«IL FAUT RESTER CALME ET VIGILANT EN ATTENDANT UN JOUR MEILLEUR»
Établie en Tunisie depuis vingt ans, Oureye Diouf a contacté «L’As» pour donner son point de vue sur les déclarations du chef de l’état tunisien sur les migrants subsahariens. elle a voulu également rassurer les Sénégalais sur leur situation

Établie en tunisie depuis vingt ans, Oureye Diouf a contacté «L’As» pour donner son point de vue sur les déclarations du chef de l’état tunisien sur les migrants subsahariens. elle a voulu également rassurer les Sénégalais sur leur situation ; avant d’appeler ses compatriotes à rester calmes et vigilants.
Le Président tunisien, Kaïs Saïed, a plongé la Tunisie dans une situation délicate en s’en prenant violemment aux subsahariens lors de la tenue d’un conseil de sécurité nationale. en effet, il avait prôné des «mesures urgentes» contre l'immigration clandestine dans son pays, affirmant que la présence de migrants subsahariens était source de «violence, de crimes et d'actes inacceptables» et qu’il fallait mettre fin à l'arrivée de «hordes des migrants clandestins». Pis, il a soutenu que cette immigration clandestine relevait d'une «entreprise criminelle ourdie à l'orée de ce siècle pour changer la composition démographique de la Tunisie», afin de la transformer en un pays «africain seulement» et estomper son caractère «arabo-musulman».
Depuis, l’indignation est totale partout dans le monde. Et de l’intérieur, les personnes d’origine subsaharienne vivant dans le pays sont stigmatisées et attaquées. Des étudiants sénégalais établis en Tunisie sont d’ailleurs récemment sortis de leur réserve pour dire qu’ils craignaient le pire. A la suite de cela, ils ont demandé à l’État du Sénégal de leur venir en aide, avant que la situation ne dégénère
Mais Ourèye Diouf, une Sénégalaise vivant en Tunisie depuis une vingtaine d’années a contacté «L’As» pour rassurer le peuple sénégalais. Elle appelle ainsi les compatriotes vivant dans le pays à garder leur calme et à être vigilants. «Il est tout à fait normal que nous nous sentons menacés, vu la situation actuelle. Nous avons la peur au ventre, parce que ces violences ne viennent pas des autorités, mais d'une partie de la population. Et pour échapper à tout cela, il faut rester calme et vigilant. C’est la solution en attendant un jour meilleur», a-t-elle souligné.
Toujours selon Ourèye Diouf, les propos du Président Kaïs Saed sont à déplorer dans la mesure où ils n’ont fait que jeter de l'huile sur feu. «Ses propos racistes et injurieux envers la communauté subsaharienne ont permis à un groupe d’individus d’imposer la terreur». Elle souligne cependant que les autorités tunisiennes sont conscientes de leur erreur, raison pour laquelle le Président a essayé de se rétracter en disant que cela ne concerne en rien ceux qui vivent en Tunisie légalement, mais les migrants clandestins. «Mais le mal été déjà fait », regrette-t-elle. Preuve que le gouvernement veut corriger son erreur, dit-elle, la manifestation du 26 février annoncée contre les migrants subsahariens n’a pas eu lieu. Et à la place, des organisations de la société civile sont sorties pour condamner cette posture du gouvernement. Ce genre de discours n’a pas de place dans la société tunisienne».
Ourèye Diouf martèle que la Tunisie n’est pas un cas isolé en parlant de racisme et que partout dans le monde le phénomène existe. Toutefois, elle souligne que le comportement de certains subsahariens est à déplorer notamment de certains passeurs de migrants qui se livrent à toutes sortes de trafic dans le pays.
MANQUE DE REACTIVITE DEPLORE DES AUTORITES CONSULAIRES
Madame Diouf déplore par ailleurs le manque de réactivité et de communication des autorités consulaires. «Elles sont restées aphones quand les choses se sont déclarées. Nous sommes restés quatre jours sans les entendre. Il a fallu que le ministère des Affaires étrangères fasse un communiqué pour qu’on puisse sentir la réaction de l’Etat du Sénégal. Alors qu’elles pouvaient entrer en contact avec les Dahiras présents en Tunisie, les associations estudiantines etc», déclare-t-elle. Ainsi, elle appelle l’Etat à être beaucoup plus à l’écoute des Sénégalais de l’extérieur. Elle propose d’ailleurs d’appliquer désormais la politique de réciprocité sur les entrées dans le pays.
A noter que le ministère sénégalais des Affaires étrangères a mis en place une cellule de crise dont la mission est d’assurer, à partir de l’ambassade sénégalaise en Tunisie, la protection des Sénégalais établis dans ce pays d’Afrique du Nord. Dans un communiqué rendu public dimanche dernier, les services du ministère disent suivre de près la situation qui prévaut en Tunisie, non sans rappeler l’attachement particulier du Sénégal à la sécurité et à la sûreté des communautés sénégalaises partout où elles résident et en toute circonstance.
Le ministère en charge des Sénégalais de l’extérieur assure être en contact avec les responsables des associations sénégalaises en Tunisie tout en appelant les ressortissants sénégalais au calme et à la sérénité.