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18 juillet 2025
PAS DE REPRISE DES CLASSES AVANT LE 4 MAI
La rentrée scolaire initialement prévue pour le 6 avril est reporté - Il a par ailleurs été décidé de l'accompagnement des daaras modernes à hauteur de 330 millions en denrées alimentaires - COMMUNIQUÉ DU CONSEIL DES MINISTRES
SenePlus publie ci-dessous, le communiqué du Conseil des ministres du 1 avril 2020.
"Le Conseil des ministres s'est exceptionnellement tenu ce mercredi 1er avril 2020 en visioconférence, sous la présidence du Chef de l'État, son Excellence, Monsieur Macky Sall.
Le Chef de l'État à l'entame de sa communication, s'est incliné devant la mémoire de feu Mababa Diouf dit Pape, ancien Président de l'Olympique de Marseille, premier sénégalais victime du Covid-19, au Sénégal.
Le Président de la République a, ensuite informé le Conseil des audiences qu'il a accordées aux forces vives de la nation (leaders politiques, autorités religieuses et coutumières, secteur privé, Syndicats, femmes et jeunes) il a magnifié l'engagement républicain et patriotique de tous à travers leurs réflexions, contributions et soutiens, dont la consolidation permettra de renforcer la cohésion nationale et la résilience face à la pandémie.
Le Chef de l'État a, à ce titre, demandé au Ministre de la Santé, de veiller, à la prise en charge adéquate de tous les patients, ainsi que de leurs contacts identifiés dans les établissements sanitaires ciblés et sites d'accueil retenus.
Il a également instruit ce dernier de ne ménager aucun effort pour la reprise de la production de certains médicaments requis pour les malades pris en charge et suivis, en relation avec les ministères et entreprises concernés.
Le Président de la République a par ailleurs félicité le Ministre de la Santé, les personnels de Santé et les forces de défense et de sécurité et a insisté sur la nécessité d'intensifier la riposte et d'agir pour soutenir le personnel de santé, d'appuyer les entreprises en vue de préserver les emplois et d'accompagner les populations les plus vulnérables, avec le déploiement de l'aide alimentaire d'urgence sur l'ensemble du territoire national.
Le Chef de l'État a, par ailleurs, invité le Ministre de l'Economie, du Plan et de la Coopération à finaliser le Programme national de Résilience Economique et Sociale (PRES), en synergie avec le dispositif du Fonds de Riposte et de Solidarité FORCE COVID-19.
Le Président de la République, abordant la célébration de la fête nationale du Sénégal a rappelé aux membres du Gouvernement que le soixantième anniversaire, du fait de la pandémie et de l'État d'urgence, sera organisé sous forme d'une cérémonie aux couleurs, le 04 avril 2020, à 10 heures, dans la cour d'honneur du Palais de la République. La Cérémonie consistera à une prise d'armes suivie de l'hymne national en présence du Ministre des Forces armées et des autorités militaires.
Le Chef de l'État a dans ce contexte demandé au Ministre de la Communication de veiller à la transmission dans les médias, tout au long de cette journée, des missions, actions et réalisations des différentes forces de Défense et de Sécurité.
Le Président de la République a, au titre, de la gouvernance et de la rentabilisation des infrastructures numériques, demandé au Ministre de l'Economie numérique et au Ministre des Finances et du Budget de prendre toutes les dispositions pour finaliser l'évaluation du patrimoine des infrastructures numériques nationales, et lui proposer un système durable de valorisation et de rentabilisation selon les normes internationales. Il a dans ce cadre demandé à l'ADIE de finaliser le processus de gestion des infrastructures.
Le Chef de l'État a clos sa communication sur le climat social et la gestion et le suivi des affaires intérieures, en demandant au Ministre en charge de l'Equité territoriale, avec le soutien du Ministre des Finances et du Budget d'accélérer les travaux relatifs au Programme d'Urgence de Modernisation des Axes et Territoires frontaliers (PUMA).
Le Président de la République a en outre évoqué la préparation de la campagne agricole 2020-2021 en demandant que les actions nécessaires au paiement intégral des subventions sur les cessions d'intrants agricoles soient prises.
Le Chef de l'État a enfin, au sujet du programme d'assainissement du pôle urbain de Diam Niadio, demandé au Ministre de l'Eau et de l'Assainissement de prendre les dispositions appropriées, afin de procéder à l'extension des capacités de la station d'épuration actuellement fonctionnelle dans ladite zone en relation avec la Délégation Générale des Pôles Urbain de Diam Niadio et du Lac Rose (DGPU).
Au titre des Communications,
Le Ministre d'État, Secrétaire général de la Présidence de la République a fait une communication sur la réalisation des grands projets infrastructurels et d'équipements initiés par le Chef de l'État.
Le Ministre des Finances et du Budget a fait une communication sur les ouvertures de crédit pour les dépenses liées à la lutte contre la pandémie. Il a par ailleurs rendu compte de la tenue du Conseil des ministres de l'UEMOA et de l'organisation prochaine d'un Sommet des Chef d'État de l'Union.
Le Ministre des Affaires étrangères et des Sénégalais de l'Extérieur a fait une communication sur la situation de la pandémie dans la diaspora et du soutien social urgent attendu au niveau des ambassades et consulats.
Le Ministre des Forces armées a fait le point sur les dispositions prises et sur le déroulé de la célébration de la fête du 04 avril prochain.
Le Ministre de l'Intérieur a fait le point sur la mise en œuvre de l'État d'urgence et le couvre-feu.
Le Ministre de l'Economie, du Plan et de la Coopération a fait le point sur le contexte économique mondial, et présenté un plan national de résilience économique et social.
Le Ministre en charge de l'Equité a fait le point sur les dispositions prises en vue d'une organisation de l'aide alimentaire.
Le Ministre de l'Agriculture et de l'Equipement rural a fait une communication sur la préparation de la campagne 2020-2021 et l'évaluation du programme national d'autosuffisance en riz (PNAR).
Le Ministre de l'Education nationale et le Ministre en charge de l'Enseignement Supérieur ont proposé au Président de la République, qui l'a validé, le report de la rentrée scolaire et universitaire initialement prévue le 06- avril, au 4 mai 2020. Il a par ailleurs été décidé de l'accompagnement des daaras modernes à hauteur de 330 millions en denrées alimentaires.
Le Ministre en charge des transports terrestres a fait le point sur la situation du transport urbain et interurbain.
Le Ministre de la Santé a fait le point sur la situation de la pandémie liée au COVID-19, l'état d'exécution du Plan de contingence et la stratégie médicale mise en œuvre face à la pandémie.
Le Ministre de l'Industrie a fait le point sur l'impact de la pandémie sur les industries et les petites et moyennes entreprises.
Le Ministre en charge du travail a fait une communication sur l'impact de la pandémie dans le milieu du travail et les mesures préconisées pour soutenir les entreprises dans la prise en charge des salaires.
Le Ministre de la Formation professionnelle a informé de la décision de la Banque mondiale d'appuyer les artisans
Le Ministre auprès du Président de la République, en charge du suivi du Plan Sénégal émergent (PSE) a fait le point sur le suivi du PSE.
Au titre des textes législatifs et réglementaires, le Conseil a examiné et adopté :
le projet de loi, complétant certaines dispositions de la loi 81-52 fixant la limite d'âge d'admission à la retraite des médecins, pharmaciens, chirurgiens-dentistes et des docteurs vétérinaires ;
le projet de loi modifiant l'article L.69 de la loi n° 97-17 du premier décembre 1997 portant Code du travail ;
le projet de décret créant et fixant les modalités d'organisation et de fonctionnement du fonds Force COVID 19.
Au titre des mesures individuelles, le Président de la République a pris la décision suivante :
Madame Aminata Ly, Conseiller des Affaires étrangères, matricule de solde n° 604449/A est nommée Directeur des Partenariats et de la Promotion économique et culturelle, au ministère des Affaires étrangères et des sénégalais de l’Extérieur, poste vacant."
LA DISPARITION DE PAPE DIOUF INCARNE LE COVID-19 AU SÉNÉGAL ENDEUILLÉ
Le premier décès de la pandémie est celui d'une personnalité familière d'un grand nombre de Sénégalais pour qui la réalité du coronavirus se matérialisait jusqu'alors par le couvre-feu, la fermeture des écoles ou l'impossibilité de prier à la mosquée
La disparition de Pape Diouf, ancien président de l'Olympique de Marseille, met un visage connu et unanimement respecté sur l'épidémie de coronavirus au Sénégal où la dangerosité de la maladie reste diversement prise en compte.
Le point journalier du ministère sénégalais de la Santé retransmis en direct a cessé mercredi d'être l'austère énoncé, en français et en wolof, du nombre de tests, de cas de personnes contaminées, de patients guéris.
Le sinistre bilan comporte désormais une entrée de plus: celle des morts, et le premier décès nommé par le ministère est celui d'une personnalité familière d'un grand nombre de Sénégalais pour qui la réalité du coronavirus se matérialisait jusqu'alors par le couvre-feu nocturne, la fermeture des écoles ou l'impossibilité de prier à la mosquée ou à l'église.
Pape Diouf, ancien président de l'un des clubs de foot les plus populaires de France (et du Sénégal), ancien agent de grands praticiens du ballon rond, ancien journaliste, est décédé mardi à 68 ans dans un hôpital de Dakar.
Adama Ndione, vice-président des Supporteurs de l'Olympique de Marseille au Sénégal, club de fans qui revendique quelques centaines de membres encartés, a "versé beaucoup de larmes": "C'était un Sénégalais, un exemple parfait de réussite dans tout ce qu'il entreprenait, un exemple pour nous", dit-il.
Dans le pays qui était le sien avec la France, et où il revenait constamment pour des raisons personnelles et professionnelles, les hommages ont afflué: du président Macky Sall, du chanteur Youssou Ndour pour lequel il était un "homme formidable et multidimensionnel", des joueurs passés ou présents, confrères journalistes...
- Dernier appel -
La photo de Pape Diouf a rempli la une des journaux."Pape Diouf perd son dernier match", se sont accordés l'As et le Quotidien.
Le maillot frappé de l'écussion "Droit au but" est un spectacle courant dans ce pays fou de foot.Pape Diouf y était populaire pour avoir ramené l'OM sur le devant de la scène sportive, pour ses relations avec les champions, mais aussi pour son parcours personnel, sa personnalité attachante, et son sens du verbe apprécié au Sénégal.
Comme d'autres, Bacary Cissé, rédacteur en chef du journal de sport Record, le présente comme son "parrain", celui qui l'a lancé dans la carrière.Il a donné son nom à son fils, et est bouleversé.
Jeudi, Pape Diouf lui écrivait qu'il traînait une mauvaise angine mais pensait à lui.Vendredi, son mentor l'a appelé pour lui dire qu'il était à l'isolement et qu'il avait été diagnostiqué positif.
"Samedi matin, nous nous sommes parlé pour la dernière fois.Il m'a dit: +Bacary, écoute, Petit, la maladie, on va tous s'en relever+".
Bacary Cissé est lui-même atteint et hospitalisé.Le Sénégal a déclaré 190 cas de contamination, dont 45 guéris et, désormais, un mort.La progression de la maladie et la part grandissante prise par les transmissions "communautaires" et non plus "importées", conjuguées à l'état des systèmes sanitaires africains, suscitent l'inquiétude.
- Sensibilisation posthume -
Le Sénégal a pris des mesures pour contenir le mal et se prépare à célébrer samedi 60 années d'indépendance sans le faste auquel un tel anniversaire aurait pu donner lieu.
Le débat est ouvert sur la nécessité de dispositions encore plus fermes que l'état d'urgence et le couvre-feu, jusqu'au confinement.Mais ici, comme ailleurs en Afrique, comment la part considérable de la population qui vit au jour le jour dans l'économie informelle fera-t-elle pour vivre en confinement ?
Nombreux sont ceux qui, comme le maire du quartier populaire de la Médina à Dakar, déplorent le mépris des règles anti-coronavirus par les Sénégalais, qu'ils agissent par nécessité ou méconnaissance du danger.
"Le décès de Pape sensibilise par sa forte résonance", dit un psychologue cité dans le journal l'Observateur, Serigne Mor Mbaye, "on le voyait tout puissant, à un niveau inaccessible (...) La dimension du personnage fait qu'on a peur"
Jusqu'alors, "les gens ne voulaient pas y croire" (à la maladie), dit Adama Ndione, du club de supporteurs, maintenant ils "vont commencer à avoir peur".Il ignore encore comment, avec l'interdiction des rassemblements, les fans sénégalais honoreront la mémoire du défunt.
PAR N. SAMBA SYLLA & P. DOYLE
IL EST TEMPS D’ABOLIR LES PRISONS POUR LES DÉBITEURS SOUVERAINS EN AFRIQUE
Pour que le continent atteigne ses objectifs de développement, le FMI doit modifier radicalement l’approche anti-croissance qu’elle promeut dans les pays très endettés/insolvables au bénéfice de leurs créanciers
Ndongo Samba Sylla et Peter Doyle |
Publication 01/04/2020
Cet article a déjà été publié il y a près de deux mois. L’actualité liée au coronavirus a obligé ses deux auteurs à le republier. Ndongo Samba Sylla et Peter Doyle soutiennent que les moratoires sur la dette des pays en développement ne suffiront pas. Leur impact selon les pays risque de dépendre plus du calendrier de paiement du service de la dette que de leur exposition à la pandémie. Sans mentionner que rien n’empêchera le FMI dans le futur de continuer à imposer aux pays en développement des excédents budgétaires primaires élevés qui se traduiront comme toujours par des pertes de production dévastatrices. Cet article propose une alternative à l’approche habituelle de gestion de l’insolvabilité souveraine par le FMI. En même temps, c’est un appel pour que les dirigeants des pays en développement exigent dès à présent la fin des prisons pour débiteurs souverains.
En l'espace d'une décennie, juste pour accompagner le flux de nouveaux arrivants sur ses marchés du travail, l'Afrique subsaharienne devra créer 20 millions de nouveaux emplois chaque année. Il s'agit d'un défi énorme. Et aussi d’une opportunité sans précédent d'exploiter l'énergie et la créativité de tous les jeunes africains.
Malheureusement, après avoir fait ce constat, le message immédiat du Fonds Monétaire International (FMI) - littéralement dans la même phrase - est de recommander « des réductions budgétaires pour assurer la viabilité de la dette » !
Ce raisonnement est tout à fait faux. Pour que l'Afrique atteigne ses objectifs de développement, le FMI doit modifier radicalement l’approche anti-croissance qu’elle promeut dans les pays très endettés/insolvables au bénéfice de leurs créanciers.
En effet, au lieu de soutenir l’émission de nouvelles dettes créatrices d'emplois, le FMI priorise le remboursement de la dette ancienne, même si cela implique de réduire les budgets des Etats et l’activité économique.
Malheureusement, le FMI persiste dans ce choix de priorités malgré les leçons à tirer de l'échec de cette approche là où elle a été tentée et pleinement mise en œuvre.
Par exemple, la Jamaïque, au cours de la dernière décennie, a suivi la feuille de route du FMI. Son gouvernement a été obligé de dégager d'énormes excédents budgétaires primaires – c’est-à-dire des recettes budgétaires supérieures aux dépenses publiques totales, hors intérêts liés au remboursement de la dette.
Contrairement à la plupart des autres pays, la Jamaïque a respecté ces instructions assez longtemps pour en voir les résultats. Quels ont été les résultats ?
La dette publique jamaïcaine a diminué, passant de 140 % du PIB il y a dix ans à 95 % aujourd'hui. Mais dans le cadre de cette priorité du FMI pour le paiement de la dette ancienne, le volume de l’emploi a chuté à partir de 2009, retrouvant à peine ce niveau à partir de 2016 ; le PIB par habitant du pays a également diminué.
Tout ceci contraste fortement avec l’expérience de pays similaires, notamment les pays africains à la croissance la plus rapide, dont le Kenya, l'Ouganda, le Botswana, la Namibie et l'île Maurice, où, dans le même environnement mondial, au lieu de diminuer, le PIB par habitant a augmenté de 25 à 35 %.
Tout cela n'est pas surprenant. Les ressources ainsi affectées au remboursement de la dette ancienne ne pouvaient pas être utilisées par la Jamaïque pour investir dans la protection contre les ouragans, la gestion des eaux ou les écoles, ni pour réduire les impôts afin de stimuler l’activité des entreprises.
La comparaison avec les pays africains en croissance rapide montre bien ce que la Jamaïque a sacrifié en suivant cette approche rendant prioritaire le paiement de la dette ancienne : 40 % du PIB jamaïcain de 2009. Voilà ce que la Jamaïque a perdu en seulement une décennie.
De telles pertes de production imposées par les créanciers se sont déjà produites auparavant. À l'époque victorienne, une couturière pouvait être emprisonnée par ses créanciers lorsqu'elle était en défaut de paiement. En prison, elle ne faisait pas de robes. Les créanciers ne se souciaient pas de cette perte de production. Ils se retournaient simplement vers sa famille pour qu’elle paie à sa place.
Nous considérons maintenant tout cela comme barbare ; en dépit de la violente opposition à leur encontre, les lois sur l'insolvabilité personnelle ont été modifiées pour empêcher les créanciers d’infliger à leurs débiteurs de telles pertes de production.
Mais les créanciers (y compris les Chinois), par l'intermédiaire du FMI, continuent de faire cela aux débiteurs souverains. Et pas seulement en Jamaïque. Le FMI exige actuellement des excédents primaires élevés à moyen terme, notamment à la Mozambique, à la Zambie, au Zimbabwe, à l’Angola, au Tchad, à la Guinée équatoriale, aux Seychelles, au Congo et au Soudan du Sud - tout cela pour rembourser des dettes anciennes.
Comme le montre la Jamaïque, il s’agit là d’une recette pour la stagnation, au mieux. Le FMI a tort de pointer du doigt les débiteurs qui ne font pas preuve de suffisamment d'engagement et d'énergie à son égard. Ce n'est guère la faute de la couturière emprisonnée si elle ne peut pas produire !
Le monde et l'Afrique ont ainsi un choix à faire. Car tout comme pour les insolvabilités individuelles – et pour lesquelles certains dispositifs ont été conçus afin de faire face au manque de considération des créanciers pour la production - il est également possible sur le plan technique de mettre en place de meilleurs dispositifs d'insolvabilité pour les souverains.
Nous détaillons ces arrangements alternatifs que nous appelons « Régime préventif d'insolvabilité souveraine » (Preemptive Sovereign Insolvency Regime, PSIR, en anglais), qui sont construits sur la même base que ceux qui ont été appliqués aux banques américaines pendant plus d'un demi-siècle, et grâce auxquels plusieurs centaines d’entre elles ont été restructurées avec succès. Un descriptif plus complet de notre proposition peut être consulté en ligne.
L’idée de base est que le FMI devra imposer des réductions de dette lorsque les ratios de dette publique ne peuvent être stabilisés sans porter l’excédent budgétaire primaire au-delà de 2 % du PIB, et non, comme c'est le cas actuellement, uniquement lorsque les ratios de dette augmentent de manière insoutenable.
Ainsi, les anciens créanciers ne pourront pas infliger des pertes de production en imposant des excédents primaires élevés via le FMI. Toutefois, les bénéficiaires devront remplir certaines conditionnalités afin de garantir le dividende de la croissance et de l'emploi qui en découle. Sur cette base, le FMI financera la transition des pays bénéficiaires vers de nouveaux créanciers.
Si ces accords avaient été appliqués à la Jamaïque à partir de 2009, sa dette eût été réduite jusqu’à des niveaux compatibles avec de faibles excédents primaires. Cela eût permis à la Jamaïque d'investir et de croître au cours de la dernière décennie, tout comme l'ont fait les pays africains en croissance rapide, et tout comme l'Afrique dans son ensemble doit le faire maintenant, au lieu de se contenter d'effacer sa dette ancienne.
En l'absence de ces dispositifs, la Jamaïque n'avait d'autre choix que d’obéir. Mais elle n'aurait pas dû être confrontée à ce « choix ». Compte tenu des conséquences, notamment le développement d’une émigration incontrôlée, aucun autre pays ne devrait être confronté à ce choix à nouveau.
Les avantages d'un « Régime préventif d'insolvabilité souveraine » (PSIR) vont bien au-delà de la réalisation du potentiel de production des pays qui sont aujourd'hui très endettés. En supprimant la « garantie d’excédent primaire élevé » du FMI, le PSIR pousse les créanciers à exiger dès le départ une responsabilité et une transparence accrues au lieu qu’ils s'associent à des dirigeants corrompus et incompétents pour imposer une dette illégitime et inutile aux citoyens les plus pauvres d'Afrique. Le PSIR ralentirait également les entrées de capitaux pendant les périodes de boom des cours des produits primaires.
Comme pour les régimes d'insolvabilité personnelle, seuls les créanciers anciens font obstacle à cette réforme qui vise à stimuler la production, à créer des emplois, à lutter contre la corruption et à lisser le boom des matières premières. L'avertissement lancé en 1987 par feu Thomas Sankara, le charismatique président du Burkina Faso, résonne plus fort que jamais : « si nous ne payons pas [la dette extérieure], nos bailleurs de fonds ne mourront pas. Soyons-en sûrs. Par contre, si nous payons, c’est nous qui allons mourir. Soyons-en sûrs également. »
Il est temps de choisir. L'Afrique va-t-elle à nouveau accepter d’être enfermée dans la prison pour débiteurs qu'elle a endurée avec les plans d'ajustement structurel (PAS) des années 1980 et 1990, en étant obligée de dégager des excédents primaires pour payer la dette au détriment de la production et des emplois décents ? Ou bien l'Afrique se tiendra-t-elle debout pour demander que les dispositifs d'insolvabilité souveraine sortent du XIXe pour entrer dans le XXIe siècle, afin de rendre possible la création de millions de nouveaux emplois chaque année ?
Le mandat originel du FMI était de garantir la production, non pas le paiement de la dette. Si l'Afrique sauve cette institution globale des griffes des créanciers en insistant sur les changements à apporter à la gestion de l’insolvabilité souveraine, elle poussera le FMI à respecter son mandat. Ce qui préparerait le terrain pour la réalisation du potentiel de tous nos peuples.
L'Afrique devrait appeler le monde et le FMI à abolir dès maintenant les prisons pour débiteurs souverains.
Ndongo Samba Sylla est un économiste du développement sénégalais.
De nationalité américaine, Peter Doyle est un ancien économiste principal au Fonds monétaire international. Il a démissionné en 2012 en raison de l'« incompétence » du Fonds et de son échec à mettre en garde contre la crise financière mondiale de 2007-2008.
par Ibrahima Thioye
OUI POUR UN CONFINEMENT TOTAL ET UN DÉPISTAGE MASSIF (PARTIE 2)
Arrêter l’économie pendant 1 mois pour bien rebondir vaut mieux que d’affronter une catastrophe qui sera longue, jalonnée de morts, de désordre et qui finira à coup sûr par impacter l’économie et l’équilibre social
Je reviens une deuxième fois pour répéter ce que j’avais dit dans mon premier article sur ce sujet. Je crois qu’on doit aller plus loin dans les mesures déjà prises, notamment vers le confinement total couplé à un dépistage massif. Certes, notre économie sera durement affectée et cela peut entraîner des conséquences sociales difficiles, voire des souffrances pour les couches de la population les plus vulnérables. Mais nous sommes en guerre contre un ennemi invisible, vicieux et redoutable. Sans de l’audace, des sacrifices, des mesures froidement appliquées, mais assurant au moins la survie des composantes de la population les plus fragiles, nous risquons d’affronter une catastrophe sanitaire sans précédent qui entraînera du désordre économique et des perturbations sociales sur une longue durée.
Je suis conscient qu’en optant pour le confinement total, nous nous retrouvons face à deux ennemis : le virus et le dénuement induit par le confinement. Plus de 70% des populations urbaines vivent au jour le jour. Les confiner sans mesures d’accompagnement, c’est simplement les exposer à un choix terrible : mourir par le virus ou mourir de faim.
Nous devons être prêts à relever collectivement ce double défi consistant à combattre le virus tout en prenant en charge cette composante de la population. Il adresse d’abord nos modes de pensée car pour beaucoup de gens on ne peut attaquer en même temps ces deux ennemis. Cela est parfaitement possible en :
- menant une lutte implacable, bien organisée ;
- tirant les leçons des pays qui nous ont devancés dans ce combat
- évitant d’éluder ces spécificités évoquées plus haut.
Le message du Professeur Seydi
J’ai visualisé une vidéo du professeur Seydi, le coordinateur de la lutte contre le COVID 19, responsable du service des maladies infectieuses de l’hôpital Fann. En substance, il lance une alerte nous rappelant que ce qui se passe actuellement en France, en Italie et aux USA peut arriver au Sénégal avec un impact décuplé. A plusieurs reprises, il est revenu sur la nécessité impérieuse de respecter les mesures barrières et les règles du confinement. Ses recommandations sont : « respectez les consignes ! Restez dans vos maisons, seule une grande urgence devrait vous pousser à sortir de votre maison ! »
Dans cette vidéo, il poursuit : « Si on ne fait pas attention, on va vers la catastrophe ; nous n’avons pas suffisamment de moyens.Tant que le flux de malades qui arrivent chez nous reste limité, nous pouvons les traiter; mais si ce flux dépasse nos capacités, la situation peut être pire que ce que l’on a vu dans les pays d’Europe ». D’après le Professeur Seydi, le cœur de la lutte se trouve dans la prévention qui permet de contenir la vitesse de propagation du virus.
Posons bien le problème
Contre qui sommes-nous en guerre ? le COVID 19, un ennemi invisible.
Quelle est sa force principale ou l’élément le plus nocif pour nous ?
Sa vitesse de propagation ou sa contagiosité. Il se multiplie vite et devient alors insaisissable. Comment faire pour le vaincre ?
Réduire sa vitesse de propagation, l’identifier, l’isoler et l’annihiler. Pour ce faire, il faut mettre en œuvre les mesures suivantes :
1 Figer ses agents porteurs (les hommes) grâce au confinement total. Cela est rendu possible par l’absence de déplacement ou de regroupement des agents porteurs.
2 Respecter les mesures barrières (laver nos mains, utiliser le gel hydro alcoolique, règles de distanciation, porter le masque etc.)
3 L’identifier, l’isoler en procédant à un dépistage massif. Une fois isolé (cela se traduit par un isolement des porteurs), il devient plus simple d’organiser la lutte.
Contrairement à l’Allemagne qui a opté pour un dépistage massif, la France ne décompte que ceux qui arrivent dans les structures hospitalières. D’après certains spécialistes, il faut multiplier par 30 le nombre de cas officiellement déclarés en France. Quel est le facteur multiplicatif pour des pays comme le nôtre. Il me semble que notre situation n’est pas aussi catastrophique avec l’organisation du suivi des cas contact. Mais lorsque le nombre de cas contact devient important, le suivi risque d’être difficile (à moins qu’on recrute une armée de personnes dédiées à cette tâche).
Confinement total
Il faut maintenir uniquement les activités qui ont un lien étroit avec la survie (mise à disposition de denrées alimentaires, médicaments, accès aux structures financières – y compris les distributeurs de Mobile money et de recharge téléphonique bien équipés de moyens de protection contre le virus).
Comment gérer ces centaines de milliers de personnes vulnérables, qui vivent au jour le jour pour subvenir aux besoins de leur famille ? Prenons les en charge en nous appuyant sur nos valeurs de Teranga, Ndibeul, Laabir, sans regroupement, ni folklore. Étant dans une situation exceptionnelle qui nécessite une lutte implacable contre ce virus, arrêter l’économie pendant 1 mois pour bien rebondir vaut mieux que d’affronter une catastrophe qui sera longue, jalonnée de morts, de désordre et qui finira à coup sûr par impacter l’économie et l’équilibre social. Même à supposer qu’il y ait des failles dans l’organisation de la chaîne de solidarité, entre deux douleurs, le pragmatisme nous recommande de choisir celle qui aura moins de conséquences déplorables aux plans économique, social, émotionnel et humain.
Je propose au gouvernement d’utiliser une méthode en escalier :
solidarité familiale à solidarité au niveau du quartier à solidarité au niveau de la ville (ou commune) à solidarité au niveau de l’État.
Ce n’est pas une honte de demander exceptionnellement aux familles (élargie bien entendu) de faire jouer cette fibre de la solidarité pendant un mois. Elles savent bien le faire lorsqu’il s’agit de célébrer un baptême ou un mariage. Nous devons être nombreux à accepter cette boutade de Samba Bathily, maire de Ouakam quand il dit : « Je préfère manger du sombi pendant un mois et rester sain et sauf, plutôt que m’exposer à la mort.» Je suis persuadé que les sénégalais sont nombreux à accepter de faire ce type de sacrifice pour assurer la survie de membres de leur famille éloignée.
Bien sûr que ce premier niveau familial ne pouvant pas assurer toute la prise en charge, on monte à l’échelon du quartier et ainsi de suite jusqu’au stade étatique. Il faudrait utiliser les moyens technologiques modernes (une application, une plateforme téléphonique) pour assurer la collecte des informations de ceux qui ne peuvent compter que sur la contribution collective et organiser les « soutiens ». Il faudra mettre en place toute une chaîne logistique réelle et virtuelle pour mener à bien ce combat. Cela éviterait les collectes ou distributions de denrées qui vont occasionner des attroupements et créer les conditions d’une propagation du virus. Il y aura toujours des cas exceptionnels à prendre en charge par des moyens logistiques
Ce serait un confinement choisi et non subi. L’Inde, l’Afrique du Sud et beaucoup d’autres pays ont choisi la voie du confinement total. L’exemple de l’Inde est assez intéressant. Quand on voit les images en provenance de Delhi, on peut conclure immédiatement que le confinement total n’est pas la solution. Non. Il ne s’agit pas de décréter un confinement sans mesures d’accompagnement. Il faut préparer toutes les mesures contribuant à la mise à disposition de moyens de survie sur la durée du confinement. Sans ces éléments, la mesure de confinement sera contre-productive.
Décréter d’emblée que le confinement est impossible (comme l’ont dit de nombreuses personnes, parmi lesquelles le président du Benin), c’est accepter de ne pas sortir des cadres habituels de raisonnement. Ce sera difficile, mais un confinement organisé est parfaitement possible. Cela exige de notre part de l’audace, de l’esprit d’initiative (à l’image des initiatives prises par le maire de Ouakam) et surtout une volonté de fer. Je vais être caricatural : sans confinement : crise sanitaire (avec un plateau sanitaire à genou) + bouleversement social + crise économique + choc émotionnel lié aux pertes en vies humaines( et peut être suivi d’un confinement subi) + aucune visibilité sur la date de sortie de crise.
Avec confinement : bouleversement social (surtout pour les couches les plus vulnérables) + crise économique + choc émotionnel propre au confinement (dépression, perte de repère, etc.) + très bonne visibilité (4 à 6 semaines max).
Entre ces deux douleurs, il faut choisir la moins brutale. Nous devons absolument faire ce choix et nous mobiliser pour la mettre en pratique. Comme je suis un partisan absolu du confinement total et j’ai une grande peur de cette partie ascendante de la courbe de Gauss, je suis sûr d’avoir présenté un tableau plus sombre pour le contraire. Mais j’entends encore les arguments qui ne militent pas en faveur et qui restent pertinents.
Dépistage massif
Le dépistage est un moyen qui permet d’identifier, d’isoler les éléments porteurs, en vue d’épargner ceux qui sont sains et d’organiser de façon plus rationnelle (en ayant une bonne visibilité) la prise en charge des porteurs du virus.
L’Allemagne arrive à réaliser 500 000 dépistages par semaine, la France en fait 9000 par semaine. Le suivi des cas contacts est intéressant, mais à partir du moment où il y a de nombreux cas issus de la transmission communautaire, il vaut mieux organiser le dépistage massif, en s’inspirant des meilleures pratiques (celle de la Corée et de la Chine). En Chine et à Wuhan plus précisément, d’après le récit du Docteur Philippe Klein (disponible sur la plateforme Youtube), ils ont procédé au dépistage systématique à l’issue duquel les porteurs asymptomatiques étaient admis dans des hôtels, les cas contacts rassemblés dans des stades et les autres pris en charge dans les structures hospitalières. En procédant de cette façon, on a de la visibilité sur la dynamique d’évolution de la maladie avec la progression et la transformation des différents flux de cas. Le grand avantage de cette option, c’est que l’ennemi est isolé et la contamination est complètement réduite. Le Docteur Klein et le Docteur Seydi raisonnent en termes de flux.
Thérapie
Je ne vais pas développer outre mesure à propos de la thérapie. Je ne suis pas un spécialiste de ce domaine. Je m’appuie simplement sur les propos du Professeur Seydi. Je trouve sa démarche très pragmatique. Si j’ai bien compris ses explications, on trouve de nombreux cas (cas simple, cas sévère, cas sérieux et cas grave). Chaque malade nécessite un traitement spécifique. Les choses ne sont pas aussi simples que nous autres profanes les comprenons. D’après le professeur, ce n’est pas la Chloroquine qui sauve les malades, mais elle accélère la guérison et réduit la contamination. Ce qui évite la mort, c’est le traitement symptomatique. La Chloroquine doit faire l’objet d’une prescription médicale pour éviter les effets indésirables.
Acquisition de matériels et d’équipements
Aujourd’hui, on note une pénurie de masques dans toutes les pharmacies. Je suis persuadé que les structures mises en place pour coordonner la lutte contre le COVID 19 se sont projetées dans un scénario catastrophe pour planifier l’acquisition de certains équipements ou matériels: masques, gants, équipements vestimentaires, respirateurs et autres appareils. La France a fait une commande de 1 milliard de masques. Pourquoi au Sénégal on ne ferait pas une commande de 200 millions de masques ?
Pour conclure, je reprends mes propositions :
- durcir le confinement en faisant appel à toutes les formes de solidarité (sans folklore ni regroupement), en utilisant les moyens technologiques modernes ;
- dépistage massif dont l’objet est de traquer, identifier et isoler le virus pour pouvoir le combattre.
Cela se traduira par 4 à 6 semaines (que sais-je) d’un arrêt des activités économiques afin de traquer ce virus jusque dans ses derniers retranchements. Cela demande de l’audace, un sens de l’anticipation, un sens des responsabilités.
Mes sources :
- CNN, BFM TV ;
- Des études en provenance de London Business School (The economics of a pandemic. The case of COVID-19), Shangai Institutes for International Studies (International cooperation for the coronavirus combat. Results, Lessons,and way ahead) ;
- Des vidéos qui m’ont marqué (celles du Docteur Philippe Klein qui a vécu l’épidémie à Wuhan, celles du Docteur Moussa Seydi, celle du Maire de Ouakam).
par Amadou Ndiaye
AU SECOURS DU FERLO ET DE L’ELEVAGE
Tous les chefs de famille sondés dénoncent le fait de ne pouvoir vendre un animal pour nourrir les leurs alors qu’on permet aux commerçants des villes, où la maladie est identifiée, de se nourrir
Depuis deux semaines que le gouvernement a commencé à prendre des mesures pour lutter contre le COVID 19, le monde rural se meurt, surtout la zone sylvopastorale. « L’heure est grave », avait si bien dit le président de la République lors de son adresse à la nation pour annoncer l’Etat d’urgence. Quelques jours auparavant, il avait déjà pris des mesures de fermeture des classes et d’interdiction de regroupement.
Depuis les premières mesures, beaucoup de spécialistes avaient, à juste raison, fait des réflexions sur les interrelations entre la pandémie et d’autres dimensions (biodiversité, changement climatique, développement durable, éducation pour la santé, etc.). Bien des réflexions sur la relation entre COVID 19 et l’économie ont aussi permis de faire des diagnostics – pronostics ainsi que des projections sur les indicateurs macroéconomiques (productivité, échanges et croissance). Aujourd’hui, tous sont d’accord que la récession sera le facteur commun pour toutes les nations du monde. Mais au-delà, qu’en est-il de l’économie réelle dans nos pays et dans nos campagnes ? Il est difficile de répondre à cette question sur l’économie réelle. Néanmoins, quelques entretiens informels dans la zone sylvopastorale du Sénégal nous permet de comprendre que « l’heure est grave ».
Toutes les personnes interviewées sont unanimes : « Les sous-préfets ont interdit les marchés hebdomadaires. C’est catastrophique pour nous. Les éleveurs du ferlo vivent au jour le jour à travers ces marchés. Chaque semaine, ils parviennent à déstocker des petits ruminants par ci ou de la volaille par là pour s’approvisionner en denrée (riz, sucre, huile). Mais avec la fermeture brusque des marchés hebdomadaires, on nous pris au dépourvu »
Bien sûr, nous ne doutons pas que le gouvernement et ses partenaires sont conscients du poids de toute décision. Malgré certaines pressions, le confinement n’a pas encore été opté pour mieux endiguer le virus. La nature informelle de l’économie sénégalaise y est pour beaucoup. Mais, comment prendre en compte le monde rural dont l’économie repose sur les marchés hebdomadaires ? L’Etat doit réfléchir. Nous savons que des structures habilitées sont en train de travailler sur des stratégies pour atténuer les impacts négatifs de la crise. Justement, nous pensons que l’une des stratégies, comme d’habitude, va reposer sur la distribution de kits alimentaires aux pauvres sur la base de données de l’ANSD ou du programme des bourses familiales. C’est difficile de le dire mais l’Etat doit aller au-delà, en tout cas dans le ferlo. De la même façon qu’on prend en compte dans la décision, le commerçant ou le vendeur à la sauvette des marchés de Thiaroye, Colobane, Petersen, etc. ou des marchands ambulants, il faut prendre en compte l’éleveur de Loumbel laana, de Wendo dioyi, de Ganinayel. De même, le ménage Widou thiengoly a les mêmes droits que ceux de Yoff, Keur Massar, etc. Tous les chefs de famille sondés dénoncent le fait de ne pouvoir vendre un animal pour nourrir leur famille alors qu’on permet aux commerçants des villes, où la maladie est identifiée, de se nourrir. Deux poids deux mesures.
Pour une fois, il ne s’agit pas d’identifier et de distribuer des kits aux pauvres ; la fermeture des marchés hebdomadaires affecte de fait les éleveurs riches. Les enquêtes de la gendarmerie pourraient aider à mieux comprendre la situation. Les spécialistes devraient ensuite trouver des stratégies d’intervention plus inclusives, sans favoriser la circulation du virus.
En optant pour le non confinement, l’Etat prendrait sans doute en compte la nature informelle de notre économie. Sans trop subir le couvre-feu, l’éleveur du ferlo qu’il soit riche ou pauvre est confiné de fait s’il ne peut aller, vendre ou acheter au marché hebdomadaire. Nous lançons un appel solennel aux autorités pour la prise en compte de ce fait dans ses stratégies. Les sous-préfets doivent agir intelligemment sur le terrain.
Au- delà, l’arrêt des marchés hebdomadaires de bétail vont dans le moyen terme affecter la consommation de protéines animales dans les centres urbains et conséquemment des maladies alimentaires vont survenir. Rapidement, la spéculation va s’installer rendant les prix inaccessibles pour le salarié moyen et plus tard, les stocks vont s’épuiser et la viande sera introuvable en ville. C’est la sécurité alimentaire à travers l’accessibilité, la stabilité et la disponibilité qui est en jeu. Déjà, les communautés mettent en place des stratégies de solidarité communautaire pour permettre à tous de manger. Les autorités doivent étudier ces stratégies pour mieux agir et non rester dans des approches dirigistes e distribution de kits alimentaires.
Pour finir, le fonctionnement des forages pastoraux est aussi un enjeu. Si l’éleveur ne parvient pas à vendre, il ne pourra sûrement pas payer les frais d’abreuvement au forage. Le gestionnaire du forage ne pourra plus acheter du carburant et réparer les motopompes. Gare à l’arrêt des forages pastoraux. Les troupeaux ainsi que l’économie d’élevage sont menacés surtout qu’avec le couvre-feu la transhumance entre région est interdite de fait.
Amadou Ndiaye est Professeur à l’UGB, Docteur vétérinaire- environnementaliste, Docteur en Socio économie rurale
par Alioune DIONE
L'ÉCONOMIE IMMÉDIATE : BAROMÈTRE ET LEVIER DE RÉSILIENCE FACE À LA PANDÉMIE DU COVID 19
La fermeture des aéroports qui porte un coup dur aux échanges internationaux et le confinement des personnes pour réduire les risques de dissémination du virus et de contagion semblent inviter le monde à appréhender d’abord l’immédiat
Le Coronas virus apparu en décembre 2019 en Chine qui est un puissant Etat et une grande Nation, a rapidement installé une catastrophe sanitaire un peu partout dans le monde. La gravité de la situation nous achemine tout droit à une autre économique et prions qu’on n’en soit pas à une catastrophe humanitaire, mais surtout agissons.
La forte dépendance de la plupart des économies et le caractère extraverti de l’activité économique montre à quel point il demeure urgent de se focaliser sur l’économie de l’ici-maintenant, celle de la résilience pour survivre à toute éventuelle crise alimentaire ou humanitaire conséquence de l’économique si elle perdure. Le covid 19 tient le monde en haleine et la santé tient l’économie en survie ; plus vite la bataille est gagnée, rapidement la catastrophe n’atteindra pas l’humanitaire.
Toutefois, l’aspect positif majeur demeure cette cohésion politique nationale qui sera assurément suivie par une sédimentation sociologique par les autres franges après la courageuse, salutaire et sage décision du président de la République Macky Sall à inviter toute la classe politique et à prendre des mesures institutionnelles et économiques urgentes. L’autre, non moins important, serait les leçons tirées pour aller dans le sens de valoriser l’économie immédiate.
C’est une dimension de l’économie gravement et longuement occultée ou méconnue qui vient d’avoir raison sur la déshumanisation profondément entretenue sur ce qui eut à l’origine un mobile d’équité et d’équilibre dans les interactions sociales. L’économie a été à ses origines moraliste, voire théologique.
En effet, des économistes comme le professeur Felwine Sarr ont raison de reprocher à cette discipline son profond complexe des sciences exactes et sa forte tendance quanto phrénique qui la noie dans les spéculations dont les plus notoires sont les soubresauts des tremblements des bourses et autres crises financières.
L’excès et la sur-abstraction mensongère ont étouffé l’économie et sa nature immédiate, qui demeure la dimension la plus réelle, la plus intégrative et la plus soutenue de l’économie en général. Ces trois majeures sont aujourd’hui confirmées par la BCEAO qui vient de prendre des décisions qui confirment le caractère salutaire de ce nouveau paradigme qui est en réalité une dimension étouffée et méconnue par l’hyper-extraversion. Les banques ont toujours été la parfaite illustration de l’économie spéculative.
En effet, cette approche économique inspirée par la Philosophie de l’Economie Suffisante thaïlandaise qui nous a amené à conclure que « si cette économie est suffisante c’est parce qu’elle est immédiate », nous a amené à se focaliser sur l’environnement physique et naturel avec comme force majeure, la capacité d’obtenir le maximum d’accessibilité et de processus de transformation et la culture au sens large du terme de « l’ensemble des biens et services matériels comme immatériels » pour voir la valeur ajoutée issue de ces deux productions brutes.
Il s’agit d’une nouvelle approche institutionnelle de l’économie à partir du niveau le plus immédiat et le plus accessible. Le roi de la Thaïlande Rama IX a le mérite d’être un précurseur du développement durable et soutenu en insinuant le cout environnemental et le rôle des pouvoirs publics dans le développement. Il a juste érigé en politique publique de développement, à l’échelle macro, une politique de développement à la base jusque-là menée par les ONG et organisations de la société civile. Ce qui présuppose une parfaite appropriation par les populations actrices et bénéficiaires.
Il faut ainsi noter que cette approche prédestine à une forte valeur ajoutée et une riche chaine de valeur. Cependant, faudrait-il qu’elle parvienne à contourner la faiblesse technologique de l’Afrique et des pays en retard industriel face aux multinationales, sous peine de ne pas être viable.
En effet, si l’on considère le processus de développement qui part des physiocrates (fin XVIIIe siècle) à l’Ecole classique (début XIX siècle) et l’Ecole néo-classique (fin XIXe siècle) jusqu’à l’école de John Maynard Keynes, on perçoit successivement le caractère réel à travers l’agriculture, la fonction du libre-échange, de la monnaie, de l’emploi et l’enjeu de la croissance comme différents focus de débat.
Assez suffisante alors pour trouver un angle qui permet de se frayer un chemin à travers ces différentes problématiques : l’économie immédiate.
Aussi, faudrait-il que la capacité de satisfaire les besoins à travers les ressources humaines, naturelles et financières issues de l’environnement géographique et spatial le plus immédiat constitue un baromètre puissant d’économie immédiate.
A titre illustratif, la capacité de réponse donnée par le vaillant corps médical est assez illustrative de la qualité des ressources humaines sanitaires. Un rehaussement du niveau d’équipement ferait des points supplémentaires. Le coût économique des comportements et le coût du manque d’infrastructures et d’équipements sont en réalité les facettes souvent faiblement perçues de l’économie immédiate. Un mauvais comportement citoyen entraine une et des pertes énormes ; un passif à intégrer dans le bilan alors. Une action citoyenne avec tous les effets induits en serait alors un actif même s’il n’a pas été comptabilisé.
L’action citoyenne est alors une dimension souvent imperceptible dans l’économie conventionnelle et un pan entier à comptabiliser dans l’économie immédiate, par sa nature réelle, intégrative et soutenue.
Le caractère réel mesuré à travers la valeur non monétaire de tous les efforts qui seront consentis et le caractère intégratif que le gouverneur de la BCEAO vient de comprendre à travers la deuxième décision d’élargir le champ des mécanismes avec l’initiative de faire la cotation de 1700 entreprises privées dont les effets n’étaient pas acceptés auparavant dans son portefeuille, montrent à suffisance combien l’activité économique a été exclusive de pans entiers du potentiel.
Economie immédiate n’est pas autarcie, elle est juste une prise de conscience de l’ensemble des potentialités monétaire comme non monétaire, informelle, de l’exigence de focus sur la qualité des ressources humaines pour obtenir un développement soutenu. Elle respecte l’environnement afin de considérer la durabilité d’autant plus qu’elle se veut une économie du terroir, une économie verte.
L’économie immédiate est un retour aux valeurs, c’est pourquoi elle privilégie l’agriculture bio qui a été la première forme agricole. C’est une invitation à l’action citoyenne car elle permet d’appréhender le cout économique des efforts citoyens comme mode de contribuable alternatif au service public à l’instar de ce que font les jeunes dans le scoutisme. Elle est alors une économie de réconciliation de l’individuel avec le collectif par ses valeurs de responsabilité : un besoin crucial en cette période de corona virus.
C’est une économie de développement à la base, comme nous l’avions évoquée tantôt, elle est ascendante à l’instar du bottom-up dans laquelle l’entreprenariat individuelle, féminin, familiale, communautaire avec les enseignements des pratiques d’économie sociale et solidaire, de micro finance, d’économie circulaire à la seule condition que la matière première ou produit brut provienne de l’immédiat ; qu’elle émane de soi et soit maitrisée par soi-même dans l’optique visée. Son caractère de profit : sa dimension économique, est ici envisagée en pondération du coût social et de sa nature contributive au développement de sa localité. C’est pourquoi toute activité d’entrepreneuriat social a une incidence d’économie immédiate.
En définitive, l’économie immédiate est une systématisation de la relation entre l’économie la culture et l’environnement d’une part, la responsabilité sociale dans la création de richesse d’où son caractère humaniste. Elle valorise le local en ce sens qu’elle articule le système de production à la consommation comme le souhaitait le président Sankara quand il disait : « Consommons ce que nous produisons et produisons ce que nous consommons ».
C’est pourquoi elle optimise aussi l’approche coopérative de Mamadou Dia qui renforce le système de production à travers leurs acteurs par des compétences technique, d’organisation, de gestion et d’adaptation. Elle favorise ainsi le transfert et la dissémination de technologie. C’est une économie de dissémination.
En conclusion, la fermeture des aéroports qui porte un coup dur aux échanges internationaux et le confinement des personnes pour réduire les risques de dissémination du virus et de contagion semblent inviter le monde à appréhender d’abord l’immédiat ; pourvu que les leçons seront bien apprises et assimilées.
Plus on dépend de ses potentialités, mieux on résiste aux chocs externes d’où la nécessité de mieux considérer l’économie immédiate à l’instar de ce précieux ouvrage qui vient de m’être offert par la présidente de Solidarité laïque : « Le Pouvoir du moment présent » qui m’a permis de voir le niveau spirituel de ma réflexion socio-économique.
Dr Alioune Dione est membre du Mouvement des Cadres de PASTEF.
LES ETABLISSEMENTS DU SUPERIEUR PRIVE INTERPELLENT L’ETAT
Forcés au chômage technique, et donc sans source de revenus depuis la fermeture des salles de classe par mesure de prévention contre la propagation du covid19, enseignants et chefs d’établissements du privé supérieur crèvent la dalle. I
Forcés au chômage technique, et donc sans source de revenus depuis la fermeture des salles de classe par mesure de prévention contre la propagation du covid19, enseignants et chefs d’établissements du privé supérieur crèvent la dalle. Inquiets pour leur survie face au prolongement de la suspension des cours, leur unique gagne-pain, ces acteurs de l’enseignement demandent à l’Etat de se pencher sur la dette qu’il doit aux établissements du supérieur privé.
Un tableau sombre dans une salle de cours désertée où pourtant raisonne l’écho d’une grogne. Les mots qui sortent des poitrines interpellent l’état. Contrairement aux établissements d’enseignement public, la fermeture des salles de classe a fini de précipiter ceux du privé dans la dèche. Leur principale source de revenus, à savoir le paiement des mensualités des étudiants, a tari ne serait-ce que provisoirement. Un provisoire qui a toutes les chances de s’éterniser.
Si les membres du corps enseignant sont en train de croupir sous le poids des charges familiales, les chefs d’établissements quant à eux sont préoccupés par le paiement du loyer des locaux abritant leurs écoles en plus des échéances des prêts contractés dans les banques. et selon le Dr Jean Marie Sène, président de la Conférence des établissements privés d’enseignement supérieur (Cepes), bien que d’autres secteurs d’activités du pays soient aussi touchés par les répercussions économiques de la crise sanitaire en cours, le leur reste affecté à deux niveaux. Il s’agit d’abord, indique-t-il, de la dette que l’état doit depuis des années aux établissements privés d’enseignement supérieur mais surtout, et c’est le deuxième élément, à la suspension de leurs activités professionnelles. «Nous faisons partie des secteurs les plus impactés en ce sens que le gouvernement nous devait de l’argent dans le cadre de l’orientation des bacheliers vers le privé, ce qui fait que déjà avant cette fermeture des classes, cette créance nous avait plongé dans des difficultés économiques. Aujourd’hui, avec cette mesure de confinement, les autres étudiants sur qui nous comptons ne paient plus leurs mensualités dans la mesure où ils ne sont plus en classe.
Et en conséquence, nous, chefs d’établissements ne sommes plus en mesure d’assurer le paiement des salaires du corps professoral ainsi que nos autres employés » alerte m. Sène, le président du Cepes. Il concède que les acteurs de l’enseignement privé supérieur sont néanmoins peinés d’exposer leur situation dans ce contexte de pandémie où la santé des citoyens prime.
Interpellant l’état, Jean marie Sène souligne que la situation à laquelle ils sont confrontés dépasse les prérogatives de leur ministre tutelle. Ce dernier, dit-il, ne peut régler que le cadre réglementaire. « Nous avons besoin de mesures d’accompagnement du point de vue fiscal, des dérogations auprès des banques pour suspendre les dettes que nous leur devons. Et, le seul capable de nous secourir sur ce plan se trouve être le ministre des Finances » estime Dr Sène qui se fait l’avocat des écoles privées d’enseignement supérieur. Le paiement de la créance, l’appareil respiratoire « Nous avons un large personnel qui dépend de nous. La survie de familles entières dépend également de ces employés. Nos bailleurs continuent de sonner à nos portes pour le remboursement. Le paiement des charges liées aux locations des sièges de nos établissements pèse sur nos épaules. Et avec cette situation particulière de confinement qui règne dans le pays, si l’Etat ne paie pas la créance qu’il nous doit, des établissements privés d’enseignement supérieur risquent de fermer leurs portes même après la crise sanitaire », avertit m. Diop, Pdg d’une grande d’école et selon qui l’état doit plus de cent millions à son seul établissement.
A l’en croire, il y aurait plus de deux cents établissements qui courent derrière l’argentier de l’état pour le paiement de leur dû. Selon le membre du Cepes, pour les deux années académiques précédentes, le gouvernement n’a pas payé un seul centime de l’énorme ardoise estimée à plus de 18 milliards qu’il doit aux écoles privées. Aujourd’hui, dans ce contexte de confinement et d’arrêt de leurs activités professionnelles d’enseignement, leur seule source de revenu, explique-t-il, c’est des milliers de familles qui vont s’enfermer chez eux sans avoir les moyens d’assurer leur subsistance.
MACKY SALL-VIKTOR ORBAN, MEME COMBAT ?
Au nom de la lutte contre le coronavirus ! Mais lisez-donc…
Au moment où l’Assemblée nationale de notre pays s’apprête à octroyer, ce mercredi, les pleins pouvoirs au président de la République Macky Sall par le biais d’une loi d’habilitation, le « Témoin » soumet à l’appréciation de ses lecteurs ce texte publié par le journal français « Géopolitique » (presque tous les journaux français d’hier ont consacré de grands articles à ce sujet) à propos de la Hongrie où le Premier ministre, le dictateur Viktor Orban, s’est lui aussi fait accorder les pleins pouvoirs. Au nom de la lutte contre le coronavirus ! Mais lisez-donc…
Les pleins pouvoirs illimités à Orban en Hongrie, au nom du coronavirus a la différence des autres lois d’exception en Europe, celles qui ont été votées hier n’ont pas de limite dans le temps, ce qui fait dire à l’opposition qu’il s’agit d’un « coup d’État » et d’en appeler à l’Europe.
Une pandémie comme celle que nous vivons fait vivre des temps difficiles aux citoyens, mais aussi à leurs droits démocratiques. Certains en profitent, s’abritant derrière le coronavirus pour renforcer leur pouvoir de manière inquiétante, et c’est le cas en Hongrie, où le premier ministre, Viktor Orban, s’est attribué hier les pleins pouvoirs, officiellement pour lutter contre la pandémie.
Le coronavirus appelle effectivement des mesures exceptionnelles, qui passent par des restrictions de liberté, comme le confinement, des mises en quarantaine, la suspension du Parlement, ou l’interdiction de circuler. nous nous en accommodons parce que nous pensons — nous savons — qu’elles sont temporaires, même si certains s’en inquiètent tout de même.
En France, l’« état d’urgence sanitaire », voté la semaine dernière par le Parlement, n’est valable que deux mois. au royaume uni, les pouvoirs exceptionnels accordés au gouvernement ont une durée maximale de deux ans, mais doivent être renouvelés par la Chambre des Communes chaque six mois.
En Hongrie, Viktor Orban s’est donc fait attribuer hier les pleins pouvoirs par le Parlement qu’il contrôle, mais sans limite dans le temps. il va donc pouvoir gouverner par décrets, aussi longtemps qu’il le souhaite, il pourra même abroger des lois votées par le Parlement, et sera le seul garant du moment où ces pouvoirs ne seront plus nécessaires. Le Premier ministre justifie cette action par la lutte contre l’épidémie, comme dans les autres États européens. mais ses pouvoirs sont tellement étendus que l’opposition, minoritaire, crie au « coup d’État » - et que les regards se tournent maintenant vers l’Europe (…)
LES FEMMES MARIEES JUBILENT TANDIS QUE LES «MBARANEUSES» FONT GRISE MINE !
Si l’instauration du couvre-feu est une contrainte pour la majorité de la population avec des activités qui tournent au ralenti, il y en a par contre pour qui ce confinement forcé dès 20 heures représente un nuage de bonheur.
Si l’instauration du couvre-feu est une contrainte pour la majorité de la population avec des activités qui tournent au ralenti, il y en a par contre pour qui ce confinement forcé dès 20 heures représente un nuage de bonheur. Il s’agit de ces dames dont les maris n’étaient que des ombres dans leur propre foyer et qui, désormais, affichent le sourire pour avoir repris possession de leurs « aladjis ». Le couvre-feu leur permet d’avoir leur époux à la maison tous les soirs, et dès vingt heures tapantes. Le temps d’un confinement, que ces dames souhaitent le plus long possible voire éternel, le bonheur s’est invité dans les foyers. Pour le moment, ces dames vivent une seconde lune de miel et prennent leur revanche, pendant que les illégitimes broient du noir
Le malheur des uns fait le bonheur des autres. S’il y a des personnes que le couvre-feu arrange, c’est bien les femmes mariées à des maris infidèles et qui ne pouvaient retenir leurs hommes à la maison, malgré le déploiement de tous les artifices de séduction possibles et imaginables. mais avec le couvre-feu instauré depuis une semaine, ces femmes délaissées retrouvent le bonheur perdu à causes des incartades de leurs époux. Ces bonnes dames qui retrouvent leurs ‘’aladji ass’’, dès les premières heures de l’après-midi souvent, crainte du couvrefeu et des coups de cravache des policiers aidant, sont dans leur nuage de bonheur et déploient des trésors d’imagination pour avoir en permanence leurs époux près d’elles. Plus personne n’ose vagabonder dans les rues de dakar après 20 heures. « Depuis des années, mon mari passe ses nuits dehors en compagnie de ses maitresses. Il ne rentrait que vers 5 heures ou 6 heures du matin totalement ivre. J’ai tout fait pour qu’il change de comportement. En vain. J’ai vécu cette situation dans la souffrance depuis de longues années mais je n’ai pas voulu mettre un terme à notre union à cause de nos cinq enfant s», raconte Suzanne Diouf.
D’après cette mère de famille, depuis que le couvre-feu a été décrété, son époux n’ose plus franchir le seuil de la porte. et même si c’est pour aller à la boutique, il hésite à mettre le nez dehors. « Je me réjouis de cette situation et j’espère qu’il profitera de ces jours de confinement pour changer de comportement », souhaite-t-elle.
Abondant dans le même sens, Fatima Soumaré vivait également les mêmes tourments que la dame Suzanne Diouf. Ne parvenant pas, depuis trois ans, à avoir son mari à ses côtés à la maison, elle en était arrivée à perdre ses illusions. Son homme trouvant toujours des prétextes pour expliquer ses sorties nocturnes. « maintenant, c’est fini les réunions jusqu’à X heures. il n’y a plus de : madame, aujourd’hui je dine avec des partenaires étrangers. ou bien la circulation n’a pas été fluide aujourd’hui. C’est fini toutes ces sortes de mensonges pour masquer ses infidélités. Avant 20 heures, il est à la maison et les enfants qui ne le voyaient presque plus, en profitent » jubile notre interlocutrice.
Les « mbaraneuses qui tournaient autour de ces bailleurs subissent les contrecoups du confinement et du retour à la maison de leurs pigeons à plumer. elles ne peuvent plus voir leurs « financiers », à moins que ces derniers leur passent d’interminables coup de téléphone ou souvent des appels vidéos pour entretenir la passion. « Le couvre-feu fait mon bonheur, car il me permet de rassembler toute ma famille. Personne ne sort », se réjouit Oulimata Sarr, mère de deux enfants.
D’après elle, son mari était tout le temps dehors et avait même perdu l’habitude de manger à la maison. « tous les soirs pratiquement, il avait des diners d’affaires, des réunions la nuit et des petits voyages entre Saly Portudal, Ngaparou etc. Je ne sais pas si c’était des prétextes pour voir ses copines ou si c’était vrai. Mais tout a changé d’un coup et il est plus présent à la maison et n’a plus d’excuses pour sortir », se réjouit elle elle aussi. Quant à Mami Cissé, elle soutient que le couvre-feu a permis à son époux de plus se rapprocher de la famille. « Les enfants qui ne voyaient leur père que les week-ends en profitent pour passer plus de temps avec lui », confie notre interlocutrice qui dit en profiter également pour rendre le quotidien de son époux agréable en lui concoctant de petits plats tout en essayant de le tenir par le ventre et le bas -ventre.
Rien ne peut arrêter un homme infidèle…
Si ces dames sont rassurées par la présence de leurs maris, ce n’est pas le cas pour Mame Diarra Ly selon qui le couvre-feu ne peut empêcher aux époux infidèles de faire ce qu’ils ont envie de faire. « Tout se passe le matin à l’heure où ils quittent les maisons pour aller au bureau ; et le soir ils rentrent à la maison comme si de rien n’était. L’infidélité est une habitude qu’on ne peut pas abandonner du jour au lendemain » dit-elle, lucide ou blasée. a en croire notre interlocutrice, tout se joue entre 12 heures et 15 heures. « Les hommes rendent visite à leurs copines pour passer du bon temps. Comme d’autres préfèrent convoquer leurs conquêtes discrètement dans leur bureau pour ‘’sathe plaisir’’, soutient, lapidaire, Arame. Comme quoi, chassez le naturel, il revient au galop !
Par Ndiaga Loum
COVID-19 ET RELATIONS INTERNATIONALES, 6 LEÇONS PROVISOIRES
Le confinement forcé nous amène à nous rendre compte qu’il y a plein de choses non essentielles que nous faisons tous les jours, qui nous prennent beaucoup de temps et dont on pourrait se passer sans conséquence
La prospective intellectuelle consiste à envisager le monde à venir à partir de l’analyse de données factuelles présentes. Les penseurs américains depuis Kissinger jusqu’à Huntington, Fukuyama ou Nye nous ont habitués à des pensées sophistiquées sorties de ce laboratoire poreux des idées avec toujours en toile de fond la préoccupation de voir se prolonger la domination militaire, politique, économique, scientifique et culturelle des Etats-Unis. Ces auteurs et beaucoup d’autres qu’il serait superflu de citer ici, étaient capables de nous dire ce qu’il va advenir du monde dans les prochains 50 ans. Ils pouvaient même élaborer des scénarios de crise et envisager les mécanismes de sortie de crise. La réalité aujourd’hui est que personne ne pouvait prévoir il y a juste 6 mois qu’un virus nommé CoVid-19 pouvait bouleverser autant la géopolitique internationale obligeant les dirigeants du monde et leurs conseillers à une gestion tatillonne, hésitante, contradictoire, au jour le jour, faute de ne pouvoir envisager même ce que va se passer dans une semaine, voire dans un jour. La réflexion prospective est en panne sèche. Nul ne sait de quoi demain sera fait. Cette inconnue est en soi une démonstration du pouvoir du virus probablement issu du corps animal sur les cerveaux humains, même ceux qui prétendent être les meilleurs. Il ne faudra surtout plus confondre le capteur et la mesure.
L’impuissance des grandes puissances européennes
L’Italie, la France, l’Espagne inquiètes de ne pouvoir disposer d’ici une semaine d’équipements pour protéger le personnel médical ou de médicaments pour soigner les patients, qui l’eût imaginé? Un pays membre de l’union européenne appeler au secours de son corps médical débordé des médecins d’un pays aussi pauvre que le Cuba pour faire face à la pandémie du Coronavirus, il n’y a pas plus grande démonstration de l’impuissance d’une grande puissance au cœur de l’union économique la plus forte, la plus approfondie et peut-être la plus aboutie à l’échelle mondiale (L’union européenne). Le fait est que l’inquiétude visible d’un président français, des premiers ministres espagnol et italien est aussi contagieuse en termes de pessimisme pour les populations que le virus lui-même. en temps de crise, aucun administré au monde ne souhaite voir son dirigeant fragilisé et ne même pas pouvoir dissimuler son sentiment d’impuissance. C’est comme aller voir son psy qui s’assied sur le divan et qui commence à vous parler de ses propres problèmes. Le virus est ainsi devenu sinon un facteur de remise en cause, du moins de relativisation de la puissance. Quand la pandémie fera ses adieux, il va falloir se questionner sur les nouveaux instruments de mesure de la puissance des États. il ne faudra surtout plus confondre le capteur et la mesure.
La revanche probable de l’idéalisme sur le réalisme
Le réalisme en théorie des relations internationales signifie qu’on mette les rapports de forces et de domination au cœur de l’analyse et qu’on parte de la réalité factuelle pour analyser le monde. Inspirée par le Prince de machiavel et le Léviathan de Hobbes, cette perspective théorique réaliste envisage le monde tel qu’il est, plutôt que tel qu’on aurait souhaité qu’il soit. L’idéalisme est le contraire du réalisme, il investit la réflexion de principes moraux et éthiques et prescrits des comportements responsables, avec des lignes directrices qui engagent l’ensemble des humains. La première perspective, celle réaliste, semblait définitivement s’imposer dans les théories des relations internationales, tentant d’expliquer, voire de justifier les déploiements de forces des plus forts et la soumission volontaire ou la contrainte obligatoire des plus faibles à se soumettre. et tant pis si la démocratie pouvait en souffrir et révéler aussi abruptement ses limites. Après tout, ce n’est pas le meilleur des systèmes, c’est le pire à l’exception de tous les autres comme l’affirmait Churchill. Aujourd’hui, dans la situation qu’impose la CoVid-19 (le virus le plus démocratique au monde), jamais l’on a autant parlé de tolérance, de solidarité, d’humanisme, de compassion, de prière, d’amour. La sémantique est en soi révélatrice d’un tournant dans les « rapports entres États » qui céderaient de plus en plus la place aux « rapports entre humains » comme nouveau paradigme de base de l’analyse des relations internationales. Une nouvelle chance pour l’Onu de retrouver une crédibilité perdue en prenant le volant d’une mécanique collective qui rappelle la profonde mais extrême fragilité de l’être humain et de ses institutions étatiques pourtant jalouses d’une souveraineté prise en détresse par un ennemi si infiniment petit qu’il est invisible, mais si puissamment redoutable qu’il traverse les frontières sans montrer son visa cacheté sur un passeport individualisé.
Le paradoxe troublant de l’hyperpuissance chinoise
« Usine du monde », « future puissance », « miracle économique », les mots ne sont jamais assez forts pour souligner l’entrée progressive du pays de mao dans le rang des pays hyperpuissants. il y a quelques années, c’est une banque américaine (Goldmann Sachs) qui prédisait la première place de la Chine dans l’économie mondiale. un autre l’aurait dit qu’on ne l’aurait pas cru. La réalité est que l’« empire chinois » étend ses tentacules, investissant, construisant partout où l’opportunité s’ouvre. Le paradoxe est qu’elle n’exporte pas seulement ses marchandises, sa matière grise et sa main-d’œuvre, elle est capable aussi, sans le vouloir, de distiller des virus au-delà de ses frontières. Quand le CoVid-19 a commencé à sévir dans son territoire, le reste du monde a compati, envisageant même son probable effondrement économique, mais rares sont ceux qui ont osé fermer leurs frontières aux Chinois, de peur de voir leurs propres unités industrielles s’effondrer parce que largement dépendantes des produits chinois. Aujourd’hui que la Chine a fini de réduire à presque néant la propagation du virus, elle reprend sans tambours ni trompette sa conquête du monde, proposant son expertise et son aide aux autres, en envisageant sereinement la responsabilité qui lui incombera demain de venir au secours de l’économie mondiale ébranlée par le « virus chinois ». Que de paradoxes inépuisables même par l’analyse la plus sophistiquée!
Le déclin de l’hyperpuissance américaine face à un ennemi imprévisible
Ces dernières années, et ce depuis la fin des deux dernières guerres mondiales, il y a une course folle à l’armement. Les États les plus forts se sont dotés des armes de destruction et de dissuasion massive et se sont mis d’accord pour surveiller les autres pays les plus faibles afin d’éviter que ces derniers se dotent de l’arme nucléaire qui les mettrait sur le même piédestal que les plus forts, sans qu’on ne sache s’ils seraient assez responsables pour s’en servir avec des pincettes voire de ne jamais les utiliser. Les relations américano-iraniennes en sont le symbole parfait. La réalité aujourd’hui est que cet arsenal militaire si impressionnant est impuissant face au CoVid-19. Les milliards de dollars dépensés en armement, les sommes colossales investies dans l’intelligence sécuritaire, les stocks d’armes de dissuasion et de destruction, la masse d’argent et d’or cadenassée dans les fiducies et coffres forts de Wall-Steet, sont tous aujourd’hui inopérants pour faire face à la pandémie. Les scénarios les plus optimistes annoncent des centaines de milliers de morts probables et finissent par avoir un effet sur la façon dont évolue la sémantique du président dans ses commentaires quotidiens sur la crise. Le président américain ne parle plus avec une certaine arrogance du « virus chinois », son vocabulaire est choisi avec plus d’humilité, sans doute avisé par ses conseillers qu’il pourrait avoir recours demain à l’expertise médicale chinoise ou avoir à commander des masques de protection à l’ « ennemi chinois »
Santé versus économie : le nouveau pouvoir des experts dans un nouvel ordre mondial à réinventer.
Les Etats-Unis qui trônent au sommet des nations les plus militarisées est le pays le plus touché par la propagation du virus CoVid-19. Le pays est devenu l’épicentre de l’épidémie du coronavirus. mais, face à cet ennemi si puissant, les cerveaux et les stratèges les plus sollicités en termes de solutions probables ne sont pas les « génies » du Pentagone.
Les plus sollicités sont les virologues et autres infectiologues qui tentent dans un langage ésotérique propre à la science d’expliquer à un président obsédé par l’hyperpuissance que la santé passe avant l’économie, et faute de ne s’être pas assez occupé de la première, ses faiblesses auront pour conséquence d’engloutir les avantages de la seconde. Lorsque le président prévoit d’assouplir les mesures de confinement ou de rouvrir les frontières pour ne pas acter le déclin inévitable de l’économie américaine, les médecins lui répondent : « nous ne sommes pas prêts de prendre soin de ce qui s’en vient…donc, pour le moment, nous avons besoin que les gens restent à la maison et nous devons aplanir cette courbe ».
Le désir de puissance affirmé, la volonté de rester le « gendarme du monde » et le « poumon économique de la mondialisation libérale », tout cela passe comme menu fretin face à la vague déferlante d’un virus qui ne fait pas de discrimination entre riches et pauvres. La parole de l’expert au cœur du nouvel ordre mondial induit par la pandémie du CoVid-19, nouvel avatar d’une mondialisation à rebours de son moteur principal, le capitalisme, c’est peut-être l’une des plus grandes leçons à tirer de façon provisoire de cette crise, elle porte la signature de l’épidémiologiste de la Connel School of Nursing du Boston College, Nadia Abuelezam : « Les virus ne respectent pas les frontières. Les virus ne font pas de discrimination. Les virus veulent juste trouver un autre corps où ils peuvent se répliquer. et je pense que c’est quelque chose à garder à l’esprit ». il serait toutefois naïf de penser que l’expertise médicale s’exprime d’une seule voix dans une parfaite convergence scientifique. Les plus iconoclastes comme le professeur Raoult de Marseille et les plus pragmatiques comme le docteur Seydi de l’hôpital Fann de Dakar prescriront l’usage de la chloroquine à leurs patients atteints du coronavirus, qu’importe pour eux les calculs intéressés sur les éventuelles retombées économiques néfastes de leurs positions présentes sur la future commercialisation d’un potentiel vaccin. Les autres plus nombreux, accusés d’être « prisonniers » ou « complices » du système en appelleront à la prudence sur l’usage de ce « médicament des pauvres » au plus grand plaisir des multinationales pharmaceutiques « battant pavillon » Oms ou labélisées Omc. Tant que les uns ne menacent pas de mort les autres, ça va pour la santé des esprits, de la liberté de penser et la qualité de la respiration du débat démocratique : « à chaque époque, écrivait Margueritte Yourcenar dans Archives du Nord, il est des gens qui ne pensent pas comme tout le monde, c’est-à-dire, qui ne pensent pas comme ceux qui ne pensent pas ». enfin, le confinement forcé nous amène à nous rendre compte qu’il y a plein de choses non essentielles que nous faisons tous les jours, qui nous prennent beaucoup de temps et dont on pourrait se passer sans conséquence. Sans compter les gains pour la qualité de l’air que nous respirons tous les jours et la consolidation du lien familial et social paradoxalement rendue possible par la distanciation sociale.
Ndiaga Loum (Ph.D),
juriste-politologue,
professeur titulaire, UQO
Titulaire de la Chaire Senghor de la Francophonie
Responsable du programme de doctorat en sciences sociales appliquées