944, tout est en place. Dans ses rapports, le général Dagnan évoque tantôt 35 morts, tantôt 70. Mais l’ampleur du drame est largement sous-estimée.
Plus de 1600 tirailleurs embarquent dans le Circasia ; près de 1300 en débarquent. Selon la version officielle, ce différentiel s’explique par le refus de plus de 300 tirailleurs d’embarquer à nouveau, lors de l’escale de Casablanca. Après les évènements, il est facile de tordre les chiffres. Mais le rapport Carbillet indique que plus de 508 cartouches furent tirées. Depuis 1944, ce sont des centaines de corps qui sont enfouies dans des fosses communes.
Le révisionnisme historique explique la tuerie par une supposée mutinerie. Trois mois après le drame, le 5 mars 1945, 34 rescapés du massacre sont condamnés à des peines allant jusqu’à dix années d’emprisonnement pour « rébellion armée », « refus d’obéissance » et « outrages à des supérieurs ». En 1946 et 1947, ils sont amnistiés, mais juridiquement toujours coupables. Coupables d’avoir refusé l’arbitraire, de s’être indignés face à l’impunité, d’avoir fait valoir leur humanité.
Chaque perte humaine demeure une plaie ineffaçable.
Thiaroye 44 ; Sétif 45 ; Haiphong 46 ; Madagascar 47 ; Casablanca 47 ; Bouaflé-Dimbokro-Séguéla 50… La liste continue.
Les oublier serait accepter qu’ils meurent une seconde fois.
Thiaroye 44, an indelible wound
It is 10 in the morning. The air is suffocating. The sun’s beams are helpless. Afar, a scream: Thiaroye.
Hundreds of bodies lay on Thiaroye’s bloodstained soil. December 1, 1944.
5:30. At dawn, the French army is preparing for its crime. The Dakar-Rufisque axis is blocked; the neighbouring villagers mustn’t be aware of what is to happen.
9:20. Armed forces gather, on an esplanade, several hundred ‘tirailleurs.’ Three armoured cars, one tank, two half-tracks and cars equipped with automatic rifles. The armament is sophisticated, the massacre premeditated.
During the Second World War, hundreds of thousands of African soldiers fought in the French army. Enlisted, often by force, they came from all the territories under French colonial occupation: from Senegal to Cameroon, Congo to Togo. Grouped under the label of ‘tirailleurs sénégalais.’
In June 1940, France surrendered; until 1944, the country was under German occupation. Soldiers were captured as war prisoners, on the other side of the border. But the Third Reich’s army, animated by violent racism that motivated killings like the one in Chasselet on June 20, 1940, refused to let these Black soldiers set foot on their soil. Tens of thousands of ‘tirailleurs’ were captured and detained, not in Germany but France. And from 1943, by their officers, under the orders of the Vichy Regime.
In the autumn of 1944, repatriation operations were launched. This included the 1950 ‘tirailleurs’ gathered in Morlaix, who embarked on the Circasia ship bound for Dakar. About 300 of them refused; all of their dues had not been paid to them. On November 11, 1944, they were transferred to the Trevé camp, imprisoned for two months.
On November 21, 1944, the Circasia arrived in Dakar; the former war prisoners were immediately transferred to the Thiaroye military camp. The objective was to repatriate every one of them, within the following ten days, to their territory of origin. But there was no way they would go back home without compensation. All these promises would have been a well-maintained lie, after all...
Colonial terrorism struck. Marcel Dagnan (head of the Senegal-Mauritania division) and Yves de Boisboissel (military commander of French West Africa) met on the eve of the tragedy. At dawn on December 1, 1944, everything was set.
In his reports, General Dagnan sometimes mentioned 35 dead, sometimes 70. But the scale of the tragedy was largely underestimated. Over 1,600 ‘tirailleurs’ boarded the Circasia; nearly 1,300 disembarked. According to the official version, this differential was justified by the refusal of more than 300 ‘tirailleurs’ to board the boat upon transiting through Casablanca. After the events, it is easy to twist the figures. But the Carbillet report indicates that more than 508 rounds of cartridges were fired. Since 1944, hundreds of bodies are still buried in mass graves.
Historical revisionism explains the killing by a supposed mutiny. Three months after the tragedy, on March 5, 1945, 34 survivors of the massacre were sentenced to up to ten years imprisonment for “armed rebellion,” “refusal of obedience” and “insulting superiors.” In 1946 and 1947, they were amnestied but still legally considered guilty. Guilty of refusing arbitrariness, being outraged by impunity, and asserting their humanity.
Every human loss remains an indelible wound.
Thiaroye 44. Setif 45. Haiphong 46. Madagascar 47. Casablanca 47. Bouaflé-Dimbokro-Séguéla 50. The list goes on.
Forgetting them would be accepting that they die a second time.
5.000 HECTARES RAVAGÉS DANS LA RÉGION DE TAMBACOUNDA EN 2019
La région de Tambacounda (est) a enregistré 97 cas de feux de brousse en 2019, lesquels ont ravagé 5.000 hectares, a-t-on appris mardi de l’inspecteur régional des Eaux, forêts et chasse, le commandant Mamadou Gaye.
Maka Colibantang (Tambacounda), 1er déc (APS) - La région de Tambacounda (est) a enregistré 97 cas de feux de brousse en 2019, lesquels ont ravagé 5.000 hectares, a-t-on appris mardi de l’inspecteur régional des Eaux, forêts et chasse, le commandant Mamadou Gaye.
"Cette année, au début de la campagne de lutte contre les feux de brousse, nous invitons les populations à la prévention. C’est le premier moyen de lutte car l’année dernière, 97 cas de feux de brousse ont été recensés pour une superficie de 5 000 hectares dans la région", a-t-il dit.
Le commandant Mamadou Gaye s’exprimait au cours de la cérémonie officielle de lancement de la campagne de lutte contre les feux de brousse à Maka Colibantang, en présence du gouverneur de la région, des chefs de services et représentants des populations.
Dans le cadre de la "lutte active" contre les feux de brousse, l’inspection des Eaux, forêts et chasse de Tambacounda, dotée de 6 unités d’intervention, a effectué "87 sorties et maîtrisé 45 feux avant leur propagation", a-t-il précisé.
Elle dispose également de trois camions citernes d’une capacité de 9 000 litres et de trois unités légères équipées, selon le commandant Gaye.
Il a indiqué que dans le cadre de la lutte préventive contre les feux de brousse, ses services ont retenu 107 séances d’information-éducation-communication auprès des populations.
De même, 12 comités de lutte ont été créés dont 9 comités équipés, sans compter que 109 et 41 km de pare-feux ont été réalisés ou réhabilités, ainsi que 29 744 hectares et 437 km d’axes routiers traités par les feux précoces.
Le commandant Mamadou Gaye déplore, de manière générale, la persistance des feux de brousse qui ravagent chaque année "des centaines de milliers" d’hectares, des forêts et de terre propices à l’agriculture.
Il a indiqué que pour le compte de la lutte contre ce phénomène, les Eaux et forêts et leurs partenaires octroient chaque année "un lot de petit matériel" aux populations locales organisées sous formes de comité.
A ce titre, des brouettes, truelles, sceaux et balais ont été attribuées aux communes de Niani Toucouleur Maka Colibantang, pour le compte de la nouvelle campagne de lutte contre les feux de brousse.
Par Hamidou ANNE
MARADONA, C’ETAIT PLUS QUE DU FOOTBALL
Maradona a franchi la digue symbolique qui interdit aux sportifs de haut-niveau de se mêler de politique. Ils sont peu nombreux dans le milieu à sortir du cadre confortable de l’athlète pour prendre la parole sur les questions politiques et sociétales
Fabian Casas, auteur argentin, peignait Diego Maradona comme un «personnage biblique» aux vies déroutantes. L’argentin était un anti-héros tranchant avec l’image du sportif modèle, bon client des marques qui transforment les athlètes en hommes-sandwichs faisant la propagande de la surconsommation néolibérale.
Maradona était un homme clivant, car le footballeur de génie côtoyait la personnalité bouffonne, excessive donc médiocre. Ses succès, ses addictions, ses fulgurances comme ses frasques en faisaient le sportif le plus proche du petit peuple, imparfait et spontané. Admirateur de Che Guevara, soutien du péronisme, compagnon de Fidel Castro, de Hugo Chavez et de Evo Morales, Maradona a franchi la digue symbolique qui interdit aux sportifs de haut-niveau de se mêler de politique. Au nom de sa foi catholique nourrie par les sermons populaires de la théologie de la libération, la branche latino-américaine de l’Eglise, et de ses convictions socialistes, il s’est engagé aux côtés des peuples de cette Amérique latine qui se débat toujours contre l’encombrant voisin étasunien.
C’est par le même engagement à Naples qu’il a conféré, par des victoires sportives, une dignité aux habitants du Mezzogiorno, longtemps toisés et méprisés du fait de leur retard économique sur l’Italie du Nord. Maradona n’a pas défendu que des idées heureuses. Ses épopées libyennes et dans le Caucase furent d’un ridicule consternant. Un jour, mon ami Racine Demba eut cette réflexion lumineuse à son endroit : «Maradona s’acharne depuis plus de trois décennies à vouloir passer pour un imbécile. Chez lui toutes les occasions sont bonnes pour faire étalage de sa vulgarité. Mais il ne réussit pas à nous dégoûter. On l’aime par la raison du cœur.» J’aimais le footballeur de talent, et l’homme, porteur de causes aux côtés des peuples et de leur volonté légitime de s’émanciper.
Fabian Casas considère que le football est «indéfendable intellectuellement», que «c’est un sentiment, ça ne s’explique pas, ça se porte bien à l’intérieur». C’est en cela que ce sport est politique, car il régit des passions, construit des mythes et quelque part, configure notre rapport au monde. Il est évident qu’il ne faut exiger de tous les footballeurs une conscience politique poussée. Mais c’est avec des acteurs engagés dans le milieu que ce sport dépasse un simple affrontement à 11 contre 11 sur un rectangle vert afin d’étreindre les revendications pour davantage d’égalité, de justice et de dignité. Ils sont peu nombreux dans le football moderne à sortir du cadre confortable de l’athlète pour se salir les mains et prendre la parole sur les questions politiques et sociétales. Le silence des footballeurs africains sur les graves violations des droits de l’Homme dans nos pays, comme celui des stars comme Paul Pogba sur les violences policières en France sont édifiants. Or, le football, par l’argent, l’influence et la passion qu’il génère, ne peut plus refuser d’exercer son statut de culte face au racisme, au capitalisme sauvage et aux menaces diverses.
Dans toutes les rues du monde, un futur Maradona perpétue sans le savoir un héritage, dessine un espoir et rejoint la communauté de tous ceux qui construisent collectivement un rêve par ce sport. Ces millions de gamins qui courent après un ballon, flanqués d’un numéro 10 dans le dos peuvent être sauvés de la faim et de l’analphabétisme si les voix des stars du football étaient plus audibles. C’est par des hommes et des femmes comme Socrates, Joe Diop, George Weah, Alessandro Lucarelli, Megan Rapinoe que ce sport dépasse le cadre du divertissement pour devenir un outil politique au service de ceux qui rêvent de changer le monde.
Le football est politique par sa capacité à être un embrayeur de l’orgueil des peuples. Le doublé de Maradona en 1986 face à l’Angleterre fut célébré, au-delà de son aspect sportif, comme une revanche de la raclée subie par les Argentins dans la Guerre des Malouines. Le but de Pape Bouba Diop, qui vient de nous quitter, a eu la saveur en 2002 d’une décolonisation achevée face à l’ancienne puissance coloniale.
La guerre déclenchée par le football entre Salvador et le Honduras en 1969, les rivalités Barcelone et Real Madrid et Boca Juniors et River Plate, les rencontres Etats-Unis-Iran de 1998, Suisse-Serbie de 2018 sont des symboles non exhaustifs de la portée politique que ce sport peut avoir. Le football ne peut avoir cette capacité d’hystériser les masses en contrôlant leur esprit et vouloir s’imposer une virginité politique.
«LA POLITIQUE D’EMPLOI DU GOUVERNEMENT EST UN ECHEC»
L’ancien premier ministre du Sénégal, Souleymane Ndéné Ndiaye président du conseil d'administration (Pca) de Air Sénégal Sa, a fait une sortie qui va certainement fâcher son ami Macky Sall.
L’ancien premier ministre du Sénégal, Souleymane Ndéné Ndiaye, a fait une sortie qui va certainement fâcher son ami Macky Sall. Le président du conseil d'administration (Pca) de Air Sénégal Sa a affirmé hier que la politique de l’emploi du gouvernement est un échec.
Accusé de faire du « deux poids, deux mesures » dans la gestion du pays et dans la façon dont il traite ses alliés par rapport à leur opinion, Macky Sall va-t-il récidiver, suite à la sortie hier de son ami et Président du Conseil d'administration (PCA) d'Air Sénégal Sa, Souleymane Ndéné Ndiaye qui a voué aux gémonies sa politique de l’emploi ?
Invité de l’émission « Toc Toc Sénégal » de la chaîne ITV, l’ancien Premier ministre du Sénégal dit être en phase avec ceux qui pensent qu’une mauvaise politique de l’emploi de la part de l’Etat a un rapport avec le phénomène de l’émigration clandestine. Très virulent, il n’y est pas allé avec le dos de la cuillère. Le leader de l`Union nationale pour le peuple (UNP) a déclaré ceci : « La politique de l’emploi du gouvernement a complètement échoué. Les structures mises en place n’ont donné aucun résultat. Pourtant, celles-ci pouvaient absorber la masse de jeunes qui vivent dans le désarroi et qui, pour leur désir de réussir dans la vie, prennent le désert ou des bateaux pour chercher des lendemains meilleurs dans d’autres pays».
Pour se justifier, le voisin de chambre de Macky Sall à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar (UCAD) prend exemple sur le Programme des Domaines Agricoles Communautaires (PRODAC). Selon lui, si ce programme était bien réalisé, cela permettrait d’absorber la masse de chômeurs et aussi assurer à terme l’autosuffisance alimentaire pour notre pays.
L’étudiant qui avait trahi la « bande à Sandrine » pense que le siège du PRODAC ne devait pas être installé à Dakar, mais l’Etat devait mettre en place des antennes au niveau des campagnes et donner les moyens qu’il faut aux hommes qui les pilotent. « On n’a pas mis les moyens qu’il faut dans le PRODAC. La politique d’emploi qu’on devait mener pour les jeunes pour qu’ils puissent avoir du travail n’a pas été faite. C’est ce qui explique qu’ils tentent l’aventure », a-t-il martelé.