VIDEONDATÉ YALLA, LA REINE QUI DÉFIE ENCORE L'HISTOIRE
À Dagana, au Sénégal, l'histoire de Ndaté Yalla Mbodj dépasse les manuels scolaires. La dernière souveraine du royaume du Walo est devienue un outil pédagogique moderne pour encourager l'engagement des jeunes, particulièrement des filles

Dans les salles de classe de l'école primaire de Dagana, au nord-ouest du Sénégal, une figure historique captive l'attention des jeunes élèves : Ndaté Yalla Mbodj, la dernière reine du royaume du Walo. Plus qu'un simple cours d'histoire, l'enseignement de cette héroïne locale devient un outil pédagogique puissant pour l'émancipation et l'engagement des nouvelles générations.
"Vous savez, en Afrique, ce n'est pas évident que les filles soient aussi considérées que les garçons, mais aujourd'hui on veut faire la promotion des filles", explique un enseignant de l'école de Dagana. L'histoire de Ndaté Yalla Mbodj répond parfaitement à cet objectif pédagogique : montrer aux jeunes filles qu'elles peuvent aspirer au leadership et à l'engagement politique.
Dans deux classes du primaire de cette école, un accent particulier est mis sur l'enseignement de cette figure emblématique. Les enseignants utilisent son parcours pour "pousser ces élèves à devenir beaucoup plus engagés dans la vie, à prendre plus de responsabilités pour devenir meilleurs".
Née en 1810, Ndaté Yalla Mbodj hérite du trône dans une lignée où l'autorité se transmet de mère en fille. Cette particularité du royaume du Walo offre aux enseignants un exemple concret de sociétés africaines où les femmes détenaient traditionnellement le pouvoir politique.
L'aspect le plus marquant de son règne reste sa résistance face au gouverneur colonial Louis Faidherbe. À travers ses correspondances avec l'administrateur français, elle démontre "un fort sentiment de patriotisme", refusant catégoriquement de s'installer sur la terre ferme et de vendre l'île de Sor aux colonisateurs.
Les récits historiques décrivent une femme qui "n'avait peur de rien", formée au combat : "Elle a été entraînée à aller sur le champ guerrier, elle cavalait comme tout le monde et allait se battre comme tout le monde." Cette dimension militaire de son personnage brise les stéréotypes de genre et inspire autant les garçons que les filles.
Le 25 février 1855 marque la fin tragique de son règne. Les Français envahissent sa capitale, et malgré une résistance acharnée qui coûte la vie à plusieurs centaines de personnes, elle est contrainte à l'exil. Sa mort survient cinq ans plus tard, et son fils unique sera paradoxalement enrôlé dans l'administration coloniale.
Aujourd'hui, seule une statue dans le centre de Dagana témoigne de son règne. Face à ce constat, les historiens plaident pour la création d'un musée dédié à sa mémoire, soulignant l'importance de préserver et transmettre l'héritage de cette résistante.