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19 septembre 2025
DE CONDITIONS MODESTES CERTES, MAIS BRILLANTES
Des lycéennes lauréates de l’association Shine To Lead recrutées à Dakar, Thiès, Fatick, Kaffrine, Kaolack, Kédougou, Louga, Matam, Sedhiou, Tambacounda et Ziguinchor sont issues de milieux très modestes,. Ce n'est pas le cas de leur intelligence
AfricaGlobe.Net |
Fred ATAYODI |
Publication 22/08/2021
Malgré la crise sanitaire de 2020, l’association Shine To Lead n’a pas cessé son accompagnement à ses boursières. Les cours de renforcement se sont poursuivis cette année. Relancés en mars, ils vont continuer jusqu’en juillet dans les matières stratégiques identifiées pour faire de ses lycéennes de futures scientifiques et leaders du pays. Sokhna Aïcha Sèye est la coordonnatrice des activités et responsable des cours au sein de l’association. Dans cet entretien accordé à AfricaGlobe, elle explique le profil des bénéficiaires de l’accompagnement de STL, les conditions matérielles et techniques de l’organisation des cours, sachant que toutes les bénéficiaires ne sont pas dans les grandes villes du pays. Depuis environ 5 ans, Sokhna Aïcha Sèye évolue dans le domaine de l’humanitaire. Ses actions sont essentiellement dirigées vers les femmes et les enfants en tant que coordonnatrice des actions sociales et éducatives. De ce point de vue, Mme Sèye est à sa place à Shine to Lead/Jiggen Jang Tekki, une association qui a pris le parti d’appuyer des jeunes lycéennes des milieux modestes, mais brillantes et conscientes de leur potentiel et de leurs capacités à réussir.
Qui sont les bénéficiaires de ces cours dans quelles conditions se tiennent ces cours ?
Les bénéficiaires des cours de renforcement sont des jeunes filles issues de familles modestes pour la plupart. Elles viennent des 14 régions du Sénégal et inscrites dans la Série Scientifique dans les lycées de l’enseignement public. Elles sont au total une centaine de jeunes filles de la Seconde à la Terminale S qui suivent les cours de renforcement en ligne. Les cours se font via la plateforme Zoom. Les classes virtuelles expérimentées à l’apparition du covid-19, nous permettent de rassembler des élèves du même niveau mais d’établissements différents pour participer ensemble à un cours afin d’améliorer leurs niveaux.
Combien de temps cela va durer et quelles sont les matières ciblées ?
Les cours ont démarré le 5 Avril 2021 et vont se terminer en Juillet 2021. Il y a aura 4 mois de cours pour les lauréates sur la plateforme Zoom. Les matières ciblées sont Maths, la Physique Chimie (PC), les Sciences de la Vie et de la Terre (SVT) et le français.
Combien d’heures de cours y sont consacrées par séance ?
Les lauréates reçoivent 20h de cours par semaine dont 80 heures le mois. Chaque classe à 4h de cours pour chaque matière.
De quelles régions du pays sont les bénéficiaires ?
Les jeunes filles viennent de Dakar, Thiès, Fatick, Kaffrine, Kaolack, Kédougou, Louga, Matam, Sedhiou, Tambacounda et Ziguinchor.
Comme les filles sont issues de milieux modestes est-il évident que toutes les aient des outils (portables, ordinateurs) et la connexion nécessaires pour suivre les cours en ligne ?
Il n’est pas très évident. En effet, certaines ont eu des difficultés à un moment donné à participer aux cours en ligne. De ce fait, Shine To Lead a mis à leur disposition des téléphones portables afin qu’elles puissent se connecter. Nous leurs fournissons aussi des pass internet toutes les semaines afin qu’elles soient connectées pour participer aux cours sur zoom.
Quels sont les résultats obtenus en termes de performances pour les premières cohortes?
Pour la première cohorte, nous avons cinq (5) bacheliers qui sont à l’université maintenant dont deux (2) à l’Université Cheikh Anta Diop (UCAD), deux (2) à l’Université virtuelle du Sénégal (UVS) et une (1) à l’Université Gaston Berger (UGB). Elles sont satisfaites du programme qui les a permis de réussir leurs études dans de meilleures conditions et de pouvoir se projeter à un avenir professionnel. Une autre partie des recrues de la première cohorte continuent leurs études aux lycées avec de très bonnes moyennes.
Peut-on avoir une idée du contenu des fournitures scolaires distribuées en avril ?
Depuis le début de l’année, nous avons livré des kits scolaires composés de livres didactiques (maths PC ou SVT), des cahiers, stylos, matériels géométriques, calculatrices, romans, etc….
Comment aviez-vous géré la période de ramadan, on imagine que c’était plus compliqué de faire cours?
En période de Ramadan, il était plus compliqué de suivre les cours en ligne car l’après-midi les élèves étaient fatiguées ou préparaient les repas de la rupture du jeûne . Nous avons trouvé une alternative avec les professeurs afin de rallonger des cours le soir après la rupture du jeûne de 20h à 22h. Et cela convenait parfaitement aux jeunes filles.
On présume que certaines bénéficiaires en tant que jeunes filles peuvent être confrontées aux contraintes liées aux tâches ménagères. Comment cela est-il géré ?
Effectivement, étant des jeunes filles sénégalaises, elles doivent souvent faire leurs tâches ménagères. De ce fait, elles trouvent un moyen de faire leurs travaux domestiques avant l’heure des cours. À notre niveau aussi, nous organisons l’emploi du temps en prenant en compte cet aspect. Nous proposons des heures où elles sont libres pour étudier.
Quelle évaluation pouvez-vous faire du taux d’assiduité des filles au cours ?
Le taux d’assiduité est satisfaisant, on peut l’évaluer à 90% par cours. Par exemple, la Seconde S est au nombre de 10 élèves et elles participent toutes aux cours sans absences. Pour la TS2, sur les 23 lycéennes, nous avons au maximum 18 à chaque cours. Il y a des absences certains jours, mais la plupart du temps elles sont toutes présentes en cours.
LA SCIENCE NE DOIT PAS ÊTRE L'APANAGE DES SEULS GARÇONS
Dès le début de la propagation de la pandémie de Covid-19, Shine to Lead a apporté son soutien aux lauréates de la cohorte de ses recrues 2019/2020 en leur faisant notamment bénéficier de cours en ligne en mathématiques.
Au plus fort de la crise du coronavirus, marquée par l’état d’urgence et la suspension des cours, le décrochage scolaire a été noté chez des apprenants, en l’occurrence chez les filles des milieux défavorisés. C’est dans ce contexte que l’association SHINE TO LEAD Jiggen Jang/ Tekki a profité pour déployer un programme de renforcement de capacité en ligne de plus d’une centaine de jeunes lycéennes dans les matières scientifique de août à septembre 2020. Un programme qui a eu un franc succès, suscité un grand engouement et beaucoup intéressé les participantes. Dans cet entretien avec AfricaGlobe.net, la chargée de communication de l’association explique l’objectif de ce programme, son déploiement, les résultats obtenus les perspectives d’une telle initiative.
Clara, Fanahimanana, Shine to Lead a organisé un programme de cours de vacances et de développement du Leadership 100% digital en faveur des jeunes filles scolarisées issues de milieux défavorisés. Pouvez-vous revenir sur le contexte social de cette initiative ?
La fermeture des établissements scolaires a en effet causé un ralentissement de l’économie, affectant lourdement les ménages modestes. De nombreuses jeunes filles se sont retrouvées en décrochage scolaire à cause des difficultés pour certains établissements de pouvoir assurer la continuité pédagogique, d’un accès à la technologie très limité ou encore d’une sollicitation dans les tâches ménagères plus fréquente qu’en temps normal. Dans ce contexte difficile, les lauréates de l’association Shine to Lead ont pu bénéficier de cours en ligne dans les matières essentielles. Les retours très positifs de nos lauréates bénéficiant de cet accompagnement nous ont motivés à porter nos actions au niveau national en déployant un programme à plus grande échelle, sur toute l’étendue du Sénégal. Ce programme avait pour objectif majeur de permettre aux jeunes filles à potentiel de combler les lacunes liées aux longs mois de fermetures des établissements scolaire et de réduire au maximum le décrochage scolaire à la rentrée 2020-2021.
Quels ont été les critères de sélection puisque vous aviez reçu environ 1500 candidatures et n’aviez retenu qu’une centaine de filles seulement ?
Ce programme était destiné aux jeunes filles scolarisées en classe de Seconde et Première de série Scientifique à travers tout le Sénégal. Cette attention particulière pour la série scientifique est un choix délibéré d’encourager les filles à embrasser des carrières scientifiques pour combler le gap par rapport aux garçons.
En clair, un appel à candidature a été lancé en ligne au début du mois de juillet via des publications sponsorisées sur les médias sociaux de Shine to Lead, avec un ciblage appuyé vers les régions à faible taux de connectivité. Les jeunes filles étaient invitées à répondre à un certain nombre de questions, via un formulaire en ligne : ville, moyenne générale, matières dans lesquelles elles souhaitaient le plus combler des lacunes, leur motivation pour intégrer le programme, etc. Nous nous sommes basées sur leurs réponses pour effectuer les sélections.
Nous en avons retenu 127 au total pour nous assurer que le programme serait de qualité et qu’il se déroulerait dans les conditions optimales. Il a constitué une forme de test et nous savons désormais que nous pouvons le déployer à bien plus grande échelle, avec le soutien de davantage de partenaires.
Quels étaient les objectifs du programme ? Ont-ils été atteints ?
L’un des objectifs majeurs du programme était de permettre aux filles de combler leurs lacunes, voire d’anticiper sur les prochains programmes, en participant à des cours intensifs en ligne dans les matières essentielles : Maths, PC, SVT, Français et Anglais. Les participantes ont été réparties en 4 classes (2 classes de Seconde et de classe de Première S) et ont bénéficié chacune de 35 heures de cours.
Cet objectif est atteint car plus 85% des participantes ont déclaré avoir rattrapé leur retard, dans la fiche d’évaluation finale. Le second objectif était de contribuer à développer leur leadership. Les filles ont beaucoup apprécié les talks inspirants que nous avons organisé chaque semaine. Je peux citer pour exemple celui organisé avec la scénariste et réalisatrice Kalista Sy sur le thème de la confiance en soi ou encore celui organisé avec la journaliste Rokhaya Diallo. Elles ont aussi pu participer à un concours de poésie et à un concours de dessin.
Enfin, lors de la session de clôture du premier volet du programme, nous avons tous été particulièrement émus, à travers les différents témoignages, de ressentir le lien très fort et l’esprit de solidarité qui s’est créé entre les participantes issues de 14 régions du Sénégal et qui ne se connaissent finalement que virtuellement.
On peut donc dire que les résultats ont dépassé vos attentes. C’est bien cela ? Quid du suivi ?
Le programme a dépassé nos attentes, avec une moyenne de 4,5/5 de satisfaction du programme par les participantes. Nous allons reprendre le programme pour les mêmes bénéficiaires à partir du 12 octobre et afin de répondre favorablement à la demande des filles de pouvoir achever leurs programmes avant la rentrée 2020/2021 prévue en novembre. Par ailleurs, les participantes les plus méritantes et assidues seront intégrées à la cohorte 2020/2021 de notre programme de Bourse d’excellence Shine to Lead / Jiggen Jang Tekki.
Manifestement c’est la première initiative du genre pour l’association «Shine to lead». Quelle évaluation en faites-vous ?
Depuis 2018, nous sélectionnons chaque année des jeunes filles de banlieue dakaroise ayant des contraintes financières, d’excellents résultats scolaires et un potentiel en leadership. Nous mobilisons des fonds pour financer leurs études et des frais annexes tels que les frais de transport et de subsistance. Elles bénéficient également d’un accompagnement personnalisé à travers un programme de mentorat.
Dès le début de la propagation de la pandémie de Covid-19, nous avons apporté notre soutien aux lauréates de notre cohorte 2019/2020 en leur faisant notamment bénéficier de cours en ligne en mathématiques. Ce qui est nouveau avec le programme déroulé du 10 août au 11 septembre, c’est que nous avons pu impacter davantage de filles, issues des 14 régions du Sénégal.
Puisque l’initiative est venue en pleine crise sanitaire du Covid-19, quel sera l’avenir de cette initiative après la crise du Covid-19, dans 1, 2, 3 ans ? Va-t-elle se poursuivre ?
Nous avons pour ambition de poursuivre ce programme sous une autre forme durant l’année scolaire, en impactant un nombre encore plus important de jeunes filles brillantes et méritantes sur tout le territoire du Sénégal.
Quels sont les difficultés que vous avez rencontrées pendant la conduite de ce programme?
Ce programme n’aurait pu être possible sans le soutien de personnes de bonne volonté, nos partenaires, la mobilisation de toute l’équipe de Shine to Lead, les professeurs ayant délivré les cours ainsi que toutes les personnes inspirantes ayant participé chaque samedi à nos talks diffusés sur en direct sur notre page Facebook. Au début du programme, il a fallu que les participantes comme les professeurs se familiarisent avec la plateforme Zoom sur laquelle les cours se sont déroulés. Les professeurs ont dû également reprendre des chapitres des programmes déjà vu durant l’année scolaire, afin d’homogénéiser le niveau des classes et adapter le contenu de leurs cours.
D’autres projets à venir pour « Shine to lead » ?
Nous avons pour ambition de déployer notre programme de bourse et de mentorat dans davantage de villes du Sénégal. L’expérience tirée de ce programme nous conduira naturellement à le poursuivre sous une autre forme durant l’année scolaire, comme évoqué.
Un mot sur Shine to Lead Jiggen Jang / Tekki
Nous défendons une cause noble essentielle : celui de l’accès dans des conditions favorables à l’éducation pour les jeunes filles au Sénégal. Ces propos de Nayé Anna Bathily, la fondatrice de cette initiative résument bien ce qui nous anime au quotidien : “ Toutes les populations ne sont pas pareillement exposées au risque de déscolarisation. Les jeunes filles sont particulièrement vulnérables face aux crises, en particulier lorsqu’elles elles viennent de milieux défavorisés. (…) Cette crise est une occasion de remettre en question notre système scolaire et de le rendre plus juste, inclusif et performant.”
Propos recueillis par Rachad Moussa – (AfricaGlobe Dakar)
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KHALIFA SALL : CE QUE MACKY DOIT SAVOIR...
Invité d'Alé Niang, l'ancien maire PS de Dakar pose la problématique de la formation des coalitions, il égratigne Benno Boko Yaakkar et accuse Macky de vouloir détruire les grands partis et critique ceux qui se plaisent dans le confort de la majorité.
Après des années passées dans les liens de la détention pour détournement de fonds, l’ancien maire qui a recouvré la liberté n’a pas perdu son appétence pour la politique. Il n’a nullement l’intention de laisser le champ libre à Macky Sall. Alors que tous les états major affutent leurs armes en direction des prochaines locales Khalifa Sall invité d’Alé Niang tacle Macky. Pour l’ancien maire de la capitale, le président Sall chercherait à détruire les grandes formations politiques à travers ses manoeuvres
LES LEÇONS AFGHANES POUR L'ANTI-TERRORISME
Les conditions du retrait américain sont humiliantes. On ne fait pas une guerre au terrorisme, on lui oppose une lutte. Dans nos pays, le terreau est fertile pour l'extrémisme. C’est ce que nous vivons au Mali - ENTRETIEN AVEC RENÉ LAKE
Propos recueillis par Falilou Faye |
Publication 21/08/2021
L’analyste politique et expert en relations internationales, René Lake, analyse dans cet entretien les événements en cours à Kaboul et leurs implications pour la lutte contre le terrorisme dans un contexte d’expansion progressive de l’extrémisme en Afrique et dans le monde.
Les Talibans qui avaient lancé l’offensive en mai dernier, à la faveur du début du retrait des troupes américaines, sont aux portes de Kaboul. Quelle lecture cefaites-vous de cette nouvelle situation en Afghanistan ?
René Lake : En fait les Talibans ont pris le contrôle du pays à l’exception de l’aéroport qui est toujours sous le contrôle miliaire américain. Il y a encore une semaine, l’objectif militaire américain était celui de la protection et du contrôle de leur ambassade et de l’aéroport. Ce week-end, les Américains ont entièrement évacués l’ambassade. Après une guerre, la plus longue de son histoire, qui a emporté plusieurs milliers de vies américaines et plusieurs dizaines de milliers de vies afghanes, qui a couté $300 millions de dollars par jour pendant 20 ans, l’Amérique est aujourd’hui réduite au contrôle de l’aéroport pour permettre l’évacuation de ses citoyens et de quelques alliés dans une atmosphère de total chaos. Selon une étude de la Brown University, la guerre a coûté aux contribuables américains, $2260 milliards soit environ l’actuel budget annuel du Sénégal cumulé pendant plus de deux siècles et demi. Au final, les Talibans reviennent aux affaires peut-être plus puissants que jamais et l’Amérique essuie non seulement une défaite politique mais les conditions de son retrait sont humiliantes comme l’étaient celles du départ de Saighon en 1975, à la fin de la guerre du Vietnam. Il est difficile de ne pas se dire, tout ça pour ça !
Cette nouvelle situation peut-elle faire boule de neige dans les autres pays confrontés à des menaces djihadistes ?
René Lake : Cette situation confirme les leçons historiques évidentes à tirer de la lutte contre le terrorisme. La guerre contre le terrorisme n’est pas une guerre conventionnelle, classique qui se gagne par la force militaire uniquement. C’est une guerre asymétrique. De nombreux stratégistes vont jusqu’à dire que l’on ne peut pas faire la guerre contre le terrorisme mais plutôt lutter contre le terrorisme. C’est une autre manière de dire que l’approche et les moyens à mettre en œuvre pour cette lutte ne peuvent pas se limiter à un envahissement militaire et à l’expression d’une force armée nettement supérieure à tous points de vue. Il ne s’agit pas d’un jeu de nombres mais d’un jeu de volonté, d’engagement qualitatif. Au-delà de l’erreur stratégique américaine qui a transformé une vaste opération militaire de contre-espionnage en opération contre-insurrectionnelle, il est essentiel de s’interroger sur la réalité de la gouvernance en Afghanistan. Si l’on considère qu’en grande partie, le désastre afghan est lié à l’incapacité des gouvernements successifs de Kaboul à mettre en œuvre un projet de bonne gouvernance populaire. Oui on peut dès maintenant imaginer comment cette situation peut faire boule de neige, comme vous dites. La corruption endémique, la prédation à large échelle, les abus de pouvoir, l’absence de transparence dans la gestion, l’iniquité du système judiciaire, etc. tout cela a fortement participé à l’absence de soutien populaire du régime d’Ashraf Ghani et à son effondrement face à des forces radicales et fondamentalistes qui elles présentent une offre politique alternative à une population désabusée. Oui, dans nos pays, où les problèmes de gouvernance sont au centre de la tragédie collective de la misère, le terreau est fertile pour les extrémismes les plus dangereux. C’est bien cela que nous vivons déjà depuis plusieurs années au Mali.
Exceptés quelques appels au calme, pourquoi la communauté internationale est restée muette face à cette situation ?
René Lake : Non, je ne pense que la communauté internationale soit restée muette face aux images de chaos que nous voyons depuis quelques jours à Kaboul où la situation est dramatique. Avec le retour des Talibans aux affaires, non seulement il y a eu plusieurs réactions à travers le monde, mais j’ai aussi noté que de nombreuses organisations internationales anticipent sur le sort peu enviable que vont subir les femmes en particulier. Quoique l’on puisse dire, ces 20 dernières années ont permis une véritable révolution progressiste pour les femmes afghanes notamment dans l’accès à l’éducation mais aussi dans l’entreprenariat économique et l’assumation de responsabilités importantes à tous les échelons de l’État. Le retour des Talibans va certainement remettre tout cela en cause même si l’un de leur porte-parole vient d’annoncer que les femmes seront autorisées à se former contrairement à ce qui s’est passé il y a plus de deux décennies quand ils étaient aux affaires avant l’intervention américaine.
Le Mali risque-t-il de subir le même sort que l’Afghanistan si les troupes étrangères se retiraient du pays ?
René Lake : Votre question revient à se demander si la chute de Kaboul, la capitale du grand « cimetière des empires », est une alerte pour le Sahel. Tout dépend de l’analyse que l’on fait des interventions étrangères dans nos pays. Si vous faites allusion ici, en particulier, à l’intervention française au Mali, je vous signale qu’elle n’est pas populaire. La présence américaine en Afghanistan n’était pas non plus populaire. Vous savez, comme souvent, les envahisseurs dans leurs alliances locales favorisent les partenaires qui font dans la servilité. Au finish, cela se retourne contre les deux entités : les alliés locaux qui sont dans la mauvaise gouvernance et ne bénéficient pas du soutien de leurs populations et les étrangers qui eux sont perçus comme des prédateurs et des donneurs d’ordre qui n’ont pas l’intérêt du pays en tête. Une bonne gouvernance au bénéficie exclusif des populations de nos pays, c’est cela le meilleur rempart contre le terrorisme.
Si jamais le Mali s’écroule, le Sénégal est-il menacé ?
René Lake : Oui c’est une évidence, il me semble. Non seulement le Sénégal mais aussi une bonne partie de l’ensemble du Sahel et même au-delà. On peut déjà considérer que l’État malien s’est écroulé depuis un bon moment. Encore une fois, la bonne gouvernance axée sur les intérêts du pays et de ses populations est la meilleure des garanties contre les risques terroristes. La servilité, l’impopularité, l’inefficacité et l’incompétence des gouvernants sont autant d’opportunités que les terroristes savent saisir dès que les conditions sont propices à une expédition.
par l'éditorialiste de seneplus, penda mbow
DE LA NÉCESSITÉ D'UNE RÉFLEXION STRATÉGIQUE
EXCLUSIF SENEPLUS - On attribue aux Américains, un destin de dirigeants de ce monde. Sont-ils encore prêts à l’assumer ? La carte du monde est en train de se redessiner. L’intelligentsia sénégalaise a une responsabilité devant l’histoire
Tous les trois nous incitent à la réflexion, mais surtout, ils démontrent encore une fois, les possibilités d’un leadership intellectuel en tant qu’héritiers de « Présence Africaine ». L’intelligentsia sénégalaise a une responsabilité devant l’histoire. La carte du monde est en train de se redessiner sous nos yeux. Sans trop vite aller en besogne et proclamer la fin de l‘hégémonie occidentale, il faut reconnaître tout de même que nous sommes rentrés dans une période de compétition des civilisations et parfois de façon violente. Personne n’en maîtrise l’issue. On ne sait pas encore quelles en seront les conséquences puisqu’il y a une imbrication de plusieurs aspects de la crise : démographique, sanitaire, climatique, de la criminalité…on dirait que l’humanité va déserter notre univers.
Les Américains ? On leur attribue un destin de dirigeants de ce monde. Sont-ils encore prêts à l’assumer ? Depuis la Deuxième Guerre mondiale, leurs troupes sont stationnées à Avène dans le Frioul en Italie et en Allemagne pour rappeler à l’Europe leur part dans la défaite du spectre nazi.
Au moins, on peut reconnaître une chose aux Américains : leur capacité d’anticipation, leur contrôle et leur maîtrise de la circulation des idées, mais aussi de la nécessité d’avoir une cartographie précise de ce que représente l’Amérique aux yeux des autres. Une information juste et vraie permet de faire les meilleurs choix. Nous avions assisté, il y a quelques années, à Carnegie Endowment for International Peace, à la présentation d’une étude dirigée par Thomas Carothers sur « Pourquoi le monde déteste les États-Unis ?», sur la position morale du pays dans le monde. Comme écrit Julia Sweigh (Courrier international du 16 août 2006), « ne nous y trompons pas, l’anti-américanisme n’est pas seulement le fruit d’une colère contre George W Bush, il plonge ses racines dans une antipathie accumulée durant des décennies. » Grâce à la critique et l’autocritique, les États-Unis s’en sortent toujours renforcés.
Le deuxième exemple repose sur le fait que les Américains peuvent discuter avec leurs pires ennemis. Pour avancer au début des années 2000 dans les discussions avec certains extrémistes musulmans, le « Wilson center « avait entrepris des études sur « Islam is or not the problem » (cf Bramberg). Et c’est la période où Mahmoud Mamdani apportait sa réponse autour de son livre : « Good muslims, bad muslims. »
Le moment est venu pour nous Africains au moins dans notre frange intellectuelle, afin de ne pas être dévorés par ce monde incertain et son lot d’évènements imprévisibles, de nous organiser autour d’une réflexion stratégique, de créer de solides think tanks, des fondations politiques.
Au Sénégal, nous devons savoir quelle sera la place de notre pays en Afrique et celle de l’Afrique dans le monde. C’est une question de survie !
À ce propos, IDEP, CODESRIA, Forum du Tiers Monde, ont abattu un énorme travail, mais le niveau des bouleversements nous invite à nous organiser autrement. Il s’agit de réinvestir la pensée politique en Afrique, mais surtout de conquérir un nouvel espace pour le Sénégal. Il y a quelques années, Pierre Sané nous invitait à un « Imagine Africa ». Le temps presse !
FUNMILAYO RANSOME-KUTI, UNE YORUBA FIÈRE ET SANS PEUR
Leader politique, elle s'est levée contre les injustices faites aux femmes de sa région avant d'œuvrer à l'indépendance du nigeria. Elle devient un personnage public tout en élevant ses quatre enfants, dont le fameux musicien et chanteur Fela
Funmilayo Ransome-Kuti était la première figure féministe du Nigeria pendant la première moitié du XXe siècle. Leader politique, elle s'est levée contre les injustices faites aux femmes de sa région avant d'œuvrer à l'indépendance de son pays. Mariée à un enseignant et révérend anglican, Funmilayo Ransome-Kuti s'affranchit des conventions de l'époque. Elle devient un personnage public tout en élevant ses quatre enfants, dont le fameux musicien et chanteur Fela.
« Savoir se faire respecter. » Ce slogan résume la vie de Funmilayo Ransome-Kuti. Née en 1900, cette Yoruba est la première fille de la colonie du Nigeria à être scolarisée. Après des études en Angleterre, Funmilayo Ransome-Kuti lance les premières organisations politiques féminines. Pour Nike Ransome-Kuti, sa grand-mère reste un modèle. « Je crois qu'elle était féministe mais pas dans le sens le plus moderne. Vous savez qu'elle était juste une femme et chez le Yoruba, les femmes sont des personnalités très fortes. Ma grand-mère était un personnage fort. Elle était disciplinée, courageuse, forte d'esprit et avec une volonté de fer. Elle était prête à mourir pour ses idées. »
En 2007, le reggaeman sommait Karim Wade de s’expliquer sur l’utilisation de fonds publics et essuyait les foudres de son président de père. Un épisode qui contribua à bâtir la notoriété du chanteur hors de sa Côte d’Ivoire natale. Témoignage
Jeune Afrique |
Benjamin Roger |
Publication 21/08/2021
J’étais au Sénégal en 2007. Je jouais à l’Institut français de Dakar dans le cadre d’un festival de rap. Nous étions en pleine polémique sur Karim Wade, le fils du président Abdoulaye Wade. Il avait été convoqué par l’Assemblée nationale pour s’expliquer sur des travaux qu’il avait faits à Dakar pour le sommet de l’Organisation de la coopération islamique (OCI), qui devait se tenir l’année suivante, mais il refusait de s’y rendre.
Comme Karim Wade était ministre et qu’il gérait des fonds publics, il me semblait important qu’il rende des comptes. J’ai donc prononcé un petit discours sur scène et j’ai dit qu’il devait s’expliquer devant les députés. Puis j’ai ajouté que si Abdoulaye Wade ne voulait pas que son fils aille à l’Assemblée nationale, qui était à l’époque dirigée par Macky Sall, il aurait fallu le laisser dans son berceau, à la maison, et ne pas le mêler à la politique. J’ai enchainé avec mon titre Quitte le pouvoir et le concert s’est terminé sans encombre.
Rencontre avec Abdoulaye Wade
Ce discours aurait pu rester dans les travées de l’Institut français mais le lendemain, alors que je me préparais à monter dans l’avion pour quitter Dakar, un policier est venu me chercher après le passage des formalités. Il a pris ma carte d’embarquement et mon passeport. Il venait pour m’interpeller, mais il a reçu un coup de fil lui disant qu’il fallait finalement me laisser partir. Je suis donc rentré à Abidjan. Le soir, au journal télévisé de la RTS, il a été annoncé que j’étais désormais interdit de séjour au Sénégal. Cela a duré trois ans.
L’alerte rouge du Giec, le réchauffement va frôler les 2° C d’ici 2030. Déjà, c’est l’heure «des événements météo extrêmes» : canicules à 50°, pluies diluviennes en été, perturbation des pôles et fonte des glaciers, ou montée des océans etc. Ça parle aux Africains, voire aux Sénégalais ?
J’en doute. Ici, les inondations seraient dues en grande partie à l’Etat, faute d’ouvrages d’assainissement adéquats (courte vue) et la désertification, un phénomène naturel qu’on s’ingénie à contenir par une muraille verte, un pis-aller (fatalisme). Dès lors que chez nous les choses se feraient à l’envers, à rebours ou sur le tard et les priorités seraient ailleurs. Et s’ils savaient que le corona en serait une résultante et qu’il faudra vivre avec, se démultipliant et mutant selon les espaces et le temps. Et que viendront aggraver les injections moléculaires par une mutation in vitro. En fait, c’est l’un des pires scénarios que projettent les séquences de vagues de Covid-19.
Selon des spécialistes, tout cela résulterait des dérèglements climatiques, voire des agressions de l’environnement à l’origine de zoonoses, une mutation des maladies animales vers l’homme. Les manipulations et élucubrations de certains chercheurs vont fatalement produire des «artefacts», pouvant complexifier les choses, faisant proliférer des épizooties et plus de contagiosité.
La destruction de la biodiversité, assimilable à des «attentats» ou crimes environnementaux, fera implicitement dégénérer la situation et va compromettre l’existence des êtres sur terre. Et pour cause, la disparition de la flore et la faune affecterait des animaux ou insectes, provoquant leur mue et transmettant un virus contagieux ; tout autant de la couche d’ozone qui contraindra les dépourvus de mélanine à une vie restreinte, voire impossible à cause des Uv.
L’environnement, c’est tout un ensemble, tout ce qui nous entoure, c’est l’ambiant matériel comme immatériel. In fine, c’est un milieu où vivent des êtres et leur rapport entre eux organisé d’une manière équilibrée. Un truisme ! Au commencement, il y eut une terre compacte «la Pangée» une seule planète du système solaire, produit par l’effondrement d’un imposant nuage de gaz et de poussière. Depuis, cette planète semble évoluer en cycles et perpétuel recommencement. La découverte d’une nouvelle planète en 2016, dénommée X ou mystérieuse, confirmation attendue en 2022, nous en dit long. Autrement, c’est l’ensemble des molécules qui forment cette planète-là dont les hémisphères nord et sud, et leurs prismes, dont l’apport et la complémentarité constituent la base organique permettant une vie normale. Tout un programme et des indications pour confirmer que le processus est certes irréversible.
Mais il s’agit de normer et atténuer le processus, et de procurer à la notion Environnement toute une autre acception socio-culturelle afin de cerner son aspect holistique sous les tropiques. Tant qu’il y a harmonie, complémentarité et proportionnalité, l’évolution sera normale et durable pour parler prosaïquement. En l’occurrence, au-delà du processus irréversible de l’expansion après le Big Bang, cela exige un respect des lois physiques sur la forme des créatures et leurs interactions, que ce soit le minéral, le végétal, l’animal et l’humain, elles se construisent elles-mêmes en fonction de leurs états et de leurs échanges équilibrés. Cela dit, chaque espèce doit créer des formes conformes à ses nécessités en mettant en exergue l’équilibre et cette harmonie.
Et à l’heure où l’on envisage la découverte d’une huitième planète, c’est un chamboulement qui l’interpelle, exigeant une remise en cause... L’idéal de vie et la prospective religieuse préconise d’évoluer dans un espace édénique avec jardins et ruisseaux afin de vivre décemment : sourate 2 (la vache) verset 25 : «Annonce à ceux qui croient et pratiquent de bonnes œuvres qu’ils auront pour demeures des jardins sous lesquels coulent les ruisseaux et ...gratifiés d’un fruit.»
La sourate 13 Ar Rad (le tonnerre) vient conforter et nous édifier en son verset 13 : «Et sur terre il y a des parcelles voisines les unes des autres, des jardins, des vignes, des céréales et des palmiers, en touffes ou espaces arrosés.»
En son verset 17 : «Il (Dieu) a fait descendre une eau du ciel à laquelle les vallées se servent de lit le flot déborde charrie une écume flottante...» Le bio-mimétisme nous invite à singer la nature comme modèle pour les vivants en vue d’un équilibre environnemental ; autrement, il faut que l’homme s’inspire de cette nature pour faire des espèces un tout. Donc, l’humain doit être au cœur de ce processus.
Depuis l’avènement du Giec en 1988 de la prise en compte institutionnelle de l’aspect environnemental, voire de l’évolution du climat, le monde aura beaucoup changé et entraîné de nouvelles certitudes, notamment l’aggravation du déséquilibre, en sus de la détérioration fulgurante et la disparité entre les hémisphères nord et sud, des remèdes différents comme démarche opposée. L’Afrique devra repenser le modèle écologique afin de créer un écosystème viable, en protégeant sa biodiversité par l’instauration d’un équilibre et une harmonie.
Pour une fois, l’Afrique peut anticiper et se démarquer, en adoptant une démarche spécifique et innovante dans sa résilience. A l’instar du Giec, un pendant africain prônera une politique, mettant en exergue ces spécificités climatiques des tropiques, en élaborant tout un diagnostic et un protocole en vue de l’Accord de Paris sur le climat en 2023, afin de contextualiser et s’approprier le Rapport de synthèse à parachever en 2022. Mais en attendant, la Cop 26 aura lieu à Glasgow en novembre 2021. Ce sera un nouveau départ et une phase cruciale afin de rallier le monde à réaliser (météos extrêmes nous l’imposent), ce tournant partant des signes avant-coureurs très édifiants et incitant à mettre un terme à l’«écophagie» des puissances, firmes ou exploitants de tout acabit.
Dans le continent, il s’agira de décréter une Politique environnementale africaine, devant permettre de contenir le réchauffement en deçà de 2° C, voire de le maintenir à 1° C. A l’instar du Programme des Nations unies pour l’environnement et en collaboration avec l’Organisation mondiale de la météorologie, une démarche atypique sera mise en branle pour traduire cela. L’homme est au début et à la fin de l’environnement, mais aussi le métronome. L’on doit tous s’engager pour le devoir climatique comme garant de la biodiversité.
L’on se doit de prôner l’équilibre écologique, avec son credo «ni ultra environnementaliste encore moins climato-sceptique», en mettant en exergue l’anthropocentrisme au cœur du processus pour la sauvegarde de la planète pour un avenir vert. Un bon protocole de Santé publique commence d’abord par la prévention et la protection de l’Homme par l’Environnement. Et selon la Bm, la préservation de la nature ferait gagner près de 3 000 milliards de dollars par an. Autrement, il y a des «écocidaires» (braconniers du floral et minéral en plus de celui animal) qui surexploitent et commettent des délits et crimes environnementaux à leur profit et pour moins que ça. Nous devrions être les gardiens de l’écosystème, en se démarquant du tout-environnement et de l’activisme politico-écologiste, en faisant du plaidoyer des impacts et jouant ce rôle de compliance. Aujourd’hui, la tendance doit s’inverser et que le devoir se lie au droit et se mue en sacerdoce ou simplement acte civique obligatoire qui incombe à tout un chacun sans exclusive.
La jeune génération (à l’image de Greta Thunberg) s’arrogera le droit d’ester en justice, en initiant le délit écologique contre l’inaction des Etats sur le dérèglement climatique ou actes délictuels d’un tiers ou groupes, comme crimes d’écocide et génocide et d’extermination d’espèces, éventuellement. On plaide pour la saisine des juridictions nationales, ou la Cpi environnementale (au sein de la Cpi en parallèle la mise en place d’une Cour pour chaque continent) et des experts et juristes climat et gendarmes (type Dscos au Sénégal) que j’appelle de tous mes vœux. Au niveau international, le Dih devrait interagir devant l’acte de protection, avec une jurisprudence dissuasive contre l’écocide. Du coup, la création de la Ciehef (la Commission internationale environnementale (à ajouter) et humanitaire d’établissement des faits) serait appuyée par la Cnahef (Commission nationale d’alerte pour l’environnement) dotée d’un fonds abondé par l’Onu. Il s’agira de leur doter de prérogatives et d’experts ad hoc afin de pouvoir être proactive. Ainsi la Ciehef serait amenée à collaborer avec les sentinelles de l’environnement que sont Wwf et Greenpeace, sous mandat de l’Onu.
Les potentiels impactés ou victimes, les jeunes en majorité, sont contraints de mener le combat à leurs côtés et surtout en Afrique (amorphes pour l’heure) avec plus de 2/3 de la population ayant moins de 25 ans. Eh oui, on doit faire de l’écologie, en plus de vecteur et variable, un secteur quaternaire à l’instar du tertiaire, pour la transition écologique, avec des millions d’emplois à la clé (selon des projections). Mais au préalable, les experts auront fini de plancher sur une dizaine de thématiques avec un autre regard, en vue de produire un modèle de développement idoine, en l’occurrence une économie solidaire et circulaire fondée sur l’«identiture» environnementale. Ce Groupe local d’experts s’attèlera à concevoir un plan de relance, par les Africains et pour l’Afrique, calqué sur l’environnement, conforme à l’évolution du climat du continent qui va recentrer les recommandations de la Cop et recadrer les directives de la Banque mondiale qui prône un avenir résilient et inclusif.
Abou DIAKO
Journaliste-écrivain
URGENCE A L’HOPITAL ARISTIDE LE DANTEC
Les travailleurs de l’hôpital Aristide Le Dantec comptent désormais mettre en avant leur obligation de moyens face aux difficultés qui ne trouvent toujours pas solutions
Les travailleurs de l’hôpital Aristide Le Dantec comptent désormais mettre en avant leur obligation de moyens face aux difficultés qui ne trouvent toujours pas solutions après leur mémorandum soumis aux autorités il y a un an.
Urgence signalée à l’hôpital Aristide Le Dantec ! Au niveau du Service des urgences qui est la vitrine de l’hôpital, la prise en charge des patients continue de poser problème. La mise à disposition d’analyses, d’examens d’imagerie et de traitements urgents sans attendre le règlement des patients n’est pas effective. C’est la Commission médicale d’établissements (Cme) qui a sonné l’alerte hier, à travers un communiqué avant sa conférence de presse annoncée. Son combat, c’est de régler la gouvernance locale et l’absence de considération des autorités.
D’après la commission, il y a un an, devant la situation difficile que traversait l’hôpital avec un «surendettement, la baisse des recettes, les ruptures de réactifs et de médicaments, pannes en série et défaillances graves de l’infrastructure», les travailleurs avaient soumis un mémorandum. Il tournait autour de 5 axes, à savoir l’infrastructure, le projet d’établissement, le fonctionnement de l’établissement, les urgences, l’équipement. Aujourd’hui, ils constatent pour s’en désoler que «la réfection de plusieurs services et des blocs opératoires entamée depuis plus de 2 ans n’est toujours pas finalisée (le bureau d’accueil des patients, la salle commune de prélèvements, le bloc de l’urologie… )».
Tandis que, ajoutent-ils, d’autres n’ont jamais démarré, notamment le Service de chirurgie plastique, de stomatologie, d’ophtalmologie, de chirurgie dentaire et de kinésithérapie, ainsi que les locaux de la consultation externe. Ces praticiens de Le Dantec estiment que «l’ensemble des services de l’hôpital est dans un tel état que l’administration de soins de qualité aux patients y est quasiment impossible».
Ainsi, ils cherchent des réponses au retard lié à la reconstruction des locaux devenus vétustes. Autre chose soulevée par la commission, c’est l’audit de la masse salariale inscrit dans le mémorandum qui n’est pas encore fait. «L’informatisation des services avance, mais risque de s’arrêter, faute de budget. Le conseil d’administration ne joue toujours pas son rôle de contrôle des finances et des investissements. Et à ce jour, les ruptures répétées et durables de médicaments et de réactifs persistent et les renouvellements de matériels (instruments de bloc opératoires, tables d’opération, matériaux de laboratoire) ne sont toujours pas assurés», indiquent les travailleurs de l’hôpital Le Dantec. Ils jugent ainsi insuffisant le soutien apporté par le ministère de la Santé pour régler les problèmes auxquels l’hôpital est confronté, notamment les aides et financements reçus du Fonds de riposte à la pandémie de Covid-19, contrairement à d’autres hôpitaux. Compte tenu de tout cela, la Commission médicale d’établissements (Cme) souhaite désormais mettre en avant son obligation de moyens, «quoi qu’il puisse leur en coûter»
LES POPULATIONS DE LA BANLIEUE DANS LA GALÈRE
72 heures de pluie ont suffi pour que plusieurs quartiers changent de visage. Des autorités locales aux abonnées absentes et des populations qui sont laissées à elles-mêmes : tel est le décor qui s’offre au visiteur qui débarque sur les sites submergés
En cette période d’hivernage, les fortes pluies qui se sont abattues dans la région de Dakar, particulièrement au niveau de la banlieue, ont causé plusieurs dégâts dans de nombreuses localités. Aujourd’hui, beaucoup de ces populations sont en train de vivre la galère à cause des inondations. 72 heures de pluie ont suffi pour que plusieurs quartiers changent de visage. Des autorités locales aux abonnées absentes et des populations qui sont laissées à elles-mêmes : tel est le décor qui s’offre au visiteur qui débarque sur les sites submergés par les eaux de pluie.
Après la pluie, ce n’est forcément pas le beau temps. Les populations de la banlieue dakaroise peuvent s’approprier cette assertion. Elles qui sont, depuis 72 heures, envahies par les eaux de pluie. Les dernières fortes précipitations qui se sont abattues sur la capitale n’ont pas laissé intacte la localité de Keur Massar. Malgré l’intervention de l’Etat pour y lutter contre les inondations, le département a subi la furie des eaux de pluie, provoquant ainsi des inondations. Plusieurs quartiers sont pris en otage par les eaux pluviales. A l’Unité 11, juste derrière la gendarmerie, se niche une population qui vit la misère des inondations. «Chaque année, nous vivons le calvaire. Le chef de l’Etat était venu l’année dernière nous promettre de régler définitivement ce problème. Mais comme vous avez eu à le constater, le problème demeure en l’état. Notre maire, Moustapha Mbengue, a disparu de la nature», a laissé entendre Mme Mbengue. Sa maison est submergée par les eaux. Hier, elle devait passer la nuit à la belle étoile, comme elle a eu à le faire des jours précédents.
«Nous sommes pris en otage par les eaux des différents chantiers»
La Cité des enseignants Aynoumady 1 Keur Massar compte plus de 2 000 habitants. Tous ont passé la nuit à la belle étoile. Leurs cordes vocales ont été cassées par les nombreux appels d’intervention auprès de l’Etat. Ils ont alors pris la décision de se prendre en charge : «Nous sommes pris en otage par les eaux qui nous viennent des différents chantiers qui sont en cours pratiquement dans la commune. A partir de Jaxaay jusqu’ici, au niveau de la construction du pont, toutes ces eaux se déversent dans le quartier», laisse entendre Léopold Babacar Senghor, délégué de quartier de Aynoumady 1.
Cette situation a fait que toutes les rues sont inondées. Des volontaires plongent dans les eaux nauséabondes pour déboucher les tuyaux d’évacuation. A Guédiawaye, les habitants des communes de Golf Sud et de Wakhinane Nimzatt sont dans le désarroi. A Golf Sud, Parcelles Unité 3, l’état de la route principale demeure le souci de ces habitants. Les commerçants qui occupent cette route ont tiré sur la sonnette d’alarme pour demander assistance. «Chaque année, c’est la même situation. Et pis, il y a certains parmi ces populations qui sont dans les quartiers où lorsqu’il pleut, non seulement ils évacuent les eaux sur la route, mais profitent de la situation pour vider leurs fosses septiques. Voilà la situation. Nous sommes obligés de plier les étals ou de fermer boutique. La route étant impraticable, souvent les véhicules sont obligés de faire le tour», souligne Pape Guèye, commerçant.
A Wakhinane Nimzatt, au quartier Baye Laye, Darourahmane est sous les eaux. Plusieurs maisons ont été inondées durant ces dernières fortes pluies. Matelas, lits, armoires, téléviseurs, ustensiles de cuisine sont entassés sur les terrasses. Les canaux d’évacuation des eaux de Baye Laye ne fonctionnent plus. «Je suis vulcanisateur. Tout le quartier me connaît. Vous avez vu, les eaux ont complétement submergé mon atelier de travail. Les tuyaux d’évacuation enfouis ici ne peuvent pas évacuer l’eau pluviale. Et quand il pleut, on ne peut plus travailler. Mais la municipalité que dirige le maire Racine Talla ne bouge pas. Nous n’avons personne pour nous assister. Ils attendent à ce que tous nos biens disparaissent sous les eaux pour venir après, avec des camions hydro-cureurs, pomper rapidement les eaux. C’est ce qu’on appelle médecin après la mort», fait savoir Omar, un vulcanisateur plus connu sous le nom de «Omar Pneu».
Toujours dans ce même quartier, le sieur Serigne Seck, le visage froissé, est resté deux jours sans fermer l’œil. La fatigue l’envahit. Il s’essouffle, seau en main, il revient tristement sur son Calvert : «Je ne peux pas vous recevoir, la maison est inondée. Et c’est dû au canal. Il est bouché. Nous avons interpellé la mairie, ils nous ont fait savoir que c’est le canal central qui se situe vers Darourahmane qui est bouché. Nous demandons le ministre Oumar Guèye à venir voir la réalité. Il n’a qu’à demander où se trouve la localité de Baye Laye pour s’enquérir de la situation. Chaque année, c’est la situation que nous vivons. Et bientôt, vous verrez les agents de la mairie venir pomper l’eau avant de masquer le tout et faire une déclaration devant les télés pour dire qu’ici, dans la commune de Wakhinane Nimzatt, tout va bien. Alors que tel n’est pas le cas.»
Par ailleurs, les populations ont décrié le fait que le problème des inondations n’est pas souvent confié à des spécialistes au niveau des mairies. «Il faut que les maires puissent choisir des hommes formés dans ce domaine pour que, lorsque pareille situation surgisse, que ces spécialistes puissent rapidement trouver une solution pour soulager les populations en attendant l’Etat», laisse entendre M. Gningue, habitant de Baye Laye. Hier, vers 18h, le ciel menaçait encore d’ouvrir ces vannes. Sur les terrasses de maison, bondées de monde, certains, inquiets, priaient encore pour que de fortes pluies ne s’abattent pas sur la banlieue.