HUIT PARMI LES SEIZE «THIANTACOUNES» MENACENT DE SE TUER
Désespères par une détention provisoire de 6 ans

Les 16 talibés de Cheikh Béthio Thioune, en détention pour le double meurtre de Médinatoul Salam et qui attendent d’être jugés depuis 6 ans, ont adressé une lettre à l’Association pour le soutien et la réinsertion sociale des détenus (Asred) pour dénoncer leur longue détention provisoire. Huit parmi ces inculpés menacent de se suicider, alors que trois ont tenté de se tuer avec du détergent et par le feu.
Les 16 Thiantacounes pensionnaires de la maison d’arrêt et de Correction (Mac) de Thiès depuis 2012, dans le cadre du double meurtre de Médinatoul Salam, ont adressé une lettre le 20 novembre à l’Association pour le soutien etla réinsertion sociale des détenus (Asred) pour se plaindre de leur longue détention provisoire et des dégâts collatéraux ressentis au sein de leurs foyers respectifs.
Il s’agit de Mamadou Hanne, Mame Balla Diouf, Cheikh Faye, Ali Diouf, Moussa Dièye, Khadim Seck, Mouhamed Sène, Mamadou Guèye, Massamba Fall, Pape Ndiaye, Adama Sow, Demba Kėbé, Mor Talla Diop, Ablaye Diouf, Ali Diallo et Demba Diallo. Huit parmi ces inculpés menacent d’abréger leur séjour sur terre. «En effet, face au désespoir et au sentiment d’avoir été volontairement placés au fond des tiroirs des oubliettes, ces derniers comptent bien user de tous les moyens afin de se faire entendre et de réclamer ce qui leur revient de droit : un jugement !
En plus de 6 ans de détention dite «provisoire», nombreux d’entre eux ont vu leurs parents quitter ce monde sans pouvoir leur adresser leurs adieux ou même assister à leurs obsèques, d’autres ont vu leurs épouses venir au parloir demander vigoureusement le divorce … Plusieurs familles se sont ainsi disloquées, faute d’horizon limpide autant pour les détenus que pour leurs proches», dit un communiqué de l’Asred. Les «Thiantacounes» dénoncent aussi leurs conditions de détention marquées, selon eux, par «la torture permanente depuis maintenant plus de 2400 jours, qui est d’attendre de manière quotidienne pour ne pas dire permanente une fin à ce supplice, un honneur rendu, un horizon de liberté volée ... autrement dit un jugement », note l’Asred. «Comment pouvons-nous faire croire aux citoyens que nous sommes une République qui fonctionne lorsque celle-ci ne parvient pas à traiter un tel dossier en 6 ans ? Comment cette même République pense t-elle pouvoir affirmer à l’opinion publique et même internationale, préserver et respecter les droits de l’Homme?», se sont demandés les concernés.
Et de poursuivre : «Nous tenons à rappeler aux autorités judiciaires les responsabilités qui leur incombent à l’endroit des détenus que nous sommes au sein de la Mac de Thiès ! Diètes et tentatives de suicide n’ont servi à rien jusqu’ici. Notez que face au désespoir qui nous habite, nous comptons bien retrouver liberté et dignité devant votre juge ou devant LE JUGE, notre vie d’ici-bas n’ayant plus aucun sens». L’Asred a rappelé qu’un de ces détenus avait tenté de s’immoler par le feu dans les toilettes et «n’eût été l’intervention rapide de ses codétenus, l’irréparable se serait produit». Deux parmi ces inculpés avaient tenté le suicide en ingurgitant de l’eau de javel.
Pour finir, l’Asred «lance un appel solennel aux autorités judiciaires de prendre toutes les dispositions nécessaires pour que ces personnes puissent être jugées le plus rapidement possible, avant que l’irréparable ne se produise».