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25 mai 2025
LES JOURNALISTES DISENT NON AU BAILLONNEMENT...
Les journalistes s’étaient donné rendez-vous avant-hier, lundi 12 février 2024 à la Maison de la Presse Babacar Touré, pour dénoncer les brutalités policières dont sont victimes les confrères et consœurs dans l’exercice de leur métier,
Les journalistes de différents organes de presse du Sénégal et ceux de l’étranger s’étaient donné rendez-vous avant-hier, lundi 12 février 2024 à la Maison de la Presse Babacar Touré, à partir de 20heures, pour dénoncer les brutalités policières dont sont victimes les confrères et consœurs dans l’exercice de leur métier, rapporte Dakaractu.
La Coordination des associations de la presse (CAP), a initié cette veillée nocturne pour dire non au bâillonnement de la presse. Prenant la parole, le président de l’Appel, Ibrahima Lissa Faye se désole du comportement des autorités étatiques. “Ils sont informés. Mais, ils n’ont ni condamné ni dénoncé ces actes. C’est la goutte d’eau qui fait déborder le vase et le combat sera mené. Ceux qui ont agressé les journalistes sont identifiables et la justice doit faire son travail”, lance-t-il.
Pour le président des Jeunes Reporters du Sénégal (CJRS), “les Fds ciblent tout le temps les reporters sur le terrain alors que la mission qu’ils mènent est encadrée par la constitution au même titre que la leur. Absa Hane a été identifiée comme journaliste, elle était avec Mor Amar, Seynabou Fall. Ils ont tous été gazés, Absa qui a essayé de le dénoncer, a été arrêtée, brutalisée. Et elle s’est retrouvée à l’hôpital à deux reprises”, fustige Migui Maram Ndiaye, qui annonce une lettre de protestation adressée au ministre de l’Intérieur.
LES SYNDICATS DES OPERATEURS DES TELECOMMUNICATIONS A BOUT
Les travailleurs protestent ainsi contre les coupures de l’internet mobile, décidées par le gouvernement et ses conséquences pour les opérateurs de téléphonie mobile.
Les Syndicats des opérateurs des télécommunications décrètent «une présence négative» et également «le port de brassards rouges» pour la journée de ce mercredi 14 février 2024. Les travailleurs protestent ainsi contre les coupures de l’internet mobile, décidées par le gouvernement et ses conséquences pour les opérateurs de téléphonie mobile. Ils convient les journalistes à une conférence de presse, ce mercredi matin, pour dénoncer cette forme d’atteinte à leur travail.
Lors de manifestations ou à chaque fois que des tensions et menaces pèsent sur le pays, notamment en mars et juin 2023 et récemment la semaine dernière et hier mardi 13 février 2024, le ministère de la Communication, des Télécommunication et du Numérique procède à la coupure/restriction de l’internet mobile. Une mesure qui non seulement porte atteinte à la liberté d’expression, la liberté d’entreprise de nombre de Sénégalaises et Sénégalais surtout du secteur informel, mais aussi n’est pas sans conséquence pour les opérateurs téléphonie mobile.
Cette décision de coupure récurrente de l’internet des données mobiles n’est pas du goût des syndicats des opérateurs des télécommunications, qui sont montés au créneau, à travers un communiqué daté d’hier mardi, pour la dénoncer. «Encore une fois de plus, le ministre de la Communication, des Télécommunications et du Numérique vient d’ordonner la coupure de l’internet mobile. Ainsi, nous les Syndicats des Travailleurs des opérateurs de Télécommunications : Décrétons une présence négative pour la journée de 14 février 2024 ; Décrétons également le port de brassards rouges pour la journée du 14 février 2024.»
Dans leur communiqué conjoint, les travailleurs du SYTS (Syndicat des Travailleurs de Sonatel), du SNTPT (Syndicat National des Travailleurs des Postes et Télécommunications) section Sonatel, du SNTS (Syndicat National des Travailleurs de Sentel) et du SNTPT (Syndicat National des Travailleurs des Postes et Télécommunications) section Expresso invitent les professionnels des médias à une «conférence de presse qui se tiendra le 14 février 2024 à la permanence du SYTS (L’immeuble de la Grande Poste, près du marché Kermel) à partir de 10 heures».
Après plus de 48 heures la semaine dernière, la connexion internet (des données mobiles) a encore été suspendue de manière «provisoire», hier mardi. L’Etat du Sénégal, à travers le ministère de la Communication, des Télécommunications et du Numérique en a fait l’annonce, dans un communiqué. Selon le texte, il s’agit d’une mesure exceptionnelle visant à suspendre l’internet des données mobiles dans «certaines plages horaires», le mardi 13 février 2024, dans le but de prévenir de nouvelles violences. D’ailleurs l’autorité motive sa décision par «la diffusion sur les réseaux sociaux de plusieurs messages haineux et subversif qui ont déjà provoqués des manifestations violentes avec des décès et de dégâts matériels importants». Et «les opérateurs de téléphonie sont tenus de se conformer aux réquisitions notifiées»
Cette réquisition de l’internet des données mobiles est intervenue alors que la plateforme «Aar Sunu Élection» a projeté d’organiser une marche pacifique et silencieuse sur l’avenue Bourguiba, de la FASTEF (exENS) au rond-point Jet d’Eau, pour protester contre le report de la présidentielle du 25 février 2024. Une manifestation finalement interdite par le préfet de Dakar qui invite les responsables à «proposer un nouvel itinéraire qui fera l’objet d’une Instruction», au motif que «l’occupation de l’itinéraire choisi aux horaires retenus, risque de perturber gravement la libre circulation des personnes et de leurs biens au regard des problèmes de mobilité notés actuellement»
Par Macoumba GAYE
QUAND SONNE L’HEURE DES SAGES
On en oublie que pour l’escalade du mont démocratique, le harnais est accroché à l’ordre républicain. Ses règles doivent être gravées sur les tablettes de la conscience collective
On officie dans le secret pour la paix que le peuple excédé réclame. On discute, louvoie, négocie, cède et concède. Le sang de dizaines de victimes sèche sur l’autel de la Raison d’État. Sous les lambris de la République s’étouffe la clameur de tous les citoyens meurtris. Ainsi soit la volonté des hommes unis par le commun vouloir de vivre ensemble !
On en oublie que pour l’escalade du mont démocratique, le harnais est accroché à l’ordre républicain. Ses règles doivent être gravées sur les tablettes de la conscience collective. Au-delà de la dissuasion de la force publique et des équilibres précaires dont nos guides politiques religieux sont des orfèvres, il nous faut condamner. Car nous ne bâtirons durablement que dans la vérité.
Rien, ni personne, ne saurait justifier que l’on amnistie d’odieux crimes sans les avoir jugés. La vertu pédagogique et salutaire du pardon trouve aussi son sens dans le repentir du condamné.
Les suspects sont désignés : ceux-là qui ont tué ; brulé vif des hommes dans des bus ; saccagé des universités ; recruté des nervis ; embastillé des innocents sans jugement ; menti au juge constitutionnel ; trahi leurs électeurs ; sacrifié des forces de sécurité républicaines, prie des libertés avec la constitution. Qu’ils se reconnaissent, ces hommes et femmes qui ont foulé à nos pieds l’ordre républicain.
C’est maintenant le temps des bonnes volontés, des apprentis sorciers et des véritables escrocs qui prêchent l’oubli et le pardon intégral. A leurs yeux, Il suffirait, pour sauver La République, de nous rappeler les joyaux de notre histoire : notre sens de la concertation, notre cohésion et notre art de vivre pluriséculaires. Ainsi, on devrait, unanimes et sans réserve, emprunter le chemin du dialogue et de la paix, à tout prix ; à n’importe quel prix !
Ils peuvent se tromper de bonne foi. Mais, à la vérité, s’il est envisageable de déroger à la règle de droit au nom de l’intérêt commun mais il est bien impossible d’obtenir une paix qui ne soit précaire en faisant fi de la justice. Qui a donc l’autorité pour arrêter ces acteurs quand ceux qui ont déjà eu la garde de la loi fondamentale s’accordent avec eux ?
Il ne reste plus que les « derniers des mohicans » pour sauvegarder la vertu : « les sages » qui doivent rétablir, en toute vérité le cours de l’histoire de nos institutions et inscrire définitivement dans nos gènes, les augustes valeurs fondatrices de ce pays auquel nous serons tous fiers d’appartenir. Il leur revient de sonner l’heure du choix. Peu importe lequel des justes méritera nos suffrages. Son impérieuse mission sera la reconstruction de l’âme d’une nation.
«AAR SUÑU ÉLECTION» REPREND DATE SAMEDI
En concertation avec le préfet de Dakar ce matin, mardi 13 février, un nouvel itinéraire a été choisi pour la tenue de la marche, une nouvelle déclaration de marche a donc été introduite pour le samedi 17 février à partir de 11 heures
Annoncée pour ce mardi 13 février, la marche projetée sur l’avenue Bourguiba entre le rond-point du Jet d’Eau et la Fastef (ex école normale supérieure) par la plateforme ‘’Aar Suñu Élection’’ a été interdite par le préfet de Dakar. Face à la presse, lundi matin, la plateforme qui regroupe plusieurs entités de la société civile a renseigné se conformer à la mesure de l’autorité et prend une nouvelle date. « Hier soir (lundi 12 février-Ndrl) seulement, c’est vers 22 heures que la plateforme a reçu la notification d’interdiction sous prétexte que l’itinéraire doit être changé.
En concertation avec le préfet de Dakar ce matin, mardi 13 février, un nouvel itinéraire a été choisi pour la tenue de la marche, une nouvelle déclaration de marche a donc été introduite pour le samedi 17 février à partir de 11 heures. Nous invitons les Sénégalais à manifester sur toute l’étendue du territoire national et la diaspora à se mobiliser, ce même jour, tous ensemble », a indiqué le porte-parole du jour de la plateforme, Elimane Kane.
Par ailleurs, ‘’Aar Suñu Élection’’ avertit l’opinion nationale et internationale sur sa réelle volonté de tenir sa marche pacifique. « Nous prenons à témoin tous les Sénégalais et toute la communauté internationale que la plateforme s’inscrit dans une démarche de respect du droit. Cependant, nous rappelons que la liberté de manifester constitue un droit fondamental et que la plateforme ‘’Aar Suñu Élection’’ ne saurait rester passive face aux atteintes répétées aux droits garantis par la constitution aux citoyens sénégalais. Face aux turpitudes des politiques, le peuple s’est toujours élevé pour trouver la solution juste et durable. Ensemble, faisons face aux menaces qui pèsent sur la stabilité du pays et la préservation de notre vivre ensemble », a conclu Elimane Kane
L’ALERTE DES NATIONS UNIES
Le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme tire la sonnette d’alarme non sans manquer de réclamer des « enquêtes approfondies et indépendantes » sur la répression violente ayant entrainé des morts lors des manifestations
La situation politique extrêmement tendue au Sénégal, marquée par le report unilatéral de la présidentielle, des manifestations violentes entrainant mort d’hommes et des interdictions systématiques des rassemblements de l’opposition et Cie, au nom du maintien de l’ordre public, a fini de susciter l’inquiétude au niveau de l’Organisation des Nations Unies (ONU). Dans une sortie en date d’hier, mardi 13 février, le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme tire la sonnette d’alarme non sans manquer de réclamer des « enquêtes approfondies et indépendantes » sur la répression violente ayant entrainé des morts lors des manifestations.
L ’Organisation des Nations unies n’est pas restée indifférente face à la crise politique qui secoue le Sénégal depuis que le président Macky Sall a annoncé le report de la présidentielle le 3 février, à trois semaines de l’échéance. Dans un communiqué en date d’hier, mardi, le Bureau des droits de l’homme de l’ONU s’est dit « profondément préoccupé » par la crise au Sénégal découlant de « la suspension de la présidentielle », tout en dénonçant un « recours inutile et disproportionné à la force contre les manifestants et des restrictions de l’espace civique ». Et cela, dans la foulée de l’interdiction par les autorités sénégalaises de la grande marche dite pacifique et silencieuse prévue par la société civile à Dakar contre le report de dernière minute de la présidentielle de ce 25 février et la prolongation du mandat de l’actuel chef de l’Etat. « Nous sommes profondément préoccupés par la situation tendue au Sénégal à la suite de la suspension de l’élection présidentielle prévue pour le 25 février. », a dit dans un communiqué le Haut-Commissariat de l’ONU aux droits de l’homme (HCDH). « Au moins, trois jeunes hommes ont été tués pendant les manifestations et au moins 266 personnes auraient été arrêtées dans tout le pays, y compris des journalistes », a déclaré par ailleurs la porte-parole du HCDH, Liz Throssell, lors d’un point de presse régulier de l’ONU à Genève.
RECOURS INUTILE ET DISPROPORTIONNÉ DE LA FORCE
Dans la foulée, la porte-parole de l’instance onusienne dirigée par Volker Turk a relevé que des enquêtes « doivent être menées rapidement, de manière approfondie et indépendante, et les responsables doivent être amenés à rendre des comptes », non sans manquer de faire savoir que « les personnes arrêtées pendant les manifestations à Dakar et dans certaines régions doivent bénéficier « d’un traitement équitable ». Qui plus est, tenant compte des rapports des médias et des ONG qui font état « d’un recours inutile et disproportionné de la force contre les manifestants… », la porte-parole du Haut-Commissariat a tenu à faire valoir que : « Dans un contexte de tensions croissantes et d’informations faisant état de nouvelles manifestations prévues, il est essentiel que les autorités ordonnent sans équivoque aux forces de sécurité de respecter et de garantir les droits humains», tout en exhortant les divers acteurs « de s’abstenir de recourir à la violence ».
Parlant des restrictions de l’espace public, la porte-parole du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme appelle au respect des droits à la liberté d’expression, d’association et de réunion pacifique. Pour rappel, mardi, le nouveau collectif Aar Sunu Election (“Protégeons notre élection”), qui revendique plusieurs dizaines d’organisations syndicales et de groupes citoyens et religieux, avait invité les Sénégalais à se rassembler massivement pour une marche silencieuse à partir de 15 heures (heure locale) dans la capitale sénégalaise. Mais la préfecture a interdit la manifestation au motif qu’elle « risque de perturber gravement » la circulation, selon la lettre officielle.
Dans ce contexte d’appels aux manifestations, les services du Haut-Commissaire Türk se sont inquiétés également de la suspension d’internet sur les mobiles hier, mardi, au Sénégal, au jour d’une manifestation prévue et interdite par les autorités pour la deuxième fois depuis le début de la crise politique post report de la présidentielle. « Il est très important de garantir le droit d’accès à l’information », a insisté Mme Throssell, indiquant que toute restriction doit « donc être strictement limitée à ce qui est nécessaire et doit être aussi limitée que possible dans le temps ». Et le Haut-commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme de conclure en faisant savoir que « Nous demandons aux autorités sénégalaises de veiller à respecter la longue tradition de démocratie et de respect des droits humains du Sénégal ». Pour rappel, le Secrétaire général de l’ONU, António Guterres, avait réaffirmé vendredi dernier « l’engagement des Nations Unies à soutenir la consolidation de la démocratie et à promouvoir la paix, la stabilité et le développement au Sénégal ». Il avait également appelé les acteurs nationaux sénégalais à s’engager dans un dialogue constructif et au maintien d’un climat politique pacifique, suite aux remous causés par le report de l’élection présidentielle prévue pour fin février 2024.
Par Fadel DIA
LA DANSE DU FOU
L’aventure que vit le président rappelle un peu la danse du fou, non parce qu’il est fou lui-même, mais parce que malgré sa longue expérience du pouvoir, il a manqué de finesse politique et n’a pas pu deviner jusqu’où il pouvait aller loin
La littérature orale pulaar, riche en dictons et proverbes, évoque souvent la tragique histoire de la danse du Fou. Le Fou danse, le public admire d’abord ses pirouettes s’étonne qu’il les ait réussies, l’applaudit, s’amuse de ses chutes et les pardonne. Le public, bonne fille, se dit qu’après tout sa danse ne durera que quelques instants et qu’il finira par céder la place car d’autres danseurs, plus frais, s’impatientent au bord de la piste.
Mais, voilà le Fou ne sait pas que le temps lui est compté pour cet exercice, il continue donc à tourner sans s’apercevoir qu’il n’amuse plus le public, que celui-ci a besoin de changement, alors que non seulement il ne se renouvelle pas, mais qu’il fait de plus en plus de faux pas. Il est victime de l’usure et sa glande de vanité est si grosse qu’il fait plus attention aux applaudissements qu’aux sifflets. On le chahute d’abord, puis on s’exaspère, on veut le forcer à quitter l’arène, mais inconscient du danger, il résiste et on finit par l’expulser en le trainant par les pieds !
L’aventure que vit le président de la République rappelle un peu la danse du Fou, non parce qu’il est fou lui-même, mais parce que malgré sa longue expérience du pouvoir, il a manqué de finesse politique et n’a pas pu deviner jusqu’où il pouvait aller loin. Il a gouverné pendant douze longues années, en exerçant la plénitude des pouvoirs déraisonnablement attachés à la fonction, il a fait de bonnes choses, en a fait d’autres moins bonnes, et tout comme le Fou ratait de plus en plus ses pirouettes, il faisait de plus en plus de mauvaises choses.
Alors on s’impatiente, sa prestation devient de plus en plus insupportable à la majorité de ses concitoyens et la colère gronde dans le pays. Il y a déjà plus de deux cents prétendants qui se pressent aux portes du palais, ils sont même si nombreux que la compétition tourne à la foire d’empoigne. Mais, alors que la tension atteignait son paroxysme, voilà que se produit un miracle : comme si le Fou avait réussi une belle pirouette qui avait désarçonné les gros bras qui s’apprêtaient à le sortir de l’arène, le président de la République fait une annonce qui retourne la situation en sa faveur. Ses adversaires se retrouvent sans voix, perdent leur principal argument de campagne, on trouve soudain des poux à certains d’entre eux, on accuse d’autres de traitrise ou d’inexpérience ou de n’avoir comme programme que de prendre sa place. L’opinion nationale et internationale applaudit, des offres de reconversions prestigieuses se multiplient, ses collègues lui font une standing ovation, bref il a remonté la pente…
Alors que tout le monde était convaincu qu’il va pouvoir sortir par la grande porte, patatras, au retour d’un voyage et comme s’il était incapable d’être à la hauteur de l’évènement, il improvise une déclaration qui rebat les cartes et plonge le pays dans la tourmente ! Qu’il ait raison ou non, au plan juridique (et la majorité des spécialistes jugent qu’il a tort) n’a guère d’importance si l’on tient compte de l’enjeu, mais aussi de ses propres prises de position sur ce sujet, fermes et définitives, exprimées publiquement il y a plus de dix ans, et qu’on lui a cruellement rappelées. Ses mots étaient alors très forts, il parlait d’engagement personnel et « solennel », fustigeait les « subterfuges » et « l’imposture », réfutait « tous les prétextes, quels qu’ils soient » et affirmait qu’il ne laisserait pas le président sortant rester « une minute de plus » au pouvoir après l’achèvement de son mandat légal ! Ce discours lui revient comme un boomerang et pour en atténuer la portée, il prône le dialogue, mais dialogue pour dialogue, pourquoi n’a-t-il pas eu lieu précisément avant cette décision aux conséquences imprévisibles avec, notamment, les candidats qui avaient franchi l’étape du dépôt de candidatures ?
La rupture est si profonde que ce seul et tardif dialogue ou la caution que lui ont apportée les deux anciens présidents de la République, dont le crédit est du reste très limité, ne suffiront pas à ramener la paix. Il faudrait une réaction à la hauteur de l’affront porté aux espérances du peuple souverain et quelle que soit sa décision, le président qui sortirait de ce guêpier qu’il a construit de ses mains serait un mutilé de guerre.
Car ce qui lui arrive aujourd’hui n’était arrivé à aucun de ses prédécesseurs. C’est la première fois au Sénégal qu’un chef d’état fait l’unanimité contre lui ,que se dressent contre lui, tous à la fois et du même mouvement, les chefs d’entreprises et les syndicats de travailleurs, l’Eglise catholique et les imams et oulémas , les chefs traditionnels et les intellectuels, les éditeurs de presse et les journalistes, les handicapés, le monde rural, celui des villes et de la diaspora, ses alliés politiques, qui l’avaient accompagné pendant plus de douze ans, et même une partie de sa majorité… Sans compter la défiance très claire de ses soutiens traditionnels au Nord, jusque-là très conciliants à son égard, et celle de ses collègues africains qui préféraient habituellement user de la langue de bois ! C’est ce qui s’appelle un gâchis, pour ne pas dire un suicide politique. Mais, pour notre malheur, ce gâchis-là fait des morts !