«SONKO DOIT TROUVER LE JUSTE MILIEU ENTRE DENONCIATION, DECONSTRUCTION ET SURTOUT PROPOSITION»
De l’avis du Docteur en Communication et Marketing politique, Momar Thiam, le député de Pastef dans la vague médiatique, devrait revoir sa copie.

Considéré avant la présidentielle de 2019 comme «la nouvelle figure d’une opposition naissante» de par sa démarche qui allie déconstruction du système et proposition de solutions consignées dans un livre programme, le leader de Pastef, Ousmane Sonko est en passe de retomber dans sa démarche première. De l’avis du Docteur en Communication et Marketing politique, Momar Thiam, le député de Pastef dans la vague médiatique, devrait revoir sa copie. Il conseille ainsi le candidat malheureux à la présidentielle dernière de faire bon dosage entre dénonciation, déconstruction et surtout proposition, d’autant plus qu’il a déjà un livre “Solution“.
Comment appréhendez-vous la communication du leader de Pastef, Ousmane Sonko ?
Il faut préciser qu’Ousmane Sonko est, un tout petit peu, la nouvelle figure d’une opposition naissante au Sénégal. Jusque-là, l’opposition aux régimes politiques en place était l’apanage de partis politiques avec des leaders qui étaient à la tête. Je veux parler du temps où on avait le Ps, le Pds, le Pit, Ld, Afp, etc. L’opposition était plus l’affaire de partis normalement constitués et à sa tête un leader politique et pas des moindres. Les leaders étaient dans une opposition systématique, mais étaient-en mal de propositions. La donne a changé avec l’entrée en politique d’Ousmane Sonko, qui a une particularité. C’est un Inspecteur des Impôts qui connait très bien les rouages de l‘administration et qui a apporté une autre manière de faire la politique, ne serait-ce que dans la démarche d’opposition. Il était dans une opposition de déconstruction et de dénonciation. En s’approchant de l’élection présidentielle, il a estimé devoir sortir un livre programme, “Solution“, et de faire part de ses propositions. Il était dans la seconde démarche de l’opposition qui était «opposition et proposition», la première étant de déconstruction et de dénonciation. Ce que j’estime être une approche assez nouvelle.
N’avez-vous pas le sentiment que le leader de Pastef est toujours dans la première phase, notamment celle de dénonciation et de déconstruction, depuis qu’on est sorti de la présidentielle ?
Il se trouve que la présidentielle est passée et qu’il retombe encore dans cette espèce de déconstruction et de critiques. Mais, une critique peut être constructive. C’est-à-dire, on critique et on propose des débuts de solutions, on apporte une réflexion nouvelle par rapport à cette critique-là de sorte que même les tenants du pouvoir pourront s’accaparer de cela comme étant quelque chose de productif. Seulement, il se trouve que l’actualité est dominée par ce qui concerne les nouvelles matières premières, à savoir le pétrole, le gaz, le fer, etc., et qu’à partir de ce moment, Ousmane Sonko, sachant pertinemment que quand on fait de l’opposition, il faut savoir saisir les éléments de l’actualité, il joue un peu sur cela. Quelque fois, c’est aussi le problème des médias. Parce que les médias font un peu l’opinion et ils saisissent ce qu’il y a de plus croustillant dans l’information.
Justement. N’y-a-t-il pas de risques à ce niveau ?
Effectivement, si vous tombez dans le travers des médias et que vous passez votre temps à déconstruire, critiquer le pouvoir autour de ce que les médias disent, vous risquez d’être écouté sans être entendu, d’être regardé sans être vu. L’autre risque, il peut y avoir ce qu’on appelle l’effet d’agenda. L’effet d’agenda en communication, c’est quand un événement survient et qu’un autre arrive, il se trouve qu’on risque de reléguer aux oubliettes cet événement. C’est-à-dire qu’il (Ousmane Sonko) va parler du gaz et du pétrole et dès qu’on va commencer à parler du fer de la Falémé et qu’il rebondit là-dessus, on va oublier ce qu’il avait dit sur le pétrole et le gaz. Cela est contreproductif.
A votre avis, que doit faire le député Ousmane Sonko ?
Il faut que Sonko trouve le juste milieu entre : dénonciation, déconstruction et surtout proposition. Surtout dans son cas, il a un livre-programme qui n’est pas connu de tous car, le niveau de lecture est en baisse chez nous. Il faut qu’il trouve le bon dosage et de poser des actes qui vont à l’encontre de ces propositions qui sont contenues dans son livre et même au-delà puisque forcément, il va murir sa réflexion compte tenu de la nouvelle donne. C’est l’occasion rêvée d’en faire part. Il faudrait qu’il communique beaucoup sur les solutions parce que ce qui va se passer c’est que si vous n’essayez pas d’être un moteur de croissance en termes de propositions, vous risquez d’être écouté par ceux qui sont férocement opposés au pouvoir, et non par ceux qui le subissent réellement, c’est-à-dire les populations. C’est bien d’être un éveilleur de conscience, c’est bien de dénoncer, de montrer la face cachée de certaines choses politiques. Ce qu’on appelle les contours souterrains en termes de discours, mais c’est bien aussi de proposer. Sonko, qui est un leader en herbe, qui n’a plus rien à démontrer, puisqu’il est arrivé 3ème à la présidentielle, a une responsabilité de proposition auprès de l’opinion. J’ai l’habitude de dire que le mal de nos hommes politiques c’est deux choses. Nous avons, parmi nos leaders politiques, certains qui n’ont ni le sens de la chose publique, ni le sens de la mission de service public. Parce que, si on a les deux, on sait pertinemment que tout ce qu’on fait, c’est parce qu’on est en mission au service de la collectivité.