LE CRI DU CŒUR DES PARENTS D'ÉTUDIANTS SÉNÉGALAIS CONFINÉS À WUHAN
"On ne peut pas comprendre qu'un chef de l'État s'adresse à la nation pour dire que la République n'a pas les moyens de rapatrier 13 étudiants. Cela nous a fait un choc terrible"
Les proches des 13 étudiants sénégalais confinés dans la ville chinoise de Wuhan, épicentre de l'épidémie de coronavirus, ont tenu mercredi 5 février une conférence de presse à Dakar pour demander leur retour immédiat.
Les parents de 13 étudiants sénégalais confinés à Wuhan, en Chine, ont lancé un « cri du cœur ». Le président Macky Sall a déclaré –ce lundi 3 février- que la question du rapatriement n’était « pas simple », que le Sénégal n’avait « pas les moyens » de les faire rentrer et de les prendre en charge en toute sécurité, en évoquant « une logistique hors de portée ». Une déclaration qui suscite l’incompréhension des familles des étudiants. Réunis en collectif, ils ont tenu une conférence de presse mercredi à Dakar, pour demander leur retour immédiat.
El Hadj Malick Coulibaly ne quitte pas son téléphone, et garde un œil sur l’application WhatsApp. Son fils Younouss étudie à Wuhan depuis 2 ans, en génie informatique : « On communique tous les jours. Chaque matin je l'appelle. Il me dit : "le truc devient de plus en plus difficile" ».
Le collectif se dit « meurtri et amer » après la déclaration du président. Abdoulaye Sall, père d’un étudiant en génie civil à Wuhan « On ne peut pas comprendre qu'un chef de l'État s'adresse à la nation pour dire que la République n'a pas les moyens de rapatrier 13 étudiants. Cela nous a fait un choc terrible. Nous nous sommes réunis avec le secrétaire d'État chargé des Sénégalais de l'extérieur qui nous a fait que des promesses vides "nous allons mettre en place une cellule..." Ce n'est pas ce que nous demandons ».
Les familles des étudiants rappellent la bonne gestion par le Sénégal de l’épidémie Ebola. Mandiaye Kane avait conseillé à son petit frère d’aller étudier à Wuhan « Monsieur le président de la République Macky Sall, on vous demande solennellement, si c'était votre fils qu'alliez-vous faire ? J'ai mon fils qui est au fond du trou, je lui tourne le dos. Je ne peux pas... "au revoir bye-bye"... C'est inacceptable... ».
Très ému, Mandiaye Kane ne peut pas terminer sa phrase. De son côté le ministre de la Santé appelle à ne pas « galvauder » les propos du chef de l’État, et répond que « le Sénégal ne dispose pas à ce jour d’un dispositif sécuritaire et sanitaire pour ramener les étudiants sénégalais ».
MAMADOU NIANG, CANDIDAT AUX MUNICIPALES FRANÇAISES
L’ancien champion de France avec l’Olympique de Marseille sera sur la liste de La République en marche dans les 15e et 16e arrondissements de Marseille
La République en Marche et l’OM, une histoire d’amour qui se confirme. L’ancien capitaine et champion de France 2010 avec l' Olympique de Marseille, Mamadou Niang, est candidat aux élections municipales de Marseille pour LREM aux côtés d’Yvon Berland. Il se présentera dans les 15e et 16 arrondissements de Marseille, sur la liste de Saïd Ahamada. « Je me mets au service d’Yvon Berland et de la population Marseillaise avec l’envie de changer les choses dans cette ville qui a énormément de besoins. Je partage les mêmes idées qu’Yvon [Berland] et Saïd [Ahamada], et cette envie de faire bouger les choses dans le bon sens », confie-t-il à 20 Minutes.
Un joli « coup » de la part de LREM tant Mamadou Niang est un symbole de l’Olympique de Marseille, et plus largement de la ville. Mais Yvon Berland veut dépasser l’image de footballeur de « Mamad », comme il l’appelle, tout en ayant conscience de l’atout qu’il peut représenter. « C’est une grande figure et capitaine de l’OM, ça compte à Marseille. Mais ce qui est encore plus important c’est qu’on a quelqu’un qui, au-delà du football dans sa carrière, s’est impliqué comme citoyen dans le monde associatif avec un travail important dans certains arrondissements de la ville. Finalement, c’est tout autant le citoyen engagé qui apporte sa notoriété à la cité, que le footballeur qu’on veut mettre en évidence », considère-t-il.
« J’ai besoin de discuter avec toute la ville »
Fort de cet engagement, et de cette aura, Mamadou Niang va poursuivre la démarche qu’il a déjà engagée en tant que directeur sportif de l’Athletico de Marseille, un poste qu’il conserve parallèlement à cette nouvelle bataille. « Quand j’étais footballeur, et depuis que j’ai arrêté, je fais de la politique. Pour moi, c’est aider les gens, voir ce dont ils ont besoin et, à ma petite échelle, essayer d’aider les gens. C’est ce qu’on fait avec l’Athletico. On a pas mal de gamins qui sont issus des quartiers en difficulté, mais on les aide à sortir de ce contexte et à se donner un avenir. Je veux aller à leur rencontre, discuter avec eux, les inciter à s’inscrire sur les listes électorales, et à aller voter. S’ils ne votent pas, ce n’est pas parce qu’ils n’ont pas envie, c’est parce qu’ils ne sont au courant de rien. Mais je ne vais pas rester sur mon secteur, j’ai besoin de discuter avec toute la ville », avance l’ancien attaquant.
Saïd Ahamada, tête de liste sur le secteur et député des quartiers Nord, est persuadé que ces qualités permettront de ramener des citoyens vers la politique et de battre le Rassemblement national, déjà à la tête des 13e et 14e arrondissements. « Ça peut être un symbole fort pour toutes celles et ceux qui sont dans ces territoires et qui ont envie que la ville change. Qu’ils se disent "OK, moi aussi je peux le faire, moi aussi je peux m’engager. Mamad s’est engagé, Saïd s’est engagé, Yvon s’engage, pourquoi pas moi ?" C’est ce qu’on a envie de réveiller dans cette ville, parce qu’on n’arrivera pas à la changer seuls », souhaite-t-il.
Un dîner avec Emmanuel Macron
L’engagement de Mamadou Niang est né lors d’un dîner avec Emmanuel Macron, grand fan de l’OM et très attentif à la situation marseillaise. « Au cours d’un dîner, il m’avait donné la parole, il m’avait laissé rester moi-même, dire les choses avec mes mots. On a pu discuter des problèmes qu’il y avait à Marseille et c’est ce qui m’avait plu. Par la suite, on s’est rencontrés avec Yvon, on a beaucoup discuté et il s’est avéré qu’on partageait les mêmes idées », relate-t-il.
Comme le grand sportif, et le grand gagnant qu’il est, il sait quelles compétences mobiliser. « Je viens avec toute mon énergie pour le futur pour cette campagne. Je suis quelqu’un qui croit en moi, je vais donner mon maximum pour aller vers les gens, et leur faire prendre conscience qu’il est important d’aller voter pour faire évoluer les choses. Marseille a besoin de changement, on le sait tous, mais personne ne fait quoi que ce soit. Aujourd’hui, Yvon est là pour faire changer les choses, mais je suis là pour le faire aussi. Saïd y travaille depuis des années. A nous trois on va déjouer les pronostics. On est là pour gagner. » « Il ne fera pas de la figuration », prévient Saïd Ahamada.
par Oumou Ndiaye
MOUSTAPHA CISSE LO, UN POISON ERRANT
Le contexte politique national actuel est marqué par des excès de langage et de multiples formes de violence verbale qui avilissent l’espace d’un débat public où devraient prévaloir des idées et des projets en faveur du Sénégal
Le contexte politique national actuel est marqué par des excès de langage et de multiples formes de violence verbale qui avilissent l’espace d’un débat public où devraient prévaloir des idées et des projets en faveur du Sénégal. Cette violence verbale est entretenue par des gens techniquement incompétents et mécontents à l’image de ce «poison errant», à la mémoire subitement courte. As-tu déjà oublié les conditions dans lesquelles tu as été élu à la présidence de la CEDEAO, élection immédiatement suivie de frasques.
Tu as toujours voulu être président de l’Assemblée nationale et tu ne le seras jamais. Le président Moustapha Niasse mérite d’être à la tête de cette institution. Car, il a le profil qui sied, une base politique solide et un parti politique respecté, bien implanté aux niveaux national et international. Or, toi, tu ne fais qu’errer de commune en commune et de département en département. Tu as été chassé de Mbacké, car tu es un poison. Tu n’as aucune base politique et tu ne seras jamais Maire. Ton verbe excessif a fait perdre Bennoo Bokk Yaakaar, notamment dans deux localités.
C’est pourquoi, tu ne supportes pas le président Moustapha Niasse. En réalité, tu le détestes et tu le dis partout. A cause de la politique, un homme d’Etat de l’envergure du président Moustapha Niasse, techniquement compétent et politiquement assis est la cible d’un rancunier haineux, d’un ingrat et un incompétent comme toi, alors qu’il t’a beaucoup et toujours soutenu.
Mais tu ignores même les limites de tes prérogatives. Tant pis pour toi.
Désormais, nous n’accepterons plus que notre leader soit attaqué par un frustré comme toi. Sache que tu as en face de toi des jeunes beaucoup plus déterminés et que le combat vient de démarrer. Tu ne crois ni à Son Excellence le président Macky Sall, ni à la défense des intérêts des Sénégalais. Car, tu ne fais que t’enrichir sur le dos des pauvres paysans, toi le démagogue impénitent.
Moustapha Niasse n’a jamais cédé au chantage et tu n’arriveras pas à constituer l’exception. Il reste sur les hauteurs, loin de l’hypocrisie et des sentiments négatifs qui tuent ceux qui les portent.
Les militantes et militants de l’AFP réitèrent leur engagement derrière le président Moustapha Niasse et l’accompagneront dans tous ses combats politiques pour le triomphe du Sénégal.
Oumou Ndiaye est Secrétaire générale deL’Alliance Nationale des élèves et étudiantsPour le Progrès (ANEEP)
UNE CAN TOUS LES 4 ANS BEAUCOUP PLUS RENTABLE, EST-CE CRÉDIBLE ?
Pierre Rondeau, économiste du sport, juge « fragile » la proposition de Gianni Infantino de multiplier par quatre ou par six les revenus de la CAN en l’organisant tous les quatre ans. Entretien
Pierre Rondeau, économiste du sport et consultant pour le groupe RMC Sport, juge « fragile » deux propositions fortes formulées par Gianni Infantino pour booster la compétitivité du football africain : multiplier par quatre ou par six les revenus de la Coupe d’Afrique des nations en l’organisant tous les quatre ans, et faire bâtir des infrastructures (stades, en tête) dans chacun des pays du continent via 1 milliard de dollars. Entretien
RFI : Pierre Rondeau, le président de la Fédération Internationale de football (FIFA), Gianni Infantino, a invité la CAF à organiser la Coupe d’Afrique des nations (CAN) tous les quatre ans au lieu de tous les deux ans. Le patron de la FIFA a assuré que les revenus d’une CAN tous les quatre ans pouvaient être multipliés par quatre voire par six par rapport à une édition organisée tous les deux ans. Cela vous paraît-il possible ?
Pierre Rondeau : Il y a plusieurs éléments à prendre en compte lorsqu’on s’interroge sur ce quatre à six fois plus de revenus. Lorsqu’on fait un comparatif avec les grandes compétitions sportives internationales, notamment en football comme la Coupe du monde ou l’Euro (qui ont lieu tous les quatre ans), leurs revenus sont bien plus importants que ceux d’une Coupe d’Afrique des nations ayant lieu tous les deux ans. Si je fais un simple comparatif, la CAN, c’est 45 à 50 millions de dollars sur une édition alors que l’Euro 2016 en France […], c’est 1,93 milliard d’euros de chiffre d’affaires pour l’UEFA (la confédération européenne de football, Ndlr). On est sur une différence colossale. Cela autorise à se dire que, oui, si on imposait une rareté avec une CAN tous les quatre ans, on pourrait s’attendre à ce qu’il y ait une augmentation assez importante des revenus et du chiffre d’affaires.
Maintenant, toute la question est de savoir si cette augmentation serait uniquement due à un événement organisé tous les quatre ans, ayant une visibilité plus importante, une meilleure organisation, une intensité sportive plus importante. Il est très difficile d’estimer que, parce que la compétition va avoir lieu tous les quatre ans, on pourra augmenter les revenus quatre à six fois. Ce qui est certain, c’est que la CAN a du retard au niveau de son chiffrage économique. Mais la seule réponse qui consiste à dire « organisons la CAN tous les quatre ans au lieu de tous les deux ans pour multiplier par quatre ou par six les revenus », ça me paraît assez fragile et assez faible comme argumentation.
Connaît-on un exemple de grand événement sportif organisé moins souvent et dont les revenus ont explosé ?
Quand on regarde l’historique des grandes compétitions sportives, c’est plutôt l’inverse qui s’est opéré. C’est plutôt en limitant le temps d’attente entre deux événements qu’on a pu augmenter les gains médiatiques et économiques.
L’exemple le plus récent, vient de la FIFA. Elle, qui demande à ce que la CAN ait lieu tous les quatre ans, a comme projet, comme souhait, que la Coupe du monde féminine ait lieu tous les deux ans au lieu de tous les quatre ans, afin d’augmenter sa médiatisation et la popularité du foot féminin. […]
De la même manière, les Jeux olympiques d’été et d’hiver avaient lieu tous les quatre ans, la même année, jusqu’en 1992. Puis, le CIO, pour tenter d’augmenter ses gains économiques, a réduit ce temps d’attente de quatre ans à deux ans, en ayant deux ans entre les JO d’été et les JO d’hiver.
L’argument qui consiste donc à dire qu’accroire le temps d’attente […] afin d’augmenter les recettes d’exploitation, de médiatisation, les recettes globales, me semble encore une fois assez fragile. L’histoire montrerait plutôt que c’est en réduisant le temps d’attente de quatre à deux ans qu’on espère augmenter les rentrées et les recettes économiques.
Gianni Infantino a annoncé son intention de mobiliser 1 milliard de dollars (à travers des organismes de financement et des mécènes) pour que chacun des 54 pays d’Afrique dispose d’au moins un stade aux standards internationaux et/ou d’un centre technique d’excellence. Peut-on vraiment faire bâtir autant d’infrastructures sur le continent avec un milliard de dollars ?
[…] Cette proposition d’un milliard pour faire bâtir au moins un grand stade dans tant de pays, ça me paraît assez léger. Je ne pense pas que le président de la FIFA veuille faire construire 54 stades, avec un milliard. Si on reprend les coûts en vigueur, en tout cas dans les pays occidentaux, pour un stade aux normes internationales, il faut compter entre 100 et 500 millions d’euros par enceinte. Et je ne parle même pas du milliard utilisé pour le stade du club anglais Tottenham !
Même un stade low cost aux normes internationales, ça coûte 100, 200 ou 300 millions d’euros. Un milliard, ce serait juste assez pour construire dix stades. […] Donc, il faudrait trouver des sources de financement ailleurs, privées peut-être, pour faire construire dans les quarante autres pays africains.
Afficher une somme aussi importante tout en l’associant à une telle promesse […] me semble extrêmement fragile. […] Ou alors, ce serait considéré que, les salaires africains sont si bas et les ouvriers africains si mal payés, qu'on peut faire bâtir des stades de football en Afrique à 10, 15 ou 20 millions de dollars.
Mohamed El Sherei est l’ancien Directeur financier de la Confédération africaine de football (CAF). Il a été licencié en juillet 2019 pour « fautes graves ». Depuis, l’Égyptien ne cesse d’assurer que son ex-employeur est à la dérive, notamment d’un point de vue budgétaire. « Si la CAN a lieu tous les quatre ans, la CAF qui est déjà détruite va être un cadavre, assure-t-il. Est-ce que la CAF peut soutenir ses dépenses en l’état actuel avec une CAN tous les quatre ans ? De mon point de vue, c’est impossible. Sauf si Gianni Infatino garantit le fait de mettre à la CAF le milliard de dollars dont il a parlé pour l’évolution du football africain ». Enfin, il tire la sonnette d’alarme, assurant que les réserves financières réelles de l’institution se montent en fait à 50 ou 55 million dollars. L’autre moitié de l’argent de la CAF (une quarantaine de millions de dollars) proviennent du programme de développement financé par la Fédération internationale, FIFA Forward.
CORONAVIRUS : A DAKAR, L'INSTITUT PASTEUR ORGANISE LA RIPOSTE AFRICAINE
Les représentants de laboratoires de quinze pays du continent se retrouvent dans l’établissement sénégalais pour améliorer leurs outils de diagnostic
Le Monde Afrique |
Marie Lechapelays |
Publication 05/02/2020
Les ressortissants sénégalais ne seront « pour l’instant » pas rapatriés de la ville chinoise de Wuhan, épicentre de l’épidémie de coronavirus 2019-nCoV. C’est ce qu’a annoncé le président Macky Sall, lundi 3 février, évoquant « une logistique tout à fait hors de portée du Sénégal ». Mais si le pays semble dépassé par rapport à la Mauritanie, au Maroc ou à l’Algérie, qui ont commencé à faire revenir leurs ressortissants, la capitale sénégalaise est en fait le lieu où la riposte scientifique africaine s’organise.
De jeudi à samedi, l’Institut Pasteur de Dakar (IPD) recevra en effet les représentants de laboratoires de quinze pays africains pour un atelier de formation continental. Ces laboratoires ont été choisis en fonction de leur niveau de performance, mais aussi selon une logique régionale : trois du Maghreb (Egypte, Maroc, Tunisie), autant d’Afrique de l’Est (Ethiopie, Kenya, Ouganda) et d’Afrique centrale (Cameroun, Gabon, République démocratique du Congo), cinq d’Afrique de l’Ouest (Côte d’Ivoire, Gambie, Ghana, Nigeria, Sénégal) et un seul d’Afrique australe (Zambie).
Reconnu pour son expertise en virologie et notamment dans les virus épidémiologiques, l’IPD a été missionné par le Centre africain de prévention et de lutte contre les maladies (CDC). Basée à Addis-Abeba, cette agence qui dépend de l’Union africaine soutient les pays du continent dans la surveillance des maladies infectieuses et l’intervention d’urgence.
« Nous devons nous adapter »
Et urgence il y a, car si aucun pays africain ne figure parmi ceux infectés par le coronavirus, « ce n’est pas parce que personne n’est contaminé, mais parce que presque personne ne sait le détecter sur le continent », assure Amadou Alpha Sall, administrateur général de l’IPD. En Afrique, seuls deux établissements sont capables de diagnostiquer le coronavirus par l’analyse d’échantillons : l’Institut national des maladies transmissibles (NICD), en Afrique du Sud, et l’IPD.
L’atelier organisé à Dakar doit permettre de former les personnels des laboratoires dans la reconnaissance du coronavirus 2019-nCoV, afin qu’ils soient capables de mener des diagnostics dans leurs établissements. « Dans chaque région, il y a des laboratoires de référence pour l’OMS [Organisation mondiale de la santé].Mais nous devons nous assurer qu’ils sont correctement outillés en termes de compétences et de capacités », explique Amadou Alpha Sall.En guise de test, les centres recevront une série d’échantillons et devront retrouver dans lequel se trouve le virus qui se répand actuellement sur la planète.
« L’essentiel, c’est d’améliorer les outils de diagnostic », insiste le docteur Ndongo Dia, responsable du centre de référence pour la grippe et autres virus respiratoires de l’IPD, chargé de l’organisation de l’atelier : « Nous travaillons déjà sur des coronavirus comme le MERS [syndrome respiratoire du Moyen-Orient], c’est notre travail quotidien. Mais le 2019-nCoV étant nouveau, nous devons nous adapter. »
Pas de course au vaccin
Le centre ne se lancera pas dans la course au vaccin. En revanche, « nous collaborerons probablement avec les groupes spécialisés dans ces travaux », ajoute le chercheur. Pour l’épidémie d’Ebola, une partie de l’équipe du pôle de virologie de l’IPD avait été envoyée en Guinée, où siège le bureau de l’OMS pour l’Afrique, afin de contribuer à l’évaluation du vaccin développé.
Pour l’IPD, février sera chargé. L’Organisation ouest-africaine de la santé (OOAS) compte sur l’établissement dakarois pour organiser une formation similaire pour les quinze pays de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) d’ici à la fin du mois. La riposte doit être des plus rapides, car les échanges entre l’Afrique de l’Ouest et la Chine, ainsi qu’avec des pays déjà touchés comme la France, sont très importants.
« On s’attend à ce que le virus arrive sur le continent, car l’expérience montre que les infections respiratoires de cette nature se diffusent très vite », affirme le docteur Ousmane Faye, responsable du pôle virologie. Des échantillons de cas suspects ont déjà été envoyés à l’IPD par des pays voisins, mais pour l’heure, aucun n’a été contrôlé positif au coronavirus 2019-nCoV.
LA CHRONIQUE HEBDO D'ELGAS
FATIMATA DIALLO & BITY KEBE, LETTRES JUMELLES
EXCLUSIF SENEPLUS - Professeures de Lettres, écrivaines, féministes, amies voire complices, elles présentent tous les traits de la gémellité littéraire. Un tandem au cœur d’une littérature nationale en quête de renouveau - INVENTAIRE DES IDOLES
Professeures de Lettres, écrivaines, lectrices, féministes, dakaroises, mères de famille, amies voire complices, Bity Kebe & Fatimata Diallo présentent tous les traits de la gémellité littéraire. Un tandem au cœur d’une littérature nationale en quête de renouveau. Portrait croisé.
Au numéro 10 de VDN (Voie dégagée Nord) à Dakar, la façade du local de la maison d’édition l’Harmattan Sénégal est discrète. Sur l’auguste avenue qui fend la capitale en deux, on voit à peine les lettres vertes capitales orner la devanture sur une pâle peinture blanche. Au rez-de-chaussée, une fois le seuil franchi, le rayon des parutions récentes, les stocks de bouquins, un comptoir discret, donnent à la librairie des airs rustiques. Une fois dedans, on est saisi par la profusion et la vitalité productive de la littérature sénégalaise dont l’Harmattan Sénégal, non sans essuyer des critiques assassines, s’est fait le moteur et le catalyseur. Au premier étage, comme salle témoin de cette nouvelle vie des lettres nationales, une pièce où beaucoup de cérémonies de présentations de livres prennent place, comme cet après-midi d’avril 2019, où celle qui est l’affiche est une romancière qui vient d’offrir au public, un roman remarqué, Des cris sous la peau, publié aux éditions Presses Panafricaines en juin 2018. Fatimata Diallo Ba est presque noyée dans l’effervescence de son évènement, qui a rassemblé une partie du gotha des lettres locales : entre autres Pape Samba Kane écrivain, Kibili Demba Cissokho, journaliste culturel, Abdoulaye Diallo, docteur en littérature et boss de la maison Harmattan Sénégal, sont de la partie. Connaissances et anonymes garnissent aussi l’affluence. Dans le public, très endimanché, l’évènement ne manque pas de drainer une certaine solennité, et sur la scène ont déjà pris place les acteurs du jour qui doivent débattre du livre. Les choses se font en grand comme le veut la tradition des séances de lancement, au risque d’une atmosphère parfois un peu guindée. Un pupitre est dressé d’où le maître de cérémonie, à la manière d’une réunion politique, déroule le menu. Se succède ensuite série d’intervenants. Fatimata Diallo est en retrait. Sur son visage, la vedette du jour alterne des moues de pudeurs et de gratitude, habillée dans la majesté simple d’une tunique sénégalaise jaune et d’un foulard assorti. Elle scrute la salle, salue, congratule, du haut de ses 50 ans révolus, avec son visage sérieux où perce une joie notable.
Livres de femmes « empêchées »
Les avis sur ce livre ont été unanimes ou presque. Des échos de la rencontre le confirment, où on salue cette écriture visuelle, et la grande pondération dans la dénonciation de la condition des femmes. Des cris sous la peau est en effet un livre qui, sous de fausses apparences poétiques, glisse immanquablement dans l’abîme. On rencontre les tourments d’une « petite fille de 45 ans » qui tient la narration, le drame de sa cousine Arame, la rétrospection dans le drame fondateur, la pénétration presque surnaturelle avec un personnage venu des âges qui se nomme Saran. Tout à la fois féminin et féministe, le texte charrie une grande violence, même si – miracle - il ne tombe pas dans le précipice. L’écriture campe les paysages extérieurs comme intérieurs, dresse la psychologie des personnages, tous frappés par des malédictions indicibles. Roman de femmes, où les rares apparitions masculines sont minorées ou anonymes, il prend la société par le col, pour la forcer à voir comment la destruction des corps et des esprits peut être causée par le viol. Un traumatisme fil conducteur sourd, progressif et épilogue du livre. En période de procès de la domination masculine, l’art du récit fournit quelques pièces à convictions supplémentaires, dans une société conservatrice où la femme paye un double tribut, celui de la misère des corps et des âmes. L’intrigue est lente à être percée à jour, et tout au long des 150 pages ou presque, c’est le roman des vies volées. La violence sociale étouffée émerge comme un cri libérateur. La tentation est grande de dresser un parallèle entre cette « fille de 45 ans », et l’autrice d’une cinquantaine d’année. Elle balaie pourtant : « ce n’est pas elle, mais son avatar ». Des éléments biographiques ? « Oui », comme toujours. Mais ce qui a déclenché l’écriture de ce livre, qui a séduit jusqu’au jury du prix Les Afriques, où il a figuré sur la liste des sélectionnés, c’est un épisode récent, d’apologie du viol dont s’est rendu coupable un chroniqueur très écouté de la place dakaroise. Eprouvée par cette violence, la romancière agrège diverses expériences, pour expulser ce « cri » qui la démangeait.
Chez Presses panafricaines, maison canadienne fondée par des expatriés sénégalais, c’est comme si on s’était donné le mot. Quelques mois plus tôt, en janvier 2018, paraissait un autre ouvrage où on retrouve sinon les mêmes tonalités, au moins la même fibre du cri et le souci de l’esthétique. Mes vicissitudes, signé Bity Kebe, renoue avec un art poétique qui plante la plume dans le drame des amours contrariées, sans rien laisser des sentiments annexes, comme la gratitude, l’hommage, l’amitié. Le recueil de Bity Kebe, divisé en six parties, étend l’horizon de Fatimata Diallo et celui du roman. Dans ces tableaux dakarois, plane l’ombre de Baudelaire dont elle cite de mémoire les passages quand on pointe des affinités. Avec la souplesse des vers, l’incursion dans les calligrammes, une puissance de la simplicité coule le long des pages, où la pudeur et une certaine élégance viennent empêcher l’explosion finale. Au cœur du texte, la condition féminine, l’éloge de la femme, la thérapie face aux drames de la vie, tout se bouscule dans ces vers où le jeu avec la langue, marque une certaine maîtrise des petites subtilités linguistiques, au risque même de paraître parfois, scolaire. Bity Kebe a l’habitude des lettres, inculquées très tôt par un père comptable, avec une grande inclination littéraire et journalistique. Lire, elle en fait son hobby, sa routine, jusqu’à devenir une régulière de l’émission de TV Impressions de Sada Kane, où elle présente plusieurs ouvrages, ceux de Felwine Sarr notamment, dont elle admire l’œuvre. C’est sur cette scène, avec un visage calme qu’un ouragan ne saurait perturber, que le public sénégalais l’a découverte. Lectrice consciencieuse, elle entre dans les textes avec la minutie nécessaire et l’honneur de la restitution fidèle. Bity Kebe a des élans de grande royale, une pudeur naturelle, inculquée très jeune, un port et une tenue qui inspirent le respect. A 50 ans, la mère de 4 enfants cultive une élégance, celle de la mère sénégalaise marquée par le soin et la grande retenue. Toutes vertus que l’on retrouve dans son livre, au risque parfois d’être tenté, comme lecteur, par la frustration, tant l’on s’imagine, ce que pourrait donner plus d’audace.
Deux livres, accords et à cris
Lire ces deux ouvrages, à un intervalle rapproché, c’est expérimenter une télépathie peu commune, tant les deux livres paraissent avoir été écrit à quatre mains, par le même cœur et la même âme, comme en miroir dans des genres différents. Par leur âge, leurs affinités professionnelles - toutes deux sont professeurs de lettres à Dakar avec plus de 20 ans de métier - par leurs sujets, par une saisissante ressemblance physique et une amitié qui s’est déclarée sur le tard, comme par vocation, les deux femmes présentent tous les traits de la gémellité littéraire, qui dépasse le cadre de la simple intuition. Elles sont des ambassadrices des lettres sénégalaises actuelles, inscrites - à l’instar de Sokhna Benga - dans un calendrier national. Elles disent et perpétuent cette longue fibre présente dans la littérature sénégalaise, dont Mariama Ba fut l’une des pionnières et Fatou Diome, une autre réplique récente. A la tentation de dresser des filiations, les deux femmes ont deux réactions sensiblement différentes face à ces idoles devenues classiques. Bity Kebe a été, jeune lectrice, « choquée » par le Babob Fou de Ken Bugul, par sa liberté de ton, son impudeur, même si, elle a reconsidéré cette ancienne appréciation ; Fatimata Diallo elle, a été « surprise », mais adopte l’inclassable autrice dans ses références. Leurs tempéraments, même si Fatimata a eu la révolte précoce et encore tonique, font d’elles plutôt des héritières d’Aminata Sow Fall, dont la douceur et la componction toute bourgeoise ont créé un genre plus en phase avec l’image de sagesse maternelle. Elles s’en nourrissent, mais cultivent aussi, au milieu de la ressemblance, des trajectoires uniques. Le poids des contraintes, les conditionnements sociaux, pèsent de leur poids sur ces deux femmes mariées, tenues par une obligation de rassurer les inquisiteurs, et qui ne peuvent se permettre, au vu de ce pedigree, de s’autoriser les embardées d’une Ken Bugul ou d’une Fatou Diome chez qui, le cri avec forces et faiblesses mêlées, s’émancipe du qu’en dira-ton. Ce qui forge encore plus leur complicité, c’est que les deux femmes ont publié relativement tard, pour deux férues de lettres, lectrices précoces, qui citent volontiers Senghor et Victor Hugo dans leur panthéon commun. Si elles n’ont pas écrit plus tôt, peut-être la raison se trouve-t-elle dans des parcours atypiques, des contraintes conjugales. La conséquence elle, c’est que leurs livres portent le sceau de la maturité de l’âge mais aussi parfois celui de ses renonciations.
Jumelles précoces et tardives
C’est à Dakar, à la fin des années 60 que les deux femmes voient le jour. Fatimata grandit entre Liberté 5 et Baobab, deux quartiers dakarois. Scolarité sans secousses pour cette jeune fille brillante qui très tôt se révolte contre « l’assassinat des moutons pour la tabaski ». Expérience dont elle garde un souvenir précieux, comme l’annonce d’une vie de bienveillance au service des plus faibles. Cette fille d’enseignants fréquente tôt la bibliothèque, obtient son bac au Lycée Kennedy, une institution réputée de la capitale qui forme l’élite féminine. Elle enchaine avec une prépa en lettres à Poitiers. L’école normale supérieure se refuse à elle, elle est reçue toutefois au CAPES (Certificat d'aptitude au professorat de l'enseignement du second degré) mais un imprévu se dresse sur son chemin : elle n’est pas française et ne peut être titularisée. Elle devient donc professeur contractuelle à l’académie de Paris, dans les prestigieux lycées comme Henry IV où elle enseigne les lettres, étudiées successivement, dans son cursus précédent, à la faculté de Poitiers et ensuite à la Sorbonne. En 99, elle obtient enfin cette nationalité et, bonne joueuse, repasse le CAPES qu’elle revalide, avant d’être affectée à Nanterre, dans les Hauts-de-Seine. Comme contractuelle ou titulaire, elle transmet son savoir pendant plus de 15 ans en France, avant de demander un détachement à Dakar où depuis 2007 elle fait le bonheur des élèves du lycée français Jean Mermoz de Dakar. Ce même lycée, où Bity Kebe fait aussi des piges en 2019, après un parcours bluffant de ressemblance avec celui de Fatimata.
C’est aussi à Dakar que la professeure de Lettres naît, dans la banlieue à Pikine. Elle grandit sous la protection et l’influence de sa grand-mère, quand ses parents vivent eux à HLM Guédiawaye. Elle fréquente l’école Pikine, ensuite le CEM Canada, et le lycée Limamou Laye. En 88, l’année blanche a raison de son Bac. Par un stratagème savant, grâce à une connaissance de la famille, elle finit, avec ses résultats brillants, au lycée Kennedy. Comme un écho primal, les deux femmes manquent à peine de se croiser dans l’institution pour filles. Bity Kebe poursuit en Lettres à Dakar à l’université Cheikh Anta Diop, après avoir hésité entre le Droit, l’Anglais et la Sociologie. Elle décroche sa maîtrise mais suit son mari en France. Son mentor Bassirou Dieng, homme de lettres, lui conseille alors de tenter l’ENS de Dakar. Elle a aussi en vue le métier de journaliste avec le CESTI en ligne de mire. Elle est enceinte pendant la période du concours auquel elle renonce donc, et c’est finalement l’ENS qui la reçoit dans un scénario digne d’un film loufoque : alors que son nom est dans la liste des admis, elle ne le découvre qu’un mois après la rentrée, informée par des amies. Elle en sort avec le CAEM (Certificat d'Aptitude à l'Enseignement moyen), enseigne 10 ans dans son ancien lycée Limamou Laye dans un retour prodigue. Mais la jeune femme se sent incomplète, elle repasse à l’ENS pour décrocher le CAES qui lui permet de monter en grade, soutient un mémoire de DEA. Elle postule ensuite à une thèse à laquelle elle doit partiellement renoncer, à l’affut des dispositions idoines pour réveiller cette ambition. Restée à Dakar, elle n’est pas enchantée par une affectation à Diourbel qui se profile, elle la refuse, risquant ainsi sa place et une radiation. C’est finalement par un savant arrangement qu’elle obtient gain de cause : elle enseigne au Lycée Blaise Diagne. Depuis 2018, elle est formatrice, n’a plus les craies en main, mais ne renonce pas. Elle a un livre à paraître, son deuxième, incessamment sou peu chez Presses Panafricaines.
On s’imagine bien la réaction alors de Bity Kebe, quand Fatimata Diallo lui a proposé d’enseigner à Jean Mermoz en 2019. Elles y travaillent toutes deux désormais, Bity Kebe encadre les élèves en difficulté dans un programme « Mieux réussir ». Un signe ? Pour ces deux femmes, les signes sont se sont multipliés en réalité. C’est curieusement sur Facebook, très récemment, par post interposés, que les deux jumelles se sont mutuellement séduites. Fatimata admire alors « la précision des formules de Bity, et sa grande érudition sur les subtilités de la langue » ; Bity elle, « apprécie le don pour narrer les paysages » de Fatimata. Même virtuelle, l’amitié est scellée. Pour des jumelles, la vraie naissance est tardive, retardée seulement de cinquante années qui ont mûri une affection mutuelle. Elles ont fait leur entrée en littérature en même temps, chez le même éditeur, dans la même collection Soleil d’hiver, et continuent d’écrire cette histoire de la femme au cœur de la littérature, avec chacune une fibre qui fait écho en l’autre et surtout, un grand talent de plume. A Dakar, cette ressemblance commence à s’ébruiter de plus en plus, au-delà du trait physique. Leur regard sur la société sénégalaise est désenchanté mais elles confient leur espoir aux livres. Pourquoi écrire le cruel en le dépouillant, ce vernis d’une langue douce sur un épiderme malade ? Des cris sous la peau, l’image ne dit-elle pas le bâillonnement ? Fatimata plaide « l’intelligence des situations », la volonté de ne pas « heurter », de ne pas donner de la « matière pour les détracteurs de ne pas juger l’œuvre mais la personne ». Bity abonde dans le même sens, elle tient aux « liens de parenté, au tact », et recourt à cette anecdote sur ses frères qui avaient fait preuve de courage pour la protéger d’une agression contre des malfrats entre Niayes et Cambérène quand elle était jeune fille. La « franchise » et la « gratitude » en valeur cardinales, elle les partage avec Fatimata Diallo. Il y a chez elle, naturellement, « une mesure » jusque dans le regard à la fois magnétique et timide, qui n’est pas une fuite lâche, assure-t-elle. Elle parie sur la « force des écrits » pour sédimenter dans la société, dont toutes les deux fustigent le patriarcat.
Références classiques
A part les classiques français du 19e siècle qu’elles citent en chœur, les deux jeunes filles de 50 ans, citent volontiers des écrivains actuels comme lectures enrichissantes. Fatimata évoque Sami Tchak, singulier auteur togolais, même si elle n’a pas toujours aimé son œuvre, Mbougar Sarr et Khalil Diallo dont elle aime beaucoup l’écriture. Bity Kebe dit son admiration pour Felwine Sarr, Fatou Diome, Aminata Sow Fall… Les critiques de leurs livres ne sauraient manquer. Appréciations qui pourraient, légitimement, questionner l’ambition des deux textes dont l’écriture peut paraitre à certains « sirupeuse ». La littérature peut-elle frayer avec la volonté de maintenir certaines pudeurs, sans y perdre la force de son authenticité ? Le compromis n’est-il pas toujours au profit de l’ogre régnant ? Comment dire la vérité, sa vérité, si on doit faire une halte face au tribunal des élégances ? L’appréhension de la réaction du lectorat, ou des proches, n’est-elle pas signe d’autocensure ? La nuance est-elle un moyen temporaire ou l’horizon final, au risque d’être une sagesse de la démission ? Voilà autant de questions que les deux livres éludent partiellement tout en gardant une belle vigueur. Mais ils participent, mutatis mutandis, à l’édification de nouvelles lettres, avec leurs lieux, leurs temps forts, leur habitus, leurs thèmes forts inscrits au cœur du drame social, au cœur du pays et du continent. Fatimata Diallo s’est d’ailleurs un peu plus engagée dans la vulgarisation des activités littéraires d’une institution naissante, très volontariste, la CENE Littéraire. L’association, avec son prix Les Afriques, contribue au rayonnement des lettres africaines, sous la houlette de sa cheffe camerounaise, basée en Suisse, Flore Agnès Nda Zoa. Bity Kebe aide à faire infuser une tradition des livres, grâce à ses nouvelles fonctions et à sa présence à la télé comme chroniqueuse.
C’est sur le plan de la littérature, comme conscience du monde lointain et proche, qu’il s’agit de questionner ces deux livres qui en annoncent d’autres, pour les lire avec l’exigence, la critique, l’intransigeance, dont dépend toute véritable vie littéraire respectable. Au milieu de leur complicité, les deux jumelles divergent pourtant sur une question quand on les pousse dans leurs retranchements. Une question présente seulement en filigrane dans leurs livres : celle de la polygamie. Alors que la jeune génération s’accommode de plus en plus de la polygamie comme en attestent les statistiques affolantes de l’ANSD (Agence nationale de la statistique et de la démographie), les jeunes femmes n’y voyant pas une régression, les deux écrivaines disent elles, leur dégoût de ce fait patriarcal. Chacune cependant à sa manière, comme une métaphore de leur légère différence. Fatimata juge que la polygamie est « une trahison impardonnable » ; le jour où elle se présente dans son couple, elle y met fin déclare-t-elle. Pour Bity, la réaction est plus nuancée, « à son âge » dit-elle, son dégoût, bien que potentiellement réel, n’irait peut-être pas jusqu’à cette « extrémité ». C’est la seule éventualité de nature à séparer ces sœurs presque siamoises dans leurs conceptions. Peut-être un livre à quatre mains sur le sujet, un jour ? Quatre comme le chiffre maudit des droits maritaux de l’homme sur la femme…