REVUE DE PARESSE
Arrêt sur image. Les pieds dans l’eau, en jean, veste bleue par-dessus une chemise blanche et casquette noire vissée sur la tête, Antoine Félix Abdoulaye Diome, ministre de l’Intérieur, s’est rendu dans les quartiers inondés de la capitale.

Arrêt sur image. Les pieds dans l’eau, en jean, veste bleue par-dessus une chemise blanche et casquette noire vissée sur la tête, Antoine Félix Abdoulaye Diome, ministre de l’Intérieur, s’est rendu dans les quartiers inondés de la capitale.
Les habitants de Yeumbeul, Diamaguène Sicap Mbao et Keur Massar ont accueilli la délégation du ministre, accompagné de son collègue Oumar Guèye, en charge des Collectivités territoriales, du Gouverneur de Dakar, des autorités locales, civiles et militaires. C’était dimanche dernier. Cette fois-ci, le chef de l’Etat a été épargné pour cet exercice de visite aux populations, devant les caméras, devenu presque une routine, chaque année à la même période.
En revanche, le Président Macky Sall a tenu tout de même une rencontre spéciale au Palais consacrée aux mesures à prendre pour soulager les populations sinistrées à la suite des fortes pluies enregistrées. Après avoir déclenché le plan national d’organisation des secours (ORSEC), charge au ministre de l’Intérieur d’aller à la rencontre des populations. Même initiative chez le ministre des Collectivités territoriales, du Développement et de l’Aménagement des Territoires, Oumar Guèye, après avoir accompagné son collègue en charge de l’Intérieur.
Cette fois-ci, c’est seul, ou presque, suivi par l’équipe de la 7TV conduite par Maïmouna Ndour Faye, qu’il visite, le mercredi suivant, les zones inondées. Seulement, quelle est l’utilité de patauger dans les eaux pluviales pour exprimer sa compassion aux populations sinistrées ? Pour les besoins des images ? Pour faire montre de témérité ? Les chaînes télés et les sites en ligne sont en opération commando et embarqués, comme en période de guerre, lorsque les équipes de journalistes suivent les troupes des soldats pendant plusieurs jours pour les besoins de leur reportage. Mais lorsque les organes de presse braquent leurs projecteurs sur les quartiers inondés de la capitale, recueillent les témoignages parfois insoutenables des victimes, le mimétisme éditorial devient excessif. Les inondations virent au voyeurisme et le mécontentement des populations ainsi relayé alimente encore et encore l’offre médiatique. D’autres font également le choix de consacrer leur Une à des sujets plus racoleurs qu’informatifs.
La Une du quotidien L’Observateur du jeudi dernier fait la part belle à cette nouvelle affaire Dieyna Baldé, reléguant au second plan les sujets plus sérieux. Idem pour le lendemain, vendredi, où la Une est consacrée à une « Sale affaire de sextorsion », une histoire de « chantage, argent, voyage » sur fond d’extorsion de sous à un commerçant par des jeunes femmes. Pourtant, la victoire historique des Lions du Beach Soccer, première équipe africaine à accéder à une demi-finale de coupe du monde de football Senior, méritait bien plus qu’un demi-bandeau à la Une. Alors, L’Obs, un quotidien définitivement « people » ? Le journal au plus fort tirage du pays fait le choix du « racolage » pour garder sa position. Les sujets « sérieux » sont relégués en manchette, tandis que les faits divers font systématiquement la Une. La disparition de l’ancien Président du Tchad, en exil au Sénégal depuis plus de deux décennies et condamné en 2016 à la prison à vie pour crimes contre l’Humanité et crimes de guerre, a aussi fait les gros titres de la presse nationale et internationale. Hissein Habré, ange ou démon ? Tyran ou héros ? Victime ou bourreau ?
L’histoire le comptera parmi les victimes de cette pandémie à coronavirus car décédé des suites de la Covid-19. Le sort de l’ancien Président a toujours interpellé les organismes de défense des droits de l’Homme. Ces derniers ont brandi une ultime accusation envers l’Etat du Sénégal pour n’avoir pas fait bénéficier au défunt d’une sorte de « trêve » pour raison sanitaire, pour lui permettre de retourner auprès de sa famille, le temps que s’estompe cette troisième vague. Une trêve dont l’ancien Président tchadien avait pu bénéficier en avril 2020, pour une durée de deux mois, à cause de la crise sanitaire.
A coup de communiqué, le gouvernement du Sénégal s’est défendu en précisant qu’aucun cas de Covid n’a été relevé au sein de l’administration carcérale, une manière de se dédouaner et de se laver à grande eau. A retenir aussi, cette déclaration de l’avocat du collectif des victimes de Habré qui déclare que sa mort ne change rien aux suites à donner, notamment l’indemnisation des victimes. À défaut de bénéficier de la clémence humaine, peut-être bénéficiera-t-il de la clémence divine ?