LES SANS PAPIERS EN FRANCE, UN ALLER SANS RETOUR
Lorsqu’ ils débarquent en Europe, ils s’interdisent de rentrer au pays natal sans le titre de séjour. Ils n’évoquent même pas l’idée de repartir au Sénégal pour enterrer un proche

En 2015, Sud quotidien faisait un reportage intitulé : « IMMERSION DANS LE CALVAIRE DES EMIGRES» ; l’accent était mis sur des sénégalais en situation irrégulière en France avec une parole forte d’un clandestin : « ICI C’EST LA MERDE».
Leurs situations ne se sont toujours pas améliorées. Elles se sont littéralement aggravées. Rappelons d’abord que le terme «sans- papiers» appelé aussi «les clandestins» désigne toute personne irrégulièrement installée en France sans titre de séjour. Il faut noter l’absence d’éléments chiffrés précis sur le nombre d’étrangers.
Néanmoins, selon la Caisse d’Assurance Maladie qui comptabilise le nombre de personnes bénéficiant de l’aide médicale d’Etat (AME), il y aurait entre 300 et 350 000 personnes en situation irrégulière. Il convient de rappeler qu’en 1974, le gouvernement français avait suspendu l’immigration des travailleurs étrangers et de leurs familles. Malgré cette décision, certains poursuivaient leurs émigrations sans gaieté de cœur. Il s’agit des personnes qui partent dans l’espoir d’une vie meilleure, pour échapper à un conflit, à une catastrophe naturelle et également pour des raisons politiques et économiques. Pour ces hommes et femmes, la migration est douloureuse car elle représente un arrachement à leur pays, à leur langue, à leurs proches…
Le journaliste Stephen Smith, spécialiste de l’Afrique, écrit dans son livre : « La ruée vers l’Europe», que la pression migratoire ne pourra jamais s’infléchir malgré les barricades mises en place par l’Europe.
Les Sénégalais font partie de ces clandestins qui vivent des situations catastrophiques en France. Ils sont souvent hébergés par des amis, frères, cousins, pères, etc., dans des foyers réservés aux migrants. La grande majorité d’entre eux est en France depuis plusieurs années, en situation irrégulière (cinq, dix, quinze ans, voire plus). L’un d’entre eux se confie : « Si j’avais su, je ne serais pas venu en France, je dors mal, je mange mal et je n’ai aucun avenir ici ; on est six personnes dans une chambre prévue pour accueillir une seule. »
La question du retour n’est pas du tout d’actualité. Lorsqu’ ils débarquent en Europe, ils s’interdisent de rentrer au pays natal sans le titre de séjour. Ils n’évoquent même pas l’idée de repartir au Sénégal pour enterrer un proche : mère, père, frère, sœur, femme, ni revoir leurs enfants qui grandissent sans eux. Il est admis par tous qu’il ne faut pas repartir au Sénégal sans le sésame, à savoir un titre de résident qui autorise le retour en France. La question n’est pas taboue, elle ne s’impose pas.
Au Sénégal, malgré le désir de la famille de revoir l’enfant prodige, elle ne souhaite pas son retour et ne veut pas le revoir traîner avec ses camarades oisifs qui sont parfois méprisés par la population. L’insulte majeure dans les villages, est : « Tu ne vaux rien, regarde, tous tes amis sont partis en voyage (ont émigré) pour subvenir aux besoins de leurs familles ».
Une infime minorité utilise d’autres nationalités aux fins de régularisation au titre de réfugié politique, car le Sénégal fait partie des pays appelés «d’origine sûre», au regard des garanties de protection que les autorités de ces pays offrent contre les persécutions et les mauvais traitements, ainsi que les sanctions qu’elles prévoient en cas de violation avérée des droits individuels.» Ces règles sont fixées par le conseil d’administration de l’OFPRA, (Office Français de Protection des Réfugiés et Apatrides). «Les sans-papiers sénégalais en France sont prisonniers à l’insu de leur plein gré», pour reprendre la parodie des guignols de l’info.