MADANA KANE ALERTE SUR LES RISQUES D’UN CHOC FINANCIER AU SÉNÉGAL
Ancien directeur général de la Banque islamique du Sénégal, l’économiste et leader de la plateforme « Dundu » s’inquiète de la fragilité budgétaire du pays. Il plaide pour un plan de restauration de la confiance et un financement alternatif.

Ancien directeur général de la Banque islamique du Sénégal (Bis), Mouhamadou Madana Kane a passé au laser la situation financière du Sénégal. L’initiateur de la plateforme politique «Dundu» a alerté, dans les colonnes de L’Observateur, que le pays n’est pas à l’abri d’un choc.
«Le gouvernement a le souci de relancer l'économie et a, à cet effet, prévu dans la Lfr, une dotation de 500 milliards FCFA pour apurer des arriérés de paiements dus aux acteurs économiques, principalement ceux du secteur des Btp. Autant la démarche est à saluer, autant je crains que ces paiements ne produisent pas les effets escomptés, si on ne s'assure pas en amont que les fonds reçus par les acteurs soient effectivement réinvestis dans l'économie. Or, je crains que la situation de blocage des quinze derniers mois n'entraîne une frilosité des acteurs économiques qui, au lieu de réinvestir, pourraient être davantage tentés par l'épargne.
Si cette situation devait se produire, les prévisions de croissance risquent de ne pas se réaliser, alors même que le paiement des arriérés a pour principal objectif de relancer l'économie. C'est pourquoi je pense qu'il est impératif que le gouvernement mette en place des mesures d'accompagnement à travers un plan opérationnel de restauration de la confiance des acteurs et d'incitation à l'investissement.
Sur un autre point, la LFR a prévu une augmentation des besoins de financement de 1141 milliards par rapport à la LFI 2025. Cette augmentation intervient dans un contexte de révision à la baisse des prévisions de recettes, notamment fiscales, et induit donc un recours plus important à la dette.
Le Gouvernement semble maintenir son option de privilégier le marché financier sous-régional, Nous observons, ces derniers temps, une certaine dépendance vis-à-vis de ce marché, à cause principalement des difficultés d'emprunt à l'international consécutives à l'abaissement de la notation souveraine du pays. Dans ce contexte, nous ne sommes pas à l'abri d'un choc qui pourrait résulter du fait que les investisseurs institutionnels (banques, sociétés d'assurance etc.), dans un souci de gérer le risque de concentration pays, pourraient être amenés, à un moment donné, à réduire leur appétence sur les titres Etat du Sénégal.
Si cette situation devait se produire, nous pourrions facilement passer de la situation de «précarité budgétaire et financière» évoquée par le Ministre des Finances à une situation d'incapacité budgétaire et financière. C'est pourquoi je plaide pour la mise en place • d'un plan alternatif de financement en dehors du marché financier sous-régional, mais également d'un plan de financement d'urgence.»