38,3 MILLIONS DE PERSONNES AU SAHEL MENACÉES PAR UNE INSÉCURITÉ ALIMENTAIRE
Si rien n’est fait d’ici juin à août prochain, les pays du Sahel connaîtront une insécurité alimentaire.

Présidant hier à Dakar la réunion de concertation technique du dispositif régional de prévention et de gestion des crises (PReGec), le secrétaire exécutif du comité Permanent inter-états de Lutte contre la Sécheresse au Sahel (cilss) a tiré la sonnette d’alarme par rapport aux pénuries alimentaires qui guettent la région. Selon Abdoulaye Mouhamadou, 38,3 millions de personnes risquent de connaître une insécurité alimentaire au cours de la prochaine période de soudure juin-août.
Si rien n’est fait d’ici juin à août prochain, les pays du Sahel connaîtront une insécurité alimentaire. L’alerte est du secrétaire exécutif du Comité Permanent Inter-états de Lutte contre la Sécheresse au Sahel (cilss) qui présidait hier une réunion sur la coordination technique du dispositif régional de prévention et de gestion des crises (PREGEC).
Selon Abdoulaye Mahamadou, seuls le Cap-Vert et le Liberia ne sont pas concernés par cette situation. «La situation alimentaire au sahel, les analyses de la sécurité alimentaire et nutritionnelle avec l’outil-cadre harmonisé conduit dans les pays, excepté au Cap-Vert et au Liberia, révèlent qu’en l’absence de réponse appropriée, le nombre total de personnes en insécurité alimentaire et nutritionnelle pourrait atteindre 38,3 millions de personnes au cours de la prochaine période de soudure juinaoût prochain, y compris les personnes déplacées internes que sont les réfugiées», prédit-il. A l’en croire, cette situation traduit une détérioration inquiétante de la situation alimentaire jamais observée depuis 2005 dans la région. Pire, elle montre les prémices d’une crise alimentaire perceptible qui réunit les conditions d’accès limites des relations vulnérables à une alimentation adéquate.
Cette insécurité alimentaire accentuée par la situation sécuritaire affecte, selon Abdoulaye Mouhamadou, en plus des 38,3 millions de personnes en crise, 83 millions de personnes qui sont à la limite de leur capacité à satisfaire leurs besoins alimentaires minimums. Face à cette situation, il préconise une assistance alimentaire appropriée pour assurer une consommation alimentaire adéquate. A savoir protéger les moyens d’existence et lutter contre la malnutrition. Il recommande aux gouvernements des zones sahel et de l’Afrique de l’ouest de prendre des mesures à effet immédiat en vue de lutter contre la vie chère et préserver le pouvoir d’achat des populations, notamment une subvention des produits pétroliers qui impactent sur le coût du transport et le panier alimentaire des ménages vulnérables. «Il leur faudra lever les mesures d’interdiction d’exportation afin de faire jouer le principe de la solidarité régionale séculaire entre les peuples, basée sur les complémentarités agro-écologiques des différents pays ; mais aussi maintenir pendant toute la période de soudure les mesures transitoires d’allègements fiscaux ou de plafonnement des prix pour faire baisser la tension sur les prix. A cela s’ajoute la modernisation de la production agricole animale et halieutique avec le recours à l’irrigation, à la mécanisation et à l’accès aux engrais de façon à assurer la disponibilité, en toute saison, des produits.
Au niveau des organisations inter-gouvernementales, le secrétaire exécutif du CILSS leur demande d’appuyer davantage les pays dans le renforcement des actions d’adaptation au changement climatique, séc Acôté des réponses offertes, il invite les pays à faire une déclaration politique d’urgence qui engage les Etats à faciliter l’accès à l’eau, aux intrants agricoles aux petits agriculteurs et à prendre les dispositions idoines pour faciliter la libre circulation des biens et des personnes et des marchandises, tout en révisant considérablement les tracasseries liées aux paiements.
LE NIGER, LE MALI, LE BURKINA FASO ET LE TCHAD SONT LES PAYS LES PLUS TOUCHES
Revenant sur la campagne agropastorale 2021-2022,Abdoulaye Mouhamadou révèle que les productions agricoles dans les pays du sahel et de l’Afrique de l’ouest sont estimées pour la production céréalière totale (maïs, mil, riz, sorgho, oignon et blé) à 73 millions de tonnes, soit une baisse de -2,2% par rapport à l’année dernière et en hausse de 2,7% par rapport à la moyenne des 5 dernières années. Il précise que les baisses les plus prononcées, comparées à l’année dernière, sont observées au Niger -39%, au Mali -15% au Burkina - 10%, et au Tchad -9%. Pour ce qui est du Cap-Vert, il affirme que cela fait la cinquième année consécutive que le pays n’a pas enregistré de production agricole significative.
Pour la production des tubercules, elle est à 203,8 millions de tonnes, en hausse de 5% par rapport à l’année dernière. Une situation qui s’explique, selon lui, par le fait que les marchés ont été particulièrement affectés par la conjonction des crises sanitaires liées à la pandémie, la crise sécuritaire en nette détérioration dans la région, les crises politiques et la baisse importante de la production céréalière en particulier dans les pays du sahel. «Ceci a eu des conséquences sur la hausse des prix dans la région, aggravée par des coûts des marchés internationaux en conséquence et surtout le ralentissement du fret au niveau mondial et la hausse de la logistique», soutient M. Abdoulaye. Sur le plan international, il reste persuadé que la crise en Ukraine a assombri les perspectives concernant les approvisionnements en blé et surtout en engrais pour les prochains mois.
En effet, la campagne agricole 2022- 2023 a déjà commencé dans les zones bénéficiant de 2 campagnes agricoles de la région, et les prix des engrais sont déjà passés du simple au double dans certains pays comme le Burkina. La situation des marchés agricoles se caractérise par la persistance de la flambée des prix alimentaires depuis le début des récoltes de la campagne agricole 2021-2022. En ce mois de mars 2022, les hausses des prix, comparées à la moyenne quinquennale, sont de 41 à 46% sur le maïs atteignant plus de 100% dans certaines localités, 30 à 37% sur le mil et le sorgho et de 15 à 21% pour le riz. Les hausses des prix sont générales et elles sont observées dans tous les pays.