CE JOUR-LÀ, J'AI ÉTÉ OBLIGÉ DE ME BATTRE POUR MA VIE
Condamné en 2017 à six mois ferme pour coups mortels, Barthélémy Dias revient sur ce 22 décembre 2011, quand une fusillade l’a opposé à des nervis envoyés par le parti au pouvoir

À l’époque, j’étais le responsable des jeunesses socialistes et luttais contre le troisième mandat du président Abdoulaye Wade. Les tensions étaient vives, l’élection s’annonçait mouvementée. Le 22 décembre 2011, en fin de matinée, je me trouvais dans mon bureau à l’Hôtel de ville lorsque j’ai reçu la visite d’individus envoyés et convoyés par le Parti démocratique sénégalais (PDS), alors au pouvoir. Ils ont encerclé le bâtiment.
Comme la mairie se trouve dans une impasse, je ne pouvais pas m’échapper. J’ai appelé la police, qui a tout fait pour les disperser, en vain. Quand j’ai compris que les forces de l’ordre n’arriveraient pas à les faire partir, je suis sorti avec un membre de ma sécurité. J’étais quand même le maire de la commune, je ne pouvais pas fuir devant des voyous ! Et ce jour-là, j’ai été obligé de me battre pour ma vie.
J’avais une arme à feu et deux armes factices. J’ai peut-être vidé trois ou quatre chargeurs. Ce n’était pas des tirs de sommation, car les personnes en face de moi étaient armées elles aussi. La fusillade a duré presque une demi-heure. J’aurais pu être touché, mais il faut croire que mon heure n’était pas venue. Et puis les nervis du PDS ont pris la poudre d’escampette.
« Mes droits ont été bafoués »
Je rappelle qu’à l’époque, les autorités ne faisaient pas dans la diplomatie. Beaucoup d’hommes politiques avaient eux aussi été attaqués : Alioune Tine, Moustapha Niasse, Ousmane Tanor Dieng… Mais ils étaient allés rendre visite à des papis ! Alors que quand ils sont arrivés chez moi, ils ont trouvé un homme jeune, comme eux. Je sais qu’ils n’étaient pas venus m’amener un carton d’invitation pour un anniversaire ! Je savais que ce jour arriverait, que je serai agressé tôt ou tard, car mon nom revenait souvent dans les réunions des états-majors et que j’incarnais à leurs yeux l’aile dure de l’opposition. Chez nous, quand on a plus d’argument à opposer, on choisit celui de la force.