«NOUS ALLONS VERS L’EXTINCTION DE LA RACE HUMAINE SI…»
Amadou Gallo Diop s’est prononcé lors la journée de la renaissance scientifique de l’Afrique (Jrsa), au Musée des Civilisations noires

L’Académie Nationale des Sciences et Techniques du Sénégal (Ansts) a célébré, hier, la journée de la renaissance scientifique de l’Afrique (Jrsa), au Musée des Civilisations noires. A cette occasion, il a été question de discuter de la révolution scientifique que constitue «l’édition génomique»
«Est-ce que nous allons assister à une troisième défaite de l’Afrique face à l’innovation technique et technologique ?» s’est interrogé le Pr Amadou Gallo Diop, Directeur général de la Recherche et de l’Innovation au ministère de Enseignement Supérieur, de la Recherche et de l’Innovation, représentant le ministre Cheikh Omar Hanne à la célébration de la Journée de la renaissance scientifique de l’Afrique (Jrsa). En posant cette question, il alerte sur l’urgence de prendre conscience de la place de la recherche dans le développement de l’humanité. «Nous devons chercher et trouver, car c’est la base du développement», indique Pr Amadou Gallo Diop qui, dans la foulée, met en garde contre les revers de l’évolution génomique. «Si derrière les trouvailles il n’y a pas d’éthique, nous allons vers l’extinction de la race humaine», prévient-il.
Le conflit entre la science et la morale et/ou l’éthique est ainsi soulevé par les académiciens. Un débat qui ne trouve toujours pas de position tranchée, tant la limite est ténue entre ces deux sphères de la connaissance (la science et la morale, Ndlr). En plus de la vulgarisation des avantages de la science à l’endroit des populations, souligne M. Diop non moins chef du service de neurologie de Fann, «nous devons servir la communauté en promouvant la vérité, car les problèmes de santé, notamment le cancer, les accidents vasculaires cérébraux (Avc) et le diabète sont liés à une alimentation introduite par le système colonial, notamment les bouillons. Nous ne combattons aucune entreprise, mais il faut dire la vérité que les bouillons constituent un danger pour la population. Nous avons des patients qui ont la trentaine et qui souffrent de diabète, d’hypertension etc.». Le financement reste également une autre difficulté que les chercheurs du tiers monde peinent à surmonter.
«LE CANCER, LES ACCIDENTS VASCULAIRES CEREBRAUX (AVC) ET LE DIABETE SONT LIES A UNE ALIMENTATION INTRODUITE PAR LE SYSTEME COLONIAL»
Pr Yaye Kène Gassama, introduisant le thème à savoir «L’édition génomique (EG) : enjeux et perspective», a entretenu l’assistance sur la découverte de «Crispr Cas 9» en 2012 : une technique avec laquelle «tout est possible» en matière de manipulation génétique, clonage, manipulation Ogm, éradication de certaines maladies… « Elle est la première technologie capable de changer la chimie», affirme la présidente de la section sciences fondamentales appliquées et innovation (Sfai). Cela soulève un débat socio-philosophique qui dépasse la sphère des scientifiques et touche toute les sociétés quant à la question éthique de la Crispr qui peut certes guérir des maladies héréditaires, notamment « la béta thalassémie, la drépanocytose en éradiquant le gène déficient », voire immuniser contre «le Vih en altérant le site de reconnaissance entre le virus et la personne». Elle peut aussi contrôler le paludisme, dit-elle. Pour lutter contre cette dernière maladie, deux options s’offrent aux scientifiques : soit « une suppression des moustiques avec la création d’un gène unique mâle dans un échantillon ; soit par la manipulation du gène pour obtenir des moustiques femelles et non reproductives». Avant de poursuivre sur les merveilles du Crispr : «On peut fabriquer avec cette technique des algues qui produisent du pétrole».
Toutefois, elle prévient : «On peut faire du bien avec cette technologie mais on peut aussi faire beaucoup de mal : des bactéries qui sont capables d’infecter une population à une allure vertigineuse, c’est possible. Donc il faut réguler… et c’est l’affaire de toute la société». Par ailleurs, l’Académie a primé les deux meilleures thèses des écoles doctorales. Le premier prix a été remporté par Serigne Momar Sarr, de l’Université Gaston Berger de Saint-Louis, qui a empoché 10 millions. Le deuxième prix est revenu à Ibrahima Mall de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar qui a travaillé en hydrogéologie.