La SDE nous fait croire une fois encore qu’un accident survenu sur une de ses conduites est la cause de l’assèchement des robinets à Dakar et d’autres villes. La fréquence de tels accidents pose la question de savoir si les sociétés chargées de l’hydraulique détiennent réellement les plans du tracé de leurs canalisations. Sinon, qui les détient et pourquoi ?
Cet arrêt de la distribution d’eau vient généraliser une pénurie sévère dont Dalifort et d’autres quartiers dakarois souffrent déjà depuis plusieurs jours. L’origine du manque d’eau n’est donc pas strictement accidentelle. Le déficit structurel de la production d’eau est toujours aussi profond qu’avant. Les investissements requis ne sont pas effectués ou n’ont pas l’impact attendu. Ce qui n’est guère étonnant dans un contexte de privatisation du secteur, où la grande question d’actualité est de savoir qui, de « M. Bouygues » ou de « M. Suez », va empocher les milliards que les Sénégalais paient annuellement pour pouvoir consommer leur propre eau.
Est-ce la guerre entre ces deux multimilliardaires français qui provoque aujourd’hui des dommages collatéraux accidentels ? On ne peut que spéculer en l’absence d’une enquête sérieuse sur la question. Idem sur la qualité de l’eau servie, qui est soupçonnée de contribuer à l’extension de certaines maladies endémiques.
Le manque d’eau affecte aussi gravement les populations rurales. Nous avons déjà dénoncé ici les dangers de la privatisation de l’hydraulique rurale réalisée dans le cadre du Pepam. Désormais, chaque jour apporte son lot d’informations consternantes sur des communautés villageoises entières privées d’eau du fait de la défaillance technique des opérateurs ou de factures impayées car anormalement chères.
La fin de la soif n’est pas pour aujourd’hui dans le milieu rural, en dépit du tapage électoraliste orchestré autour du PUDC et du Puma. On révèle à ce propos que nombre des forages précipitamment réalisés et bruyamment inaugurés ont déçu les bénéficiaires, car ils fournissent peu d’eau ou une eau salée. D’autres demeurent non fonctionnels faute de châteaux d’eau.
Un minimum de souci pour les conditions de vie des populations et pour la sécurité nationale devrait inciter à mettre à profit la transition actuelle entre un contrat expiré et un autre non encore signé, pour explorer des alternatives à la privatisation tous azimuts. Paradoxalement, l’expérience de la privatisation de l’eau, comme celle de l’électricité, a fini de démentir le prétexte d’une incapacité nationale à gérer convenablement ces secteurs stratégiques, qui avait été brandi en son temps par la Banque mondiale pour les justifier. Les partenaires stratégiques apportent certainement un plus mais il peut être optimisé dans le cadre d’une gestion publique faisant appel à la concurrence internationale.
Pourquoi devrions-nous rester éternellement les bannis de la nationalisation, qui est partout dans le monde un instrument de gestion ordinaire ? Ou plutôt jusqu’à quand les intérêts privés étrangers vont-ils prévaloir sur le droit des Sénégalais à une eau saine et potable à un prix raisonnable ?
Mamadou Bamba Ndiaye est ancien député, Secrétaire général du Mps/Selal
LE 4 AVRIL PLACÉ SOUS LE SIGNE DE L'INSTRUCTION CIVIQUE
Le Chef de l’Etat en appelle à la mobilisation de tous les segments du corps social autour du culte du travail, de l’excellence et de l’exemplarité - COMMUNIQUÉ DU CONSEIL DES MINISTRES
SenePlus publie ci-dessous, le communiqué du Conseil des ministres du 27 mars 2019.
"Le Président Macky SALL a réuni le Conseil des ministres, mercredi 27 mars 2019 à 10 heures au Palais de la République.
A l’entame de sa communication et en cette dernière séance du Conseil des ministres du septennat 2012 – 2019, le Chef de l’Etat remercie et félicite le Premier Ministre et l’ensemble des ministres pour leur engagement républicain et le travail remarquable accompli durant ces sept (7) années.
Ainsi, le Président de la République rappelle que c’est grâce à l’action quotidienne des différents gouvernements et des ministres et de l’ensemble de leurs collaborateurs que les sénégalais ont sanctionné positivement son bilan et lui ont renouvelé leur confiance.
A cet égard, le Chef de l’Etat magnifie particulièrement l’engagement et l’abnégation de ce dernier Gouvernement qui a parachevé ses ambitions du premier mandat, avec à sa tête le Premier Ministre Mahammed Boun Abdallah DIONNE.
Poursuivant sa communication autour la prestation de serment prévue le 02 avril 2019 au Centre des Expositions de Diamniadio, le Président de la République indique que l’audience solennelle se déroulera en présence, notamment, de chefs d’Etat et de gouvernement, ainsi que de nombreuses délégations et personnalités étrangères qui ont déjà confirmé leur participation.
A cet égard, le Chef de l’Etat invite le Gouvernement à prendre toutes les dispositions pratiques adéquates en vue du bon déroulement de la cérémonie d’investiture et saisit cette occasion, pour réitérer ses remerciements au Peuple sénégalais pour sa confiance suprême renouvelée en son endroit.
Par ailleurs, abordant la célébration du 59ème anniversaire de l’accession de notre pays à la souveraineté internationale, le 04 avril 2019, placée sous le thème : « Forces de Défense et de Sécurité : un exemple dans l’éducation à la citoyenneté et à l’unité nationale » le Président de la République se félicite du choix du thème au regard de l’impératif de renforcer l’instruction civique, la discipline nationale, et, surtout, notre engagement patriotique quotidien au service de la consolidation de la République et de la Nation.
A ce titre, le Chef de l’Etat en appelle à la mobilisation de tous les segments du corps social autour du culte du travail, de l’excellence et de l’exemplarité.
En outre, le Président de la République demande au Gouvernement de prendre toutes les mesures idoines, en rapport avec les autorités administratives déconcentrées, les collectivités territoriales, et les forces de défense et de sécurité, pour une parfaite organisation des prises d’armes et des défilés civils et militaires sur l’ensemble du territoire national.
Dans ce cadre, le Chef de l’Etat informe qu’une prise d’armes suivie d’un Grand défilé sera organisée sous sa présidence, sur le Boulevard du Général De GAULLE à Dakar.
Enfin, abordant la bonne organisation de la 139ème édition de l’Appel de Seydina Limamou Laye et de la 78ème édition du DAAKA de Médina Gounass, le Président de la République demande au Gouvernement de mettre en œuvre toutes les mesures d’ordre sécuritaire, sanitaire et logistique, notamment hydraulique, nécessaires au bon déroulement de ces importantes manifestations religieuses respectivement les 5 et 6 avril 2019 à Yoff et du 06 avril au 15 avril 2019 sur le site habituel réhabilité et sécurisé de la retraite spirituelle de Médina Gounass.
En outre, le Président de la République demande au Gouvernement de veiller à l’encadrement et au soutien à l’organisation des célébrations du Magal de Porokhane et du Kazzu Rajab.
Le Chef de l’Etat a terminé sa communication sur le suivi des partenariats et son agenda.
Le Premier ministre a adressé au Chef de l’Etat ses sincères remerciements et ceux de tous les membres du Gouvernent pour la confiance placée en eux et l’honneur qu’il leur a fait de les avoir appelés à ses côtés pour servir la nation.
Il a ensuite présenté au membres du Conseil, le rapport général d’activités du Gouvernement 2012 – 2019, marqué par différentes réalisations, en mettant l’accent sur celles relatives entre autres, à l’inclusion sociale, à l’équité territoriale, aux performances économiques, au développement de l’agriculture, au rattrapage infrastructurel, au renouveau des transports de masse, à la hausse des investissements et la progression constante du budget national, à la consolidation de l’Etat de droit, au développement des savoirs, à l’autonomisation des jeunes et des femmes. Il a enfin rendu compte de la coordination des activités gouvernementales.
Le ministre des Affaires étrangères et des Sénégalais de l’Extérieur a fait le point de la situation sous régionale, africaine et internationale.
Le ministre de l’Economie, des Finances et du Plan a fait le point de la conjoncture économique nationale et internationale.
Le ministre de l’Agriculture et de l’Equipement rural a rendu compte du suivi de la campagne de commercialisation arachidière, de la préparation de la prochaine campagne agricole en mettant l’accent sur les résultats définitifs de la campagne en cours, qui s’annoncent encore une comme des performances record.
Au titre des textes législatifs et règlementaires, le Conseil a examiné et adopté :
-le projet de décret approuvant et rendant exécutoire le Plan Directeur d’Urbanisme de Dakar et ses environs horizon 2035."
REMOBILISER LES DAKAROIS POUR UN MEILLEUR SÉNÉGAL
Le Bureau Fédéral invite l’ensemble des militants et sympathisants du Parti résidant à Dakar à se joindre à son action pour faire du parti, l’une des plus grandes forces politiques dans le Département - DÉCLARATION DE LA LD-DEBOUT
SenePlus publie ci-dessous, la déclaration de la Fédération départementale de Dakar de la LD-Debout, datée du 26 mars 2019, relative au renforcement de ses bases dans la capitale en perspective des élections locales.
« Le Bureau de la Fédération LD-Debout de Dakar s’est réuni en session extraordinaire le 22 mars 2019 à la Permanence nationale du Parti. Les responsables de Dakar ont procédé à l’évaluation de la participation de la Fédération à l’élection présidentielle du 24 février 2019, suivie d’échanges sur les perspectives.
Le Bureau Fédéral s’est félicité de la participation active des militants du Parti du Département de Dakar à la campagne électorale, à travers en particulier l’initiative « Dakar Debout contre Macky » qui a enregistré d’importantes manifestations avec la mobilisation de centaines de Dakarois dans les communes qui ont été visitées.
Analysant les résultats, le Bureau Fédéral conforte les constats effectués par la Direction du Parti et relatifs aux multiples manipulations du processus électoral par le Président Macky Sall et son système, pour asseoir une réélection ne reflétant pas les apirations du peuple sénégalais.
Concernant les pespectives, le Bureau fédéral fait sien l’appel de la Direction du Parti pour la remobilisation et la réorganisation des forces progressistes et démocratiques en vue de la réalisation des réformes profondes de notre système politique et pour l’avènement d’une véritable alternative de progrès. Il s’agira, en ce qui le concerne, de remobiliser les Dakarois pour un meilleur Sénégal. Afin d’apporter sa pleine contribution à cette entreprise, le Bureau Fédéral a décidé d’établir un plan d’action basé sur des visites aux militants et sympathisants, un programme de causeries et d’ateliers de formation politique au profit des jeunes militants, et le parachèvement de l’installation des bureaux des sections communales.
Ainsi, dans le sillage de la préparation des prochaines élections locales, le Bureau Fédéral invite l’ensemble des militants et sympathisants du Parti résidant dans le Département de Dakar à se joindre à son action pour faire de LD Debout l’une des plus grandes forces politiques dans le Département. »
PAR L'ÉDITORIALISTE DE SENEPLUS, MODY NIANG
DAKAR, "CAPITALE DE L'ÉMERGENCE", VILLE DÉSORDONNÉE ET BRUYANTE
Tous les jours, à l’occasion des baptêmes, des mariages, des décès, des tours de famille, des gamous-meetings, etc., des tentes poussent comme des champignons, souvent dans les rues les plus passantes et sans autorisation
Dans ma précédente contribution, j’annonçais que la suivante, donc celle-ci, serait consacrée à deux autres maux que nous traînons depuis de longues années : l’incivisme et l’indiscipline. Je commencerai par préciser que l’expression ‘’Dakar, capitale de l’émergence’’ n’est pas de moi. Je l’ai empruntée à une affiche géante de la coalition ‘’Bennoo bokk yaakaar’’ qui était visible à Dakar comme dans nombre d’autres villes du pays, pendant toute la dernière campagne électorale et même plusieurs mois avant. Naturellement, les guillemets de ‘’capitale de l’émergence’’ sont bien de moi. Il suffit de lire ma contribution du 19 mars dernier (‘’WalfQuotidien’’, ‘’L’Exclusif’’ et Dakar-Times’’) comme celle-ci, pour comprendre aisément pourquoi.
Revenons donc à notre sujet du jour qui m’a toujours préoccupé et auquel j’ai consacré un nombre important de contributions. J’ai été jusqu’à interpeller, dans l’une d’elles, directement et publiquement des autorités chargées de la question. Elle avait pour titre : « Ministère de l’Environnement et autres autorités publiques, où êtes-vous ? » (xalima.com du 9 septembre 2014). J’y faisais remarquer notamment ce qui suit : « Notre capitale nationale mérite d’être secourue. Elle n’est pas seulement défigurée d’ailleurs, loin s’en faut, par les ordures ménagères, les gravats et les branchages. Elle traîne une autre plaie, celle-là aussi béante que les autres : l’indiscipline caractérisée des populations, pratiquement encouragée par la frilosité des autorités publiques, et dont l’ampleur dépasse nos frontières ». Pour illustrer alors mes propos, je me reportais à une de mes contributions publiée douze (12) ans auparavant, au quotidien ‘’Walfadjri’’ du jeudi 3 octobre 2002, et dont le titre était « Le Sénégal a besoin d’être repris en main ». Deux jours auparavant, soit cinq après le tragique et honteux naufrage du ‘’Joola’’, le Président de la République s’était adressé à la Nation. Cette adresse, de nombreux observateurs l’avaient trouvée « ferme, déterminée et en même temps apaisante », pour les quelques rares rescapés et les familles des disparus. Deux ministres lui avaient présenté leur démission. Le Président de la République reconnaissait très tôt et publiquement « la responsabilité civile de l’Etat » et « les nombreuses négligences, fautes et légèretés » qui se sont accumulées en amont, et expliqueraient pour l’essentiel la tragédie du 26 septembre 2002. Il promettait ensuite des sanctions exemplaires, à la suite des différentes enquêtes qu’il allait ordonner.
Dans ma contribution du 3 octobre 2002, je prenais acte, avec prudence, de la démission des deux ministres et de toutes les mesures prises ou annoncées par le Président de la République. J’attendais surtout la suite qui serait réservée à tout cela car, « je ne perdais quand même pas de vue que nous vivions au Sénégal, où on nous a habitués depuis bientôt quarante huit ans à des commissions créées plus pour nous endormir que pour faire éclater la vérité et situer les véritables responsabilités ». La suite me donnera raison puisque, à l’arrivée, au moins 1 800 victimes gisent au fond de l’Océan, sans qu’aucun responsable de cette tragédie n’ait été pénalement sanctionné. Cette absence de sanctions avait amené d’ailleurs la Justice française à mettre en examen de hautes autorités sénégalaises de l’époque dont le Premier Ministre Mame Madior Boye. Elles finiront d’ailleurs par bénéficier de non-lieux.
Je rappelais dans ma contribution du 3 octobre 2002 que ce n’était pas la première fois qu’une tragédie intervenait au Sénégal avec zéro responsable. En effet, on se souvient encore de la terrible catastrophe de la SONACOS intervenue le mardi 24 mars 1992, et qui avait fait environ 140 morts et des centaines de handicapés dont certains à vie. Les fautes étaient pourtant lourdes. « La citerne qui avait explosé à l’intérieur de l’usine, du laboratoire exactement, était bourrée de 27 tonnes d’ammoniac, pour une capacité de 22 tonnes autorisée. Elle était, en outre, rafistolée en de nombreux endroits », précisais-je alors. Devant la gravité des faits, une commission d’enquête avait été mise en place par les autorités, « plus par simple formalité que par volonté réelle de situer les responsabilités ». Comme cela arrive souvent dans notre pays, la commission fut sans lendemain puisque le rapport, déposé entre les mains du Premier ministre (alors Habib Thiam), n’a jamais été exploité et aucune sanction n’a été prise, surtout pas contre le Président-Directeur général de la SONACOS (alors Abdoulaye Diop). Je signalais dans ma contribution du 3 octobre 2002 qu’il n’y avait rien d’étonnant dans cette absence de sanctions, puisque le Président de la République et le PDG de la SONACOS « étaient très proches, ayant grandi dans la même concession à Louga ».
La tragédie de la nuit du 26 septembre 2002 – pour revenir à elle –, je m’en étais indigné en ces termes : « Par-delà les centaines de morts qu’elle a entraînées et la douleur indicible qu’elle a engendrée, a été une honte pour notre pays et a porté un coup terrible à son image. Les images peu reluisantes du naufrage du ‘’Joola’’ ont fait le tour du monde. Elles ont été relayées par de nombreuses télévisions étrangères et principalement françaises, commentées avec par moment des pics qui ne nous honorent pas. Juan Gomes de RFI avait consacré son émission ‘’Appel sur l’Actualité’’ des 1er et 2 octobre 2002 au malheureux événement. » Ce n’était pas tout. Un ressortissant français intervenant de Dakar « avait, par-delà le naufrage du “Joola”, pointé un doigt accusateur sur l’indiscipline caractérisée des Sénégalais et principalement sur celle des conducteurs de ‘’cars rapides’’ et de “ Ndiaga Ndiaye” qui sont, selon lui, de véritables bourreaux sur les routes. »[1]Et il avait terminé son intervention par cette terrible assertion : “ Le Sénégal se complet de plus en plus dans la médiocrité et le laisser-aller”. Une dame, résidant à Paris, ira dans le même sens en regrettant que son pays (le Sénégal), “s’installe de plus en plus dans la culture du laxisme ”.
De ces différentes interventions qui ne nous honoraient point, je tirais la conclusion suivante : « Les Portugais, les Hollandais, les Suisses, les Espagnols, les Belges, etc., dont des ressortissants ont péri dans la catastrophe du 26 septembre, réfléchiront désormais longuement et profondément, avant de se décider à venir au Sénégal qui se révèle de plus en plus comme le champion mondial incontesté de l’indiscipline et de l’incivisme. Nous nous comportons chaque jour qui passe comme une communauté de singes et d’hyènes adolescentes (que les walaf appellent “ nduulañ ”), communauté sans responsable où chacun fait ce que bon lui semble et selon son instinct du moment, sans se soucier le moins du monde du tort qu’il peut porter au pays ou à son voisin immédiat. Quarante huit années après l’indépendance (ce n’était donc que ça ?), nous continuons de traîner comme un boulet, les maux que le Président Senghor appelait “ Les maladies infantiles du sous-développement ”, dont les plus courantes aujourd’hui sont l’indiscipline et l’incivisme.»([2])
Ces plaies béantes nous collent encore à la peau aujourd’hui et se manifestent, notamment, dans les constructions anarchiques qui sont quotidiennement dénoncées et sans succès. Les métastases de ce cancer – c’en est un – n’épargnent pas, non plus, les nombreuses cérémonies familiales et religieuses. Pratiquement, tous les jours, à l’occasion des baptêmes, des mariages, des décès, des retours de pèlerinage des Lieux saints, des tours de famille, des gamous-meetings, etc., des tentes poussent comme des champignons, souvent dans les rues les plus passantes et sans aucune autorisation. On peut regretter ici l’organisation d’un gamou (ou ziaar) annuel par une famille religieuse qui, à l’occasion, dresse une tante gigantesque barrant une rue très fréquentée et abritant de surcroît un terminus de bus, pendant une longue semaine, obligeant ainsi de nombreux automobilistes à faire de grands détours, parfois pour accéder seulement à leurs domiciles. L’islam ne permet à aucun musulman, et quel que soit son rang, de porter préjudice à ses coreligionnaires.
Je ne m’attarde pas sur « les fuurël et autres soirées dansantes et tánn béer organisés à tout bout de champ, en week-ends comme en jours de semaine, avec des baffles ouverts à plein régime et des tam-tams sur lesquels frappent à tue-tête des griots endiablés », ni sur « les appels à la prière de certains muezzins zélés, aux environs de quatre heures du matin, avec des hauts parleurs qui portent leurs voix à des kilomètres à la ronde ».
La politique, telle qu’elle se pratique chez nous, n’est pas en reste. Nous comptons aujourd’hui environ trois cents (300) partis politiques. On parle beaucoup de leur rationalisation, sans s’attarder sur les torts qu’ils portent aux populations, principalement pendant les campagnes électorales, avec leurs meetings et leurs caravanes qui drainent en général beaucoup de monde et participent de la grande confusion de la circulation et du désordre dans les grandes villes. Dans les pays sérieux, les grandes démocraties, ces rencontres se déroulent dans des endroits fermés. Nous avons suffisamment de salles et de stades pour abriter ces meetings, dont nous pourrions d’ailleurs nous passer sans grands dommages[3].
Un autre aspect des manifestations des partis politiques qui pose problème, ce sont les affichages sauvages pendant les campagnes électorales et même hors de celles-ci. Nos compatriotes, militants de partis politiques ou non, ont la fâcheuse habitude d’afficher et de faire des graffiti n’importe où : sur les murs des bâtiments publics ou privés et même chez de pauvres particuliers qui, parfois, ont à peine fini de peindre leurs maisons. Les tableaux de signalisation (stop, sens interdit, sens giratoire, etc.) qui réglementent la circulation ne sont même pas épargnés, comme d’ailleurs les enseignes payées par différents services publics comme privés. En plus des torts qu’ils portent aux nombreux particuliers, les affiches et les graffiti anarchiques défigurent notre pauvre ‘’capitale de l’émergence’’ et nombre d’autres villes de l’intérieur. Celui qui a remporté et de loin la palme pendant la dernière campagne électorale et bien avant celle-ci, c’est incontestablement le chef de la coalition gouvernante. Ses affiches géantes sont vraiment envahissantes, dérangeantes et rappellent, sur bien des points, Varsovie, Prague, Berlin, Moscou, Budapest, etc., des années 50.
Toutes ces plaies béantes ont la vie particulièrement dure chez nous. Elles sont loin de dater d’aujourd’hui. Le président Senghor – nous l’avons rappelé plus haut –, les a très tôt stigmatisées. Son successeur aussi qui, dans son message à la Nation au soir du 31 décembre 1999, dénonçait vigoureusement (verbalement tout au moins) l’indiscipline et l’anarchie qui s’installaient dangereusement dans le pays. Ce texte étant déjà long, j’y reviendrai dans une prochaine contribution, pour montrer à quel point autorités (d’abord) et nous citoyens, avons besoin de déployer d’immenses efforts, pour faire de notre pays une République moderne, avec des textes de lois et de règlements qui s’appliquent à tous et à toutes, quel que soit, par ailleurs, le statut des uns et des autres.
[1] Dans son rapport en date du 14 mars 2019, le Bureau de la sécurité diplomatique des États-Unis a notamment recommandé aux citoyens américains qui vivent au Sénégal et à ceux qui comptent s’y rendre, d’éviter de prendre ces ‘’cars rapides’’ et ces ‘’Ndiaga Ndiaye’’, qui « manquent de contraintes de sécurité et parfois de fenêtres, et sont conduits de manière dangereuse par des conducteurs non qualifiés ».
[2] Nous sommes, à ma connaissance, le peuple de loin le plus indiscipliné de la Planète-terre. Nous faisons ce que bon nous semble et nous comportons comme nous voulons, sans frais, sans risque d’aucune sanction.
[3] Pour se faire une meilleure idée des immenses torts que ces meetings et caravanes nous portent, je renvoie le lecteur à ma contribution du 3 octobre 2002.
"IL Y A UNE FORME DE TOLÉRANCE SOCIALE POUR LE RACISME"
Avec « Ne reste pas à ta place », la réalisatrice, journaliste, chroniqueuse et activiste témoigne de son parcours atypique - Elle s'est confiée au Point Afrique
Comment arriver là où personne ne vous attendait ? C'est autour de ce thème que Rokhaya Diallo a construit son livre témoignage mais aussi autobiographique* où le ton est donné par une citation de René Char : « Impose ta chance, serre ton bonheur et va vers ton risque. À te regarder, ils s'habitueront. »
Le Point : Pourquoi ce livre ?
Rokhaya Diallo : C'est un livre que j'ai voulu faire parce que 2019 marque la 10e année de ma présence régulière dans les médias et de mon parcours de journaliste. J'ai trouvé que c'était un moment d'étape important pour raconter ces dix ans qui ne se sont pas du tout déroulés comme j'aurais pu imaginer et qui m'ont conduite à un métier auquel je ne me destinais pas initialement, et à une place à laquelle je ne m'attendais pas.
Il y a aussi que, quand je participe à des événements publics, je reçois beaucoup de questions de personnes qui me demandent tout simplement comment je fais pour affronter la haine que je reçois régulièrement, les oppositions dont mes discours font l'objet. Face à cela, je voulais très simplement partager quelques recettes personnelles.
Comment imaginiez-vous ce métier quand vous avez commencé ?
J'ai commencé ce métier sans avoir le sentiment de le commencer. J'ai été repérée sur un plateau de télévision comme chroniqueuse et pas comme journaliste. C'était temporaire. J'ai travaillé au départ à RTL et à Canal+, pour lesquelles j'avais signé pour une saison. Je ne pensais pas aller au-delà, car j'avais un autre métier. J'étais dans le dessin animé et dans la production. Pour moi, cette année-là était un peu une parenthèse pour surtout écrire un livre alors que mon ancien job ne me donnait pas forcément le temps. De fait, j'ai commencé le journalisme sans vraiment avoir de projection, car je ne m'imaginais pas un instant me professionnaliser dans cette voie. En somme, le journalisme m'est un peu tombé dessus.
Vous dites que vous avez suivi un parcours loin de ce que la sociologie prévoyait pour vous ? Pourquoi ? Parce que vous avez su saisir les opportunités ou par sens du défi ?
Je ne dirais pas qu'il y avait une volonté de ma part de défier la sociologie. En fait, j'ai grandi en n'ayant pas conscience de la sociologie. Quand j'étais petite, je regardais les séries où les femmes étaient médecins, avocates, professeures, etc. Je me suis identifiée à elles et au travail qu'elles exerçaient sans forcément me dire que je ne pouvais pas le faire parce que j'étais issue d'un milieu populaire, et parce mes parents étaient immigrés. Et cela, d'autant que mes parents m'ont encouragée en me disant que je pouvais tout faire. Cela a beaucoup compté pour la personne que je suis devenue et qui a finalement défié la sociologie. J'ai eu des opportunités qui se sont présentées à moi. J'en ai accepté certaines, j'en ai refusé d'autres. Et surtout, j'ai toujours cru dans ce que les gens voyaient en moi.
Souvent, les femmes ont des opportunités, mais, dans le doute, elles se disent qu'elles ne sont pas capables. On est en fait souvent conditionné à ne pas connaître forcément l'amplitude de nos capacités. Ma chance à moi, c'est que j'ai confiance. Vous me proposez quelque chose, je me dis que je peux le faire, et c'est ce qui m'a amenée à faire des choses complètement inattendues.
Que représente la France pour vous ?
La France est mon pays. C'est l'endroit où je me sens chez moi. Le français est ma langue, même si beaucoup de pays parlent le français sans être la France. Mon chez-moi en France se réduit particulièrement à Paris, qui est la ville où je suis née, la ville où j'ai grandi et où j'ai passé la majeure partie de ma vie. J'ai vécu en banlieue aussi et ai une conception de Paris assez étendue.
Cela dit, pour moi, la France, c'est la familiarité, c'est à la fois ce Paris qu'on peut traverser facilement, une ville dans laquelle on peut apprécier la gastronomie dans notre vie quotidienne, une ville avec cette capacité de révolte que je porte aussi en moi.
Ayant des origines étrangères, avez-vous un autre pays ?
Juridiquement, je n'ai pas d'autres pays, mais quand même. Je n'ai pas la nationalité sénégalaise contrairement à mes parents. Cela fait que je suis très attachée au Sénégal, même si c'est un pays dans lequel je n'ai jamais vécu si ce n'est pendant les périodes des vacances. Donc, oui, j'ai plusieurs pays.
Que représente l'Afrique pour vous ?
L'Afrique, c'est le continent dont sont originaires mes parents. C'est un foyer important de l'histoire de l'humanité, c'est un continent décrié dont je me sens vraiment partie prenante et très proche. C'est un continent que j'ai envie d'explorer. Pour l'instant, je connais surtout l'Afrique francophone, subsaharienne et du Nord. J'ai commencé à découvrir l'Afrique anglophone il y a peu et cela me donne vraiment envie de continuer. Cela dit, l'Afrique, je l'entends aussi comme le foyer des diasporas afrodescendantes, ce qui nous en rappelle aussi le destin assez cruel qui a été le sien. Cela me lie à beaucoup de personnes originaires du continent de manière plus ou moins lointaine et avec lesquelles je partage l'expérience d'être noire dans le monde.
Quel rapport avez-vous avec d'autres pays qui, comme la France, ont des minorités visibles ? Les États-Unis et la Grande-Bretagne, par exemple.
Les États-Unis sont un pays qui m'intéresse beaucoup et où j'ai eu l'occasion de me rendre plusieurs fois pour des raisons professionnelles, pour réaliser mes documentaires, dont trois sur quatre y ont été réalisés. C'est un pays qui a un passé esclavagiste et impérialiste, comme la France, mais qui, en même temps, est complètement différent parce qu'il a affronté sa question raciale de front, droit dans les yeux. Du coup, les combats des minorités américaines sont très visibles, contrairement à ceux des minorités françaises. Je trouve que, dans les théories qui ont été développées, il y a des choses intéressantes. De plus, des Français ont même inspiré les Américains, notamment des intellectuels américains antiracistes et féministes. Ainsi de Frantz Fanon et de Simone de Beauvoir.
J'entretiens aussi des rapports assez réguliers avec les États-Unis sur le plan professionnel. J'écris par exemple pour le Washington Postdepuis l'année dernière. Cela dit, ce n'est pas un pays dans lequel j'aimerais vivre, même si j'aime bien y aller pour la bouffée d'air aussi bien intellectuelle qu'artistique que j'y trouve. Je suis très bien en France et mes séjours aux États-Unis me renforcent chaque fois dans la conviction qu'il faut que j'agisse en France.
Comment imaginez-vous un cadre législatif, politique, économique qui sanctionne toutes les discriminations, raciales, de genre, de mœurs et de religion, et renforce la devise de votre pays, la République française, à savoir « Liberté, égalité, fraternité » ?
Je pense qu'il faudrait vraiment mettre en œuvre le dispositif législatif qui existe. Les condamnations pour discrimination sont très rares aujourd'hui en France par rapport au nombre de plaintes et au regard du nombre de citoyens d'origine étrangère qui se sentent ou qui sont exposés au racisme au cours de leur vie. d'où le gros décalage qu'il y a entre leur ressenti et la manière dont sont perçues les sanctions que je trouve pas assez dissuasives parce que très, très faibles.
C'est un problème de textes ou d'application des textes ?
Je pense qu'il y a un problème dans l'application des textes, dans la reconnaissance des dommages et, en dehors du cadre légal, dans les sanctions sociales. On a ainsi des personnalités publiques qui tiennent régulièrement des propos racistes sanctionnés par la justice mais dont la reconnaissance du propos raciste n'a aucun effet social. Normalement, ce devrait être honteux et, a priori, les gens ne devraient pas avoir envie de s'associer à des personnes reconnues comme étant auteures de propos racistes. Et pourtant, beaucoup d'entre eux continuent à être reconnus et ne font pas l'objet d'une opposition majeure. Pour moi, cela signifie qu'il y a une forme de tolérance sociale pour le racisme qui est trop importante. La loi, c'est important, mais la capacité de réaction de la société signifiant aux personnes racistes que leurs propos ne sont pas acceptables me paraît très, très faible en France et dans beaucoup de pays européens.
Que peut-on faire pour le cadre politique ?
La volonté politique est nécessaire. Aujourd'hui, il y a une secrétaire d'État en charge du droit des femmes et de la lutte contre les discriminations. Elle n'est malheureusement pas souvent sollicitée sur les questions de discrimination. Je trouve que les politiques ne s'expriment pas assez suffisamment sur ces questions.
D'ailleurs, après le rapport du Défenseur des droits début septembre sur la discrimination, notamment à l'embauche, on n'a pas vu une déclaration, une décision politique qui indique qu'il faudrait mettre en œuvre ou promouvoir l'embauche des personnes qui sont exposées au racisme. Donc la question demeure difficile. En même temps, le fait qu'il y ait une législation européenne oblige des pays comme la France à se positionner. Par exemple, la création de la Halde (Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité), qui est devenue le Défenseur des droits, a été rendue obligatoire par l'Union européenne à travers une de ses directives. On voit là qu'il est important d'avoir des instances supranationales comme les Nations unies et la Cour européenne des droits de l'homme, par exemple, qui peuvent interpeller la France quand elle ne répond pas à ses obligations ou n'est pas en adhésion avec ses propres principes.
On vous prête les propos selon lesquels il y aurait un racisme d'État en France . Que répondez-vous à cela ?
Pour commencer, ces propos ne sont pas de moi. D'autres en ont parlé avant moi : des philosophes reconnus et très en vue. Il y a aussi un syndicat d'enseignants qui avait parlé de racisme d'État. Ce que moi-même j'avais défendu. Quand on parle de racisme d'État, cela signifie que l'État produit du racisme. Et il en produit parce que ses structures le permettent. On ne peut pas vivre dans une république dont les fondements sont liés à une période coloniale sans imaginer que cette république continue de perpétuer cet héritage. C'est évident.
Cela dit, j'ai des cas très concrets de racisme d'État. Je pense que les chiffres du contrôle au faciès du fait de la police en sont une illustration. Quand on est un jeune originaire du Maghreb, d'Afrique ou des dom-tom, on a vingt fois plus de risques de se faire contrôler que le reste de la population. Le gouvernement ne fait rien contre cela, alors que c'est une institution de la République qui est impliquée. Donc c'est au moins du racisme par manque d'action.
D'autres exemples comme la manière assez spectaculairement inégalitaire dont les outre-mer sont traités donnent à réfléchir. Quand on pense aux essais nucléaires en Polynésie, aux conséquences aussi bien tectoniques qu'en termes de cancer sur les habitants, on voit bien qu'il y a un problème. Je pense aux problèmes écologiques et d'ordre environnemental dans les outre-mer qui sont vraiment liés à l'utilisation de produits qu'on n'utilise pas dans l'Hexagone. Je pense au chlordécone, qui fait que la Martinique et la Guadeloupe, de toutes petites îles, sont les territoires où les taux de cancer de la prostate sont les plus élevés au monde. Ce n'est pas le cas du reste de la France. De quoi s'interroger encore. Sinon, Françoise Vergès parle très bien du cas de La Réunion avec la stérilisation des femmes dans les années 70, les placements de force d'enfants dans des familles hexagonales. Tout cela, pour moi, est l'expression d'un racisme propagé par l'État français.
Finalement, en décolonisant l'Afrique dans les années 60, la France aurait donc dû se décoloniser l'esprit en même temps ?
La France a maintenu des liens très forts avec ses anciennes colonies. Elle leur a imposé une monnaie qui a été renommée à partir de son nom de l'époque coloniale (CFA pour Colonies françaises d'Afrique et devenues CFA pour Communauté financière d'Afrique). Beaucoup de ces pays devenus indépendants ont vu à leur tête des présidents placés par la France. Il y a aussi la présence de l'armée française sur des territoires souverains. Cela interroge sur la nature des liens. Je pense donc que la France n'a pas fait le deuil de la colonisation et qu'aujourd'hui il y a un continuum colonial non seulement sur le continent africain, mais aussi sur les territoires ultramarins et sur le territoire hexagonal, où on peut aussi parfois parler de gestion coloniale des territoires urbains comme les banlieues. L'usage de la force publique n'y est pas le même que celui qu'on peut voir ailleurs.
Pour vous, il aurait fallu une action publique très forte pour décoloniser les esprits ?
Déjà, il aurait fallu un travail d'éducation. Il y a un vrai travail de transmission à faire sur l'histoire de la décolonisation. Il s'agit de faire comprendre ce qui s'est joué à l'époque en termes de prise de pouvoir, en termes de lavage de cerveaux aussi des jeunes élites, du nombre de morts, etc. En France, on aime souvent parler du rôle positif de la colonisation. On parle d'une abolition de l'esclavage qui aurait eu lieu en 1848, mais on ne pense pas aux travaux forcés qui ont eu lieu sur les territoires coloniaux où des gens ont construit des chemins de fer, des routes parfois au prix de leur vie… C'était au XXe siècle et ce n'est pas si vieux que ça. Il y a aujourd'hui des personnes qui sont en vie, qui l'ont vécu et qui ont pu témoigner de cela. Tout cet héritage-là n'est pas présent dans la fiction, dans la littérature, et n'est pas suffisamment présent dans les livres d'histoire et dans les discours politiques. Je pense qu'on ne peut pas dire à des jeunes issus de cette histoire-là d'avancer dignement s'ils n'ont pas un ancrage, une reconnaissance de la souffrance passée, tout simplement.
Revenons à votre expérience personnelle. Comment comptez-vous faire adhérer des jeunes à votre démarche de « ne pas rester à sa place » ?
Je dois d'abord dire que ce livre que je publie et intitulé à dessein Ne reste pas à ta place n'est pas un livre de gourou (rires). Je ne vais pas commencer à lancer une secte. En fait, j'ai grandi avec une télévision vraiment monochrome et les seuls visages qui me ressemblaient venaient des fictions américaines. Et, quand ce n'étaient pas des fictions américaines, c'étaient des publicités ou des fictions où les Noirs étaient tournés en ridicule. Dorothée, par exemple, qui était une star des années 90, cuisinait dans un chaudron géant. Sur un autre registre, il y avait aussi un biscuit baptisé Bamboula. Tout ça pour dire que ce n'étaient pas des images très valorisantes. Du coup, ce que j'ai envie de dire aux jeunes qui m'aperçoivent sur un écran de télévision, c'est simplement que c'est possible même si c'est difficile. Et que, s'ils n'y arrivent pas, ce n'est pas de leur faute car on est dans un environnement qui rend les choses difficiles.
Je n'ai pas envie de chanter le mythe de la méritocratie parce que j'ai réussi à m'extirper d'une situation qui n'était pas forcément évidente au départ. Car en fait, j'ai fait de bonnes rencontres, et en tant que jeune, je n'ai pas eu peur d'avoir foi en moi tout simplement. J'ai vraiment envie de transmettre aux jeunes générations les outils qui m'ont permis de m'élever socialement, tout en leur disant qu'il faut tenir bon dans la mesure du possible, tirer les enseignements de chaque échec et tirer aussi des ressources de leur environnement culturel, parce que c'est important.
Y a-t-il donc lieu d'aider les jeunes issus de l'immigration à mieux connaître la culture de leurs parents, de leurs grands-parents ?
Je pense que c'est un choix qui est personnel. En ce qui me concerne, cela a été structurant. La culture de mes parents, sénégalais et musulmans, m'a donné un cadre de référence que j'ai mélangé avec ma culture française. C'est un cadre auquel je me réfère toujours maintenant. Par exemple, sur la question des femmes, du corps des femmes, j'ai tiré beaucoup d'inspiration de la culture sénégalaise. En France, les femmes qui vieillissent sont souvent déconsidérées, alors qu'au Sénégal le fait d'être une femme d'un certain âge engendre du respect et confère un statut social. En France, par exemple, on traitera quelqu'un de « sale vieux », alors qu'au Sénégal cela n'a aucun sens pour des raisons liées au respect accordé aux aînés. Cela m'a permis d'aborder la question de l'âge avec un autre prisme. Donc, même si sa culture d'origine est considérée comme mineure, ce qu'elle n'est pas en réalité, il y a des choses à prendre et à apprendre pour tenir bon. Il en est ainsi en ce qui concerne les canons de beauté de cette femme éternellement jeune et mince. J'ai ainsi passé ma vie avec une mère qui s'est toujours trouvée trop mince. Du coup, je ne suis pas vraiment sensible aux canons de mannequins toutes maigrichonnes qu'on nous présente comme étant les plus belles femmes du monde.
Donc, finalement, si vous deviez vous définir aujourd'hui, que diriez-vous ?
(Rires.) Je dirais que je suis Rokhaya Diallo, une Parisienne aux ascendances multiples, fière de tout ce qu'elle porte.
Rokhaya Diallo, « Ne reste pas à ta place », Marabout 2019 – Sortie le 27 mars
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J'ÉTAIS L'ANTISYSTÈME DE MON ÉPOQUE
EXCLUSIF SENEPLUS - Landing Savané parle de sa jeunesse marquée par d'âpres oppositions au régime de Diouf - Le secrétaire général d’And-Jeff admiratif du combat politique de la nouvelle génération, invite cette dernière à se montrer patiente
Ababacar Sadikh Sall et Fatou Sène |
Publication 27/03/2019
‘’ Quand j’étais jeune, j’étais l’antisystème de cette époque’’, rappelle Landing Savané qui ne cache pas sa sympathie à l'égard de la nouvelle vague de jeunes politiques sénégalais, notamment incarnée par Ousmane Sonko. Pour le secrétaire général d’And-Jeff, un jeune doit être antisystème parce que c’est ce qui fait avancer un pays.
L’allié du président Macky Sall dans la coalition Benno Bokk Yaakaar, est convaincu que les systèmes doivent changer, de même que les hommes. ‘’ Le progrès c’est le changement et non la continuité. Il faut peu de continuité et beaucoup de changement. Donc les jeunes doivent s’impliquer dans le combat démocratique’’, estime-t-il, appelant ces derniers à prouver leur mérite sur le terrain.
LA CHRONIQUE HEBDO D'ELGAS
DEZ, DURÉE DE VIE D’UN RÊVE
EXCLUSIF SENEPLUS - Pilier et joyau de l’ASC Tilène, il avait porté haut le flambeau des numéros dix mythiques qu’avait enfantés l’équipe - On bravait la pluie de l’hivernage pour le voir à l’œuvre - INVENTAIRE DES IDOLES
Quand j’ai revu Dez, il était alité sur un petit lit malfamé. Ses probables 45 ans à l’état civil paraissaient bien plus marqués, tirant vers une vieillesse précoce, de celles que seule la misère sait précipiter et accélérer. Il avait le visage meurtri, les joues creuses, le front buriné, et dans sa couverture, le sanglot était comme contenu dans une forme de pudeur. La pièce était sombre. Le ballet des visiteurs régulier. Ca faisait quelques jours que l’hôpital l’avait plus ou moins renvoyé à la maison. Son lit était sa demeure, où il attendait la fortune comme on attend le miracle, avec une pénitence qui ne promettait pas de délivrance.
Il avait quand même réussi à baragouiner quelques mots, à entretenir la légende de sa bonhommie réelle. Autrefois, il était taquin et bavard, une blague toujours collée à ses lèvres. Entre les rayons faibles du jour qui se jetaient dans les ouvertures de la pièce, il réussissait le génie tendre d’arracher un éclat de rire, avant que le sien ne gronde. Par moment, sa dure souffrance, et ce sommier incertain où il demeurait, devenaient bien anecdotiques, tant l’espoir, trouvant dans un rire une régénération, rejaillissait, et par flashs on voyait notre ancien Dez, increvable et majestueux. Mais l’euphorie retombait toujours quand il poussait un grognement de douleur.
Quand j’ai connu Dez, nous étions en 98 ; il était le prince du championnat estival des Navétanes. Pilier et joyau de l’ASC Tilène, il avait porté haut le flambeau des numéros dix mythiques qu’avait enfantés l’équipe. Dez devait bien être le plus facétieux, le plus fantasque de toute cette lignée de faiseur de jeu. Génial dribbleur, féru de gestes spectaculaires, diva sur le terrain avec un grand sens de la mise en scène, avec lui, le football touchait à sa part théâtrale. Nul besoin de dire qu’il en fût, tour à tour, haï et vénéré. Il était comme la perle centrale, la grande pièce d’or sculptée. L’équipe de Tilène du reste dominait à l’époque le championnat estival. Des phases de zones jusqu’aux phases nationales, en passant par les régionales, le club du quartier de Ziguinchor avait raflé la mise partout, devenant une forme d’institution locale qui donnait régulièrement au championnat national ses talents.
Héros et star de cette période, Dez était un demi-dieu, traité avec allégeance et dévotion. De son petit sourire narquois qui ne le quittait jamais, jusqu’à la languette de ses chaussures Copa mundial qu’il exhibait fièrement, il avait son costume. Pour toute une génération d’ados ou d’enfants de cette période, on voulait devenir Dez. C’était notre légende. On bravait la pluie de l’hivernage pour le voir à l’œuvre. Avec lui, même les entrainements étaient des spectacles courus où on allait singer des gestes du maître.
Toute cette aura a valu à l’icone les convoitises de beaucoup de club de première division. Et la rumeur avait commencé à lui bâtir une légende : il serait le nouveau Bocandé. Omar Guèye Sene. Et les commentaires allaient bon train. C’est la Linguère de Saint-Louis qui décrochera la perle. Pour gravir le premier échelon de ce rêve qui prenait forme, il lui fallait y faire régner son talent. Dompter les dieux du foot national avant de se jeter pleinement dans le rêve d’Europe. Mais à la Linguère le rêve fut de courte durée. Dez s’y ennuyait. Il n’était plus en son royaume de Tilène. Si son talent le maintenait à flot, il lui manquait la touche supplémentaire de grâce ou de baraka, pour conquérir la vieille ville. Le blues le gagna et comme dans un divorce funeste, l’idylle prit fin.
Et Dez de trainer, comme un conquérant déchu, sa peine et sa croix pour revenir chez lui. L’enfant prodige ne devint qu’un enfant triste. Le rêve s’était recouvert d’amertume et de frustration. Les Navétanes, trop petites pour son ambition, quoiqu’elles fussent le berceau de sa naissance, ne lui dirent plus rien. Les péripéties du destin avaient sabré Dez d’un coup sec. Fini le foot, il traversa sa période noire, jusqu’à ce que qu’une école lui propose de devenir professeur d’EPS.
Ce déclassement social allait avec un pécule bien ridicule. Dans la classe déjà défavorisée des enseignants, ceux d’EPS étaient au bas de l’échelle et le ragot national n’oubliait pas de leur rappeler cette funeste condition de rebuts. Dez portait l’ombre de sa gloire passée. A Ziguinchor, la démographie avait changé la donne. Il n’était plus connu. De jeunes talents avaient repris la place et postulé au rêve. Et lui marchait dans l’anonymat presque total, sauf pour quelques anciens qui récitent encore ses gammes dans le passé, en chœur avec une pointe de nostalgie et de mélancolie mêlées.
Quand j’ai revu Dez, dans son lit de paillasse, le corps englouti dans cette couverture élimée, plein de souvenirs ont inondé ma tête. Sa manière de soulever le ballon du sol en appliquant deux gestes simultanés des pieds, ce qui propulsait le ballon ; j’ai revu les séries de ses dribbles par feintes ; ses frappes, ses contrôles. Mais tout le souvenir butait sur la lucidité de l’instant, et la vérité de son état. Il était bien là, impuissant, comme tous les gens à son chevet, tous liés par cette gratitude, ce sentiment de redevabilité vis-à-vis de joies passées. Tous volontaires mais tous vains, nous étions le dernier réduit, le dernier carré de fidèles, la dernière ligne de protection au front, tous promis inéluctablement à laisser l’ex-glorieux héros, seul face à la mort ou seul face à la vie, sans qu’aucune des perspectives ne nous ôte véritablement notre crainte.
Quand j’ai connu Dez, c’était sans doute comme beaucoup d’autres gars, partout dans le pays, dans le monde, comme on connaît des idoles. Avec beaucoup d’amis, nous avons des modèles ainsi faits dont on se souvient, un nom, un geste, un moment, mais qui disparaissent inlassablement dans des cimetières précoces appelés agonie ou définitifs appelés mort.
Les lecteurs réguliers de ces [Inventaires] le noteront, une forme d’obsession m’habite, par ce qu’elle me travaille : celle de ces destins brûlés. C’est la chronologie de déchéances programmées et l’invincibilité de la misère qui permet des espoirs et de rêves pour mieux les assombrir. Il y a des Dez partout, cousin, ami, frère, dans une indistinction de territoire. C’est le ciment d’un ventre national où la condition de la vie, impitoyable, abat ses violences.
Actuellement sur les routes du Sénégal, j’en vois l’esquisse, c’est le dessin d’un profil qui survit au temps et à l’Histoire. Bien des vices deviennent alors compréhensibles, sinon pardonnables, quand on voit une société coincée entre l’emprise du manque d’argent et l’empire de l’argent comme désir d’affichage. Dez comme d’autres est un enfant de ce couple qui n’engendre que des monstres. A nous, si le cœur et l’humanité nous en disent, de prier pour lui. Notre grand drame (ou pas), c’est que Dieu restera peut-être le seul à son chevet. En bien ou en mal, il restera, là où la lâcheté, ou sa variante, la vie, nous dispersera.
Notre solidarité de Panafricanistes est acquise au Peuple héroïque du Mali, objet de multiples attaques - L’Afrique doit aider l’Afrique, l’Afrique doit protéger l’Afrique - DÉCLARATION DU MPCL – LUY JOT JOTNA
SenePlus publie ci-dessous, la déclaration du parti MPCL – LUY JOT JOTNA, datée du 27 mars 2019, relative au massacre perpétré sur les Peuls au Mali, dimanche dernier.
« À quelques jours de la commémoration de la tragédie qui avait frappé le continent au Rwanda en avril 1994, l’horreur a encore rattrapé l’Afrique avec l’extermination sans pitié de femmes, nourrissons, enfants, personnes âgés et autres membres de la communauté peule du Mali le samedi 23 mars 2019.
Ce carnage qui a fait plus de 160 morts (bilan provisoire) a ôté la vie à des civils sans défense dans le pire style des génocidaires qui sévissent assez régulièrement dans notre continent meurtri pas tant de violence, de cruauté et d’actes de barbarie d’un autre âge.
Ces escadrons de la mort à la gâchette et à la machette faciles n’ont que trop semé la mort, la désolation et le désespoir parmi nos populations innocentes et sans défense. Le Burkina Faso et le Mali en souffrent atrocement de nos jours.
Si les membres de l’ethnie peule, présents dans une vingtaine de pays d’Afrique, ou de toute autre ethnie doivent vivre dans la peur permanente et dans la crainte d’attaques meurtrières régulières, l’Afrique aurait définitivement rompu avec ses valeurs humanistes de coexistence fraternelle des ethnies et des peuples.
Notre parti, le MPCL-Luy Jot Jotna, dit sa profonde consternation et sa grande tristesse devant le massacre récent des Peuls du Mali et de tout massacre d’Africains. Il s’indigne encore plus quand ces carnages sont perpétrés par des Africains contre des Africains dans leur patrie commune : l’Afrique. Notre solidarité de Panafricanistes est acquise au Peuple héroïque du Mali, objet de multiples attaques (Jihadistes, trafiquants et criminels transfrontaliers, génocidaires et séparatistes violents).
La nation malienne, prise à partie par beaucoup d’adversaires à la fois, a besoin de la solidarité en actes de tous les états membres de la CEDEAO, renforcés par le Tchad, le Cameroun, le Maroc et l’Algérie en particulier. L’Union africaine ne devrait pas être en reste et devrait amplifier la solidarité de toute l’Afrique au Mali et au Burkina Faso !
L’Afrique doit aider l’Afrique, l’Afrique doit protéger l’Afrique. Tous les pays de notre sous-région (voire du continent) doivent se mobiliser et chercher ensemble des solutions à l’escalade de la violence destructrice dans le Sahel et dans les pays voisins.
Une preuve symbolique de notre solidarité active est l’observation d’une journée de deuil national (sous la forme d’un hommage solennel à toutes les victimes des massacres à connotation ethnique) au Mali et dans tous les états membres de la CEDEAO et du G-5 Sahel afin d’envoyer un signal fort de solidarité avec les communautés peules du continent et un signal de fermeté et de détermination dans la riposte à tous les génocidaires du continent.
L’Afrique faisant face à des périls sécuritaires qui menacent son essence et ses fondements, il nous faut comprendre l’alerte rouge déjà allumée, prendre le taureau par les cornes et assumer pleinement notre destin panafricain et notre devoir de protéger et de défendre tous nos compatriotes africains : éleveurs et /ou cultivateurs, nomades ou sédentaires, ruraux ou urbains !
Vivement l’avènement d’une Afrique unie et debout, capable de prendre elle même en charge sa sécurité et le bien être de ses populations ! »
LE SENEGALAIS MAGUETTE NDIAYE PARMI LES TROIS AFRICAINS RETENUS COMME ARBITRES CENTRAUX
La Commission des arbitres de la Fifa a publié la liste des 27 arbitres, 42 arbitres assistants et 21 arbitres assistants vidéo pour la Coupe du monde U-20 de la Fifa, Pologne 2019.
Une sélection dans laquelle figure notre compatriote Maguette Ndiaye qui constitue avec l’Algérien Mustapha Ghorbal et le Congolais Ngambo Ndala les trois Africains qui vont officier comme juges centraux. Les arbitres assistants africains seront six. Trois autres Africains ont été retenus comme arbitres à la Var (Vidéo assistance à l’arbitrage) dans la liste de la commission des arbitres de la Fifa. Il s’agit d’un Ethiopien, d’un Egyptien et d’un Gambien.
Selon la commission des arbitres de la Fifa, la préparation à la compétition, organisée par la sous-division de l’Arbitrage, « se concentrera sur des sujets aussi vastes que la lecture et la compréhension du jeu, le positionnement pour bien évaluer les situations de hors-jeu, la collaboration et l’importance d’être au bon endroit au bon moment afin de prendre les bonnes décisions grâce au meilleur angle de vue », peut-on lire dans le communiqué de l’instance mondiale du football. Des aspects que la commission a pris en compte et qui reflètent la philosophie de l’arbitrage de la Fifa puisque « essentiels à la préparation des arbitres, en plus d’être indispensables pour obtenir uniformité et homogénéité au niveau des décisions arbitrales à ce niveau ».
Au même titre que les arbitres assistants et le quatrième arbitre, la commission indique que les arbitres assistants vidéo auront pour mission de soutenir l’arbitre principal, qui continuera à prendre les décisions initiales - et finales - sur le terrain. La Coupe du monde U-20 de la Fifa, Pologne 2019 se tiendra du 23 mai au 15 juin 2019 et se déroulera dans les villes de Bielsko-Biala, Bydgoszcz, Gdynia, Lublin, Lodz et Tychy. La finale sera disputée à Lodz.