ABDOULAYE DIOP, AU DEFI DE MBAGNICK ET LATIF
Dans cet entretien croisé, Abdoulaye Koundoul, Iba Gaye Massar et le Pape Meïssa Guèye, donnent leurs avis par rapport à Abdou Latif Coulibaly et au rattachement de la communication à la culture.

Nommé avant-hier, dimanche 7 avril, ministre de la Culture et de la Communication, Abdoulaye Diop, qui était jusque-là, ministre de l’Emploi, de l’Insertion professionnelle et de l’Intensification de la main d’œuvre, a du pain sur la planche. De nombreux chantiers attendent ainsi le tout nouveau ministre de la Culture et de la Communication, actuel maire de Sédhiou, à savoir l’adoption de la loi sur le statut de l’artiste, la rémunération sur la copie privée, selon les acteurs culturels. Dans cet entretien croisé, le directeur des Arts, Abdoulaye Koundoul, l’artiste-musicien, Iba Gaye Massar et le secrétaire général du Syndicat national des travailleurs de la culture, Pape Meïssa Guèye, n’ont pas manqué de donner leurs avis par rapport à l’ancien ministre de la Culture, Abdou Latif Coulibaly et au rattachement de la communication à la culture.
NOMINATION DU NOUVEAU MINISTRE DE LA CULTURE
ABDOULAYE KOUNDOUL : «Abdoulaye Diop vient prendre le relais»
«L’Etat, c’est une continuité. Chacun reçoit une mission sur un temps bien déterminé et après d’autres vont venir. C’est comme ça qu’il faut comprendre la nomination du ministre Abdoulaye Diop. Il vient prendre le relais et sûrement, il va essayer de mener le plus long possible tout ce qui a été entamé par son prédécesseur».
PAPE MEÏSSA GUEYE : «Nous ne regrettons pas du tout le départ de l’ancien ministre»
«Je ne peux pas dire grand-chose sur le nouveau ministre mais nous ne regrettons pas du tout le départ de l’ancien ministre. Parce qu’on a vu que la situation n’a pas du tout évolué parce qu’il y’a de grands chantiers qu’il a trouvés ici et qui sont toujours là. Le ministre n’est pas parvenu à briser les lobbies qui gangrènent le développement de la Culture. On avait proposé au ministre sortant de prendre langue directement avec les acteurs. On ne nous a pas écoutés».
COMMUNICATION RATTACHEE A LA CULTURE
IBA GAYE MASSAR : «Il peut y avoir des conflits d’intérêt»
«C’est la énième fois que ça arrive au Sénégal. Mais moi ça me dérange un peu parce que la culture, c’est la culture. La communication, c’est la communication. Je donne un exemple : si jamais la RTS se comporte d’une manière qui n’est pas légale par rapport à des faits culturels, à des produits culturels, comment le ministre va pouvoir arranger ces choses-là ? Parce que ça relève de la culture. Notre ministère de tutelle, c’est la culture. Si par exemple, la RTS ne fait pas les droits d’auteur, elle est en marge par rapport ce qui est légal. Comment le ministre de la culture peut-il prendre en compte ces choses-là et avoir un comportement équidistant par rapport à la communication? Parce que la RTS aussi sera sous tutelle du ministère de la communication. Il peut y avoir des conflits d’intérêt».
PAPE MEÏSSA GUEYE : «On aimerait... avoir un ministre de la Culture tout court»
«C’est difficile d’avoir un ministre de la Culture. On a eu l’attelage Culture-Loisirs, Culture-Communication, Culture-Francophonie. Et là, on revient avec Culture-Communication. Ça montre que c’est un secteur qui pose problème. Quand un secteur pose problème et qu’on nomme à la tête de ce secteur, un homme qui n’est pas du sérail aussi, je pense que d’ici quelques années, on verra que le ministère de la Culture va être rattaché à un autre domaine. On aimerait avec tous les problèmes qui gangrènent le secteur, avoir un ministère de la Culture tout court».
LES CHANTIERS DU NOUVEAU MINISTRE DE LA CULTURE
PAPE MEÏSSA GUEYE : «Il faut que le statut de l’artiste soit une réalité»
«Il faut que le statut de l’artiste soit une réalité et il faut impliquer l’ensemble des corporations des secteurs artistiques. Le statut de l’artiste ne peut pas faire l’objet d’un débat entre un groupuscule de personnes ou d’associations. Il faut intégrer tous les secteurs. Il faut aussi réguler les fonds qui existent, une bonne gestion, une bonne transparence et une équité dans la gestion et la distribution de ces fons-là. Faire que la pratique culturelle soit décentralisée. Je pense que ce sont les acteurs qui sont dans les différents secteurs qui maitrisent et qui connaissent ces problèmes-là. C’est pourquoi je dis que le ministre doit prendre langue avec ces acteurs-là et même faire un forum où les gens vont s’exprimer librement».
ABDOULAYE KOUNDOUL : «Le projet le plus en vue, c’est la loi sur le statut de l’artiste...»
«C’est déjà une réorganisation du département qui a été entamée et qui n’a pas abouti. Il y’a aussi beaucoup de chantiers sur le plan de l’amélioration de l’environnement d’ordre juridique du secteur et le projet le plus en vue, c’est la loi sur le statut de l’artiste et des professionnels de la culture. C’est un vieux projet qui n’a jamais été aussi avancé qu’il ne l’est aujourd’hui et à l’heure où je vous parle nous avons déjà l’avant projet de loi qui suit son chemin et qui, peut-être, dans quelques mois, sera peut-être, déposé comme une proposition de loi sur la table gouvernement. L’autre chantier toujours accompagnant la loi sur le droit d’auteur et les droits voisins, c’est la mise en place de la commission copie privée et rémunération équitable. C’est la plus value que la SODAV a apporté par rapport au BSDA. La Sodav ne se contente plus de récupérer les droits d’auteurs mais, il y’a aussi de nouveaux droits qui sont là et qui seront mis en œuvre à partir de la commission copie privée et rémunération équitable».
IBA GAYE MASSAR : «Mettre en œuvre tout ce qui concerne les droits voisins»
«Nous en sommes arrivés à avoir une nouvelle loi sur le droit d’auteur et les droits voisins depuis 2018, après le décret d’application de la Sodav qui est fonctionnel maintenant depuis 2016. Et que maintenant nous en sommes aussi à des choses qui sont très importantes pour nous, c’est cette mise en œuvre des commissions statutaires qui doivent s’occuper de comment au niveau de la Sodav, nous allons vraiment mettre en œuvre tout ce qui concerne les droits voisins. C’est-à-dire la commission rémunération équitable qui est une commission statutaire et que le gouvernement en fait partie. Des gens ont été nommés, élus pour la copie privée aussi concernant les actes des interprètes, des producteurs et des éditeurs. Donc, ce sont des chantiers que le gouvernement est en train de faire avec nous. Au niveau des associations culturelles, il y en a beaucoup qui ont démontré leur preuve et qui, depuis plusieurs années, participent au développement culturel de notre pays. C’est donc des chantiers qui sont extrêmement importants. Il y a aussi des structures parce que nous en sommes à un professionnalisme réel de tous les secteurs de la culture».
A PROPOS DE L’ANCIEN MINISTRE COULIBALY
ABDOULAYE KOUNDOUL : «Il a accompli sa mission pour le temps qui lui était imparti»
«L’ancien ministre de la Culture, Abdou Latif Coulibaly est un éminent intellectuel, très ouvert et très généreux sur tous les plans. Il a su en un temps record s’adapter. Il disait qu’il avait une passion pour la culture et cette passion lui a permis par la suite de développer beaucoup de compétences et de comprendre les enjeux du moment. Je pense qu’il a accompli sa mission pour le temps qui lui était imparti et en termes de bilan, il peut être satisfait de ce qu’il a fait».
PAPE MEÏSSA GUEYE : «Il avait dit qu’il n’est pas expert en la matière»
«Lors de son passage de service, il avait dit qu’il n’est pas expert en la matière. Il n’est pas expert en la matière. Donc, je ne peux pas le condamner. Si on doit condamner, on doit condamner la personne qui l’a nommé à ce poste-là. Au début, on avait eu confiance au ministre sortant mais la culture ne se gère pas dans les bureaux»
IBA GAYE MASSAR : «Il était très imprégné de la culture»
«Abdou Latif Coulibaly est d’abord un collègue dans la culture. C’est quelqu’un avec qui nous avons eu des choses. Je ne dirai pas que je regrette son départ parce qu’il n y a pas de regrets. Je sais une chose, dans ce que nous voulions faire avec lui, il était entièrement avec nous. Il était très imprégné de la culture»