L'ASUDIC REVELE COMMENT LE SENEGAL A ETE EPARGNE D'UNE COUPURE D'INTERNET
Alors que beaucoup d’internautes s'attendaient à une coupure de l'internet le jour du scrutin, tel n’a pas été le cas. Et à travers un communiqué, l'Association sénégalaise des utilisateurs des Tic (ASUDIC) donne les explications

«Il n’y a eu aucune restriction sur internet. La première explication qu’on pourrait donner serait que le gouvernement est, enfin, dans une dynamique de respecter les droits humains numériques au Sénégal. Que nenni. L’analyse révèle plutôt que la coalition Benno bokk yakaar (BBY) avait besoin d’une connexion internet, stable et de qualité dans le cadre de sa campagne électorale digitale. Aussi, une coupure d’internet était exclue. Le jour du scrutin, quelques heures après la fermeture des bureaux de vote, coup de tonnerre. Le représentant du candidat Macky Sall, à la surprise générale, annonçait la victoire à 57% au minimum», a révélé le texte.
«BBY a saisi les opportunités électorales offertes par les outils du numérique»
Sur cette base, Ndiaga Guèye et ses collègues estiment : «Le secret de cette éclatante victoire se trouve dans la campagne électorale à l’Américaine mise en œuvre par BBY. Une combinaison novatrice du numérique et du terrain, adossée à une loi sur le parrainage et un organisateur partisan. Ainsi, une redoutable machine de guerre électorale encore plus monumentale et réactive que celle de 2012 fut créée¬ pour la conservation du pouvoir. A l’évidence, BBY s’est beaucoup inspirée des campagnes présidentielles américaines qui sont depuis longtemps une référence pour le reste du monde». L’ASUDIC souligne aussi : «Le jour du scrutin, en temps réel, grâce à l’internet, BBY pouvait suivre au quartier près, heure par heure, dans quels endroits les gens allaient voter et dans quels endroits c'était plus difficile pour y concentrer leurs militants et mobiliser les électeurs. L’opposition ne pouvant pas rivaliser avec une telle organisation, si puissante et efficace, se retrouva face à une cinglante défaite, bien plus forte que le scrutin très serré annoncé par les médias». «La campagne déroulée, nous autorise à penser que la coalition BBY a saisi les opportunités électorales offertes par les outils du numérique malgré que le candidat Macky Sall, peu préoccupé par le numérique, n’a jamais fait preuve d’un leadership politique de haut niveau sur la question pendant sept ans de gouvernance. Outre la communication digitale sur les réseaux sociaux, nous pensons que la principale nouveauté de cette élection présidentielle réside dans l'utilisation d’un logiciel électoral par BBY»
«La principale nouveauté réside dans l'utilisation d’un logiciel électoral par BBY»
«Les données collectées et agrégées, certainement par une armée de spécialistes du digital, ont surtout permis la détermination des zones d’électeurs constituant l’inconnu, c’est-à-dire des zones comportant une majorité d’électeurs indécis, abstentionnistes et étant susceptibles par leur vote d’influencer l’issue des élections», souligne le document. «En outre, le logiciel contient des données sur la carte électorale du coup, le jour de l’élection, cette fonctionnalité permet aux mandataires chargés de surveiller le dépouillement du vote, de télécharger les résultats par bureau de vote pour donner à BBY le résultat global de l’élection présidentielle, en temps réel», renseigne l’ASUDCI. «Les données en masse (Big Data) nécessaires pour créer cette puissante base de données, ont été obtenues grâce aux parrains collectés par les candidats», a noté le document.
«A l’opposition de se mettre à jour, même si BBY a déjà une bonne longueur d’avance»
Pour ces spécialistes du net, «le troisième axe de cette stratégie pour gagner l’élection était de priver de vote le maximum d’électeurs par la mauvaise distribution des cartes d’électeur, pour ne pas dire leur rétention, la non inscription d’électeurs dans le fichier, la modification de la carte électorale dans les zones non favorables et le gonflement de celles jugées favorables». «La réussite d’une telle stratégie de campagne électorale faisant la convergence du numérique et du terrain ne s’improvise pas. Celle de BBY a été conçue et mise en œuvre par un appareil très organisé, centralisé, hiérarchisé et décentralisé. En outre, il faut noter que cette victoire a été facilitée par une opposition morcelée, faible, toujours dans l’informelle mais surtout sans courage politique», souligne le communiqué. D'après l’ASUDIC, le «Big Data», la collecte et le traitement automatisé de gigantesques quantités de données, a aidé le candidat de Benno Bokk Yakaar à remporter un second mandat. «Une aide phénoménale à la prise de décision dans une compétition électorale. Et ça ne fait que commencer avec les outils numériques d’appui logistique aux campagnes électorales. Des lors, disent ces spécialistes, il appartient à l’opposition de se mettre à jour, même si BBY a déjà une bonne longueur d’avance. Elle doit s’attaquer aux immenses chantiers qui l’attendent, dont deux sont des sur priorités¬ : l’abrogation de la loi sur le parrainage et un organisateur d’élections neutre».
A défaut, constatent-ils : «L’entreprise électorale BBY avec ses campagnes électorales, ultra ciblées, ou l’électeur est un client et le candidat un produit, est assurée d’avance de gagner toutes les élections à venir. Et l’opposition continuera à parler d’élections truquées sans convaincre personne».