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12 octobre 2025
ELIMINATOIRES MONDIAL U20 FEMININE, LE SENEGAL DOIT FAIRE MIEUX AU BENIN
L’équipe du Sénégal féminine de football des moins de 20 ans devra trouver des ‘’stratégies’’ pour se ‘’remobiliser’’ afin de mieux aborder la manche retour contre le Bénin en éliminatoires de la Coupe du monde féminine de la catégorie, le 15 octobre 2023
Dakar, 8 oct (APS) – L’équipe du Sénégal féminine de football des moins de 20 ans devra trouver des ‘’stratégies’’ pour se ‘’remobiliser’’ afin de mieux aborder la manche retour contre le Bénin en éliminatoires de la Coupe du monde féminine de la catégorie, le 15 octobre prochain à Cotonou, a soutenu, samedi, son entraîneure, Mbayang Thiam.
Elle s’exprimait au terme de la victoire contre le Bénin (2-0), en manche aller du deuxième tour des éliminatoires de la Coupe du monde féminine des moins de 20 ans prévue en Colombie (31 aout-22 septembre 2024).
‘’La qualification n’est pas encore acquise. Il faut se remobiliser et être sûres de faire mieux au Bénin. Nous aurons beaucoup de problème là-bas devant leur public. Maintenant, les deux équipes se connaissent. Il va falloir trouver des stratégies et chercher les failles à exploiter’’, a-t-elle dit.
La technicienne sénégalaise a reconnu que ses joueuses ‘’ont fait un bon début de match dans les 15 et 20 premières minutes, en marquant deux buts, mais après elles se sont emballées et ont raté beaucoup d’occasions’’.
‘’Nous avons recadré les filles, en leur donnant plus de consignes, mais malgré cela, nous n’avons pas pu marquer d’autres buts. En deuxième période, elles sont revenus en accablant l’adversaire, mais les Béninoises étaient bien revenues et jouaient mieux’’, a-t-elle analysé.
‘’Nos filles ne sont pas fortes dans les duels. Chaque fois, nous leur imposons le jeu au sol et les combinaisons pour éviter de balancer les ballons. Ce sont encore des gamines et nous avons une semaine pour voir ce qu’il y a à améliorer, à travailler et essayer de corriger les lacunes’’, a promis Mbayang Thiam.
MULTIPLE PHOTOS
COUP DU SENEGAL, LE DUC CHAMPION
Le Dakar université club a remporté, samedi, la Coupe du Sénégal de basket chez les dames, en battant, 42-37 l’ASC ville de Dakar, en finale, a constaté l’APS.
Dakar, 8 oct (APS) – Le Dakar université club a remporté, samedi, la Coupe du Sénégal de basket chez les dames, en battant, 42-37 l’ASC ville de Dakar, en finale, a constaté l’APS.
Le DUC était déjà devant à la pause, 21-16.
Une semaine après avoir remporté la Coupe du maire de Dakar face à l’ASC ville de Dakar, le DUC s’impose devant le même adversaire pour la deuxième fois en trois finales de la saison.
Les deux équipes se sont rencontrées lors des finales de la Coupe de la Ligue, de la Coupe du maire de Dakar et de la Coupe du Sénégal. L’ASC ville de Dakar s’est adjugée le premier trophée, les deux autres sont allés au DUC.
Les Duchesses semblent avoir définitivement trouvé la clé pour battre l’ASC ville de Dakar.
L’ASC Ville de Dakar peut, toutefois, se féliciter d’avoir gagné le championnat national face à la Jeanne d’Arc de Dakar et la Coupe de la Ligue face au DUC
Omar Blondin Diop, plutôt la mort que l'esclavage
UN RÉVOLUTIONNAIRE ENCOMBRANT
Du plateau d’un film de Jean-Luc Godard à l’avant-garde de Mai-68 aux côtés de Daniel Cohn-Bendit, Omar Blondin Diop délaisse peu à peu les bancs de l'École normale supérieure de Saint-Cloud pour les mouvements révolutionnaires de l'époque (2/5)
Du plateau d’un film de Jean-Luc Godard à l’avant-garde de la révolte étudiante de Mai-68 aux côtés de Daniel Cohn-Bendit, Omar Blondin Diop délaisse peu à peu les bancs de l'École normale supérieure de Saint-Cloud pour s'inscrire dans les mouvements révolutionnaires de l'époque.
Florence Morice et Clémentine Méténier racontent les premières années du parcours militant de ce jeune intellectuel sénégalais.
Rendez-vous avec la star mondiale Youssou N’dour pour un retour à 360 degrés sur sa carrière hors du commun. De ses débuts dans la Medina de Dakar à sa rencontre avec Peter Gabriel, Sting ou Bono, jusqu’à la remise de ses prix honorifiques
Rendez-vous avec la star mondiale Youssou N’dour pour un retour à 360 degrés sur sa carrière hors du commun. De ses débuts dans la Medina de Dakar à sa rencontre avec Peter Gabriel, Sting ou Bono, jusqu’à la remise de ses prix honorifiques (Doctor Honoris Causa, Grammy Award) jusqu’à ses engagements humanitaires.
Dans cet épisode les stars Burna Boy et Omar Sy offrent les vidéos surprises
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ALY NGOUILLE NDIAYE OFFICIALISE SA CANDIDATURE
Le dissident du parti au pouvoir, l’Alliance pour la République, et de Benno Bokk Yaakaar (BBY), la coalition de partis politiques de la majorité présidentielle, reconnaît qu’‘’il y a, dans notre pays, beaucoup de souffrances, d’injustices et de divisions
L’ex-ministre de l’Agriculture, de l’Équipement rural et de la Souveraineté alimentaire, Aly Ngouille Ndiaye, a fait une déclaration de candidature à l’élection présidentielle du 25 février prochain, samedi, à Dakar, en exprimant le souhait d’‘’être le président d’un Sénégal réconcilié’’ avec lui-même.
‘’J’ai décidé, s’il plait au Tout-Puissant, avec humilité et détermination, d’être candidat à l’élection présidentielle du 25 février 2024’’, a déclaré M. Ndiaye devant de nombreux militants et sympathisants.
Le dissident du parti au pouvoir, l’Alliance pour la République, et de Benno Bokk Yaakaar (BBY), la coalition de partis politiques de la majorité présidentielle, reconnaît qu’‘’il y a, dans notre pays, beaucoup de souffrances, d’injustices et de divisions’’.
‘’En ces temps graves et porteurs d’inquiétudes multiformes, je veux être le président d’un Sénégal réconcilié’’ avec lui-même, a-t-il ajouté.
Compagnon du président de la République, Macky Sall, depuis l’accession de ce dernier au pouvoir en 2012, Aly Ngouille Ndiaye a exercé d’importantes fonctions ministérielles à ses côtés.
Il a dirigé le ministère de l’Intérieur avant d’être nommé à la tête de celui de l’Agriculture, de l’Équipement rural et de la Sécurité alimentaire, le 17 septembre 2022.
‘’Les fonctions que j’ai successivement exercées m’ont permis très tôt d’identifier et de cibler les priorités des Sénégalais, à la tête desquelles se trouve le besoin de sécurité à toutes les échelles de leur vie’’, a souligné M. Ndiaye.
Il a été investi candidat par une coalition, ‘’Aly Ngouille 2024’’. Le maire de Linguère (nord), âgé de 59 ans, dit placer sa candidature ‘’au-dessus des partis politiques et des clivages de toute nature’’.
L’emploi, l’autosuffisance alimentaire et la réforme des institutions judiciaires font partie de ses priorités, a-t-il dit.
Aly Ngouille Ndiaye a fait aussi la promesse de ‘’renforcer l’indépendance de la justice et d’établir une réelle séparation des pouvoirs’’, notamment ‘’entre l’exécutif et le judiciaire’’.
Sa déclaration de candidature a eu lieu en présence de représentants de l’ancien Premier ministre et candidat déclaré à l’élection présidentielle Mahammed Dionne.
M. Ndiaye a démissionné du gouvernement lorsque Macky Sall, président de Benno Bokk Yaakaar, a choisi Amadou Ba, le Premier ministre, comme candidat de ladite coalition.
L’ancien ministre, ingénieur en génie civil diplômé de l’École polytechnique de Thiès (ouest), expert financier et ancien directeur du crédit à la Banque de l’habitat du Sénégal, était candidat à la candidature de BBY.
RENTRÉE CHAOTIQUE DANS LES ÉCOLES SACCAGÉES DE ZIGUINCHOR
Les inscriptions et réinscriptions se font à l'air libre, faute de bureaux et d'électricité, sans accès aux ordinateurs. Les conséquences de cette situation sont préoccupantes
Dans la ville de Ziguinchor, la rentrée scolaire ne se déroule pas dans de bonnes conditions, notamment dans les écoles qui ont été saccagées lors des manifestations politiques suivant la condamnation de l'opposant Ousmane Sonko en juin dernier. Malgré la détermination des responsables et des enseignants à surmonter les obstacles, il est presque impossible de reprendre les cours immédiatement.
Le personnel du CEM Boucotte sud, l'un des établissements scolaires détruits à Ziguinchor, est confronté à un véritable casse-tête pour démarrer les cours dans un environnement complètement saccagé. Les inscriptions et réinscriptions se font à l'air libre, faute de bureaux et d'électricité, sans accès aux ordinateurs.
Les conséquences de cette situation sont préoccupantes. Certains élèves risquent de redoubler, n'ayant pas pu suivre le deuxième semestre comme les autres écoles. Diminga Kayoungha, en classe de troisième, exprime son désarroi dans les colonnes de DW Afrique : "Certains élèves n'ont pas le niveau de 3e, mais on est obligé de les laisser parce qu'on n'a pas fait le deuxième semestre comme les autres écoles. Beaucoup risquent de redoubler."
L'élève Mohamed Lamine Sourou cité par le même média craint également un démarrage tardif des cours : "Il n'y a pas de classes pour nous accueillir, toutes les classes ont été détruites. On ne sait pas quand est-ce qu'on va commencer les cours. Ça nous fait peur, on va commencer à apprendre tardivement. Et les professeurs n'auront pas le temps de se rattraper."
La situation préoccupe également les parents d'élèves. Mahawa Doumbouya, responsable des parents d'élèves, estime que l'avenir des élèves est en danger : "L'avenir des élèves est menacé parce que les tables-bancs manquent dans les salles de classe. Quand est-ce que ces tables-bancs seront reprises et remises dans les salles de classe pour que les professeurs puissent dispenser leurs cours en suivant le calendrier du programme ?"
Malgré cette situation désastreuse, François Poussy, le principal de l'établissement, assure que tout sera mis en œuvre pour que les cours reprennent rapidement.
Madiadiop Sané, président de Vision citoyenne, une organisation de la société civile, exprime sa préoccupation face à la situation des écoles détruites et interpelle l'État : "Si nous voyons quelque part des écoles qui ont été saccagées depuis le mois de juin et qui n'ont pas été réhabilitées, nous pensons qu'à la limite, il faut parler d'une mauvaise foi de l'État."
MAME PENDA BA EN CONVERSATION AVEC FELWINE SARR
DU PROLONGEMENT DU POUVOIR ABSOLU AU SÉNÉGAL
EXCLUSIF SENEPLUS - Les institutions coercitives et idéologiques de la colonisation ont maintenu l'infériorité des colonisés et perduré au fil des générations, entravant les mouvements de décolonisation - Il est impératif de réformer ces institutions
Dans cet épisode de Chronique d’un Temps politique, engagée dans un dialogue avec l’écrivain et universitaire Felwine Sarr, la Professeure Ba explore l'histoire de l'État du Sénégal. Elle discute de la manière dont la communauté politique est organisée et fonctionne, tout en revenant sur l'histoire et la conception de l’État sénégalais, avec une attention particulière portée à ses origines coloniales.
La Professeure Mame Penda Ba, agrégée des facultés de droit et de sciences politiques, enseigne à l’Université Gaston Berger de Saint-Louis. Elle occupe également le poste de directrice au laboratoire d’Analyse des Sociétés et Pouvoir Africain Diaspora, fondé en 2014. En plus de ses fonctions académiques, elle est rédactrice en chef de la Revue Globale Africa. Ses recherches se focalisent principalement sur la sociologie politique du religieux, les politiques publiques, et le genre.
Pouvoir tyrannique hérité de la colonisation
L'État, selon la Professeure Mame Penda Ba, n'est pas une entité statique ; il est en constante évolution et mondialisation, et son implantation et développement sont le fruit d'une longue histoire, particulièrement au Sénégal et en Afrique de l'Ouest. Elle insiste sur le fait que l'État doit être compris comme une structure dynamique et souligne que le moment colonial dans la construction de l'État sénégalais a été déterminant, un moment dont nous ne sommes pas totalement sortis.
À son avis, les principes, attributs et caractéristiques qui ont guidé la mise en place de cet État colonial persistent encore aujourd'hui. Pour comprendre l'État actuel, il est impératif de déconstruire et d'examiner en profondeur l'État colonial, qu'elle considère fascinant en tant qu'objet d'étude. Les sociologues, politologues et historiens institutionnels ont longtemps cru que l'État colonial était une structure inédite, ne correspondant ni aux métropoles ni aux colonies, et représentant une forme nouvelle et spécifique.
Cependant, des historiens montrent désormais une continuité significative entre l'État colonial et l'Ancien Régime français, voire européen. L'Ancien Régime, comme Mme Ba le note, était un modèle extrêmement hiérarchisé et violent, caractérisé par une élite dominante qui exerçait le pouvoir de manière seigneuriale, sans accorder de pouvoir ou de parole au tiers état. Elle trouve intéressant de noter que l'État colonial, en réalité, suit le modèle rejeté et renversé par les révolutions européennes, notamment la Révolution française.
Le modèle d'État de l'Ancien Régime, détruit dans les métropoles par les révolutions, a été transporté dans les colonies. Selon la Professeure Ba, il s'agit d'un modèle violent et hiérarchisé, où tous les pouvoirs étaient concentrés entre les mains du roi, dont l'autorité était incontestée et vue comme divine. De manière similaire, les administrateurs coloniaux détenaient tous les pouvoirs - judiciaires, exécutifs, législatifs - sans avoir de comptes à rendre, surtout pas aux sujets coloniaux. En fin de compte, Mme Ba conclut que notre histoire s'inscrit dans ce contexte et il est crucial de comprendre que l'État colonial était un État violent, tyrannique, injuste, et qui favorisait une petite élite au détriment de toutes les autres catégories sociales.
L’État colonial se prolonge après les indépendances
Dans sa conversation avec Felwine Sarr, la Professeure Ba souligne que les conséquences du type d'État hérité de la colonisation n'ont pas été pleinement explorées ou comprises. Selon elle, il est essentiel de nommer correctement les choses car cela représente non seulement un processus idéal mais également un processus politique. La professeure évoque que la terminologie utilisée pour parler des États, tels que les colonies, les fédérations, les associations ou les unions, ne reflète pas le fait qu'ils étaient en réalité des États d'Ancien Régime. À son avis, une révolution aurait été nécessaire pour véritablement se libérer de ce type d'État, une révolution similaire à celle qui a eu lieu en France.
Il aurait fallu, continue-t-elle, une philosophie de révolution, de refondation, et une nouvelle praxis pour démanteler complètement et remettre en question le modèle existant. Cependant, cette action n'a pas été entreprise. Les pères fondateurs de la nation ont probablement agi selon les moyens et le contexte de l'époque.
La professeure souligne que le modèle colonial était logique et efficace dans son action. Elle rappelle que le Sénégal avait des représentants à l'Assemblée nationale française dès 1848, ainsi que des écoles et d'autres institutions qui accompagnaient la soi-disant mission civilisatrice, mettant en avant les avantages de faire partie de cette civilisation.
Cependant, il est crucial de comprendre que le projet colonial était total et pernicieux, bien qu’intelligent dans son fonctionnement. La professeure cite des analystes marxistes qui ont démontré qu'il existe deux types d'actions et d'institutions dans toute colonisation : les institutions répressives, comme la police et l'armée, et les appareils idéologiques qui inculquent insidieusement aux colonisés leur infériorité naturelle et normale. Ces éléments idéologiques de la mission civilisatrice, après 350 ans de présence française au Sénégal, ont présenté le colonisateur comme un bienfaiteur, masquant et justifiant ainsi toute la violence physique et symbolique inhérente à la colonisation.
Au moment des indépendances, la population avait déjà subi divers degrés d'aliénation et de collaboration avec la métropole. Des relations profondément enracinées avaient été établies au fil des siècles, rendant difficile de rompre complètement avec un système si profondément ancré. Cela pourrait expliquer pourquoi, en particulier en Afrique francophone, l'option d'une décolonisation pacifique et négociée a été privilégiée plutôt que celle d'une révolution totale.
La séduction coloniale dans la postindépendance
La Professeure Ba fait remarquer que beaucoup des institutions postcoloniales sont issues, dans une large mesure, de la transposition et du mimétisme d'institutions qui ne sont pas nécessairement modernes. Elle insiste sur l'importance de comprendre cela.
Pour répondre à la question posée par Felwine Sarr sur la transformation des États, elle se réfère au travail de Frantz Fanon, qui propose une radicalité exigeante pour le colonisé qui aspire à l'émancipation. Il s'agit d'une nécessité impérative de conceptualiser vigoureusement et méticuleusement une contre-proposition à l'État colonial, un projet robuste et indépendant pour un nouvel État libre.
Elle souligne que cela implique de concevoir et de construire un nouveau projet de société, en prenant en compte divers aspects, tels que la paysannerie, la culture, l'éducation, etc. Parallèlement, elle mentionne d'autres penseurs, comme Cheikh Anta Diop, qui ont également formulé des propositions. Cependant, elle admet que ces idées sont difficiles à implémenter. La réalisation de ces propositions nécessite un courage politique considérable et une rupture significative avec la métropole.
La Professeure Ba note que les états et institutions sont composés d'individus qui ont leurs propres intérêts et qui ont établi des relations et formes de complicité qui rendent difficile la transition vers une posture plus radicale. Elle souligne également le coût élevé payé par ceux qui ont choisi de rejeter le modèle colonial, en citant des exemples comme la Guinée, Lumumba au Congo, ou encore l'UPC au Cameroun, où les enjeux sont littéralement des questions de vie ou de mort.
Elle suggère que le choix de nombreux pays postcoloniaux d’opter pour l'accommodation plutôt que la révolution a été motivé en partie par la rationalité de l'époque. Cependant, elle reconnaît que le coût de ce choix est toujours payé actuellement. Elle insinue qu'à l'époque, il pourrait y avoir eu des justifications rationnelles à opter pour un modèle d'accommodation plutôt que de poursuivre la révolution et la radicalité.
Un État volontariste pendant une courte période
La Professeure Ba analyse la période des années 1960 et 1970, jusqu'à la première crise pétrolière. Elle note qu’après le départ des administrateurs coloniaux, ces derniers furent remplacés par des administrateurs locaux. Cela évoque, selon elle, une observation de Frantz Fanon, selon laquelle le rêve des individus noirs aurait été de prendre la place de l’homme blanc et de coucher avec la femme blanche. Bien que ce point demeure largement inexploré, elle reconnaît que la première décennie postcoloniale était caractérisée par des ambitions développementalistes.
Dans cette phase, les États nouvellement indépendants étaient engagés dans la construction nationale, mettant en œuvre des projets de développement tels que la construction d'écoles, de routes, le développement économique, l'établissement de bureaucraties fonctionnelles et la fondation des premières universités. Il y avait un dynamisme et des projets politiques sérieux en cours, comme en témoignent des initiatives telles que le "socialisme singulier". Avec le soutien de la communauté internationale et l'accès à des ressources financières et à des prêts, ces États avaient l’ambition et l'envie de réaliser des changements significatifs.
Cependant, la Professeure Ba signale que cette période de volontarisme étatique et de petits épisodes démocratiques fut brève. Elle mentionne que ces moments d'optimisme et d'effervescence ont été suivis d'une fermeture rapide du champ civique et d'un glissement vers des régimes à parti unique.
Malgré tout, elle souligne qu'il y avait une sorte de quasi-État providence en place à cette époque, avec des programmes visant à démocratiser l'éducation et à fournir un accès ouvert et gratuit à la santé. Des initiatives comme la mise en place progressive de la sécurité sociale, des efforts pour promouvoir l'éducation, la médicalisation par l'État, et des tentatives d'industrialisation étaient manifestes.
Cette période d'effervescence a été interrompue assez rapidement, mentionnant également que l'agriculture avait été subventionnée au début, soulignant ainsi les tentatives diverses et complexes d'établissement et de développement dans les nouveaux États postcoloniaux.
De l’impossible État-nation postcolonial
La Professeure Ba identifie ce qu'elle considère comme des erreurs historiques commises par les dirigeants africains. Elle explique qu'ils ont adopté le modèle de l'État-nation, un produit d'un processus historique long et complexe en Europe, comme si c'était un modèle naturel et facilement transposable en Afrique. Ce modèle européen a émergé à la suite de guerres prolongées et violentes, tant externes qu'internes, et un processus d'homogénéisation autour de la langue et de la culture quotidienne qui a pris des siècles.
Selon la Professeure Ba, les dirigeants africains ont tenté d'implanter ce modèle d'État-nation en une ou deux décennies dans des régions extrêmement diverses et plurielles en termes de culture et de communauté. Ce faisant, ils ont tenté d'effacer ces différences pour construire des identités nationales unifiées, telles que le citoyen ivoirien, sénégalais, béninois, ou camerounais, sans reconnaître la diversité inhérente à ces territoires.
Selon elle, il aurait été plus approprié de conceptualiser ces États comme multinationaux et de réfléchir à la cohabitation au sein de cette diversité. Elle note que les processus d'homogénéisation entraînent inévitablement des perdants et des gagnants, et que les perdants finissent par exprimer leurs revendications, parfois de manière brutale. Elle cite des exemples comme le Nord du Mali et le Sud du Sénégal, où les conflits, enracinés dans ces dynamiques, ont persisté pendant des années.
En parlant de la devise du Sénégal, "Un peuple, un but, une foi", la Professeure Ba se demande quel peuple est représenté, qui a défini ce "but", et qui a été inclus dans ces conversations fondatrices. Elle souligne que les nations sont des communautés imaginées, souvent conceptualisées par les élites sans la participation active des peuples, sauf peut-être après des crises, des révolutions ou des moments de refondation.
Selon elle, une perspective à court terme et une focalisation sur l'immédiat nous empêchent de comprendre la puissance des dynamiques à long terme. La Professeure Ba conclut en observant que les changements significatifs en Afrique ne résultent pas nécessairement des actions des gouvernants ou du contexte international, mais sont souvent impulsés par les citoyens et les sociétés. Ces derniers, affirme-t-elle, influencent de plus en plus les gouvernements, que ce soit au niveau local ou national, reflétant ainsi le dynamisme et la complexité des sociétés africaines contemporaines.
Les rapports entre pouvoir et société
La Professeure Ba aborde l'inadéquation persistante de la forme étatique, faisant référence aux erreurs historiques qu'elle a mentionnées précédemment. Selon elle, bien que l'État colonial ait dévalué et écarté certaines institutions traditionnelles et zones de pouvoir significatives, ces entités n'ont pas disparu ; elles ont plutôt opéré en arrière-plan. Ces structures continuent d'influencer la société, en dépit des tentatives de l'État colonial de les rendre invisibles et sans pouvoir.
Le cas du Sénégal est particulièrement révélateur à cet égard. En dépit de la puissance militaire et idéologique de l'État colonial, ce dernier finit par rencontrer une résistance, illustrée par une société qui devient silencieuse, refuse de communiquer, de partager et de respecter les ordres, sauf sous la contrainte extrême, comme l'emprisonnement ou la violence physique. Dans ce contexte, l'administration coloniale se retrouve contrainte de faire appel aux autorités traditionnelles qu'elle avait initialement dévalorisées et délégitimées, pour servir de médiateurs.
Ces pouvoirs intermédiaires jouent un rôle crucial, offrant du sens et facilitant la cohésion au sein de sociétés diverses. Au Sénégal, cela explique pourquoi le pouvoir religieux a acquis une importance considérable, surtout pendant les deux guerres mondiales. Par exemple, des révoltes ont éclaté en Casamance lorsqu'on a exigé des paysans qu'ils cèdent leur récolte de riz, déclenchant des mouvements comme celui d’Aline Sitoe Diatta.
La Professeure Ba illustre également comment, dans la région du Bassin arachidier, la colonisation a réussi à imposer une monoculture de l'arachide, souvent par la médiation des chefs religieux et traditionnels. Ces derniers, dans le processus d'accommodation réciproque, ont joué un rôle crucial dans le renforcement spirituel, moral et idéologique de leurs communautés face à la domination coloniale.
Elle conclut en soulignant comment, dans ce contexte, la diffusion de l'islam et des confréries islamiques au Sénégal a été particulièrement notable durant la période coloniale, utilisant la "paix coloniale" pour étendre leur influence. Cette période a également été témoin d'un effort concerté pour préserver l'identité, l'histoire, la langue, et d'autres aspects culturels des communautés, malgré les pressions économiques et politiques de la colonisation.
Le pouvoir religieux confrérique comme co-production coloniale
Dans ce passage, la Professeure Ba continue d'analyser la complexité des dynamiques coloniales au Sénégal, en soulignant le processus de coproduction qui a façonné le modèle étatique du pays depuis environ 1856. Elle argumente que cet état, tel que nous le connaissons aujourd'hui, résulte d'une collaboration et d'une négociation entre les autorités coloniales et les autorités religieuses locales.
Selon la Professeure Ba, l'État colonial, en l'absence d'autorités politiques locales légitimes, s'appuie sur les autorités religieuses comme substituts pour exercer son pouvoir. Ces autorités religieuses, tout en étant instrumentalisées par les colonisateurs, trouvent également des opportunités dans cette relation.
Elles utilisent la « paix coloniale », une période où les conflits internes entre royaumes locaux sont réduits, pour diffuser leur influence religieuse et résister à l'intérieur du système colonial.
Elle explique que le modèle colonial, tout en étant initialement étranger et imposé, commence à faire sens et à être intégré dans la société locale grâce à l'engagement et à la participation de groupes tels que les confréries religieuses. Ces groupes, tout en facilitant le fonctionnement de l'État colonial, s'approprient et adaptent les structures et les processus de cet État pour répondre à leurs propres objectifs et visions.
La Professeure Ba insiste sur le fait qu'il est crucial de comprendre la dimension économique de ces dynamiques. Dans le contexte colonial, les intérêts économiques sont prédominants, et les autorités religieuses locales comprennent et naviguent habilement dans ces eaux, collaborant avec l'État colonial lorsque cela sert leurs intérêts.
En conséquence, le modèle colonial sénégalais évolue et se transforme progressivement en une entité qui fait sens pour ceux qui y vivent, en intégrant des éléments appropriés et modifiés du colonialisme avec les visions et objectifs des communautés locales.
Pour une théorie de la refondation institutionnelle
Dans ce segment, la Professeure Ba souligne l'importance de la réflexion et de la théorisation autour de la notion de "refondation" à un moment critique de l'histoire : les indépendances. Elle suggère qu'il est nécessaire d'examiner et de penser profondément à la crise que représentait le moment colonial, qui était une période à la fois profonde, nouvelle et radicale. Elle exprime le besoin d’une réévaluation intellectuelle et théorique profonde sur l'état post-colonial et la refondation de la société après la domination coloniale.
Elle mentionne que le colonialisme a surpris, dominé et humilié les populations locales, et insiste sur l'importance de lire et d'engager un dialogue avec les travaux d'intellectuels africains significatifs tels que Fabien Eboussi Boulaga, Cheikh Anta Diop, Mamadou Dia, et Senghor. Selon elle, il est crucial de se familiariser avec leurs réflexions et visions, car elles offrent des perspectives diverses et profondes sur la situation politique, le panafricanisme, et l'avenir du continent.
En considérant que "mal nommer les choses c’est ajouter au malheur du monde", elle souligne l'importance cruciale de nommer et d'identifier correctement les crises et les défis auxquels les sociétés africaines sont confrontées, car cela est fondamental pour comprendre, centrer et répondre adéquatement à ces problèmes. La Professeure Ba appelle à une réflexion profonde et à ne pas répéter les erreurs du passé, invitant à une réflexion collective et critique sur la situation actuelle et sur les voies possibles de refondation et de reconstruction.
L’urgence de la refondation
La professeure Mame Penda Ba articule clairement que l'importance de réfléchir aux réformes et transformations nécessaires dans les États africains est cruciale. Selon elle, il est indispensable d'aborder ces réformes avec un profond sens de refondation et d’innovation, tout en évitant de reproduire les erreurs passées. Elle mentionne les Assises nationales du Sénégal, ayant eu lieu entre 2008 et 2010, comme un moment significatif et inspirant pour le continent.
Madame Ba souligne que ce processus inclusif de consultation populaire sur la Constitution du pays est un exemple lumineux de démarche démocratique ouverte et participative. Elle met en relief que tous les citoyens étaient sollicités à réfléchir et s'exprimer sur le projet commun de la société, indépendamment de leur âge.
La professeure Ba indique que l'initiative visait à créer un dialogue national autour de la notion de « bien-vivre » ou de « décence », qui transcende les cadres institutionnels et politiques pour englober l'ensemble de la société, les interactions humaines, et même les relations internationales.
La notion de "bien-vivre" ou de "décence" doit être, d’après elle, le phare guidant la réflexion sur les institutions politiques et sociales. Cela signifie repenser non seulement qui doit gouverner, mais également la manière de gouverner. Mame Penda Ba insiste sur le fait qu'il faut adopter une approche qui dépasse la simple démocratie électorale et procédurière pour envisager les finalités qui se cachent derrière ces procédures.
Elle plaide également en faveur d'une participation plus large et plus équitable dans le discours public. Pour Madame Ba, il est essentiel d'inclure les voix souvent marginalisées, comme celles des femmes, des jeunes filles, des marchands ambulants, des personnes handicapées et des populations rurales. La professeure encourage vivement à tirer des leçons des expériences passées et à valoriser ces enseignements dans le processus de refondation et de réforme. Elle souligne l'importance de ne pas toujours chercher à innover ou découvrir, mais plutôt à apprendre de ce qui a déjà été expérimenté et mis en œuvre.
En résumé sur cette question, les propos de la professeure Mame Penda Ba appellent à une réflexion profonde et inclusive sur la refondation et la réforme des États africains, en mettant l'accent sur les leçons apprises du passé et en intégrant activement les voix des groupes souvent exclus du discours public.
Capitaliser sur les Assises nationales
Selon la professeure Mame Penda Ba, les Assises nationales du Sénégal et le travail de la Commission Nationale de Réforme des Institutions (CNRI) représentent une avancée significative, bien que non exemptes de critiques. Elle les perçoit comme une amélioration notable par rapport aux anciennes méthodes de rédaction et de mise en œuvre des textes législatifs.
Madame Ba met en avant la nécessité d'affiner, de prendre soin et de renforcer ces processus et contenus, soulignant qu'il y a des éléments importants dans le contenu même si des améliorations sont nécessaires.
Elle regrette notamment que la voix des femmes n'ait pas été suffisamment entendue, et d’autres groupes ont également été négligés dans ces discussions, selon elle. La professeure Ba souligne qu'un élément crucial a été mis sur la table, mais déplore que l'ensemble de la classe politique sénégalaise, indépendamment de son affiliation, ait montré une incapacité à réaliser pleinement les promesses énoncées pendant cette période.
Elle exprime également son inquiétude quant à la perte de l'espoir vital qui s'est manifesté lorsque certains leaders politiques, comme les présidents ivoirien et guinéen, ont décidé de se représenter. Selon elle, ces actes retirent à leurs citoyens, et plus largement à leurs pays, l'espoir d'un avenir meilleur, quelque chose qu'elle considère comme inexcusable. L'érosion de cet espoir, selon Madame Ba, constitue une violation profonde et dévastatrice.
Est également évoqué la frustration et le désespoir palpable chez les jeunes, particulièrement lors des manifestations. Elle interprète cette colère et ce désespoir comme une réaction à la perte de l'espoir et à un sentiment de stagnation, où les jeunes ont l'impression d'être retenus par des combats qui ne sont pas les leurs. Elle souligne que les véritables batailles à mener concernent l'amélioration de la qualité de vie, la participation active des voix africaines dans les débats internationaux, et la réflexion sur les systèmes de santé, d'éducation, et sur le type de société que les citoyens souhaitent construire.
Selon Madame Ba, le débat institutionnel actuel empêche d'avoir des discussions profondes et significatives sur des questions sociales vitales comme l'éducation, la santé, l'économie, la coexistence pacifique et la prospérité partagée. Elle exprime le sentiment d'un retour en arrière et d'une stagnation qui, à son avis, entrave le progrès et crée un vide dans lequel les citoyens se sentent coincés. La professeure perçoit dans la colère des jeunes une volonté fervente de rompre avec cette stagnation, manifestant un désir profond de mouvement, d'action et de dynamisme.
Une crise porteuse d’opportunités
La professeure Mame Penda Ba suggère qu'il est crucial d'envisager les situations actuelles dans une perspective dynamique. Elle est en accord avec le Professeur Felwine Sarr qui exprime l'idée que, bien que nous puissions avoir l'impression de stagner, il se pourrait que nous soyons à la fin d'un cycle, avec une crise indiquant un possible renouveau démocratique à venir.
Selon elle, les demandes démocratiques actuelles sont bien plus fortes qu'elles ne l'étaient il y a 10 ou 12 ans. Mme Ba partage la perspective que de nouveaux types de citoyens sénégalais émergent, avec des exigences et une volonté de changement plus prononcées. Elle estime que les sociétés sont en avance sur les États, les gouvernements, les élites, ainsi que sur les universitaires et chercheurs.
À Felwine Sarr qui critique la tendance de certains universitaires à se considérer déconnectés de la société, alors qu’ils font intégralement partie d'une société intégrée, parlant les langues nationales et étant en phase avec les problèmes rencontrés par les Sénégalais, Mame Penda Ba réagit en exprimant son aspiration à une sociologie approfondie des jeunes, observant un manque de recherches détaillées sur les jeunes et sur des sujets comme la magistrature au cours des 25 dernières années. Elle souligne le besoin de travaux sociologiques et anthropologiques qui explorent en profondeur la Justice, les magistrats et les juges au Sénégal, ainsi que leur formation, socialisation, cooptation et intégration dans la société.
Enfin, la professeure Ba et l’économiste Sarr s’accordent sur le besoin de théories politiques, d'épistémologies et de philosophies politiques nouvelles. Ils appellent à la production et à la mise à disposition de nouvelles formes de connaissances pour le corps social, afin de permettre une refonte et une reconsidération de la situation actuelle, suggérant que le domaine politique a aussi un rôle crucial à jouer dans cette période de refondation.
Comment la junte au Niger a-t-elle dribblé tout le monde pour se rendre sympathique ? La CEDEAO est-elle une organisation inutile et à la botte des Occidentaux? N'est-elle pas dans son rôle contre tous? Quels sont ses hauts faits depuis sa naissance ?
Tirant vraisemblablement des leçons des situations malienne, burkinabé et guinéenne, Aux premières heures du coup d'État, la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) a brandi rapidement la menace d'une intervention sur le Niger, afin de rétablir le président déchu Mohamed Bazoum Mais cette menace n'a pas ému le moindre du monde, les miliaires qui se sont emparés du pouvoir à Niamey.
En revanche, le Général Tchiani et ses camarades se sont renforcés en dribblant la CEDEAO et en jouant sur l'autodétermination du Niger, exigeant notamment le départ de l'armée française du pays.
Ce faisant, ils ont réussi assez rapidement à mobiliser les Nigériens autour de leur pouvoir contre la CEDEAO qui prétend intervenir pour réinstaller Bazoum et contre la France, déjà chassée du Burkina et du Mali et qui semble abois et presque sans perspectives sur le continent.
Mais en vérité, la CEDEAO n'est-elle pas dans son rôle contre tous ses détracteurs ? Est-elle une organisation inutile et à la solde l'Élysée et Cie comme beaucoup d'Africains le pensent ?
Comment la junte nigérienne a-t-elle dribblé tout le monde pour se rendre sympathique aux yeux des Nigériens ? Après le départ de la France, Bazoum peut-il continué à être gardé en résidence surveillée par la junte ?
Dans cet entretien, le politologue Serigne-Bamba Gaye nous fait le décryptage sur AfricaGlobe Tv.
par Cheikh Omar Diallo
QUAND LE SÉNÉGAL S’ÉVEILLERA AVEC GUY MARIUS-SONKO
Tout concorde entre "Ousmane Sagna et Guy Marius-Sonko". Ce duo incarne une certaine forme d’espoir et de renouveau politique. Guy Marius-Sonko, ce bon faiseur de roi, pourrait posséder les clés du second tour
Guy Marius Sagna, 43 ans, activiste, député et travailleur social, candidat à la présidentielle, incarne incontestablement le reflet d'Ousmane Sonko. Il pourrait être la révélation et l'attraction de la campagne électorale de 2024 et il risquerait de porter malheur à ceux qui le sous-estimeraient.
L'avenir politique se dessine quelquefois dans les similitudes et les différences entre deux âmes complémentaires. Dans quelques semaines, Guy Marius Sagna pourrait bien se transformer en Guy Marius-Sonko. Ce trait entre les deux patronymes symbolise parfaitement l'union de deux fortes personnalités qui se complètent à tous égards. Leur identité de vue, leurs origines, leurs parcours, leur licenciement de la fonction publique, leur statut de député, et même leur première participation à la présidentielle.
Tout concorde entre "Ousmane Sagna et Guy Marius-Sonko".
Cette convergence de caractéristiques est une force qui pourrait bouleverser le paysage politique et électoral, dans la mesure où ce duo incarne une certaine forme d’espoir et de renouveau politique.
Sur une terrasse surplombant l'océan Atlantique, lors d'un week-end paisible, tandis que je peaufinais mon dernier ouvrage positionné dans les librairies, ce lundi 9 octobre, le hasard m'a fait croiser le légendaire El Hadj Diouf, l'ancien international qui avait fait rêver tout un peuple lors de la Coupe du monde 2002. Notre conversation s'est naturellement tournée vers l'élection présidentielle de 2024, un sujet brûlant d'actualité.
Au milieu des 200 candidats en lice, El Hadj Diouf m'a pris à part pour me faire une prédiction audacieuse. Selon lui, son candidat l'emporterait dès le premier tour. J'ai répliqué en affirmant que même si Macky Sall se lançait à nouveau dans la campagne, il serait difficile pour lui de gagner dès le premier tour. Cela signifierait que son candidat devrait conquérir toutes les grandes villes à fort potentiel électoral, de Dakar à Thiès, en passant par Mbour, Diourbel, Mbacké, Touba, Saint-Louis, Kaolack, Kolda, Ziguinchor, et bien d'autres encore. Puis dans une lecture latérale, je lui demandais de prêter attention au député Guy Marius Sagna, le parfait doublon d’Ousmane Sonko… Il m’a ri au nez. J’en ai souri.
Mais au-delà de cette conversation anodine, il faut dire que depuis la mise en quarantaine de Sonko, Sagna se démarque du lot. Cet improvisateur téméraire et parfois maladroit, ce débatteur brutal et puissant tire le maximum de son charisme physique. Immense acharné du travail, GMS n’est pas devenu cet animal de scène, cette bête vivante de l’hémicycle en dormant sur ses lauriers.
Sa réputation repose sur un engagement indéfectible dans la lutte contre l'injustice, une quête qui le pousse à persévérer, peu importe, les obstacles qui se dressent devant lui. La cinquantaine de fois où il a été arrêté et emprisonné atteste de sa détermination à dénoncer toute forme d'injustice. Bien qu'il puisse susciter des opinions tranchées, il est essentiel de regarder au-delà des apparences pour comprendre le show Sagna, ce "guerrier" moderne, dont la force d'âme égale celle de ses muscles.
Guy Marius Sagna n'est pas un acteur politique préfabriqué, mais plutôt un individu façonné par une histoire et une éducation politique profonde. Il a puisé dans les enseignements des grandes figures politiques telles que : Lénine, Mao, Trotski, Brejnev, Confucius, Tito, Gandhi, Majmouth Diop, Cheikh Anta Diop, et bien d'autres encore. Son environnement familial et éducatif l'a exposé très tôt à des idées et des idéaux révolutionnaires.
Son parcours à l'Université Cheikh Anta Diop de Dakar (UCAD), où il a brièvement étudié à la faculté de droit et des sciences juridiques, lui a offert une diversité de perspectives politiques. Sa chambre d'étudiant était devenue un lieu de débats intellectuels animés, décorée de posters de Lénine et de Karl Marx. Lieu de rendez- vous pour des discussions intenses sur la révolution et les mouvements politiques.
De plus, Guy Marius-Sonko est diplômé de l'École Nationale de Développement Sanitaire et Social (ENDSS). Tout au long de sa vie, ce travailleur social a milité pour de nombreuses causes sociales et politiques, notamment en tant que membre actif du Rassemblement des travailleurs africains/Sénégal (RtaS). En tant que rédacteur en chef du journal de gauche de ce mouvement, il a contribué à écrire des articles éclairés sur des sujets liés au Sénégal, à l'Afrique et au tiers-monde en général.
Guy Marius-Sonko pittoresque, imprévisible, menaçant, gouailleur, souffle alternativement le chaud et le show. Irrésistiblement, il en est venu à incarner la lutte intransigeante pour les idéaux nobles : la cause des travailleurs, des démunis et des faibles. Bien qu'il puisse être critiqué pour ses positions, il demeure fidèle à ses convictions et refuse de se compromettre. Son rejet de l'endoctrinement et sa détermination à rester un défenseur intransigeant de ses convictions font de lui une figure polarisante, mais indéniablement authentique.
Alors qu'il se présente à la présidentielle, il appartient désormais à la jeunesse de décider si elle est prête à soutenir au nom et pour le compte d'Ousmane Sonko, cet homme qui sait parler peuple au peuple. Il pourrait être le seul, à côté du grand favori Amadou Ba à compter des représentants dans tous les 16 000 bureaux de vote au Sénégal et dans les 750 à l’étranger, grâce à la machine d’Ousmane Sonko. C’est là la principale unité de mesure de la représentativité électorale d’un candidat sérieux.
Qu'il soit aimé ou détesté, Guy Marius-Sonko occupe désormais une place centrale dans l'arène politique.
Quoi qu'il en soit, Guy Marius-Sonko est un homme de rupture et de fracas prêt à affronter les défis qui se dressent sur son chemin avec une détermination inébranlable.
C'est pourquoi il pourrait être la révélation de février 2024.
Les chances de GMS d'être dans le trio de tête
Outre le fait que 13 députés vont le parrainer les yeux fermés, sa candidature à la présidentielle est une certitude quasi-mathématique. Ouvrons à présent, le chapitre de ses chances.
Soutien d'Ousmane Sonko : En tant que parfait doublon du chef de file de l'opposition sénégalaise, Guy Marius-Sonko bénéficiera de toute évidence de l'appui considérable du maire de Ziguinchor et de son aura politique nationale et internationale. Le soutien de Sonko depuis la prison peut élargir son électorat.
Réputation de défenseur des sans dents : Guy Marius Sagna a acquis une solide réputation en tant que défenseur des opprimés, des pauvres et des faibles. Cet atout pourrait attirer les électeurs qui cherchent un candidat engagé et déterminé.
Détermination inébranlable : Son historique d'arrestations et de lutte indique une détermination inébranlable à poursuivre ses convictions. Son discours de rupture pourrait inspirer les jeunes électeurs et renforcer sa crédibilité en tant que candidat.
Alignement sur la même ligne d’attaque : En adoptant les valeurs, les principes et les convictions politiques de Sonko, Guy Marius [ayant déjà montré qu'il pouvait donner sa vie pour son mentor] captera des centaines de milliers d'électeurs en tant que candidat de substitution. Et le leader de l’ex-Pastef sera pour les besoins de la cause, son directeur de campagne depuis la prison, au même titre que Macky Sall le deviendra pour Amadou Ba. « Le mortal kombat » entre les deux mastodontes continuera de plus belle.
Audience internationale : Ousmane Sonko est déjà une figure populaire adulée dans la diaspora et connue à l'échelle internationale, en raison de son « souverainisme social » et de la lutte anti-impérialiste. Dans le même sillage, le polyglotte Guy Marius-Sonko qui parle couramment anglais, français, diola, ouolof et créole, pourrait facilement capter l'attention des médias internationaux et des sympathisants de la diaspora sénégalaise. Il est en tournée internationale en France, en Italie, en Espagne et bientôt aux Etats-Unis.
Thèmes de campagne : En tirant le plein bénéfice de la dénomination de sa coalition « Guy-Sonko 2024 », [voir article L.123 du code électoral] et en prenant le contrôle des thèmes incitatifs tels que la lutte pour la libération de Sonko, la défense des intérêts nationaux, la lutte contre la corruption, la justice sociale, la souveraineté nationale et l’anti-impéralisme, Guy Marius-Sonko pourrait susciter un soutien populaire inattendu.
En résumé, sauf tremblement de terre dans le « Sonkoland », Guy Marius-Sonko, ce bon faiseur de Roi, pourrait posséder les clés du second tour.
Cheikh Omar Diallo est Docteur en Sciences juridiques et politiques.
par Abdoulaye Bamba Diallo
L'ELDORADO OU L'ESCLAVAGE
Avez-vous remarqué que si les enseignants ont toujours des choses à dire sur la démocratie et les libertés dans le pays, peu d’entre eux ne nous proposent des ouvrages didactiques ou pédagogiques à destination de nos élèves ?
Le Sénégal est un pays merveilleux, unique au Monde quelquefois, car étant le seul où détails et accessoires prennent souvent le dessus sur l’essentiel. Ainsi, les potaches ont-ils repris le chemin de l’école tandis que les politiciens professionnels, eux, les routes sinueuses des élections.
S’il est comptabilisé, déjà, plus d’une centaine de candidatures à la candidature pour la présidentielle de Février 2024, la rentrée des classes s’est-elle effectuée avec des écoles insalubres encore sous les eaux du fait de inondations et d’une végétation sauvage sans compter les abris provisoires qui, eux, souffrent d’un déficit de tables-blancs, de tableaux et même d’enseignants. Et cela ne semble interpeller personne ni choquer grand monde à l’heure où ailleurs sur la planète, on investit dans les nouvelles technologies de l’information avec une optimisation des possibilités qu’offre l’Internet et l’intelligence artificielle afin de mettre à niveau le système éducatif et obtenir ainsi des gains dans l’acquisition de connaissance, meilleur atout pour être compétitif dans l’économie de l’intelligence qui fonde la nouvelle richesse des nations comme l’a, déjà, dit Adam Smith.
Le paradoxe sénégalais étant que la faune politique qui a accaparé les destinées du pays est constituée dans une très grande proportion d’enseignants qui ont des leçons à donner sur la gestion des affaires de la cité et des politiques publiques mais jamais ne formulent des propositions sur les réformes à mener pour faire de l’école sénégalaise une école adaptée aux exigences de son époque.
Tenez, avez-vous remarqué que si les enseignants (et surtout leurs syndicalistes) ont toujours des choses à dire sur la démocratie et les libertés dans le pays, peu d’entre eux sinon personne parmi eux ne nous proposent des ouvrages didactiques ou pédagogiques à destination de nos élèves dont tout le monde s’accorde à reconnaître la baisse de leur niveau.
Le cimetière de l’Atlantique
Les Sénégalais sont ingénieux et dégourdis, c’est connu. Mais tout de même, il fallait une certaine perspicacité pour savoir que des conventions diplomatiques de libre circulation des personnes existent entre le Sénégal et le Nicaragua. Les nouvelles routes du Mbeuk-mi qui poussent notre jeunesse à aller à la recherche d’un eldorado au prix de leur vie viennent, ainsi, de remettre au goût du jour les routes du commerce triangulaire de la Traite Négrière. Traverser l’Atlantique par les airs pour essayer de rentrer aux Etats-Unis par la terre en passant par le Nicaragua et le Mexique n’est-ce pas un remake de la tragédie des Nègres marron cherchant la liberté à tout prix au point de subir les pires châtiments des esclavagistes et les conditions de vie les plus éprouvantes en cherchant liberté et refuge dans les îles volcaniques des Caraïbes ou dans les jungles meurtrières d’Amérique centrale et du Sud. Cette nouvelle route des Amériques qu’emprunte notre jeunesse n’est-elle pas un remake des routes de l’esclavage qui contribuent, ainsi et encore, à faire du Nègre le seul damné de la terre trois siècle après le début de la traite négrière et moins d’un siècle après la fin de l’esclavage.
Politiciens comme intellectuels, artistes comme membres de la Société civile regardent cette tragédie d’une jeunesse en quête de mieux-être qui a choisi de faire de l’Atlantique un cimetière comme une chose toute banale plutôt que de rester sur la terre de leurs ancêtres où l’espoir n’existe plus. Jusqu’où allons-nous continuer à nous vautrer dans la démission et la fuite en avant ? L’Afrique est malade des Africains.
La cour des miracles
Certes, le ridicule ne tue pas, aujourd’hui, dans notre pays mais la vanité, elle, est en passe de devenir la chose la mieux partagée par tous, partout et pour tout. N’est-ce pas un Général européen qui disait que l’ambition n’est pas un crime mais ne pas avoir les moyens de son ambition peut être un grand danger pour ceux sur qui cette ambition veut ou doit s’exprimer.
Il faut dire que ce crime tel que défini par ce vaillant défenseur du leadership est inconnu pour la classe politique sénégalaise. Chez nous n’importe quel quidam se croit autoriser à toutes les audaces et outrances sans retenue au point de valser entre le risible et le ridicule car usant de la transhumance et de la volteface au gré des situations et des conjonctures afin obtenir des sinécures. Le Sénégal, un pays de 201.000 Km2 avec 17 millions d’habitants, affiche plus de 400 partis politiques reconnus, une centaine de syndicats, une dizaine de centrales syndicales, une Assemblée nationale, un Haut Conseil, un Conseil économique et social, trois chambres accueillant chacune plus de 150 personnes formant ainsi une caste politique entretenue grassement. Excusez du peu, il faudra y ajouter, dorénavant, une centaine de candidatures à la candidature suprême.
Si la Démocratie n’a pas de prix, elle a tout de même un coût. Et au Sénégal, la politique me paraît être d’un coût prohibitif et exorbitant par rapport aux moyens du pays, aux capacités de l’Etat et aux besoins et attentes des populations. Les affaires politiques entraînent énormément de dépenses, perturbent en permanence la vie sociale car l’activisme politique a lieu toute l’année même en dehors des périodes d’élection. Il faudra bien un jour procéder à l’évaluation de ce nous coûte la politique et examiner avec précision ce qu’elle nous rapporte.
Néanmoins, on peut être d’accord sur le fait que l’économie nationale paie un énorme tribut de l’overdose de l’activité politique. Pour février 2024, près de deux cent prétendants au pouvoir suprême mais, pourtant, peu parmi eux peuvent se prévaloir d’avoir initié ou réussi une activité qui a été d’une utilité quelconque pour la communauté. Bien au contraire, on peut observer au sein de cette pléthore de candidats de nombreux hauts fonctionnaires et agents de l’Etat qui affichent des fortunes colossales et des moyens extraordinaires. De véritables nouveaux riches avec des comportements les plus ostentatoires faisant de certains d’entre eux des « jet-setteurs », coqueluches des musiciens en vogue et des animateurs des médias électroniques.
Le nombre de fonctionnaires appartenant aux régies financières de l’Etat (Trésor public, Impôts et Domaines, Douanes) affichant un train de vie de milliardaires est un fait notable à relever. Depuis l’alternance de 2000, force est de constater que la Fonction publique sénégalaise génère plus de nouveaux riches que le secteur privé national.
Présidents non grata
Sarkozy en France, Trump aux Etats-Unis, deux anciens présidents encore au pouvoir, il y a peu, font face à la justice de leur pays tout comme Daddis Camara vit pareille situation en Guinée depuis l’année dernière. Aly Bongo au Gabon et Mohamed Bazoum au Niger sont ou en résidence surveillée ou pris en otage comme Kaboré au Burkina et son tombeur Damiba est, lui, exilé de force au Togo. L’après pouvoir présidentiel paraît être une vie peu paisible. Mohamed Ould Abdel Aziz en Mauritanie doit méditer sur cela tout comme Uhuru Kenyatta qui a eu le malheur d’adouber comme dauphin et successeur celui que William Ruto a battu, lui aussi, vit les mêmes affres. Alors une question se pose : être un ancien président en vie est-il un risque ?