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22 juillet 2025
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INCENDIE À LA CATHÉDRALE NOTRE-DAME DE PARIS
Un incendie était en cours lundi en fin de journée à Notre-Dame de Paris, "potentiellement lié" aux travaux de rénovation de l'édifice - Selon le porte-parole de Notre-Dame de Paris, toute la charpente "est en train de brûler"
Un incendie était en cours lundi en fin de journée à Notre-Dame de Paris, "potentiellement lié" aux travaux de rénovation de l'édifice, a-t-on appris auprès des pompiers. Selon le porte-parole de Notre-Dame de Paris, toute la charpente "est en train de brûler".
Le feu a pris dans les combles de la cathédrale ont indiqué les pompiers. Selon le porte-parole de Notre-Dame, l'incendie se serait déclaré aux alentours de 18h50. Selon les informations recueillies par Europe 1, l'île de la Cité, où est située la cathédrale, va être évacuée.
Hidalgo déplore un "terrible incendie". Sur Twitter, la maire de Paris Anne Hidalgo a déploré "un terrible incendie" sur ce site, le plus visité de la capitale. Elle a également demandé aux riverains et badauds de respecter le périmètre de sécurité pour permettre aux pompiers de maîtriser l'incendie.
QUAND LA «TUEUSE DE L’OMBRE» FAIT PARLER D’ELLE
Les spécialistes la surnomment la «tueuse de l’ombre». Parce qu’on ne la voit pas venir jusqu’à ce qu’elle frappe de son coup fatal. Elle, c’est la mort subite due au malaise cardiaque.
Ces derniers temps, elle fait beaucoup parler d’elle au Sénégal, pays qui ne compte que 80 cardiologues pour plus de 15 millions d’habitants.
Un certain temps, la rubrique nécrologie est marquée au Sénégal par la disparition d'hommes ou de femmes de média ou encore des gens de renommé. Des personnalités loin de l’anonymat qui succombent suite à des malaises. Des morts subites dues à des crises cardiaques. Sur la longue liste des illustres victimes de malaises, on peut citer Sidy Lamine Niasse, Ameth Bachir Kounta, Mariane Siva Diop, Me Mbaye Jacques Ndiaye et tout dernièrement Momar Seyni Ndiaye. Des victimes issues du monde du média et du barreau mais aussi de la politique avec Sidya Djiba, Directeur général de l’ANRAC, mais qui viennent également du secteur des arts, à l’image de Cheikh Sidaty Fall alias Pacotille, emporté par un malaise cardiaque, à 35 ans. Itou pour le tambour major Doudou Ndiaye Coumba Rose
24% des adultes hypertendus au Sénégal
La persistance du mal découle d’un certain nombre de facteurs. Il y a notamment le fait qu’au Sénégal, 24% des personnes âgées de plus de 25 ans sont hypertendus. Aussi, les maladies cardio-vasculaires constituent la première cause de mortalité au Sénégal. Du reste, la Société sénégalaise de cardiologie (SOSECAR) informe que si les 24% constituent la moyenne nationale, dans certaines régions, la prévalence peut aller jusqu’à 30 voir 40%. La crise cardiaque, appelée aussi la «tueuse de l’ombre», parce que beaucoup de gens sont hypertendus, sans le savoir, se manifeste très souvent par une complication et un Accident cardiovasculaire (AVC), entre autres. Cette prévalence importante explique les morts subites des personnes qui tombent en faisant des arrêts cardiaques. Et dans la plupart du cas, elles ne sont pas assistées dans de brefs délais et rendent ainsi l’âme, faute d’une prise en charge adéquate. En effet, quand une personne est hypertendue, cela veut dire que c’est un traitement à vie qu’elle doit suivre. On ne connaît pas la cause de l’hypertension artérielle, mais elle peut se compliquer d’AVC, d’insuffisance cardiaque, d’insuffisance rénale, etc. Les cardiopathies étant elles des maladies chroniques à soins coûteux, d'où l'importance de la prévention prônée par les spécialistes.
80 cardiologues pour 15 millions de Sénégalais
Avec une population de plus de 15 millions d’habitants, le Sénégal ne dispose pourtant que de 80 cardiologues. Soit une moyenne d’à peu près un cardiologue pour 150 000 habitants. Certes, le Sénégal fait mieux en la matière que l’Afrique du Sud, le Nigeria et beaucoup d’autres pays africains. Mais il est loin du ratio prôné par l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Cependant, notre pays a réussi à faire en sorte que dans chaque capitale régionale dispose d’au moins un cardiologue, sauf Kolda et Tambacounda. Parce que les cardiologues n’ont pas accepté de s’y installer. Ceci a été rendu possible par la mise en place d’une Ecole de cardiologie qui a déjà reçu 60 médecins en formation venant de 18 pays, dont 32 Sénégalais. Dans la nouvelle promotion de cardiologie qui en compte 14 médecins, il y a 12 Sénégalais. Il faut noter que l’Organisation mondiale de la santé (OMS) estime à 17,7 millions le nombre de décès imputables aux maladies cardio-vasculaires dans le monde. Soit 31% de la mortalité mondiale totale. Parmi ces décès, on estime que 7,4 millions sont dus à une cardiopathie coronarienne et 6,7 millions à un AVC (chiffres 2015).
17,7 millions de décès avant 70 ans dans le monde
Plus des trois quarts des décès liés aux maladies cardiovasculaires interviennent dans des pays à revenu faible ou intermédiaire. Sur les 17 millions de décès, survenant avant l’âge de 70 ans, et liés à des maladies non transmissibles, 82% se produisent dans des pays à revenu faible ou intermédiaire et 37% sont imputables aux maladies cardiovasculaires. Il est possible de prévenir la plupart des maladies cardiovasculaires en s’attaquant aux facteurs de risque comportementaux – tabagisme, mauvaise alimentation et obésité, sédentarité et utilisation nocive de l’alcool – à l’aide de stratégies à l’échelle de la population. Les personnes souffrant de maladies cardiovasculaires ou exposées à un risque élevé de maladies cardiovasculaires (du fait de la présence d’un ou plusieurs facteurs de risques comme l’hypertension, le diabète, l’hyperlipidémie ou une maladie déjà installée) nécessitent une détection précoce et une prise en charge comprenant soutien psychologique et médicaments, selon les besoins.
LA VILLE S’INSURGE CONTRE «L’EXTENSION FONCIERE A OUTRANCE» DE LA CIMENTERIE
Déjà heurtées, les relations entre la ville de Rufisque et la cimenterie de la SOCOCIM risquent d’être mouvementées, dans les jours à venir.
En effet, le maire de la ville et la Convention des Lébous de souche demandent l’envoi d’une mission d’inspection d’Etat, afin de tirer au clair l’extension outrancière sur l’assiette foncière de la part d’un voisin incommodant.
Rufisque étouffe. C’est le cri du cœur des autorités rufisquoises qui tirent la sonnette d’alarme face à l’accaparement de la seule réserve foncière de la ville située à l’extrême Est, sur la partie mitoyenne au pôle urbain de Diamniadio. Pour le maire de la ville, la cimenterie veut passer outre les termes de la convention dans le cadre du périmètre minier. Une concession qui stipule que la SOCOCIM doit exploiter le calcaire en profondeur et indéfiniment. Or, se porte à faux, le maire Daouda Niang, «rien n’autorise à la SOCOCIM à faire des extensions sur des terres qui ne lui appartiennent pas. Elle n’a pas le droit de faire des extensions sur 210 hectares des terres où a été cultivé le Jatropha, alors que la concession va finir en 2024. Pourquoi profiter de l’occasion pour installer une centrale solaire. C’est une preuve manifeste de l’accaparement des terres des rufisquois. Nous ne l’accepterons pas», a-t-il protesté, ce samedi, lors d’un point de presse,
La ville n’exclut pas un recours en justice
«On ne peut pas penser que la SOCOCIM puisse disposer de plus de 17 titres fonciers à moins que Vicat veuille se transformer en promoteur foncier. Nous avons en notre possession les TF et les droits réels. Le président de la République doit bien entendre cette pulsion des populations», a asséné le maire qui, tout de même, se dit disposé à assainir la cohabitation. «Nous voulons discuter avec la SOCOCIM pour que les choses soient raisonnablement réglées pour que l’on puisse mettre nos installations de développement, pour que l’on puisse avoir une cohérence territoriale dans les baux», a-t-il ajouté, sans exclure un recours judiciaire pour amener la cimenterie à respecter son engagement des restituer les terres. Une reconduction de cette «concession tacite» qui permettra d’aménager des espaces pour une «continuité territoriale, urbanisée avec le pôle de Diamniadio», voilà ce que prône la ville de Rufisque. «Il est temps que l’autorité prenne conscience de ce qui se passe sur le foncier à Rufisque. Il y a un silence coupable. Et se taire c’est être coupable», revient à la charge l’édile. «Le Président Macky Sall qui connait bien Rufisque ne doit pas être indifférent par rapport à cette situation catastrophique. Nous voulons un dialogue. Il faut que l’on clarifie les fonctions des uns et des autres», a encore soutenu Daouda Niang.
Rufisque interpelle le chef de l’Etat pour une mission de l’IGE
«Il faut une enquête en profondeur pour apporter toute la lumière sur la situation du foncier dans le département. La SOCOCIM doit être dénoncée», a rouspété de son côté François Goudia Guèye, président de la Convention des Lébous de souche. Du reste, comme ses autres concitoyens de Rufisque, il interpelle le chef de l’Etat pour une mission de l’Inspection générale d’Etat (IGE). Et son avis est partagé par Mamadou Diop Thioune de la Fédération départementale des acteurs non étatiques qui soutient mordicus que l’industrie est dans le faux. «La SOCOCIM empiète sur des procédures fallacieuses qui ne répondent à aucune norme. Nous demandons des éclaircissements sur des états de contusion dans le processus d’attribution de ces terres.
La SOCOCIM est interpellée aujourd’hui par la citoyenneté rufisquoise en défiant une autorité (le maire) en droit et titre agissant», dénonce le haut conseiller, Mamadou Diop Thioune. «En complicité avec AGREKO, SOCOCIM continue d’exploiter nos terres, au-delà que ce qui est autorisé. Nous voulons que des procédures judiciaires soient intentées pour arrêter cette injustice pour accaparement de nos terres», a persisté M. Thioune qui dénonce «une complicité agissante» des autorités étatiques. Une situation d’autant plus grave, qu’il y a aussi la menace écologique qui pèse sur Rufisque, avec l’avancée de la mer. Des conditions réunies en vue d’une paupérisation qui, selon eux, mérite une mobilisation des populations pour que l’injustice ne passe pas.
DES ÉTUDIANTS CONGOLAIS ASSIÈGENT LEUR AMBASSADE À DAKAR
Les étudiants de la RD Congo e l’Institut privé de gestion-Institut supérieur de technologie industrielle (IPG-ISTI) se sont rassemblés ce lundi devant l’Ambassade de leur pays à Dakar pour réclamer leurs bourses d’études
Selon eux, leur Gouvernement s’est porté garant devant l’IPG-ISITI, pour prendre en charge le paiement de leurs bourses, à raison de 240 000 FCFA par trimestre et par étudiant.
« Nous, on avait oublié cette histoire de bourses et c’est l’Ambassade qui nous rappelé, il y a de cela trois semaines, pour nous dire que l’Etat va payer les bourses. Mais depuis, on a rien vu et nous n’avons personne comme interlocuteur pour nous expliquer ce qui bloque », a déclaré, Juver, un des étudiants venus protester devant la chancellerie congolaise à Dakar.
Un peu plus loin, un groupe d’étudiants échangent sur la posture à adopter pendant que d’autres cherchent à expliquer aux gendarmes chargés de la protection de l’Ambassade le bien-fondé de leur protestation.
Sous le couvert de l’anonymat, l’un des étudiants révèle que « depuis 2016, l’Etat ne paie plus les bourses aux étudiants ». Plus grave, souligne-t-il, « l’Etat congolais doit également de l’argent à l’IPG-ISTI ».
Cette situation fait que, explique l’étudiant en technologie industrielle, deux générations d’étudiants n’ont pas récupéré leurs diplômes et sont obligés de travailler dans les centres d’appel ou ailleurs pour pouvoir gérer leurs frais de séjour à Dakar.
Du côté des agents de l’Ambassade, personne n’est sur place, sauf le concierge. « L’Ambassadeur a donné l’ordre de ne pas travailler jusqu’à ce que l’Etat paie les bourses », a confié à APA, le chef des gendarmes déployés sur les lieux.
L’Etat congolais avait signé, en 2014, avec l’IPG-ISTI de Dakar un contrat aux termes duquel une cinquantaine d’étudiants doivent y être formés dans les métiers de l’industrie.
par Abdourahmane BA
LE FAST-TRACK OU RÉALISER LE PSE DANS L'INFORMEL
Les reformes dont nous avons besoin au Sénégal demandent d’avancer avec des pas mesurés surtout pas dans la précipitation ou dans la « Fast-policy-making »
Dans l’allure de composition et recomposition gouvernementales faisant suite à l’élection présidentielle et la confirmation d’un second mandat pour le Président Macky Sall, certaines autorités haut-placées ont fait état de « Fast-track » comme option stratégique de mise en œuvre du Plan Sénégal Emergent (PSE) dans les cinq années à venir. Nous comprenons bien que l’idée est d’accélérer la mise en œuvre, ou la cadence des reformes et des programmes dans la phase 2 du PSE pour plus de performance dans l’atteinte des objectifs. Cependant, le « Fast-track » n’est pas le concept approprié pour cela, malheureusement. Dans notre pays, on aime souvent utiliser des concepts importés, taillés sur mesure pour impressionner la population et faire semblant de travailler pour faire avancer les choses.
Tout le monde connaît le concept de « Fast-food » qui s’est définitivement installé dans nos mœurs alimentaires suite à l’avancée rapide de la pauvreté surtout dans les zones péri-urbaines, les banlieues. Du point de vue sémantique, le « Fast-track » dans le management du développement n’est pas une option désirable en temps normal. Etymologiquement, dans notre métier de management, le mot Fast-track en stratégie signifie globalement « commencer l’exécution d’une action ou d’un programme alors que la conception n’est pas encore achevée du fait du manque de temps ou des ressources nécessaires. »
Le concept de Fast-track a été introduit surtout dans les programmes d’urgence suite à des calamites, lorsque les besoins et les souffrances causées par les crises ne peuvent souffrir de temps de conception et menacent la résilience des populations : on est pressé d’agir pour sauver des vies dans ces cas. Le Fast-track peut aussi signifier le démarrage de la construction d’un immeuble ou autre chose par les composants de base en attendant la fin du travail de l’architecte ou du génie concepteur tout en sachant globalement l’idée de ce que l’on veut faire.
On a eu des exemples de Fast-track dans l’histoire de la gestion des programmes publics au Sénégal. Dans les années 80 du fait de l’explosion démographique des populations d’élèves dans les écoles et collèges avec un nombre limité d’enseignants bien formés, bien conçus à l’Ecole normale supérieure, le Ministre de l’Education de l’époque avait fait recours au Fast-track dans la formation des enseignants plus connus plus tard sous le sobriquet « Ails de Dindes » dans le système éducatif Sénégalais, qui signifie moins de qualité et de rigueur. Fast-track, Fast-Food, ou Fast-talk (parler sans conviction pour convaincre) renvoient tous à l’idée de l’impréparation et de l’improvisation pour gagner du temps ou faire face au manque de ressources. Cela dénote de l’informel dans l’action et le manque de maitrise de ce que l’on veut faire.
Les reformes dont nous avons besoin au Sénégal demandent d’avancer avec des pas mesurés surtout pas dans la précipitation ou dans la « Fast-policy-making ». Construisons des choses solides et durables. N’utilisons le Fast-track que quand c’est nécessaire surtout dans les politiques sociales, les politiques d’aides d’urgence, etc. Pour le reste, adoptons le « evidence-baseddecision-making » et le « measured-risk-taking » plutôt que le Fast-track. Nous avons même entendu une autorité politique utiliser le concept de Fast-track-management. Ce qui n’existe pas. Le « Fast-track management and organizationalbehavior » plutôt, renvoie à l’idée de former très vite, dans le tas, des Managers pour contrôler les opérations en l’absence de leaders avérés et expérimentés pour sauver les organisations en périls.
Maintenant que le Gouvernement est composé et que les rôles sont définis, je pense qu’on doit sonner la fin de la recréation, mettre fin à la guerre des concepts et convoquer les acteurs au travail car le chemin à courir est encore long, le manque d’infrastructures criant, le chômage des jeunes est immense, et les reformes nécessitent du courage et surtout de l’expertise, sans compter la nécessite de l’adhésion et du support des populations qui en sont les bénéficiaires ultimes. La politique politicienne et la guerre des concepts ne peuvent développer un pays.
BALLA DIOP NGOM VALORISE LA COQUE D’ARACHIDE EN ENERGIE
Auteur d’une trentaine de publications scientifiques et communications parues dans de grandes revues scientifiques, le chercheur sénégalais fait partie des deux francophones dont les projets ont été retenus sur une soixantaine.
De notre envoyé spécial à Nairobi, Eugène KALY |
Publication 15/04/2019
Balla Diop Ngom, enseignant-chercheur à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar, a bénéficié d’un financement de la Société Royale de Londres pour continuer ses recherches sur la biomasse, en valorisant la coque d’arachide, et produire de l’énergie à bas prix. Auteur d’une trentaine de publications scientifiques et communications parues dans de grandes revues scientifiques, le chercheur sénégalais fait partie des deux francophones dont les projets ont été retenus sur une soixantaine.
Professeur assimilé au département de Physique de la Faculté des sciences et techniques de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar, Balla Diop Ngom fait partie des 30 jeunes chercheurs africains dont les projets de recherche bénéficieront d’un financement de la Société Royale dans le cadre du Programme flair (Future leaders - african independant research ou, en français, futurs chercheurs autonomes de l’Afrique). Balla est l’un des deux francophones qui vont recevoir l’enveloppe de 300 000 livres sterling, soit environ 230,5 millions de FCfa, pour continuer à mener, pendant deux ans, des recherches sur la biomasse. Son projet s’intitule : « La synthèse à partir de la biomasse des nanomatériaux pour le stockage d’énergie ». Le chercheur sénégalais est titulaire d’un Doctorat de troisième cycle de Physique du solide et Science des matériaux obtenu à de l’Ucad et d’un PhD en Sciences des matériaux et plasma de l’University of the Western Cape Town, en Afrique du Sud. Ce physicien est également le directeur du Laboratoire de photonique quantique d’énergie et de nano fabrication du Groupe de physique du solide et sciences des matériaux (Gpssm). Il est aussi l’auteur d’une trentaine de publications scientifiques et communications publiées dans des revues scientifiques de grandes renommées. Dr Ngom pilote ce projet depuis plus de deux ans avec un groupe de 15 étudiants, dont 10 en Doctorat et Master et quatre séniors. A travers les biomasses, Balla Diop Ngom compte valoriser les coques d’arachide. Selon lui, la culture de l’arachide est développée dans le bassin arachidier (centre du Sénégal), mais malheureusement, dit-il, les populations de la zone n’utilisent que les graines et jettent les coques. « Il va falloir voir comment rentabiliser ces coques d’arachide en envisageant de créer une industrie autour de ce produit », dit le chercheur.
Rentabiliser toute la chaîne de valeur
Dans l’optique de valoriser la coque d’arachide, le chercheur sénégalais proposa son projet de recherche aux bailleurs et à l’Académie africaine des sciences. Il envisage d’utiliser cette biomasse pour élaborer des nanomatériaux d’oxyde métallique en 2D pour la fabrication de batteries afin de stocker l’énergie. En effet, la finalité du projet va audelà de la recherche. Elle vise également à assurer le transfert de technologies. « Le Sénégal dispose assez de terres pour la production de cette matière première. A priori, les hectares de terres à exploiter permettront d’employer plusieurs jeunes sénégalais dans la culture de l’arachide. L’industrialisation de la coque d’arachide, une fois réussie, permettra de disposer d’une main-d’œuvre pour un transfert technologique assuré. Nous voulons faire en sorte que toute la chaine de valeur soit rentable au Sénégal parce que les graines permettront de produire de la pâte d’arachide et les coques de l’énergie », explique l’enseignant chercheur. Il soutient que tout son programme tourne autour de la valorisation de la coque d’arachide, mais affirme avoir déjà testé, dans ses recherches, d’autres produits locaux comme les feuilles d’hibiscus (bissap en wolof) et de baobab avec des résultats probants qui seront profitables aux populations. Balla se dit fier et heureux de figurer parmi les récipiendaires du Programme Flair.
Selon lui, avec ce financement, lui et son équipe de recherche pourront assurer un renforcement des capacités de jeunes chercheurs aux plans national et international. Ces fonds, insiste-t-il, serviront exclusivement à acquérir des équipements de recherche, pour plus d’opportunités dans le domaine. « Ce projet sera aussi une occasion de créer, dans le futur, un nouveau profil de jeunes chercheurs », ajoute M. Ngom qui compte utiliser aussi les produits locaux pour développer de nouveaux systèmes de stockage d’énergie.
par Abdoulaye Cissé
AUDIO
QU'EST-CE QUI FAIT COURIR MACKY ?
Il avait tout pour se faciliter son début de quinquennat et il se le complique tout seul par des contingences sorties de sa seule imagination - Pas sûr qu'il puisse colmater les brèches sans dégât pour lui, comme par le passé
Mais qu'est-ce qui donc fait courir le président Macky Sall?
Il avait tout pour se faciliter son début de quinquennat et il se le complique tout seul par des contingences sorties de sa seule imagination.
Pas sûr toutefois qu'il puisse colmater les brèches sans dégât pour lui, comme par le passé.
Et pendant ce temps, les priorités attendent . . .
La réflexion est signée Abdoulaye Cissé.
MACKY SALL NOMME EVA MARIE COLL SECK
C’est au tour de Eva Marie Coll Seck de présider le Comité national de l’Initiative pour la Transparence des Industries Extractives (Itie). Ainsi en a décidé, par décret, le Président de la République.
Après Ismaïla Madior Fall, ancien Garde des Sceaux, devenu ministre d’Etat auprès du Président de la République, et Mankeur Ndiaye, ancien ministre des Affaires étrangères et des Sénégalais de l’Extérieur, nommé récemment Représentant spécial du Secrétaire général de l’Onu pour la République centrafricaine, c’est au tour de Eva Marie Coll Seck de présider le Comité national de l’Initiative pour la Transparence des Industries Extractives (Itie). Ainsi en a décidé, par décret, le Président de la République.
Le Président de la République vient de pourvoir au remplacement de l’ancien ministre des Affaires étrangères et des Sénégalais de l’Extérieur, qu’il avait nommé, en septembre 2017, à la tête du Comité national de l’Initiative pour la Transparence des Industries Extractives (Itie). En effet, depuis le 09 février dernier, le Secrétaire général de l’Onu, António Guterres, a nommé Mankeur Ndiaye Représentant spécial pour la République centrafricaine et Chef de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation en République centrafricaine (Minusca). Et c’est sur Eva Marie Coll Seck que Macky Sall a jeté son dévolu. Ministre de la Santé cinq ans durant, de 2012 au terme des Législatives de juillet 2017, elle était devenue depuis ministre d’Etat auprès du Président de la République. Une fonction qui a cessé depuis le 05 avril dernier, lorsque Macky Sall a dissous tout son Cabinet. Aujourd’hui, alors que le Sénégal est entré dans l’ère du pétrole et du gaz avec d’importants gisements qui seront très bientôt exploités, Eva Marie Coll Seck se retrouve aux commandes d’un organisme très important. L’Itie qui a été lancée il y a quinzaine d’années à l’initiative de l’Angleterre, repose sur une déclaration de principes d’une cinquante de pays ayant des industries extractives dont le but est de favoriser plus de transparence sur les paiements et revenus du secteur à travers la publication de leurs montants exacts sous une forme complète et compréhensible. Un exercice auquel le Sénégal s’est livré avec brio, pour être classé, l’année dernière, aux rangs de premier pays africain, et de quatrième au niveau mondial à satisfaire la norme dans les industries extractives.
Une femme brillante aux états de service exceptionnels
A la tête du Comité national de l’Itie, qui regroupe l’Etat, des entreprises, des investisseurs et la Société civile, Eva Marie Coll serat-elle à la hauteur des bilans de ses prédécesseurs, Ismaïla Madior Fall et Mankeur Ndiaye ? Son pedigree et ses états de service fondent à répondre par l’affirmative. Soixante-huit (68) ans, mariée et mère de quatre enfants, Eva Marie Coll Seck est l’un des médecins sénégalais les plus réputés, qui a à son actif une carrière internationale des plus reluisantes. Infectiologue, cette ancienne sociétaire de l’équipe de basket-ball de la Jeanne d’Arc de Dakar, fut en effet, en 1984, à 33 ans, la première femme agrégée de médecine au Sénégal. Deux ans plus tard, elle enregistre une autre performance singulière : elle diagnostique, en 1986, le premier cas de sida, au Sénégal. Cependant, les études et la recherche, pour ne pas dire les nombreuses formations en méthodologie et pédagogie qu’elle enchaîne, ne l’éloignent pas d’un autre terrain de prédilection, le syndicalisme, pas éloigné de la politique : elle est membre fondateur du Syndicat unique des travailleurs de la santé et de l'action sociale (Sutsas).
En 1989, elle est nommée professeur titulaire de la chaire de maladies infectieuses à l’université de Dakar et chef du service des maladies infectieuses au centre hospitalier universitaire de Fann (Dakar). Ensuite, s’ouvre pour elle une brillante carrière internationale qui culminera avec sa nomination, en 2004, comme Directrice exécutive du Partenariat «Roll Back Malaria» (Faire reculer le paludisme). Organisme créé par l’Organisation mondiale de la santé (Oms), le Programme des Nations unies pour le développement (Pnud), l’Unicef et la Banque mondiale (Bm), aux commandes duquel elle restera jusqu’en 2012.
Entretemps, à la faveur de la première alternance politique au Sénégal, elle est rappelée pour devenir ministre de la Santé (2001- 2003). Très vite déçue par le Président Wade qu’elle accuse, début 2012, dans les colonnes de Walf, d’avoir trahi «le nouveau souffle du 19 mars 2000 qui fut une des plus grandes réussites démocratiques en Afrique noire», indexant «la corruption et l'impunité qui sont devenues la règle» et «une menace plus vicieuse qui nous guette, à savoir la candidature illégale pour un troisième mandat avec comme seul dessein inavoué une dévolution dynastique du pouvoir», Eva Marie Coll s’était rapprochée de Macky Sall. Ce dernier élu en mars 2012, la ramène à la tête du ministère de la Santé qu’elle quittera cinq ans plus tard, au terme des Législatives de 2017, pour devenir ministre d’Etat auprès du Président de la République.
«LA MODERNISATION DU SITE VA SE POURSUIVRE»
Le chef de l’Etat, Macky Sall, a réaffirmé, hier, son «intention de continuer la modernisation du site du daaka» et de faire en sorte que les «besoins des pèlerins soient satisfaits au maximum».
La retraite spirituelle de Médina Gounass a eu un invité de marque hier, en la personne du chef de l’Etat Macky Sall. Ce dernier a, à la veille de la clôture des 10 jours du Daaka, demandé aux figures religieuses de «poursuivre les prières pour la paix, la prospérité» et un bon hivernage et réitéré son intention de poursuivre la modernisation du site de la retraite spirituelle.
Le chef de l’Etat, Macky Sall, a réaffirmé, hier, son «intention de continuer la modernisation du site du daaka» et de faire en sorte que les «besoins des pèlerins soient satisfaits au maximum». Il a demandé aux guides religieux et à la communauté de fidèles de poursuivre les prières pour la paix, la prospérité, la sécurité des populations et un hivernage pluvieux. Le Président de la République, à la tête d’une forte délégation gouvernementale, a exprimé son bonheur de communier avec les pèlerins du Daaka de Médina Gounass, louant Dieu de lui avoir permis de «vivre cette édition, ces instants présents dans la ferveur religieuse». Il a dit, dès le début de son propos, avoir «le cœur apaisé et très heureux de retrouver le site et les pèlerins». «Je suis venu, l’année dernière, solliciter vos prières et votre aide. Qu’Allah soit loué, vos prières ont été entendues et exaucées», a-t-il souligné à l’attention du Khalife Amadou Tidiane Bâ, faisant allusion à l’élection présidentielle.
Le Président a salué les figures et familles religieuses qui perpétuent la tradition de la retraite spirituelle : celles d’El Hadji Mamadou Seydou Bâ, d’El Hadji Aly Thiam, de Thierno Barro et de Thierno Hamet Baba Talla. Il a remercié l’initiateur du Daaka pour cette «belle œuvre» qui, au fil des ans, «attire des fidèles et révèle une véritable dimension religieuse». Il a aussi salué les pèlerins, toutes origines confondues, insistant particulièrement sur ceux qui sont venus de la Gambie, de la République de Guinée, de la Guinée-Bissau, du Mali et de la Mauritanie. Le Khalife de Gounass, Thierno Amadou Tidiane Bâ, s’est réjoui de la présence de cet hôte de marque et de sa délégation. Il a rendu grâce à Dieu et l’a imploré en ces termes : «Qu’Allah guide le Président de la République et le protège pour tous les actes qu’il continue d’accomplir pour les fidèles et pour le Daaka. Ses actions sont, du reste, très visibles». Il n’a pas manqué d’inviter les chauffeurs à la prudence et de prier pour que les pèlerins «rentrent et retrouvent leurs familles en paix». Thierno Ibnou Bâ, frère du Khalife qui fait office d’Imam, a, sur instruction de celui-ci, prié pour «l’unité du pays et pour le Président afin qu’il remplisse sa mission dans les meilleures conditions et pour le bien-être collectif».
Abdoul Aziz Bâ, autre jeune frère du Khalife, avait salué la création d’une usine de fabrique de glace sur instruction du Président, sans omettre de lui faire part des «problèmes d’approvisionnement en eau à Médina Gounass où les populations de certains quartiers vivent le calvaire douze mois sur douze». La délégation gouvernementale comprenait les ministres des Forces armées, Me Sidiki Kaba, de l’Intérieur, Aly Ngouille Ndiaye, des Finances et du Budget, Abdoulaye Daouda Diallo, de la Justice, Me Malick Sall, de l’Economie, du Plan et de la Coopération, Amadou Hott, de l’Agriculture, Moussa Baldé et de l’Education nationale, Mamadou Talla.
PAR RÉMI CARAYOL
L’ARMEE MALIENNE À L’ÉPREUVE DU FEU
Alors que « l’horizon 2019 » est bientôt atteint, force est de constater que les objectifs recherchés, tant en matière d’efficacité opérationnelle que de respect des droits humains, sont loin d’avoir été accomplis
L’agence française de développement a annulé la publication d’un dossier sur le Mali qui devait paraître dans sa revue Afrique contemporaine. En cause, des articles qui ont déplu, mettant à mal la stratégie de la France ou les autorités du Mali. Mediapart publie l’un d’eux, consacré aux accusations visant l’armée malienne.
La polémique a éclaté fin mars. Elle a pour origine la démission de Marc-Antoine Pérouse de Montclos, chercheur à l’Institut de recherche pour le développement (IRD), de ses fonctions de rédacteur en chef d’Afrique contemporaine, une revue trimestrielle éditée par l’Agence française de développement (AFD). En cause : l’AFD a refusé la publication d’un dossier consacré au Mali.
Pourtant, les articles de ce numéro spécial, « écrits par des chercheurs réputés, qui connaissent le terrain et écrivent depuis longtemps sur le Mali et l’Afrique, avaient été acceptés et approuvés par le comité de rédaction de la revue », indique Bruno Charbonneau, qui a dirigé ce travail (et qui est lui-même professeur d’études internationales au collège militaire royal de Saint-Jean au Québec).
L’un des textes du dossier, détaille-t-il, analyse les faiblesses de l’approche militaire du contre-terrorisme actuellement privilégiée par les puissances occidentales. Il montre « comment cette approche qui l’emporte sur tout peut être contre-productive et être elle-même génératrice de violences ». Un autre évoque « l’impunité générale et généralisée dont jouissent des représentants de l’État malien dans la mesure où leurs actions illégales, criminelles et autres ne sont pas ou que rarement punis ».
Il semble que ce sont ces deux articles qui ont posé problème à l’AFD, laquelle édite la revue mais la dirige aussi, puisque le directeur de la rédaction, Thomas Melonio, est un de ses agents. Ce dernier est le directeur exécutif du département innovation, recherche et savoirs de l’AFD, et a été conseiller Afrique du président François Hollande, après avoir été délégué national responsable de l’Afrique au parti socialiste. Il était en poste à l’Élysée lors du lancement de l’opération militaire française Serval au Mali, en 2013.
Auteur de l’article consacré aux défaillances de l’armée malienne, le journaliste indépendant Rémi Carayol a confié à Mediapart l’intégralité de son texte, que nous publions ici avec son autorisation.
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Sept ans après sa déroute dans le nord du Mali face aux combattants du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA), l’armée malienne se reconstruit difficilement. Les résultats des importants moyens mis en œuvre pour lui permettre d’assumer ses missions sont pour l’heure peu probants. Il est vrai qu’elle revient de loin. En 2012, ses défaites successives dans le septentrion avaient révélé d’importantes faiblesses structurelles : manque de moyens matériels, déficit de cohésion au sein des différents corps, mauvaise gestion des ressources humaines, pratiques clientélistes, commandement défaillant, patriotisme à géométrie variable des soldats…
Très vite après la perte d’une partie du territoire national, les partenaires du Mali ont entrepris d’aider les autorités à reconstruire une armée digne de ce nom. Il s’agissait alors de lui permettre, avec le soutien d’une force onusienne, la Mission internationale de soutien au Mali (Misma), de reconquérir au plus vite les régions tombées sous le joug des groupes armés djihadistes, lesquels avaient profité de l’offensive du MNLA pour prendre le contrôle des principales villes du nord. Cette mission a finalement été accomplie par l’armée française, avec l’appui des armées africaines, après le déclenchement de l’opération Serval en janvier 2013.
Lancée dans la foulée de l’intervention française, en février 2013, la mission de formation de l’Union européenne au Mali1 avait pour fonction initiale de former quatre Groupements tactiques interarmes (GTIA), soit un total de 2 600 hommes, destinés à se battre dans le nord. Prolongée à trois reprises en 2014, 2016 et 2018, cette mission en a formé bien plus : environ 12 500 soldats maliens ont officiellement suivi des cours et des entraînements dans le centre de Koulikoro, où sont basés les instructeurs européens. Prévue pour durer au minimum jusqu’en mai 2020, cette mission a pour l’heure coûté près de 133 millions d’euros2.
L’EUTM a pour mandat de fournir des conseils en matière militaire et de contribuer à rétablir les capacités opérationnelles des Forces armées maliennes (Fama). L’instruction des militaires maliens comporte plusieurs volets, dont une formation en matière de droit international humanitaire, de protection des civils et de droits de l’homme. Depuis sa création, la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation au Mali (Minusma), qui a succédé à la Misma, a elle aussi prodigué des formations en matière de droits humains aux soldats maliens. La France et les États-Unis mènent de leur côté des programmes de formation destinés aux armées de la sous-région, dont celle du Mali.
Parallèlement à ces initiatives financées par les partenaires du Mali, le gouvernement malien a fait voter une loi d’orientation et de programmation militaire ambitieuse en mars 2015, dont l’objectif était « de se doter à l’horizon 2019 d’une organisation et d’un plan d’équipements, de disposer d’un outil de défense adapté aux besoins de sécurité, et capable en toutes circonstances de défendre l’intégrité du territoire national tout en contribuant à la consolidation de la démocratie ».
D’un coût total estimé à plus de 1 230 milliards de francs CFA (près de 1,9 milliard d’euros) sur une période de cinq ans, ce qui représente un effort colossal pour l’État malien, cette loi visait notamment à recruter près de 10 000 hommes, afin de porter les effectifs des forces de sécurité à 20 000 éléments, et à acquérir du matériel de guerre.
Alors que « l’horizon 2019 » est bientôt atteint, force est de constater que les objectifs recherchés, tant en matière d’efficacité opérationnelle que de respect des droits humains, sont loin d’avoir été accomplis. Plus que la guerre dans le nord, le conflit multiforme qui secoue le centre du Mali illustre cet échec relatif.
Si les Fama ont participé à la reconquête du nord, elles ne sont intervenues qu’en second rideau, une fois que les djihadistes avaient été chassés du terrain par les troupes françaises et africaines. Les soldats maliens ont très vite été amenés à reprendre leurs positions dans les villes de Tombouctou et de Gao, mais ils n’ont pas été en mesure de s’installer durablement plus au nord, notamment dans la ville de Kidal. Aujourd’hui encore, l’armée malienne est relativement peu présente dans les zones jadis occupées par les djihadistes. La plupart du temps cantonnée dans ses bases, elle ne sort que rarement des centres urbains. Son rôle est en outre dilué du fait de la multiplication des acteurs armés.
L’armée française poursuit ses manœuvres dans le cadre de l’opération Barkhane (4 500 hommes), qui a succédé à l’opération Serval en 2014, et dont la base principale se situe à Gao4. Elle se concentre sur les dirigeants des groupes terroristes, qu’elle traque dans l’ensemble de la sous-région avec une totale liberté d’action.
La Minusma, qui dispose de plus de 12 000 soldats, est également présente sur l’ensemble du territoire septentrional (à Tombouctou, Gao, Tessalit, Aguelhok, Kidal, Goundam, Ber, Gossi, Ansongo et Menaka), ainsi que dans le centre (à Douentza, Sévaré et Diabaly). Si les Casques bleus sortent peu de leurs bases, au grand dam des populations, ils constituent une force non négligeable dans ces villes.
Enfin, les groupes armés signataires de l’accord de paix issu du processus d’Alger, membres de la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA), qui réunit d’anciens rebelles, ou de la Plateforme, dans laquelle se retrouvent des groupes qualifiés (parfois à tort) de loyalistes à l’égard de Bamako, jouent eux aussi un rôle dans la sécurisation du territoire. Le MNLA, le Haut Conseil pour l’unité de l’Azawad (HCUA) ou encore le Groupe autodéfense touareg imghad et alliés (Gatia) assurent le contrôle de certaines zones rurales d’où sont absentes les Fama, en lien parfois avec les forces française et onusienne.
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1 European Union Training Mission (EUTM)
2 Le budget de l’EUTM Mali n’a cessé d’augmenter au fil des ans : 12,3 millions d’euros en 2013, 27,7 millions en 2014-2016, 33,4 millions en 2016-2018 et 59,7 millions pour la période 2018-2020. Cette dernière hausse spectaculaire s’explique par une extension du mandat de l’EUTM, qui, désormais, forme également des éléments de la Force conjointe du G5-Sahel. Source : EUTM Mali.
3 427,59 milliards FCFA pour les investissements ; 442,57 milliards CFA pour le fonctionnement ; et 360,38 milliards CFA pour le personnel.
4 Le quartier général de l’opération est basé à N’Djamena (Tchad).
Le centre du Mali, foyer des violences
Dans le centre du pays, par contre, les Fama sont en première ligne, et ont même longtemps été un peu seules. Cette zone, qui englobe la région de Mopti et une partie de la région de Ségou, est aujourd’hui considérée comme l’épicentre des violences au Mali, et est désormais perçue à New York, au siège des Nations unies, comme l’enjeu principal du moment. 40 à 50 % des violences recensées dans le pays en 2018 l’ont été dans ces deux régions.
Selon un décompte de la Fédération internationale des ligues des droits de l’homme (FIDH) et de l’Association malienne des droits de l’homme (AMDH), environ 1 200 personnes y ont été tuées ces deux dernières années, dont au moins 500 entre les mois de janvier et août 20185. Or l’armée malienne n’est pas étrangère à un tel bilan.
En 2012, le centre du Mali, zone géographique relativement vague, marquait la séparation entre le nord, placé sous le joug des djihadistes, et le sud, administré par l’État. Ses habitants n’ont pas été exposés aux violences au même degré que ceux du nord, mais ils en ont subi les conséquences de manière plus ou moins directe : désertion des représentants de l’État, y compris des militaires dans certaines zones, multiplication des actes de banditisme, détérioration de la situation économique…
En 2013, dans la foulée des troupes françaises et africaines, les Fama ont réinvesti la zone. Alors que les Français, dont les objectifs se situaient plus au nord, ne faisaient qu’y passer, et que la Minusma s’y implantait timidement, l’armée malienne, elle, y a repris ses positions. Cette reconquête s’est accompagnée d’exactions contre les populations locales, et plus particulièrement les Peuls, victimes d’amalgames en raison du ralliement de certains d’entre eux aux groupes djihadistes, souvent pour des raisons autres que religieuses 6.
Plusieurs dizaines de personnes ont été exécutées et jetées dans des puits par des soldats maliens à Sévaré7. Des cas de tortures ont également été mentionnés8. De nombreuses personnes ont en outre été portées disparues après avoir été arrêtées par l’armée malienne 9.
Ce retour « musclé » n’a pas permis pour autant de restaurer la sécurité, et encore moins la confiance entre les populations et l’armée. Outre les violences attribuées aux soldats maliens, des tueries (impunies jusqu’à présent) ont aussi été commises par des bandits armés10, et les pillages n’ont pas cessé.
« Une fois que les Fama sont revenues, les vols de bétail se sont multipliés, précise un élu local de la commune de Nampala. Les gens sont allés voir les militaires pour leur demander de sécuriser les déplacements des troupeaux, mais ils n’ont rien obtenu. Certains se sont alors tournés vers les groupes armés ou ont décidé de s’armer eux-mêmes. » 11
C’est dans ce contexte de méfiance à l’égard des représentants de la force publique et de violences diffuses qu’est apparu début 2015 un nouveau mouvement djihadiste : la katiba Macina, affiliée au groupe dirigé par Iyad Ag-Ghaly, Ansar Eddine. Sa première attaque a eu lieu à Nampala, deux ans presque jour pour jour après la bataille de Konna, qui avait vu l’armée française entrer en action.
Le 5 janvier 2015, plusieurs dizaines d’hommes armés lancent l’assaut sur le camp de l’armée malienne, puis investissent la ville et y font flotter leur drapeau noir pendant quelques heures, avant de se replier vers leur base. Depuis lors, les membres de cette katiba n’ont cessé d’étendre leur zone d’influence. Ils ont multiplié les attaques contre l’armée malienne et la Minusma, tuant des dizaines de soldats maliens et onusiens. La plupart du temps, ils profitent du passage d’un convoi pour lancer l’assaut12. Ils attaquent également des bases militaires ou des barrages de la gendarmerie à l’entrée des villes, et s’en prennent à des soldats isolés ou en permission.
Après avoir chassé l’armée malienne des zones les plus difficiles d’accès dès les premiers mois de l’année 2015, les « hommes de la brousse » (c’est ainsi que les habitants de la zone ont pris l’habitude de les dénommer) ont mené une stratégie d’exécutions ciblées et d’enlèvements contre des représentants de l’État, des chefs religieux, des notables locaux et des élus soupçonnés de s’opposer à leur projet ou de collaborer avec l’État.
Aujourd’hui, ils contrôlent une grande partie des zones rurales du centre du pays, où ils rendent justice, règlent les contentieux, imposent des règles de vie aux populations, gèrent l’accès aux ressources… Des centaines d’écoles publiques (dites « françaises ») ont été fermées, et parfois saccagées, ces dernières années13.
Plusieurs facteurs peuvent expliquer la facilité avec laquelle les djihadistes se sont implantés dans le centre, et ont parfois gagné les cœurs de ses habitants : un État perçu depuis longtemps comme prédateur, notamment en raison de la corruption de certains de ses agents ; une économie vacillante, qui a subi de plein fouet les sécheresses des années 1970 et que la guerre au nord a encore un peu plus affaiblie ; la récurrence des litiges liés à l’utilisation des ressources naturelles, qui aboutissent parfois à des conflits communautaires ; la prolifération des armes…
Mais si l’État a perdu le contrôle de pans entiers de cette zone, c’est aussi parce que l’armée malienne s’est jusqu’ici révélée incapable de faire face aux incursions djihadistes, et encore moins de gagner la confiance des populations. À Nampala, une semaine après l’attaque du 5 janvier 2015, un élu rapporte que « les [soldats des] Fama sont revenus. Ils ont dit que les Peuls étaient responsables. Ils ont arrêté des suspects, les ont tabassés. Certains ont été amenés à Bamako, et libérés après avoir dû verser de l’argent. Après ça, la population ne collaborait plus avec eux. » Les djihadistes en ont immédiatement profité : « Ils sont venus dans les villages et ont dit : “On ne vous demande rien, sauf de ne pas nous dénoncer.” Ils ont exécuté plusieurs informateurs de l’armée. »14
Passée cette première phase de repli début 2015, au cours de laquelle elles se sont réfugiées dans les camps situés dans les grands centres urbains, les Fama ont mené des opérations anti-terroristes d’envergure, mais souvent sans lendemain. « Ils venaient, ils passaient quelques heures dans le village, ils arrêtaient des gens, puis ils repartaient, et nous laissaient à la merci des groupes armés », explique un élu local du cercle de Tenenkou15.
International Crisis Group notait en 2016 que « ce type d’intervention vise à contenir l’expansion des groupes armés plutôt qu’à agir sur les sources de l’insécurité »16. L’opération Seno, lancée à l’automne 2015 dans le cercle de Bankass, a permis d’arrêter un certain nombre de suspects. Mais elle a également abouti à des arrestations violentes de personnes n’ayant rien à voir avec la katiba Macina, à des détentions arbitraires, parfois très longues, à des actes de torture17 et à des vexations, dont certaines, filmées et postées sur les réseaux sociaux, ont alimenté un sentiment victimaire chez nombre de Peuls.
Début 2018, sous l’impulsion du nouveau gouvernement dirigé par Soumeylou Boubèye Maïga, un « Plan de sécurisation intégré des régions du Centre » a été élaboré. Ce plan, toujours en vigueur, prévoit le renforcement du dispositif sécuritaire dans les régions de Mopti et Ségou, et des mesures en matière de gouvernance et de développement économique et social. Des aides d’urgence ont été annoncées par le premier ministre lors de divers déplacements sur le terrain. Des représentants de l’administration, dont des sous-préfets, ont repris possession de leur poste dans quelques villes secondaires.
Cependant, nombre de services publics sont toujours inaccessibles aux habitants des zones rurales, et l’État reste un mirage pour une grande partie d’entre eux. Au-delà des quelques promesses opportunément annoncées peu de temps avant l’élection présidentielle (à l’issue de laquelle le président sortant, Ibrahim Boubacar Keïta, a été réélu), seul le volet militaire a été réellement mis en œuvre.
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5 « Dans le centre du Mali, les populations prises au piège du terrorisme et du contre-terrorisme », Rapport d’enquête n° 727 de la Fédération internationale des ligues des droits de l’homme et de l’Association malienne des droits de l’homme, novembre 2018.
6 Sangare Boukary, « Le centre du Mali : épicentre du djihadisme ? », note d’analyse du GRIP, mai 2016.
10 Le 18 mars 2013 à Doungoura (cercle de Tenenkou), au moins 20 personnes, essentiellement des Peuls, ont été tuées et jetées dans un puits par des hommes armés apparentés au MNLA. D’autres exactions ont été rapportées les jours suivants dans la même zone. Sources : entretiens avec l’auteur, Bamako, avril 2016.
11 Entretien avec l’auteur, Bamako, mai 2018.
12 Le premier semestre de l’année 2017 a été particulièrement sanglant. Le 19 janvier 2017, la pose d’une mine, suivie d’une fusillade, aurait provoqué la mort d’au moins dix soldats maliens dans la zone de Diabaly. Le 5 mars, l’attaque d’une patrouille des Fama à Boulikessi a fait 11 morts et 5 blessés. Le 2 mai, une embuscade entre Nampala et Dogofri a tué neuf soldats et en a blessé cinq autres.
13 À la fin de l’année scolaire 2018, deux écoles sur trois de l’académie de Mopti étaient fermées. Source : ONU.
14 Entretien avec l’auteur, Bamako, mai 2018.
15 Entretien avec l’auteur, Bamako, mars 2018.
16 « Mali central, la fabrique d’une insurrection ? », International Crisis Group, Rapport Afrique n° 238, juillet 2016.
17 « Mali : Les abus s’étendent dans le sud du pays », rapport de Human Rights Watch, février 2016.
Des massacres laissés impunis
Dès le mois de janvier 2018, les Fama ont repris le contrôle des camps qu’elles avaient abandonnés trois ans plus tôt, et dans lesquels elles n’étaient revenues qu’occasionnellement. Elles ont en outre mené plusieurs opérations de lutte anti-terroriste, parfois sous commandement du G5-Sahel. Mais ce retour en force n’a pas permis de reprendre le contrôle des territoires perdus, qui restent encore aujourd’hui des zones de non-droit.
Les éléments de la katiba Macina l’ont bien compris : ils évitent soigneusement les patrouilles et se cachent dans leurs repères, souvent situés dans des forêts, jusqu’à ce que les militaires repartent. Le reste du temps, ce sont eux qui dictent leur loi aux habitants. Cette situation empêche ces derniers de collaborer avec les forces de sécurité.
Un sous-officier de l’armée malienne qui a mené plusieurs opérations en 2018 dans le centre du pays admet qu’il est compliqué de créer un lien avec les populations : « Quand on entre dans un village, on voit bien que les gens ont peur. Ils ne nous regardent même pas. Comme l’État n’est pas là la plupart du temps, ils doivent faire avec les djihadistes. Si on passe dans la journée, ils savent que le soir même les djihadistes viendront dans le village et attraperont ceux qui nous ont parlé . »18
Outre cette menace décrite comme omniprésente par les habitants, d’autres raisons sont avancées pour expliquer cette défiance. Des Peuls déplorent notamment l’absence de dialogue avec les militaires maliens. D’autres évoquent la réputation qui les précède. Les opérations de l’armée malienne ont en effet été marquées par de nombreux abus en matière de droits humains ces derniers mois : l’enquête de la FIDH et de l’AMDH a démontré que des unités de l’armée avaient exécuté au moins 67 personnes, des Peuls dans leur grande majorité, au cours de six opérations menées entre février et juillet 2018, la plupart dans le cadre de l’opération « Dambe »19.
D’une tuerie à l’autre, le scénario est sensiblement le même : une colonne de l’armée malienne installe un camp provisoire pendant quelques jours dans une zone considérée comme étant « infestée » de djihadistes ; elle procède à des arrestations sur la base de dénonciations villageoises ou du simple fait de l’appartenance à la communauté peule ; certaines des personnes arrêtées sont passées à tabac avant d’être libérées ou envoyées à Bamako, d’autres sont exécutées et enterrées dans une fosse commune…
Le 21 février 2018 par exemple, dans les environs de Sokolo, les Forces armées maliennes patrouillent dans plusieurs villages et campements peuls. Elles y arrêtent neuf personnes : sept Peuls et deux Bambaras, qui sont relâchés le soir même. Quelques jours après le départ des militaires, des villageois se rendent dans leur campement pour tenter de retrouver les disparus. Sur les lieux, ils trouvent ce qui pourrait être une fosse de 3 mètres sur 2,5 mètres. « Il y avait des petits trous dans la terre, et des traces de sang, comme quand on égorge un mouton », indique un témoin20.
Selon toute vraisemblance, les sept Peuls ont été exécutés et enterrés par des soldats maliens, sur les lieux mêmes où la colonne avait installé son camp provisoire, dans une forêt. Une enquête a été ouverte et très vite refermée. Elle n’a abouti à aucune arrestation21.
Les méthodes employées par les soldats maliens semblent relever de la politique de la terre brûlée. « On a parfois l’impression qu’ils arrêtent n’importe qui, du moment qu’il est peul, et qu’ils ont pour consigne d’en tuer un certain nombre pour effrayer les populations », souligne un observateur onusien déployé dans la région22.
Un officier de l’armée en poste à Bamako, loin du théâtre des opérations, pense pour sa part qu’au contraire, ces pratiques sont liées à l’absence de consignes de la part de la hiérarchie : « On envoie des jeunes éléments sur un terrain très difficile, sans consigne claire sur ce qu’il faut faire. Ils ne connaissent pas le contexte, ni parfois la langue des habitants, ils ont peur, ils sont nerveux, et donc parfois ils tirent dans le tas. »23
Il paraît cependant difficile d’expliquer certaines opérations autrement que par une volonté manifeste de terroriser les populations. Le 5 avril, les Fama ont arrêté 14 hommes dans le hameau de Nelbal, situé à une quinzaine de kilomètres de Dioura. Selon des témoins, les militaires ont encerclé le campement peul, ils ont rassemblé tous les habitants, hommes, femmes et enfants, ont bandé les yeux à tous les hommes valides et les ont emmenés avec eux24. Le lendemain, l’armée a publié un communiqué indiquant que 14 hommes, présentés comme de présumés terroristes, étaient morts en tentant de s’évader de la prison de Dioura25.
Deux mois plus tard, le 13 juin, les soldats maliens ont tué 25 hommes qu’ils avaient arrêtés dans les villages de Nantaka et Kobaka, situés tout près de Mopti, et les ont enterrés dans trois fosses communes à quelques kilomètres des deux villages. Dans un communiqué publié le 19 juin, le ministère de la défense a confirmé « l’existence de fosses communes impliquant certains personnels Fama dans des violations graves ayant occasionné mort d’hommes à Nantaka et Kobaka », et annoncé l’ouverture d’une enquête judiciaire26. Celle-ci n’a pour l’heure abouti à aucune arrestation ni à aucune sanction officielle.
D’autres massacres commis par les Fama paraissent pouvoir répondre d’un esprit de vengeance. Ce qui s’est passé à Boulikessi le 19 mai 2018 en fournit une illustration. En 2015, face à la menace des djihadistes, l’armée avait quitté le camp qui jouxte cette ville. Le 28 décembre 2017, un détachement de l’armée malienne, sous commandement du G5-Sahel, a réinvesti le camp. Quelques jours après son arrivée, un lieutenant a organisé une réunion avec les habitants, au cours de laquelle il aurait annoncé que si les militaires subissaient une attaque, ils s’en prendraient aux habitants. « Pour un mort de notre côté, on en tuera vingt de votre côté », aurait-il dit à plusieurs reprises, selon des notables locaux27.
Le 19 mai, jour de foire à Boulikessi, les militaires ont mis leur menace à exécution. Ce jour-là, un soldat qui patrouillait près du marché a été tué par un homme venu à moto et reparti aussitôt. Trente minutes plus tard, les militaires sont revenus en nombre. Ils ont tiré de manière indiscriminée sur les gens qui étaient restés sur les lieux, tuant dix hommes, puis ils sont allés chercher deux autres personnes dans la maison d’un commerçant, qu’ils ont exécutées sous les yeux du chef de village28.
À l’évidence, les formations en matière de droits humains promulguées par l’EUTM et la Minusma n’ont pas eu l’effet escompté. Quant aux efforts consentis par l’État malien pour renforcer l’armée, ils ne lui ont pas permis pour l’heure d’engranger les victoires. Certes, des caches de la katiba Macina ont été découvertes et des combattants ont été arrêtés ou parfois tués. Un important travail a également été mené au niveau du renseignement.
Mais la lutte anti-terroriste ne peut se résumer à ce seul tableau de chasse. Jusqu’à présent, les forces de sécurité se sont montrées incapables de protéger les civils, comme en témoigne ce chiffre de l’ONU : lors des seuls mois d’avril, mai et juin 2018, au moins 287 personnes ont été tuées dans le centre du pays29.
Les Fama n’ont pas été plus efficaces face aux différentes milices qui se sont constituées ces trois dernières années dans cette zone. Afin de remédier à l’absence de l’État, des mouvements armés dits « d’autodéfense » ont été créés de manière plus ou moins spontanée, sur la base de l’appartenance communautaire : dogon, peul, bambara. Mais ils ne protègent que leur propre communauté, et s’en prennent plus souvent aux civils issus de la communauté « concurrente » qu’aux combattants de la katiba Macina.
Ces milices ont commis de nombreux massacres en 2018, plus particulièrement à l’approche de la saison des pluies30. Elles ont incendié des villages et ont obligé des milliers de personnes à se déplacer. Certaines d’entre elles ont agi au nez et à la barbe des soldats maliens, et parfois avec le soutien de responsables politiques et militaires.
Il semble notamment que les Dozos (chasseurs traditionnels), qui jouent un rôle majeur dans les milices bambara et dogon, ont été dans un premier temps utilisés par les Fama comme éclaireurs ou informateurs, avant de participer plus activement aux combats. Or cette stratégie a d’ores et déjà montré ses limites : au fil du temps, ces groupes armés ont gagné en autonomie ; ils menacent désormais de s’en prendre à l’armée si elle se met en travers de leur route31 et mènent des expéditions meurtrières d’une ampleur inédite au Mali32.
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18 Entretien avec l’auteur, Ségou, mars 2018.
19 Rapport d’enquête n° 727 de la Fédération internationale des ligues des droits de l’homme et de l’Association malienne des droits de l’homme, novembre 2018.
29 Rapport du Secrétaire général des Nations unies, S/2018/866, 25 septembre 2018.
30 « “Avant, nous étions des frères”. Exactions commises par des groupes d’autodéfense dans le centre du Mali », rapport de Human Rights Watch, décembre 2018.