POURQUOI L’OPERATION DE RECONQUETE DE MACKY SEMBLE VOUEE A L’ECHEC
Macky Sall en opération reconquête à Sédhiou. C’est le moins qu’on puisse dire après sa rencontre avec les responsables de la majorité présidentielle de la localité, avant-hier.

Macky Sall en opération reconquête à Sédhiou. C’est le moins qu’on puisse dire après sa rencontre avec les responsables de la majorité présidentielle de la localité, avant-hier. Rencontre au cours de laquelle le chef de l’Apr, visiblement choqué, a exprimé sa déception par rapport aux revers que BBY a essuyés face à Ousmane Sonko dans les circonscriptions de Sédhiou et de Goudomp, lors des dernières législatives. Selon Macky Sall, ces revers sont consécutifs aux clivages qui gangrènent son parti dans la Moyenne Casamance et particulièrement à Sédhiou et à Goudomp. Ces clivages auraient, selon son analyse, entraîné des votes-sanctions à l’intérieur de la coalition BBY pour empêcher tel ou tel de gagner. Aussi, il a-t-il intimé à ses partisans de mettre de côté leurs querelles et de travailler, main dans la main, pour l’intérêt de leur coalition à laquelle ils ont causé d’énormes préjudices.
Et en marge des inaugurations et autres poses de pierres qui ont pris souvent les allures de meetings politiques, celui à qui on prête l’intention de briguer un troisième mandat a également rendu visite à beaucoup de guides religieux de la région, depuis son arrivée à Sédhiou. Ces visites ciblées dites de courtoisie, on le sait, sont toujours teintées de politique. On rencontre ces guides pour avoir les voix de leurs talibés ou des membres de leurs familles religieuses. En fait, dans ces villages, c’est connu, les guides religieux ont une forte influence sur les faits et gestes des populations. Chacun essaie de se conformer au vœu du guide pour montrer son attachement à celui-ci. Donc, le soutien de ces guides est toujours très bénéfique pour les pêcheurs de voix. Sur un autre plan, le locataire du palais de l’avenue Léopold Sédar Senghor a accordé et continue d’accorder d’interminables audiences à des notabilités ou à des leaders d’opinion de la région. C’est un secret de Polichinelle, ces audiences ont toutes des relents politiques, c’est une campagne de charme déguisée pour faire des récupérations. Dans les jours à venir, on ne devrait pas être surpris d’apprendre que tel ou tel responsable d’un parti de l’opposition à Sédhiou a retourné sa veste pour rejoindre le camp présidentiel. Mais est-ce que ces campagnes de charme du chef suffiront pour permettre à la majorité présidentielle de renverser la tendance dans le Pakao (Sédhiou) et dans le Balantakounda (Goudomp) ? Une telle éventualité semble peu probable à priori, même si la politique est souvent faite de surprises.
L’influence massive des jeunes dans la victoire de YAW
En fait, à Sédhiou, à Goudomp, comme presque dans tout le pays, ce sont les jeunes qui constituent l’essentiel de l’électorat de Sonko. C’est cette frange qui a plébiscité les listes de YAW dans ces deux départements, lors des dernières locales. Ces jeunes, influencés sûrement par leurs camarades des grandes villes du pays qui battent une campagne quasi-quotidienne dans les réseaux sociaux en faveur de Sonko, qu’ils peignent comme le sauveur, ont voté massivement pour les listes de YAW lors des législatives. Les discours qu’ils entendent, à travers les médias et sur internet ont une influence certaine dans leur esprit, ils ont fini de se faire une religion que tant qu’il n’y a pas un changement radical dans ce pays, le peuple continuera toujours de souffrir.
À leurs yeux, celui qui incarne leur espoir, c’est Sonko et non le régime actuel. Et comme mentionné un peu plus haut, les réseaux sociaux ont beaucoup contribué à incruster cette idée dans leurs têtes. En fait, on n’est plus à l’époque où seuls les jeunes des villes ont accès aux réseaux sociaux puisque, actuellement, même dans les coins les plus reculés du pays, à l’image de Goudomp qui est plus proche de la Guinée-Bissau que de Ziguinchor ou Sédhiou, on peut se connecter sur internet et être branché sur l’actualité. Pendant la période de la campagne électorale, presque tous les jeunes étaient branchés sur la page Facebook de Pastef pour suivre en direct les déplacements de Sonko à travers les différentes localités du pays.
Au lendemain de son passage à Kolda où les jeunes ont accueilli son cortège, vers une heure du matin, dans une liesse indestructible, les jeunes du Balantakounda avaient, eux aussi, réclamé la venue du leader du Pastef dans leur contrée pour qu’ils puissent lui manifester leur soutien. À Sédhiou également, les jeunes avaient obligé son cortège à s’arrêter même dans les plus petites bourgades pour communier avec la population. Ces deux faits avaient fait anticiper à beaucoup d’observateurs une victoire de YAW à Sédhiou et à Goudomp.
Dans un autre registre, il faut signaler que les jeunes des régions de Sédhiou et de Kolda, à l’image de ceux de presque tout le pays, ne digèrent pas les brimades exercées sur le leader du Pastef à chacune de ses sorties politiques et les arrestations ciblées de ses militants. Cette situation les pousse à la révolte. Aussi profitent-ils des élections qui constituent une belle occasion pour désavouer le régime au pouvoir. Et si on ajoute à ce cocktail le chômage endémique quo touche ces jeunes et découle de l’absence quasi-totale de programmes d’emplois dans cette partie de la Moyenne Casamance, et cela malgré les énormes potentialités dont elle regorge, on est tenté de croire que la mission de reconquête du président donnera difficilement les résultats escomptés. En effet, après les campagnes de commercialisation des noix d’acajou qui ne durent que deux mois et qui ne profitent véritablement pas aux producteurs, ces jeunes n’ont aucune activité pour le reste de l’année. Ils passent leurs journées sous les manguiers à se tourner les pouces. Du moins pour ceux d’entre eux, c’est-à-dire l’immense majorité, qui ne disposent pas de motos « Jakarta » !