CARDINAUX, ARCHEVEQUES ET EVEQUES DE L’AFRIQUE DE L’OUEST METTENT EN GARDE LA CEDEAO
L’intervention militaire pour rétablir l’ordre constitutionnel au Niger est-elle vraiment la solution ?

L’intervention militaire pour rétablir l’ordre constitutionnel au Niger est-elle vraiment la solution ? Alors que les chefs d’Etat de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) vont se pencher sur la question demain, jeudi, avec l’expiration de l’ultimatum de la CEDEAO aux nouvelles autorités nigériennes depuis dimanche, de plus en plus de voix s’élèvent pour alerter contre cette option. Dans une lettre, les Cardinaux, Archevêques et Evêques des Conférences épiscopales réunies de l’Afrique de l’Ouest, appellent tous les acteurs impliqués dans la crise et notamment la CEDEAO à faire preuve de retenue, de discernement et de responsabilité.
Dans une lettre datée du 4 août 2023 à Abuja (Nigéria), les Cardinaux, Archevêques et Evêques des Conférences Episcopales Réunies de l’Afrique de l’Ouest s’opposent à une intervention militaire au Niger, envisagée par la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), suite au coup d’État du 26 juillet 2023. Dans ce contexte de tension, ils invitent les acteurs majeurs à la retenue, à plus de responsabilité et au discernement dans la gestion de la situation socio-politique au Niger. «Chers frères et sœurs en humanité,
Nous, les Cardinaux, Archevêques et Évêques des Conférences Episcopales Réunies de l’Afrique de l’Ouest, après concertation, sommes profondément préoccupés par la tension sous régionale en lien avec la situation politique au Niger. Face aux événements qui se déroulent actuellement dans notre sous-région, il est de notre devoir moral, spirituel et pastoral d’adresser cette lettre d’exhortation à tous les acteurs impliqués, de près ou de loin, dans la gestion de cette crise afin d’inviter chacun à faire preuve de retenue, de discernement et de responsabilité. Il y va de la vie de nos peuples de l’Afrique de l’Ouest», lit-on dans la missive du clergé.
Ces frères et sœurs en humanité qui gardent comme vision centrale «l’intégrité des populations», insistant sur le respect de la dignité humaine et un sens élevé de la redevabilité devant les hommes, l’histoire et Dieu le Créateur, réaffirment que «rien ne peut justifier la création ou la facilitation d’un environnement destructeur pour les populations. Aucun intérêt, projet individuel, national, régional, géopolitique ou confessionnel ne doit prévaloir sur la préservation de la vie, de la dignité humaine et de l’avenir des générations futures en Afrique de l’Ouest et au-delà».
C’est pourquoi, considérant que «la violence ne résout aucun problème», même pas celui qui est à l’origine de son déclenchement, ils réaffirment et insistent auprès de la CEDEAO et de l’Union Africaine, pour dire que «toute intervention militaire au Niger en ce moment, compliquerait plus la situation des populations du Niger, de la sous-région qu’elle ne leur apporterait des solutions.»
En atteste, relève le clergé, le terrorisme qui a déjà son bilan macabre de veuves, d’orphelins, de déplacés, d’affamés, de mutilés, etc. Le cas de la Libye aussi, demeure un exemple tragique des conséquences désastreuses sur la vie, la dignité et l’avenir des populations. «Nous ne pouvons pas rester silencieux face à de telles situations et devons tirer des leçons pour que de tels événements ne se reproduisent plus, en particulier avec le Niger comme épicentre potentiel d’une crise similaire», déclarent les chefs de l’Eglise de l’Afrique de l’Ouest clergé qui appellent les organismes régionaux et sous régionaux notamment la CEDEAO et l’Union Africaine (UA) «à faire preuve de responsabilité devant l’histoire et à revisiter leurs missions respectives, car, en cette période critique et délicate, il est essentiel que ces organisations jouent un rôle actif dans la recherche de solutions pacifiques et durables, en mettant en avant les intérêts de la population et le respect de leur dignité».
Le 26 juillet dernier, le président nigérien, Mohamed Bazoum, a été renversé par un coup d’État. Quatre jours après, le 30 juillet, la CEDEAO, dont le Niger est membre, a fixé un délai d’une semaine aux militaires putschistes pour rendre le pouvoir au président Bazoum, n’excluant pas une intervention armée, passé ce délai. Cet ultimatum ayant expiré dimanche dernier, à minuit, un sommet des chefs d’Etat de la CEDEAO est convoqué jeudi prochain.