68% DES SENEGALAIS VEULENT LE RETOUR DE LA PEINE DE MORT
Les Sénégalais veulent le retour de la peine de mort

La multiplication des meurtres barbares, gratuits et atroces ainsi que la délinquance extrême ont abouti à un sentiment généralisé d’insécurité. D’autant que plus de six Sénégalais sur 10 jugent « plutôt mal » ou « très mal » les performances du gouvernement dans la réduction de la criminalité. Une grande majorité des citoyens (68 %) est d’accord avec l’introduction de la peine de mort dans la Constitution. C’est le résultat de l’enquête de Afrobarometer publiée ce mardi 27 septembre.
Les Sénégalais veulent le retour de la peine de mort. Ce sentiment généralisé révélé par l’enquête d’Afrobarometer découlerait d’une croyance populaire selon laquelle l’Etat ne serait plus à même de prendre en charge la problématique de la peine de mort. « Malgré le dispositif sécuritaire déployé nuit et jour sur le terrain et l’implantation des caméras de vidéosurveillance sur l’ensemble des zones sensibles, l’insécurité continue d’être observée par endroits, notamment dans le département de Pikine. L’effectif de la population carcérale reste en hausse, passant de 10.045 en 2017 à 11.014 en 2018, dont 241 mineurs. Les Sénégalais révèlent un sentiment d’insécurité dans leurs quartiers et, dans une moindre mesure, la crainte de subir un crime dans leurs propres maisons.
Cette inquiétude est plus élevée chez les habitants en milieu rural, les moins instruits et les plus pauvres. A côté de ce sentiment d’insécurité, les citoyens déplorent l’inégalité devant la justice et l’impunité des officiels qui commettent des crimes » écrit Afrobarometer dans le résumé de son enquête consacrée au Sénégal. Selon toujours cette étude, la majorité (63%) des Sénégalais s‘est sentie en insécurité dans les quartiers au moins une fois tandis que le tiers (32%) des citoyens craint de subir un crime dans les maisons durant les 12 derniers mois. Ce sentiment d’insécurité dans les quartiers est plus ressenti par les habitants en milieu rural (67 %), les plus pauvres (67 %), les moins instruits (67%) et les habitants de la zone Nord (74%). La peur de subir un crime dans la maison est plus élevée chez les femmes (34 %), les résidents en milieu rural (36 %), les moins instruits (40 %), les plus pauvres (42 %) et les habitants des zones Sud/Est (35 %) et Nord (47 %). D’autres formes d’insécurité sont également signalées : violences psychologiques (13 %), harcèlement dans le lieu de travail (12 %), violences physiques (7 %), viols (3%) et autre violences sexuelles (3%).
Manque d’emplois des jeunes, la principale cause de la hausse de l’insécurité
Quatre Sénégalais sur 10 (40 %) pensent que le manque d’emploi des jeunes est la principale cause de la hausse de l’insécurité et de la délinquance. Un citoyen sur cinq soutient que l’accentuation de la pauvreté (21%) et le manque d’éducation et de discipline à la maison (20%) en sont les causes. Ce sentiment d’insécurité dans les quartiers suit une tendance haussière depuis 2014, passant de 43 % à 63 %, soit une augmentation de 20 points de pourcentage. Cependant, la peur de subir un crime dans sa propre maison est restée plus stable, quoiqu’elle soit en légère hausse par rapport à 2017. Plus de six Sénégalais sur 10 (62 %) jugent « plutôt mal » ou « très mal » les performances du gouvernement dans la réduction de la criminalité. D’ailleurs, la grande majorité (68%) des citoyens est d’accord avec l’introduction de la peine de mort dans la Constitution. Les citadins (65%) et les plus instruits (53 %) sont moins favorables à l’introduction de la peine de mort que les habitants du milieu rural (71%) et les moins instruits (69 %-72 %).
Cependant, le soutien à l’introduction de la peine de mort est quasiment identique suivant le sexe, l’âge et le degré de pauvreté vécue. La majorité des citoyens pensent que le gouvernement devrait pouvoir surveiller les communications privées (59 %) et empêcher les gens de se déplacer (57%) en cas de menaces de sécurité publique. Cependant, 54% s’accordent sur le fait que le gouvernement ne devrait jamais réguler ce qui se dit dans les lieux de culte. La majorité (52 %) des Sénégalais pense que la création d’emplois pour les jeunes constitue le moyen le plus efficace pour lutter contre la délinquance et l’insécurité. Près d’un Sénégalais sur cinq (18 %) affirme que le rétablissement de la peine de mort pourrait résoudre le problème de l’insécurité. Afrobarometer est un réseau panafricain et non-partisan de recherche par sondage qui produit des données fiables sur les expériences et appréciations des Africains, relatives à la démocratie, à la gouvernance et à la qualité de vie. Il est basé à Accra au Ghana. Huit rounds d’enquêtes ont été réalisés dans un maximum de 39 pays depuis 1999. Les enquêtes du Round 8 en 2019/2021 couvrent 34 pays.
EN 2004, LA PEINE DE MORT ETAIT ABOLIE AU SENEGAL
La peine de mort a été abolie au Sénégal le 10 décembre 2004 par le vote d’un projet de loi à l’Assemblée nationale. Cette décision était intervenue à la suite d’une intense campagne internationale de la Fédération internationale des droits de l’homme (FIDH) pour l’abolition universelle de la peine de mort, en particulier par les pays africains. Ce projet de loi avait été présenté devant le Parlement le 16 juillet 2004 afin de modifier les articles 337 et 346 du Code Pénal qui prescrivaient encore la peine de mort pour les personnes reconnues coupables d’enlèvement ou de prise d’otages. Bien qu’en vigueur jusqu’ici, la peine capitale n’avait plus été appliquée depuis 1967. Avec cette décision, le Sénégal rejoignait le camp des abolitionnistes et devenait le 79ème pays ayant aboli la peine de mort et le quatrième pays membre de Communauté économique des Etats d’Afrique de l’ouest (CEDEAO) à ne plus prévoir la peine capitale dans sa législation. La FIDH avait salué cette décision historique de la représentation nationale sénégalaise et engagé le Sénégal à ratifier le deuxième protocole facultatif au Pacte international relatif aux droits civils et politiques visant à abolir la peine de mort. Au Sénégal, les seules exécutions furent celles de Moustapha Lô le 11 Avril 1967 suite à une tentative d’assassinat contre le président Senghor et de Abdou Faye pour le meurtre du député Demba Diop le 15 Juin 1967.