TIVAOUANE : DES JEUNES EN COLERE SACCAGENT DES EDIFICES PUBLICS ET BRULENT TOUT SUR LEUR PASSAGE
C’est sous l’emprise d’une colère noire que les jeunes du village traditionnel de pêcheurs de Fass Boye, dans le département de Tivaouane, se sont réveillés hier mercredi 16 juillet 2023 pour brûler des pneus et saccager des édifices publics

C’est sous l’emprise d’une colère noire que les jeunes du village traditionnel de pêcheurs de Fass Boye, dans le département de Tivaouane, se sont réveillés hier mercredi 16 juillet 2023 pour brûler des pneus et saccager des édifices publics. Une manière d’exprimer violemment leur désarroi après que la pirogue qui avait quitté leur localité le 10 juillet dernier avec à son bords 101 passagers ait été finalement retrouvée ce mardi au large du Cap-Vert, avec juste 38 rescapés et sept corps à bord. Autrement dit, dans sa dérive sur l’immense océan, l’embarcation a enregistré une soixantaine de morts, la plupart d’entre eux étant originaires de Fass Boye. Un drame qui a plongé la localité dans la tristesse et la consternation.
Le phénomène de l’émigration clandestine a pris des proportions inquiétantes au niveau du village traditionnel de pêcheurs de Fass Boye, dans la commune de Darou Khoudoss, département de Tivaouane, où les jeunes, tentés par le mirage d’une vie rose en Europe, n’hésitent guère à affronter la mer ce avec des pirogues artisanales. Une traversée vers l’Espagne qui se traduit souvent par des morts et des disparitions. Le dernier drame en date a commencé à se jouer le 10 juillet dernier lorsqu’une pirogue ayant à son bord 101 personnes a quitté Fass Boye à destination des îles Canaries. Plusieurs jours après, elle n’était pas parvenue à destination et les parents restés au village avaient perdu tout contact avec ses occupants. Les recherches entreprises n’avaient rien donné. Un mois plus tard, les familles semblaient s’être faites à la raison. Jusqu’à ce que la pirogue disparue soit retrouvée mardi dernier par un navire espagnol au large du Cap-Vert. Hélas, il n’y avait plus à son bord que 38 survivants et sept corps. Autrement dit, et selon l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), confirmant en cela les autorités capverdiennes, « plus de 60 migrants sont présumés avoir perdu la vie à bord ». La nouvelle de ce terrible drame a plongé Fass Boye dans la tristesse et la consternation dans un premier temps avant que les jeunes de la localité n’expriment violemment leur colère dans la rue.
Accusant l’Etat de n’avoir pas déployé, dès le signalement de la disparition de la pirogue, tous les moyens requis pour la retrouver et sauver ses passagers, ils ont brûlé des pneus un peu partout dans le village et saccagé des édifices publics sur leur passage. Dans ce sillage, ils ont saccagé le service des pêches avec des dégâts estimés à plusieurs de millions de FCFA, le domicile de l’adjoint au maire Moda SAMB, par ailleurs président du CPLA (comité local de la pêche artisanale) dont ils ont entièrement détruit le verger.
Poursuivant leur équipée, les manifestants armés de gourdins et de pierres ont aussi attaqué le Collège d’Enseignement Moyen (CEM), le marché, le magasin de stockage, etc. Il a fallu l’intervention d’un peloton de gendarmerie en provenance de Thiès et venu prêter main-forte aux pandores de Tivaouane complètement dépassés, pour ramener le calme. Selon Arona Thioune, adjoint au maire de Darou Khoudoss, c’est avec beaucoup de tristesse et de désolation que la nouvelle de la disparition d’une soixantaine de personnes a été apprise dans la commune, qui a ainsi perdu plusieurs de ses fils dans cette tragédie.
Selon lui, c’est des moments difficiles, mais il faut que les uns et les autres fassent preuve de retenue, le mal étant déjà fait. « Manifester violemment, saccager des édifices publics et des biens d’autrui, cela ne fait qu’empirer inutilement la situation » estime-t-il. Il souligne que, malgré le temps qui s’est écoulé depuis le 10 juillet dernier, les familles gardaient toujours l’espoir de retrouver tôt ou tard les leurs. L’adjoint au maire a encore une fois appelé toute la population à la retenue, en lui demandant également de refuser d’agir sous le coup de la colère et de l’émotion. Cela dit, Arona Thioune soutient que l’Etat également doit tout faire pour rapatrier dans les meilleurs délais les corps retrouvés afin de permettre aux familles de faire leur deuil. Ce qui, selon lui, serait de nature à apaiser quelque peu leur douleur.