PASTEF DEPLORE «L’IMPROVISATION» DE L’ETAT
Le Mouvement National des Cadres Patriotes doute sérieusement de la faisabilité de l’utilisation du numérique pour sauver l’année académique, suite à la crise sanitaire du Covid-19

Le Mouvement National des Cadres Patriotes (Moncap) doute sérieusement de la faisabilité de l’utilisation du numérique pour sauver l’année académique, suite à la crise sanitaire qui a poussé l’Etat à procéder à la fermeture systématique des Etablissements d’Enseignement Supérieur (EES) publics et privés pour endiguer la pandémie du Covid-19. «Pour sauver l’année académique (2019-2020), comme à ses habitudes, l’Etat du Sénégal, dans la précipitation et l’improvisation, agite le recours immédiat au numérique à travers les plateformes existantes et les cours déjà mis en ligne», s’insurgent les cadres patriotes dans un communiqué.
Selon Bassirou Diomaye Faye et ses camarades, la mise en œuvre effective du numérique suscite beaucoup d’interrogations. «Comment peut-on prétendre poursuivre des activités pédagogiques en cette période de vacances forcées où la majeure partie des étudiants habite parfois dans des contrées pauvres et reculées dépourvues d’électricité avec la persistante problématique de la fracture numérique? Comment tous ces enseignants et étudiants confrontés au manque d’outils informatiques adéquats et n’ayant subi aucune formation pour l’utilisation des plateformes en ligne pourront-ils s’adapter à cette nouvelle situation à laquelle ils ne sont pas préparés ?
Les préalables ne devaient-ils pas être installés à la base (primaire, moyen et secondaire) pour un glissement naturellement moins préoccupant en de pareilles circonstances ?» se demandent les cadres de Pastef qui estiment qu’il ne fallait pas attendre seulement que la pandémie du Covid-19 apparaisse pour recommander des plateformes déjà fonctionnelles. Un tantinet pessimiste, ils se demandent ce qu’il en serait des travaux pratiques qui nécessitent la manipulation d’objets dans les domaines des sciences et de la formation professionnelle. «Au cas où la pandémie continuerait à gagner du terrain, quels procédés d’évaluation préconiser pour les apprenants ? Que dire des apprenants qui seraient bien partis pour être les victimes de leur inadaptation ?» s’inquiètent Bassirou Diomaye Faye et ses camarades.
Raison pour laquelle la Commission Enseignement Supérieur et Formation Professionnelle (Cesfp) du Moncap appelle les autorités étatiques à faire face à leurs responsabilités dès à présent. Ces dernières doivent, selon les patriotes, éclairer les parents, enseignants, étudiants et partenaires en prenant des dispositions concrètement applicables, adossées à un échéancier, quelle que soit la situation qui se présentera au lendemain de la date butoir. «Le gouvernement du Président Sall a pris des résolutions inspirées de l’une des recommandations fortes de la Concertation Nationale sur l’Avenir de l’Enseignement Supérieur au Sénégal (Cnaes) relative à l’utilisation du numérique dans l’enseignement supérieur en 2013».
Dans ses réformes succinctes, le ministère de l’Enseignement Supérieur, de la Recherche et de l’Innovation (Mesri) a placé le numérique au centre de l’enseignement supérieur par des programmes qui incluent l’interconnexion des établissements, le programme «un étudiant un ordinateur», la promotion de l’enseignement à distance à l’Université Virtuelle du Sénégal (Uvs) et dans les universités publiques.
L’Etat a aussi contracté un prêt d’environ 110 millions de dollars (66 495 000 000 FCFA) à travers le Projet de Gouvernance et de Financement de l’Enseignement Supérieur (PGF SUP) avec des signatures de Contrats de Performance (CDP), et a déclaré avoir investi 436 627 355 000 FCFA dans l’enseignement supérieur entre 2012 et 2019’’, soulignent le Moncap. Malheureusement, d’après les patriotes contre toute attente, la majeure partie de ces projets n’a pas abouti avec parfois des objectifs dévoyés.
Selon eux, Le projet « un étudiant un ordinateur » n’a touché qu’une partie infime des étudiants depuis 2013. ‘’La formation des acteurs n’est pas généralisée. L’interconnexion des établissements fait défaut. L’UVS peine à fonctionner correctement. Depuis 2015, seuls 03 des 50 Espaces Numériques Ouverts (ENO) prévus ont été effectivement construits et achevés, 10 ENO fonctionnent provisoirement dans des bâtiments loués et 37 sont au stade de projets malgré les financements disponibles.
Les financements du PGF SUP n’ont pas aidé à l’acquisition des équipements technologiques prévus dans les projets. Malheureusement, le projet Smart Sénégal Elearning entre la Chine et le Sénégal qui devait équiper les universités dans ce cadre depuis 2018 fait face à des lenteurs. Des chapiteaux ont été érigés à hauteur de 300 millions FCFA en lieu et place de bâtiments dans les EES publics’’, s’alarment-ils. Ils estiment en outre que l’Etat a pris des initiatives probantes dans la mise en pratique du numérique au service de l’enseignement supérieur. Mais il a failli, signalent-ils, dans la mise en œuvre des recommandations et des mesures adoptées pour que l’on assiste aujourd’hui à ce qui ressemble beaucoup plus à une entreprise de tâtonnement de la part du gouvernement. ‘’L’agitation ponctuelle et tout bricolage entretenu pour la poursuite des cours en forçant la porte du numérique sans les pré-requis ne seraient que du test sur des sujets (apprenants et enseignants) qu’il ne faut surtout pas sacrifier d’avance’’, renchérissent les camarades d’Ousmane Sonko dans le communiqué.