RELATIONS SÉNÉGAL/ FRANCE, LA RUPTURE EN MARCHE
La France a déjà compris que sa relation avec le Sénégal a changé, elle ne peut plus être ce qu'elle était. Mais elle voudra limiter la rupture pour la préservation de certains intérêts économiques

L'ex première dame de Côte d'Ivoire, Madame Simone Gbagbo avait révélé que c'est la France qui validait les ordres du jour des réunions des conseils des ministres en Afrique dans ses anciennes colonies. On est aujourd'hui très loin de cette époque, la France a perdu son autorité dans la plupart de ses ex colonies. Au Sénégal, le nouveau régime dirigé par Bassirou Diomaye Faye a complètement brisé le paternaliste français.
Ce jeudi 17 juillet 2025 marque la fin de la présence des soldats français au Sénégal. C'est une page de l'histoire qui se ferme, sous la houlette du duo Diomaye-Sonko.
Cet acte n'est qu'un aspect dans les nouvelles relations entre l'hexagone et le pays de la teranga.
Nous sommes en un moment où une belle occasion se présente pour changer le cours de l'histoire dans les relations entre les deux pays.
Sonko avait annoncé la couleur, dans son livre Solutions. " Nous souhaitons que la France entende et comprenne notre message, celui d'une nouvelle Afrique, portée par une nouvelle génération politique, citoyenne, artistique, intellectuelle,... qui n'aspire qu'à plus d’égalité et d'équité dans nos rapports avec elle, pour le progrès et le développement auquels aspirent légitimement nos peuples. Si elle l'entend et le comprend, cela sera salutaire pour nos relations séculaires. Sinon elle s'achemine vers une rupture brutale et inéluctable avec ses anciennes colonies qui s'orienteront définitivement et durablement vers d'autres partenaires privilégiés. " Ousmane Sonko, livre Solutions.
Le Président du Pastef avait vu juste. Dans le contexte où son parti est arrivé au pouvoir et redéfinit ses relations avec la France, cette dernière est chassée du Mali, du Niger, du Burkina Fasso, du Tchad. La France a commis la même erreur de la décolonisation, ne pas partir à temps. Elle a été humiliée en Indochine et en Algérie à cause de son entêtement, aujourd'hui elle est encore ridiculisée en Afrique noire en voulant perpétuer le néo colonialisme. Elle est en train de sortir par une petite fenêtre.
Dans un post Facebook du 28 février 2023, commentant un discours du Président français Emmanuel Macron, l'ancien Secrétaire général du Pastef, Bassirou Diomaye Faye, par un dialogue fiction avec Ousmane Sonko, écrivait ceci:
" Lui: Bonjour Diomaye. Tu as écouté Macron sur la nouvelle relation Afrique-France?
Moi: Oui, j’ai écouté. Il (Macron) commence à entendre cette voix profonde de l’Afrique que O. SONKO leur conseille d’écouter depuis 2018. "
Diomaye et Sonko sont alors en train de mettre en œuvre ce qu'ils écrivaient du temps de l'opposition, sur la relation entre le Sénégal et la France.
Déjà, après un an 3 mois passé à la tête du pays, le Président sénégalais n'a pas effectué une visite officielle en France. Il y est allé deux fois mais pas en visite officielle.
La première, c'est lors de la Conférence de GAVI sur l’accélération de la production de vaccins en Afrique, le 20 juin 2024. Après les travaux, le Président Emmanuel MACRON l'avait convié à un déjeuner. Au sortir de cette rencontre, le Président sénégalais avait publié sur sa page Facebook un post qui montrait la voie du changement.
" Nous avons évoqué la longue tradition et la qualité des relations entre nos deux pays et exprimé notre volonté commune d’œuvrer à leur rénovation en les adaptant aux mutations actuelles. "
La deuxième fois, c'est en juillet 2024, au sommet des JO du Développement durable en prélude des Jeux olympiques de Paris 2024.
Le Président sénégalais a pourtant fait des visites officielles dans beaucoup de pays de l'extrême Orient ( Chine ) du Moyen-Orient ( Arabie-Saoudite, les Émirats arabes unis, Qatar, la Turquie, etc.), de l'Amérique ( États-Unis) en plus du continent africain où il fait près du tiers des pays.
La France a déjà compris que sa relation avec le Sénégal a changé, elle ne peut plus être ce qu'elle était. Mais elle voudra limiter la rupture pour la préservation de certains intérêts économiques. Même si ce n'est pas pour l'Etat central, il faudra sauvegarder les intérêts des entreprises privées françaises fortement implantées dans le pays.
Et tout porte à le croire, la France est dans cette dynamique, c'est elle qui court derrière le Sénégal. Tout récemment, lors de la Conférence de Séville sur le financement du développement, le 30 juin 2025, le Président Emmanuel Macron s'est précipité de twitter pour annoncer sa rencontre avec son homologue sénégalais. " [...] J'ai échangé avec le Président DIomaye. En pleine refonte, le partenariat entre le Sénégal et la France doit nous permettre d'avancer ensemble au service des intérêts de nos peuples et de notre souveraineté.
Partenariat économique, de sécurité et de défense, culturel et memoriel: autant de chantiers que nous suivons de près avec le Président Faye. " a écrit le président Emmanuel Macron.
Quand on est en position de force, on l'exploite. Dans ce contexte, les autorités sénégalaises doivent continuer à mépriser à la France. Cela peut leur permettre d'entrer davantage dans l'histoire en poussant le Président Emmanuel MACRON à faire une visite officielle au Sénégal avant que le Président sénégalais ne fasse la visite du retour.
Babacar DIOUF, professeur d'histoire et de géographie au lycée de Nguekokh