LE MONDE RURAL VEUT VENDRE LE KG D’ARACHIDE A 350 FRANCS !
Kaolack : contestant le prix d’achat au producteur fixé par le Gouvernement

C’est devenu routinier. Comme la saison dernière, après la fixation du prix au producteur du kg d’arachide, les paysans du Bassin arachidier dénoncent la décision du Conseil des ministres de maintenir à 250 frs le kg d’arachide. Ils proposent 350 francs, prix que le kilogramme d’arachide a atteint l’année dernière à mi- campagne. Quant au Conseil national de concertation et de coopération des ruraux (Cncr), il estime que la seule issue qui s’offre aux paysans c’est d’avoir la possibilité de céder leurs graines à un prix plus élevé aux acheteurs qui sont prêts à mettre le prix étant donné que les 250 francs sont un prix plancher.
En effet, ces pauvres paysans qui n’ont que leurs cultures comme source de survie, jugent le prix officiel fixé par les autorités très en deçà de ce qu’ils espéraient. C’est l’Association des agriculteurs du bassin arachidier qui donne le ton. Selon son secrétaire général, Cheikh Tidiane Cissé, « les paysans espéraient mieux que ce prix mais le gouvernement est passé outre leurs doléances ». Un manque à gagner qui va encore dégrader les conditions d’existence des travailleurs de la terre. Cheikh Tidiane Cissé soutient que ce prix vient porter le coup de grâce aux paysans n’ont pas reçu l’engrais à temps — à supposer qu’ils en aient reçu —, et n’ont pratiquement pas disposé de semences de qualité cette année. Autant de choses qui font que beaucoup d’organisations paysannes contactées parlent d’ores et déjà d’échec de la campagne agricole. Et de prédire le même scénario que la saison dernière en ce sens que, d’après Tamsir Ndiaye du Syndicat national des paysans sénégalais, « les plus forts vont encore dévorer les plus faibles », pour dire que les récoltes seront vendues à de vils prix au moment où les acheteurs étrangers, notamment les Chinois, vont envahir le marché avec leurs mallettes remplies d’argent « pour obliger le paysan à leur céder ses graines à de mauvais prix pour sauver sa production ».
Marché libre et ouvert…
Poursuivant, Tamsir Ndiaye indique qu’audelà de cette donne, au regard de la crise sanitaire, « nous sommes obligés de bazarder le stock semencier qui devrait nous servir de dé- part pour la prochaine saison parce que la quantité de graine récoltée est très en deçà de ce que nous espérions et, avec le peu d’’argent que l’on gagne (250 frs/Kg), nous sommes obligés de tout vendre pour au moins obtenir une somme d’argent raisonnable pour vivre ». Selon les responsables des organisations paysannes, leur seul salut serait de voir le prix du Kg d’arachide fixé à 350 francs, ce qui va leur permettre de combler le mauvais rendement agricole enregistré cette année. Toutefois, du côté du Conseil national de concertation et de coopé- ration des ruraux (CNCR), par la voix de son chargé de communication, Sidy Ba, on fait valoir que « les paysans peuvent, malgré le prix officiel de 250 francs, céder leurs graines aux plus offrants puisque la loi ne l’interdit pas en ce sens que le prix officiel est un prix plancher ». Pour couronner le tout, Tamsir Ndiaye fustige le fait que « la Sonacos achète sur le marché le kg d’arachide à 210 frs alors pourtant que le démarrage de la campagne est prévu le 25 novembre ».
Un deux poids deux mesures souligné par Amath Diakhaté Niass, président du Cadre local de concertation des organisations de producteurs de Taïba Niassène. A ses yeux, ce qu’il qualifie de « discrimination flagrante au détriment du monde paysan » serait la preuve que nos autorités ne tiennent pas un langage de vérité aux populations. Pis, estime-t-il, cette politique vise simplement à anticiper les conséquences désastreuses qu’avait connues la Sonacos qui n’avait presque pas de graines à triturer la semaine dernière. Selon les paysans interrogés comme ceux affiliés à la Fédération nationale des femmes rurales, l’Etat est très sûr d’une chose à savoir que « le paysan préfère vendre sa production aux opérateurs étrangers qui proposent jusqu’à 300 frs/Kg là où la Sonacos achète entre 210 et 25 frs ». Donc, pour protéger la Sonacos, l’Etat a permis à l’huiler national de violer le principe du marché. A vrai dire, c’est reparti pour une saison arachidière marquée par grands manquements, surtout avec cette pandémie qui laisse des séquelles partout même, et surtout, dans les champs.