LE RAPPORT DE LA COUR DES COMPTES JUGÉ INCOMPLET
Le Fonds Monétaire International juge insuffisant le document qui avait pourtant révélé 7 milliards de dollars de passifs dissimulés, contraignant Dakar à faire appel à un cabinet d'audit externe pour reprendre l'inventaire

(SenePlus) - Le Fonds monétaire international suspend sa décision sur le "misreporting" sénégalais en attendant un inventaire complet de la dette publique. L'institution juge insuffisant le rapport de la Cour des comptes qui avait pourtant révélé 7 milliards de dollars de dette cachée.
La crise de la dette sénégalaise prend une nouvelle dimension. Selon les informations rapportées par Jeune Afrique, le rapport de la Cour des comptes rendu en février dernier, celui-là même qui avait révélé l'existence de 7 milliards de dollars de dette cachée, "a finalement été considéré comme incomplet et imprécis" par le Fonds monétaire international.
Cette évaluation du FMI explique pourquoi la procédure de "misreporting" - déclenchée suite aux révélations sur cette dette dissimulée - n'est toujours pas arrivée à son terme. Cette procédure pourrait conduire l'institution de Bretton Woods soit à demander le remboursement des sommes déjà versées dans le cadre de l'accord de 1,8 milliard de dollars signé en juin 2023 sous Macky Sall, soit à "passer l'éponge".
Face à cette impasse, le ministre des Finances Cheikh Diba et le Premier ministre Ousmane Sonko ont fait appel au cabinet de conseil français Forvis Mazars, révèle Africa Business+. Le cabinet d'audit indépendant, qui dispose d'une filiale au Sénégal dirigée par Sidy Diakhoumpa, a pour mission de "faire l'inventaire complet de toutes les dettes du pays, créancier par créancier".
Cette mission exhaustive inclut également l'examen du passif de chaque entreprise publique sénégalaise, notamment "la Sénélec, la Société africaine de raffinage ou encore l'Aéroport international Blaise-Diagne", précise JA.
Selon les informations du magazine panafricain, "cet examen complet devrait révéler une dette cachée bien supérieure aux 7 milliards établis par la Cour des comptes". Cette perspective alourdit encore les inquiétudes sur la situation financière réelle du Sénégal.
Une dette réévaluée à 119% du PIB
La situation s'est encore dégradée avec la publication d'un rapport de la banque britannique Barclays, qui a réévalué la dette sénégalaise à 119% du PIB à fin 2024, selon les données du ministère des Finances. Michael Kafe, économiste de Barclays, évoque une augmentation "sans précédent et inexpliquée" de la dette sénégalaise.
Cette estimation représente "l'équivalent de 8 milliards de dollars de plus que les prévisions du FMI publiées en mars", lors de la visite d'Edward Gemayel, chef de mission du FMI pour le Sénégal. L'institution dirigée par Kristalina Georgieva tablait alors sur un ratio dette/PIB de 105,7%.
Ces révélations font du Sénégal "le pays le plus endetté du continent", souligne Jeune Afrique, compliquant davantage les discussions entre le FMI et le président Bassirou Diomaye Faye.
Ce n'est qu'une fois l'inventaire de Forvis Mazars achevé que "le FMI pourra statuer sur le 'misreporting', et éventuellement proposer un nouveau programme au Sénégal, lequel n'interviendrait pas avant septembre prochain, au plus tôt", indique la publication.
Dans un discours diffusé le 2 juillet sur les réseaux sociaux, le Premier ministre Ousmane Sonko a annoncé qu'il présenterait "dans les prochains jours un plan de redressement" qui "expliquera point par point aux Sénégalais comment remettre le pays sur pied". "Nous expliquerons ce que nous attendons du peuple, comment l'État doit réduire ses dépenses, et comment avancer avec nos partenaires", a-t-il précisé.