En marge du cinquième sommet Union africaine-Union européenne, fin novembre 2017 à Abidjan, plus d’une centaine de chercheurs avaient signé un « appel en faveur de la science et de la technologie », afin d’obtenir un soutien plus important des décideurs africains pour la recherche scientifique. Un an plus tard, au Sénégal, les chercheurs sont toujours confrontés aux mêmes difficultés, notamment pour l’accès à Internet.
« La connectivité est médiocre, déplore Ousmane Ka,chercheur en physique des matériaux à l’université Cheikh-Anta-Diop (UCAD) de Dakar. On est souvent obligés d’utiliser la 4G de notre téléphone et de partager la connexion. Une étudiante a même dû abandonner sa thèse car la bande passante ne permettait pas l’accès aux données du laboratoire américain avec lequel elle collaborait. »
Chaque chercheur a son lot d’anecdotes qui témoignent des difficultés au quotidien. Pour Alassane Traoré, chercheur dans le nucléaire, c’est un important appel vidéo avec l’EPA,l’agence de protection environnementale américaine, qui a été empêché, faute d’une connexion stable. « Nous avons l’habitude, relativise-t-il. Avant la rentrée de janvier, on est restés six jours sans Internet à la faculté des sciences et techniques. Les notes ont été rentrées tardivement et toute l’administration était bloquée. »
Fractures numérique et scientifique
Depuis 2015 pourtant, le Sénégal a amélioré sa connectivité, avec une bande passante de 310 kilobits par seconde. Seulement, les étudiants et les enseignants-chercheurs sont plus de 100 000 dans les six universités publiques du Sénégal. « A titre de comparaison, l’université Ashesi, au Ghana, dispose de la même bande passante pour moins de 1 000 étudiants. A Lagos, on est entre 13 et 15 kilobits par utilisateur, là où les Sénégalais en ont 3 », dénonce Boubacar Barry, chercheur au département de physique et directeur général du Réseau de l’Afrique de l’Ouest et du Centre dédié à l’éducation et à la recherche (Wacren).
Fracture numérique, donc, mais aussi fracture scientifique, avec des calculs et des transferts de données qui nécessitent parfois plusieurs jours. Conséquence : des travaux et des résultats au compte-gouttes, mais aussi des ordinateurs en surcharge de mémoire, avec une durée de vie affaiblie. Face à cette situation ubuesque, une solution précaire a été adoptée par certains chercheurs : embarquer leur disque dur lors de leurs voyages d’études pour faire analyser leurs données à l’étranger et les rapatrier ensuite au Sénégal.
Pour pallier ces difficultés, le Wacren a mis en place AfricaConnect2, un projet visant à interconnecter les pays africains, avec une meilleure connexion et un coût d’accès Internet moindre, financé par l’Union européenne pour un coût global de 26 millions d’euros (17 milliards de francs CFA). Le Sénégal était l’un des tout premiers pays à intégrer le programme, en 2011.
Mais sept ans après, l’adhésion au Wacren n’est toujours pas effective, alors que le déploiement du réseau a eu lieu le 15 mars à Lomé. Le hub qui était prévu à Dakar a finalement été transféré à Abidjan, où les premières installations sont en voie de réalisation, pour une capacité de 10 000 mégabits à terme. « Ce projet était pourtant le nôtre, regrette Alassane Traoré. Mais c’est bien connu qu’ici, on a déjà tout pensé, tout écrit, mais on peine à passer à l’action. »
Un supercalculateur… non connecté
« Au Sénégal, nous n’avons pas attendu le Wacren. On a fait notre propre réseau », réagit le ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, Mary Teuw Niane, qui a placé le numérique au cœur de son action : « L’interconnexion est faite entre toutes nos universités et c’était ça notre priorité. L’objectif maintenant est d’avoir une bande passante de 1 ou 2 gigabits pour une meilleure connexion. Le problème est que, dans certains pays, il n’y a pas d’interconnexion entre les différentes universités, alors comment être interconnecté à eux maintenant ? »
Le projet AfricaConnect2 prévoit la connexion aux différents réseaux mondiaux, comme Géant en Europe, ainsi qu’une mutualisation des ressources pédagogiques entre les différents chercheurs africains. Aujourd’hui, le Ghana et le Nigeria sont connectés. Pour le Togo, c’est en cours, tandis que la Côte d’Ivoire, le Burkina Faso et le Mali le seront courant 2019. Ce qui va creuser le retard avec les chercheurs sénégalais, qui, pour se consoler, pourront compter sur le supercalculateur prévu dans la Cité du savoir en construction à Diamniadio, une ville nouvelle à l’est de Dakar. « Mais ce supercalculateur ne sera pas connecté aux autres alors que nous sommes à l’heure du numérique »,ironise M. Barry.
PAR L'ÉDITORIALISTE DE SENEPLUS, SERIGNE SALIOU GUÈYE
VIOLENCE HANDICAPANTE OU MORTIFÈRE À REBEUSS, LA HONTE DE LA RÉPUBLIQUE
EXCLUSIF SENEPLUS - Nos prisons ne sont plus des purgatoires où l’on amène l’individu fautif à la résipiscence mais des abreuvoirs de honte, des mouroirs où les détenus sortent trépassés, éclopés ou estropiés
Serigne Saliou Guèye de SenePlus |
Publication 23/11/2018
Le vendredi 2 novembre 2018, devant les grilles du palais présidentiel, en plein jour, un homme d’une quarantaine d’années du nom de Cheikh Diop a décidé de s’immoler par le feu. N’eût été l’intervention d’un automobiliste qui a utilisé son extincteur pour éteindre le feu qui consumait le corps de cet ex-détenu de Rebeuss, ce dernier aurait rendu l’âme séance tenante. Mais cette mort qu’il cherchait à travers son geste suicidaire de désespoir survient deux jours plus tard à l’hôpital Principal où il était admis aux soins d’urgence. Ainsi Cheikh Diop, depuis qu’il a reçu cette injection handicapante d’un infirmier major de Rebeuss, venait de mettre fin à plusieurs mois de souffrance due à l’indifférence de l’Etat, qui, à travers son agent judiciaire Félix Antoine Diome, n’a jamais voulu se prononcer clairement sur l’indemnité afférente à son bras qui a été amputé.
C’est ici le lieu de fustiger les traitements dégradants et inhumains que subissent impunément et régulièrement les détenus de Rebeuss. Ce qui est incompréhensible, c’est le fait que l’infirmier incriminé, premier maillon de la chaine de faits qui ont abouti au passage à l’acte létal de Cheikh Diop ne soit pas entendu ni poursuivi. Dans une vidéo parue sur le site emedia.sn, Cheikh accuse le major Mamadou Ndiaye de lui avoir inoculé une substance qui a abouti l’amputation de son avant-bras droit.
L’agent de santé pénitentiaire n’est pas ce maton qui, très souvent, dans nos prisons, entretient des relations d’animosité voire d’hostilité avec les détenus. Comme le dit Evelyne Picherie, infirmière aux Unités de consultations et de soins ambulatoires (Ucsa) de Nantes, dans un document traitant du rôle de l’infirmier(ère) dans la trajectoire des soins pendant l’incarcération, « le personnel soignant doit savoir, lors des consultations, qu’il n’accueille jamais un individu en tant que détenu, mais en tant qu’être humain avec son vécu et ses difficultés ». Elle ajoute que « savoir écouter permet de mieux comprendre, de créer cette relation de confiance indispensable dans le soin, de signifier au patient qu’il peut être entendu, aidé, soigné et que la prison n’est plus ce lieu d’exclusion qu’il fut autrefois » avant de conclure que « soigner derrière les barreaux, c’est avant tout proposer la même qualité de soins qu’à l’extérieur, mais c’est aussi assurer le respect inhérent à la personne humaine ».
Malheureusement le respect de la dignité humaine des détenus a déserté les lieux détentions. Nos prisons ne sont plus des purgatoires où l’on amène l’individu fautif à résipiscence mais des souffroirs immondes, des abreuvoirs de honte et de dégoût, voire des mouroirs abjects où les détenus sortent trépassés, humiliés éclopés ou estropiés physiquement ou psychologiquement. Cheikh Diop est sorti de Rebeuss avec un bras amputé. Ibrahima Mbow est sorti le 20 septembre 2016 de Rebeuss dans une bière. Il a été abattu implacablement comme un chien à la suite d’un rassemblement de protestation que les matons de Rebeuss ont qualifié de mutinerie. Assane Diouf qu’on taxe d’insulteur public est aujourd’hui estropié. Les gardes pénitentiaires n’ont pas hésité à lui fracasser la jambe pour avoir voulu simplement rencontrer un codétenu du nom de Cheikh Mbacké Gadiaga. Le major qui est de loin la cause lointaine de la mort de Cheikh Diop, le maton qui abattu Ibrahima Mbow et les gardes qui ont fracassé la jambe d’Assane Diouf plastronnent dans la prison de Rebeuss sans être inquiétés alors que dans un Etat de droit de pareils actes auraient déclenché sans délai de poursuites judiciaires. A la suite de la soi-disant mutinerie de Rebeuss où Ibrahima Mbow a perdu la vie après avoir reçu une balle, le procureur de la République avait tenu une conférence de presse pour avouer honteusement l’échec de la justice et de la police sénégalaise pour n’être pas parvenues à identifier le tireur tueur de Rebeuss. Pourtant, des détenus libérés ont déclaré reconnaitre l’auteur de la mort d’Ibrahima Mbow mais pour le maître des poursuites, les déclarations d’anciens délinquants ne valent pas roupie de sansonnet.
La vraie justice devrait punir sans avilir si, du moins, l’on continue de penser qu’elle est rendue au nom d’une certaine conception de la personne humaine. Le rôle d’une administration judiciaire n’est pas de martyriser ni de tuer mais de corriger, d’assister et d’éduquer. C’est le triptyque de principes qu’on attribue au milieu carcéral. Mais dans nos prisons surpeuplées, les détenus souffrant le martyre, doivent porter stoïquement la croix de leur souffrance sans moufter. Faute de quoi, les conséquences risquent d’être néfastes dans les mitards.
Pour en revenir à Cheikh Diop, il faut dénoncer la responsabilité du personnel soignant de Rebeuss, de cette justice qui a refusé de reconnaitre la faute médicale de l’infirmier piqueur à l’origine de l’amputation de son bras. Après être débouté en première instance et en appel de ses demandes d’indemnisation par la justice qui n’a jamais voulu reconnaitre la culpabilité du major Mamadou Ndiaye, Cheikh Diop, après avoir déclaré dans une vidéo qu’il n’en pouvait plus, posait ipso facto le primum movens de son acte suicidaire qui interviendra quelques jours après.
La sédimentation de frustrations et de désespoir a poussé l’ancien détenu de Rebeuss rendu infirme à franchir le Rubicon. A travers son geste suicidaire, cet ancien émigré en Italie ne recherchait pas la mort, mais voulait mettre un terme à une souffrance profonde pour laquelle il ne voyait plus de solution. Ainsi, l’autodestruction était devenue pour lui la catharsis, voire la thérapie qui allait le libérer ou le guérir de toutes les injustices et souffrances que son Etat lui a infligées depuis cette injection létale jusqu’à cette matinée dominicale funeste où il a rendu le dernier soupir sur son lit d’hôpital. Mort dans des conditions atroces, justice doit lui être rendue et que ceux qui ont contribué à sa mort répondent devant la loi ! C’est un impératif catégorique de l’Etat de droit ! Mais ne risquons-nous pas de prêcher dans le désert si l’on sait que le Sénégal est une terre d’impunité où une certaine caste de politiciens (gens du pouvoir) et une certaine catégorie de fonctionnaires (magistrats, policiers, gendarmes, douaniers…) nanties d’une immunité étatique ne connaitront jamais l’enfer des cachots ?
Longtemps chasse gardée des coachs européens, les fédérations du continent font de plus en plus appel à des techniciens locaux pour encadrer les équipes nationales
Le Monde Afrique |
Alexis Billebault |
Publication 23/11/2018
La liste des qualifiés pour la Coupe d’Afrique des nations (CAN) au Cameroun, du 15 juin au 13 juillet 2019, n’est pas encore close, puisque seuls treize des 24 billets disponibles ont été attribués. Et sur ces treize équipes, huit sont entraînées par des étrangers, mais les choses pourraient s’équilibrer d’ici à la phase finale. Car sur le continent, 32 des 54 sélections affiliées à la FIFA sont désormais entre les mains d’un Africain.
« Le niveau des techniciens africains ne cesse de s’améliorer, les résultats de nombreuses sélections le montrent. Des équipes comme celles d’Algérie, du Mali, de la Tunisie, de la Côte d’Ivoire, du Ghana ou du Gabon font confiance à des locaux», se félicite Constant Omari, le président de la Fecofa, la fédération de football de République démocratique du Congo (RDC). En 2014, il avait ainsi nommé Florent Ibenge pour remplacer le Français Claude Le Roy. Un choix qui lui avait valu de nombreuses critiques, mais qu’il avait défendu mordicus :
« Les supporters et la presse attendaient un étranger renommé. Moi, j’ai voulu donner sa chance à un Congolais, même si Ibenge a obtenu ses diplômes en Europe et qu’il y a travaillé, notamment en France dans des clubs amateurs. En Afrique, il faut faire tomber les barrières sociologues et psychologiques, ne plus avoir de complexe d’infériorité. »
Quatre ans plus tard, Florent Ibenge, qui est également l’entraîneur de l’AS Vita Club de Kinshasa, est toujours sur le banc des Léopards.
Le deuxième poste le plus exposé du pays
A l’instar de la RDC, d’autres fédérations parmi les plus puissantes d’Afrique ont fait le pari de confier à un local le deuxième poste le plus exposé du pays, après celui de chef de l’Etat. Ainsi, Mohamed Magassouba a attendu d’avoir presque 60 ans pour devenir le sélectionneur du Mali, en septembre 2017, après le départ du Français Alain Giresse. Samedi 17 novembre, les Aigles maliens ont obtenu leur qualification pour la CAN 2019 grâce à une victoire au Gabon.
Leur coach, méconnu en Europe, y a pourtant effectué une grande partie de sa formation. Titulaire d’une maîtrise de sciences économiques, il a obtenu son diplôme d’entraîneur sur le « Vieux Continent » et a sillonné l’Afrique avant de se voir confier la sélection de son pays :
« J’ai commencé à entraîner au Mali, à l’AS Hippodrome, mais c’est à l’étranger que j’ai fait l’essentiel de ma carrière, en RD Congo, au Gabonet au Sénégal, avant de revenir dans mon pays, au Stade malien puis en tant que directeur technique national. »
Mohamed Magassouba insiste sur l’apport des entraîneurs étrangers passés par l’Afrique :
« On doit beaucoup à certains. Ils ont apporté leurs compétences, leur expertise, car ils ont bénéficié d’une très bonne formation. Mais je pense que les écarts sont en train de se resserrer et je suis convaincu que les résultats obtenus par des Africains vont inciter les fédérations à nous faire de plus en plus confiance, même si les étrangers seront toujours les bienvenus. J’espère qu’un jour, on verra plus d’Africains exercer en Europe.»
Moins bien rémunérés que les étrangers
La Confédéra00tion africaine de football (CAF) veut améliorer la formation de ses entraîneurs. Des accords ont été signés avec la FIFA et l’UEFA, «car ce que nous souhaitons, c’est que de plus en d’Africains soient formés par des Africains », souligne Constant Omari. Cette volonté de confier à des locaux – ou à des binationaux – les plus hautes responsabilités peut aussi permettre à certains techniciens de se forger une expérience qu’ils n’auraient sans doute pas acquise en Europe.
L’exemple d’Amir Abdou, 46 ans, le sélectionneur des Comores depuis 2014, est l’un des plus significatifs. Né à Marseille, ce Franco-Comorien a joué au niveau semi-professionnel. « Puis j’ai entraîné des clubs amateurs dans la région d’Agen, en occupant parallèlement un emploi municipal.» Les bons résultats des insulaires, ces dernières années, et plus particulièrement ceux obtenus en 2018 lors des qualifications pour la CAN 2019, ont fait grimper sa cote :
« En France, je n’aurais sans doute jamais pu entraîner un club de haut niveau. Le fait d’être sélectionneur et d’avoir contribué aux progrès de l’équipe comorienne me permet d’être un peu plus connu. A l’avenir, cela pourrait m’ouvrir des portes, pour entraîner un grand club africain par exemple. »
La nomination d’un local plutôt que d’un étranger est aussi parfois liée à des contraintes économiques, puisque ce sont souvent les Etats qui prennent en charge le salaire du sélectionneur. Et les Africains sont toujours moins bien rémunérés que les étrangers, ce que déplore Constant Omari :
« Il arrive encore que des fédérations choisissent un local car il coûtera moins cher. Mais à compétences égales, il faut donner un salaire identique. Si une fédération peut donner 30 000 euros à un Français hors avantages, elle peut en faire autant avec un national. Cette différence de traitement, bien réelle, sera une des prochaines barrières à faire tomber. »
LA FRANCE RESTITUE 26 ŒUVRES AU BÉNIN
En cohérence avec la démarche engagée, Macron a décidé de rendre sans tarder, ces objets d'art constitués de prises de guerre du général Dodds dans le palais de Béhanzin, après les sanglants combats de 1892
«En cohérence avec la démarche engagée, et sur proposition du musée du Quai Branly – Jacques Chirac et du ministère de la Culture, le président de la République a décidé de restituer sans tarder 26 œuvres réclamées par les autorités du Bénin, prises de guerre du général Dodds dans le palais de Béhanzin, après les sanglants combats de 1892. Ces œuvres pourront être présentées au public béninois et au public international dans le cadre du projet ambitieux de musées porté par la République du Bénin», détaille communiqué.
PAR MOHAMED DIA
MA SI LONGUE LETTRE À MES JEUNES FRÈRES ET SŒURS POUR DEMANDER PARDON
Ne soyez point flattés par le TER, Ila Touba, Dakar Arena, le monument de la renaissance - Demandez plutôt ce qui a été fait pour la santé, l'éducation, l'emploi, etc. - Ne commettez pas la même erreur que nous
Vous qui êtes nés avant ou durant la première alternance politique et qui êtes en âge de voter, je vous écris cette lettre pour vous demander pardon et vous préparer à ne pas commettre l’erreur que nous avions commise, car nous sommes la raison principale de ce que vous vivez en ce moment. Je vais vous expliquer ce qui s’est passé pendant que vous étiez d’innocents enfants sans soucis.
Avec l’alternance de 2000, le Sénégal était dans l’euphorie totale. Vers 23h40 le soir du 19 mars 2000, le général Cissé appellera le président Diouf pendant 20 minutes et lui dira que « la situation est difficile pour vous et pour votre parti ». Il a appelé le président Diouf à cinq reprises et a tout fait pour le convaincre d’accepter sa défaite ; il réussira finalement à le convaincre en lui disant : « Si vous félicitez votre adversaire comme vous l'avez promis à votre directoire de campagne, vous serez le vainqueur moral de cette élection. » Plusieurs personnes du camp de président Diouf voulaient le dissuader d’accepter sa défaite. N’eut été la sagesse du général Lamine Cissé et la grandeur du président Diouf est-ce que le pays n’allait pas vivre son premier coup d’Etat ?
Une alternance réussie grâce à Moustapha Niasse
Certes, le président Wade a été un farouche opposant et a gagné la présidentielle de 2000, mais cela n’a été possible qu’avec tous les acteurs, principalement Moustapha Niasse qui a présenté le président Wade au président Senghor. Tout commencera de là jusqu’à l’accession au magistère suprême. Il a quitté le Parti socialiste en 1999 et comme raison il avait dit entre autres que la corruption et les fraudes électorales étaient trop présentes dans le paysage politique du Sénégal. Il critiquera le bilan du président Diouf en disant que "le mandat présidentiel doit être constitutionnellement limité à deux termes et non pour des périodes de sept ans, mais bien de cinq ans au maximum. Il est évident et aujourd'hui amplement prouvé que ce qu’un chef d'Etat n'a pu réaliser en dix ans, il ne pourra jamais le réaliser en vingt ou trente ans". Il dira aussi qu’aucun pays ne s’est développé sur la base d’aide des pays industrialisés. Il accusera le général Cissé d’avoir fait fabriquer deux types de carte d’électeur, les cartes sénégalaises et les cartes israéliennes. Le général Cissé ne niera pas, mais donnera comme raison de vouloir vérifier l’infalsifiabilité des cartes avant de le rendre public. Bref, il y avait huit candidats et tous des hommes avec la seule femme s’étant retirée faute de moyens financiers. Parmi ces candidats, il faut noter Abdou Diouf qui avait 65 ans, Abdoulaye Wade qui avait 74 ans et Moustapha Niasse qui lui avait 61 ans. Pendant ce temps Macky Sall était chef de la division Banque de données de PETROSEN. Durant les élections présidentielles de 2000, Diouf recevra 41,33 % des voix, Wade recevra 30,97 % et Niasse recevra 16,76 % des voix. Tous les autres candidats recevront moins de 10%. Durant le second tour, presque les mêmes personnes ont voté pour le président sortant, Abdou Diouf, car ayant reçu 41,51 % des voix contre 58,49 % avec l’aide de la coalition pour Abdoulaye Wade. Le Sénégal vit sa première alternance politique de son histoire. Abdoulaye gagne finalement la présidentielle après avoir perdu en 1978, 1983, 1988 et 1993.
Les 12 ans de règne des libéraux
Le taux de chômage était de 40 % avec une croissance très faible surtout si elle est comparée à la croissance démographique. Le ratio de dépendance démographique - celui entre l'effectif de la population qui dépend des autres et l'effectif de la population qui peut prendre en charge des autres - étaient de plus de 80 %. Une infime partie de la population qui travaillait s’occupait du reste, car il n’y avait pas assez d’emplois. Le taux de pauvreté avait atteint 50 % et cela avoisinait 60 % en milieu rural.
Comment pourra-t-on ne pas commencer par la première bévue durant la première élection locale quand avec effarement, nous avons tous appris que feu Serigne Saliou, khalife général de Serigne Touba sur terre, avait été investi tête de liste de la coalition Sopi 2002. Nous n’avons toujours pas trouvé de qualificatif pour cette bourde.
Le 26 septembre 2002, nous assisterons au naufrage du bateau le Joola qui coûtera la vie à 1 863 personnes officiellement contre 65 survivants pour un bateau qui était conçu pour transporter 500 passagers. Certains diront que le président a préféré réparer l’avion présidentiel au lieu du bateau en connaissance de cause, car un des moteurs était en panne. D’autres diront que certains membres du gouvernement ont même essayé de prendre des pièces des moteurs de certaines industries de notre pays. A titre de comparaison, le Titanic avait fait environ 1500 morts et 700 rescapés.
Et la mallette d’Alex Segura ? Un fonctionnaire du FMI rentrant en Espagne a reçu une mallette contenant 100 000 euros et 50 000 dollars en cash du gouvernement. Quand il a découvert la somme, il a alerté les autorités du FMI qui ont retourné les fonds par le biais de l’ambassadeur du Sénégal à Barcelone.
Et les fonds Taiwanais ? En 2006, le Sénégal avait reçu 7,5 milliards de la Chine pour divers projets sociaux. Cet argent n’est jamais rentré dans les caisses de l’Etat et cela a créé des tensions diplomatiques entre le Sénégal et la Chine. On nous dira plus tard que l’argent avait atterri dans le compte bancaire du fils du conseiller spécial du président de la République.
Et le plan Takkal ? Malgré plus de 600 milliards de FCFA investis, le problème de l’électricité n’a été réglé qu’après 2012. Un acquis rendu possible grâce à la marche de protestation des imams de Guédiawaye contre les factures trop élevées malgré les délestages incessants. Le ministre de l’Energie à l’époque reconnu même que sur 720 000 factures, environ 159 000 comportaient des anomalies.
Et la cherté de la vie ? Le coût de la vie était encore raisonnable durant l’époque où vous êtes nés ou étiez des enfants. Le kilogramme de riz qui coûtait 140 Francs CFA est monté à 240 Francs CFA en 2008. Le kilogramme de viande de mouton qui coûtait 1 200 Francs CFA en 2 000 coûtait 2 580 Francs CFA en 2007. La bouteille de gaz de 6 kilogrammes qui coûtait 1 495 Francs CFA en 2004 coûtait 3 109 en 2007 et celle de 12 kilogrammes qui coûtait 3 615 Francs CFA en 2004 est passée à 7 165 Francs CFA en 2007. Le prix du sac de riz de 50 kilogrammes est passé de 9 500 Francs CFA à 17 000 Francs CFA à Dakar et 20 000 Francs CFA dans les autres régions du pays. Vous trouvez normal que la population marche pour décrier la cherté de la vie ? C’est ce que je crois aussi, mais malheureusement la marche a causé la mort d’un homme par balle et 21 personnes condamnées puis graciées.
Et la violence ? Sous le régime libéral, 12 Sénégalais ont été assassinés et aucun procès n’a été organisé pour situer les responsabilités. Paix à leurs âmes. A titre de comparaison, le président Diouf avait lui radier 94 commissaires de police, 14 officiers de paix supérieurs, 201 officiers de police, 42 officiers de la paix, 383 inspecteurs de police, 101 sous-officiers de la paix et 5 430 gardiens de la paix quand Baba Ndiaye fut détenu et torturé à mort au commissariat du IV arrondissement.
Et l’autoroute à péage que nous trouvons très utile ? Malgré l’utilité de cette autoroute, il est important de vous dire que le Sénégal a financé 181,5 milliards de francs CFA sur les 306,5 milliards du financement public. Le groupe Eiffage Sénégal n’a financé que 20,8 milliards de francs CFA sur les 61 milliards de francs CFA du financement privé et que la SENAC est responsable de l’exploitation de l’autoroute jusqu’en 2039.
Et le 23 juin 2011 ? La date ou le président Wade a officieusement perdu le pouvoir en voulant faire voter ce projet de loi qui avec 25 % des voix nécessaires, le ticket présidentiel d’un président et d’un vice-président allait être élu. Cela allait lui permettre de céder le pouvoir à son fils. Le Sénégal a failli basculer dans le chaos total, mais le projet de loi a été retiré à temps.
La liste est exhaustive, mais nous ne pourrons pas tout lister. Néanmoins, nous pouvons citer quelques scandales que vous pourrez rechercher pour plus d’informations. 25 milliards ont été dépensés pour un tunnel sur la corniche ouest, 52 milliards pour la construction des villas dites présidentielles du Méridien président et les 20 milliards de l’affaire SUDATEL.
Les 6 ans et demi du règne républicain
Là, vous commencez à grandir et vous entendez une seconde alternance politique au Sénégal. Nous avions souffert sous le régime libéral. Le régime républicain semblait venir avec un nouveau souffle qui est celui d’une gouvernance sobre et vertueuse qui était le refrain préféré de son leader.
Sous le règne républicain, en 2013, la dette représentait 45,7 % du PIB, 50,6 % en 2014, 55,7 % en 2015, 59 % en 2016 et 61,44 % en 2017. Le taux de pauvreté est de 47 % et nous faisions partis à un moment des 25 pays les plus pauvres du monde.
Et la réduction du train de vie ? Le président avait promis de réduire le nombre de ministres à 25 ce qu’il a fait pendant quelques mois avant d’augmenter ce nombre et de nommer une flopée de ministres conseillers. Ce régime a supprimé le sénat et d’autres agences d’une part pour après créer des institutions budgétivores que sont le HCCT et le CNDT entre autres. Il avait aussi promis la réduction du train de vie de l’État et nous ne voyons que l’arrogance de la part de ses collaborateurs et d’ailleurs, il paraît que le président s’était payé une Mercedes à un milliard pendant que la capitale n’avait pas d’eau pendant trois mois. Quelles que soient les raisons de l’achat de cette voiture, le timing n’était pas bon car le peuple souffrait. Le président Sall nous parlait, pendant qu’il était candidat, « d’une présidence de rupture et de progrès » mais je ne vois rien qui ait changé entre son magistère et celui du président Wade. Il parlait aussi « d’un nouvel ordre de priorité » pendant que le palais présidentiel était devenu un GAB et une annexe du siège de l’APR. Est-ce le président de tous les Sénégalais ou chef de parti ?
Le président qui décriait l’implication de la famille du président Wade dans les affaires de l’Etat en tenant ces propos : « Je ne mêle jamais ma famille à la gestion du pays. Si mon frère a été amené à être cité dans des affaires de sociétés privées, c’est parce que je lui avais justement indiqué très clairement, dès ma prise de fonctions, qu’il ne bénéficierait jamais de ma part d’un décret de nomination, notamment en raison de l’histoire récente du Sénégal (Wade père et fils) et parce que je ne voulais pas être accusé de népotisme ». Je ne vais pas vous dire tous les postes que son jeune frère occupe, mais sachez qu’il a bénéficié d’un décret de nomination.
Et la justice ? Il est le président du Conseil supérieur de la magistrature. Il nomme et gère l’avancement des magistrats. Comment peut-on parler d’indépendance de la justice dans ce cas ? Quand la justice a demandé à Ousmane Ngom de ne pas sortir du territoire, le président Sall l’amena avec lui en voyage en Guinée Conakry. Cheikh Omar Hann, Directeur du COUD avait été aussi épinglé par l’OFNAC, mais c’est la directrice qui a été limogée pour avoir bien fait son travail. Le président Sall avait promis une indépendance de la justice, mais rien n’a été fait dans ce sens. Il disait aussi qu’il ne protégerait personne : « à tous ceux qui assument une part de responsabilité dans la gestion des deniers publics, je tiens à préciser que je ne protègerai personne. Je dis bien personne ». Il en a tellement protégé que l’exception en est devenue la règle. Une seule personne est jugée et condamnée par la CREI sur une liste de 25 personnes.
Et les dépenses somptuaires à but électoraliste ? L’autoroute Ila Touba est en train d’être achevée à l’aide d’un prêt concessionnel d’un montant de 416 milliards de francs CFA (634 millions d’euros). 32 milliards de francs CFA dédiés à la construction de l’arène nationale hébergeant les combats de lutte. Le centre international de conférence Abdou-Diouf et le complexe sportif Dakar Arena nous ont coûté plus ou moins 126 milliards de francs CFA. Sans oublier la promesse de la construction d’un stade olympique de 50 000 places en 2020. Et le fameux TER qui reliera Dakar à l’aéroport international Blaise-Diagne (57 km) dont le premier wagon a été réceptionné par le Premier ministre ? Même la Banque mondiale a averti de la non-rentabilité de ce projet. Le gouvernement s’est entêté pour la mise en œuvre, d’un coût de 750 milliards de francs CFA.
La liste est loin d’être finie et nous pouvons aussi citer d’autres scandales tels que Petrotim, Bictogo, Mittal, les scandales fonciers, la Banque de Dakar et les exonérations fiscales entre autres.
Vivre dans le déni ?
Nos deux présidents depuis 2000 se sont lancés dans le projet d’infrastructures, certains nécessaires d’autres à but électoraliste. Quand on est pauvre, il faut savoir qu’on est pauvre et savoir où investir le peu de ressources dont nous disposons. Le « modèle économique » utilisé par ces deux présidents est très similaire. Ils ont tous les deux cru à des modèles qui ne sont pas adéquats dans notre pays. La croissance endogène ne s’applique pas à notre pays, car chaque pays a son modèle unique à lui. Un pays classé 162e sur 188 selon l’indice de développement humain, un pays qui compte 0,07 médecin pour 1 000 habitants, qui affiche un taux de pauvreté de 47 % et dont la dette publique représente plus de 60 % du PIB doit-il se préoccuper d’arène de lutte, d’un TER dont le contrat a été très mal négocié, d’une autoroute Ila Touba dont la rentabilité est hypothétique ? Mes jeunes frères, je vous exhorte à avoir plus de lucidité que nous quand nous avions cru que le président Wade allait créer des emplois pour tout le monde et que nous avions cru que le président Sall allait bannir l’injustice sociale et que « le fils du badolo aurait la même chance que le fils d’untel », comme il le disait. Ne soyez point émerveillés par les réalisations que vous voyez et sachez que le bilan du président de la République équivaut à son travail et il ne doit pas être félicité pour avoir fait son travail. Le travail qui mérite d’être félicité, c’est sortir du Sénégal des pays les plus pauvres, d’investir dans la santé, l’éducation et la création d’emplois. Cette création d’emplois ne se fera qu’à partir du développement du secteur primaire et principalement du secteur agricole. Regardez autour de vous et vous verrez dans vos familles et dans nos familles des diplômés qui chôment, des malades qui ne peuvent pas se soigner, des personnes qui ne peuvent pas continuer leurs études faute de moyens financiers, des adultes qui devaient se prendre en charge et qui sont pris en charge. Pensez-vous que ces gens que nous éliront ont les mêmes problèmes que nous ? Non, ils ont des maisons de fonction, des voitures de fonction, des gardiens qui veillent sur eux et leurs enfants, des bons d’essence, des salaires décents, ils détiennent de multiples titres fonciers, ils envoient leurs enfants dans les meilleures écoles pendant que nous sommes en grève (les fils du président Wade étaient en train d’étudier en France pendant qu’il nous demandait de boycotter nos cours.)
Ils ne se soignent pas au Sénégal ou s’ils se soignent au Sénégal, ils vont dans les meilleures cliniques privées. Pourquoi pas nous ? Ont-ils pitié de nous ou ont-ils oublié les cars rapides et les clandos ? Nous marchons des kilomètres pour aller à l’école, nous ne mangeons pas le petit-déjeuner et allons à l’école quelquefois. Combien de femmes meurent en donnant naissance, combien de personnes meurent du paludisme à cause de nos hôpitaux que je qualifie d’antichambre de la morgue pendant que des dépenses inutiles se font du matin au soir. Les jeunes frères et jeunes sœurs, de grâce, ne commettez pas l’erreur que nous avions commise. Choisissez le candidat que vous pensez peut réellement développer le Sénégal de manière concrète. Nous payons toujours les pots cassés 18 ans plus tard. Rien n’a changé. Ne vous laissez pas aduler par des chiffres dont eux seuls ont les vraies données. Nous ne disposons pas des données de la croissance économique, mais seulement de ce que le gouvernement nous donne. Ne soyez point flattés par le TER, le BRT à venir, Ila Touba, Dakar Arena, le monument de la renaissance, l’aéroport Blaise Diagne, le tunnel de la corniche Ouest, le projet de Diamniadio, les bus Dakar Dem Dikk. Il faut plutôt demander qu’est ce qui a été fait pour la santé, dont le budget est inférieur aux intérêts que nous payons pour le service de la dette, pour l’éducation dans le long terme, quand nous disposons toujours d’abris dit provisoires et qu’on se vente d’une arène de lutte, et surtout pour la création d’emplois durables ? Ne laissez personne vous dire que cela va prendre du temps et que c’est un plan à long terme. Un plan qui développera le Sénégal est possible, mais ce n’est point ces plans qu’on nous a proposés ces dernières 18 années. Nous ne pouvons pas continuer dans cette lancée, l’heure a sonné pour le changement. Mon petit frère, ma petite sœur, aimes ton pays et soucies toi de l’avenir de ton pays. Les hommes partent, mais le Sénégal demeurera.
PAR SORO DIOP
L'OPPOSITION, L'IMPUISSANCE BRUYANTE
Aucun programme fondé sur des arguments scientifiques à opposer au PSE de Macky Sall - Pas une once d’acquis et de mérite à lui reconnaître, à lui concéder au moins, par honnêteté politique - C’est trop leur demander ?
Accusations gratuites et légères. Délires et délivrances de fake news par des porte-flingues d’opposants, habitant et habitués des réseaux sociaux. Foire d’insultes. Compilations de prétendues révélations jamais étayées par des preuves irréfutables. Voilà depuis quelque temps, la martingale de certains opposants nerveux et énervés. Un mantra politicien qui, au-delà des verbiages et des fourberies politiciennes, traduit une impuissance bruyante. La vérité est devenue, chez eux, comme immorale et amorale.
Aucun programme puissant, réaliste, utile et fondé sur des arguments scientifiques et techniques, à opposer au Plan Sénégal Emergent (PSE) du Président de la République Macky Sall. Sinon celui de se consumer à mettre sur le bûcher funéraire toutes les réalisations de ce dernier. Pas une once d’acquis et de mérite à lui reconnaître ! A lui concéder au moins, par honnêteté politique ! C’est trop leur demander ?
Des opposants croient enrôler et enrober les Sénégalais dans leurs propres légendes qui, quant au fond, constituent l’expression de leur phobie d’une future débâcle électorale. A force d’émettre un seul son de cloche, ils émettent effectivement comme des cloches. Au grand banquet des fictions et des accusations, nos George Orwell de la politique finiront par découvrir qu’ils ont alimenté du vide et qu’ils se sont nourris de néant.
Après avoir servi sans succès un festival d’affaires prétendument scandaleuses à grands tapages politico-médiatiques, mener bruyamment mais en vain des campagnes sordides d’intoxications, des enfumages sans fumée et des scènes de victimisation frisant l’hystérie, comme palliatifs à la vacuité de leurs projets de société et de programmes alternatifs, des opposants -pas tous parce qu’il en existe qui ont quand même du scrupule-, se convertissent dans la cuisson de la violence électorale et des jets de menaces de déstabilisation du pays. Certains annoncent des nuages, d’autres prédisent l’apocalypse.
Que sont devenues les annonces répétées des opposants quant à la mort de la coalition Benno Bokk Yakaar ? A moult reprises, ils ont prédit sa mort, l’ont mise sur un corbillard, dans un cercueil sans clous, vers une tombe fictive. Et pourtant, la coalition dirigée par le Président Macky Sall est toujours vivante et vibrante. Elle s’est même renforcée et élargie. Du jamais vu et vécu dans l’histoire des coalitions politiques au Sénégal !
Les négationnistes entêtés avaient installé un pseudo-débat sur la croissance économique dont ils avaient nié avec véhémence le taux établi à 7%. Là, ils ont fini par remettre leurs flèches dans les carquois, car des experts non partisans et diverses institutions financières aux voix autorisées avaient rétabli les faits. Cela après avoir seriné que croissance ne se mange pas. Si tel n’est pas le cas, les travailleurs allaient vivre aujourd’hui des fins de mois cauchemardesques. En 2012, le Président Wade n’avait-il pas annoncé que les salaires ne seront pas payés trois mois après sa chute ? Il savait bien l’état des finances publiques qu’il laissait derrière lui, après 12 ans de folies dépensières et de déstructuration de l’Administration et de ses règles. Seulement, il avait sous-estimé la capacité de résistance et la détermination besogneuse de son ancien Premier ministre qui avait réussi, pourtant, de son propre aveu, à sortir ses projets de terre.
Et qui plus est, depuis l’avènement du Président Macky Sall, tout ce qui pouvait mettre à rude épreuve le pouvoir d’achat des Sénégalais a subi une baisse : le riz, l’huile, le gaz, l’essence, l’électricité, l’impôt sur les salaires, etc. Tout cela, en plus de réalisations d’infrastructures et de programmes à fortes retombées sociales (Bourses familiales, Couverture Maladie Universelle, PRODAC, PROMOVILLES, PUDC, etc.), n’aurait pu être supporté et réalisé sans une croissance forte et régulière. C’est ça la vérité !
Par la suite, des opposants ont essayé d’empester l’atmosphère politique par des bruits de pétrole et de gaz sur la base de soupçons et autres suspicions. Les bricoleurs de la réalité ont crû y trouver une aubaine pour vilipender, jeter des quolibets et éclabousser le pouvoir. Des soupçons et des suspicions comme programmes ! Dans ce domaine, à part des dénonciations infondées, on a eu droit à des prédictions quant à une malédiction du pétrole, même pas encore à l’état d’exploitation. En dépit de toutes les précautions prises par le Président de la République pour une gestion future, avec tout le sens requis de la responsabilité, du pétrole et du gaz dont la découverte, -oh divine chance !-, coïncide avec son exercice du pouvoir.
ILS INVENTERONT ENCORE DES SCANDALES !
Comme si tout cela ne suffisait pas, voilà que des opposants en mal de perspectives électorales et en déficit de propositions ont inventé l’existence de deux ou même de trois fichus fichiers, selon l’ampleur de leur fantaisie, de leur fantasme ou de leur fiction. Personne d’entre eux n’a pourtant montré, la plus petite preuve à l’appui, où se trouve le prétendu faux fichier.
Lorsque le Ministre de l’Intérieur a mis le fichier électoral en ligne, ils ont quand même persisté et signé avec l’encre de la suspicion. Soit dit en passant qu’un candidat à la candidature, apercevant la débâcle à l’horizon, a jeté l’éponge sur le ring du parrainage pour se convertir en rassembleur de l’opposition. Il n’y a pas que dans le domaine des infrastructures routières, qu’il existe des voies de contournements ! En politique, ça existe aussi ! Ils seront nombreux à laisser leurs plumes dans l’arène des parrainages. Sur ce terrain-là, il ne sert à rien de faire trop de bruit puisque ce sont des Sénégalais, pas virtuels pour un clic, qui «sanctifient» ou sanctionnent les candidats à la candidature.
A peine ont-ils fini de chercher, dans le brouhaha et le brouet de la tension de trésorerie, à se faire un «programme de campagne», les voilà qui faufilent sur le terrain de la recommandation du Comité des droits de l’homme sur l’arrêt de la CREI qui a condamné Karim Wade. Là, comme les avocats du bonhomme, spécialistes de l’activisme et de la manip, il leur faut faire d’une simple recommandation une obligation. Forcément ! Au-delà des considérations juridico-judiciaires alambiquées et des dissertations politiciennes, les Sénégalais très sensés du reste ne sont pas amnésiques. Ils n’ont point oublié les ravages financiers de Wade-fils du temps de la splendeur de son père au pouvoir. Ça, jamais !
A fortes doses de tintamarres politico-juridiques, nos porte-drapeaux du nationalisme, apôtres du patriotisme à relents parfois xénophobes, renient la décision de notre justice nationale. A qui donc ferait-on croire qu’une demande de grâce n’est un aveu de culpabilité ? Ils veulent coûte que coûte remettre Karim dans une course électorale de laquelle la loi et le droit l’ont exclu. Restaurer un ancien régime qui s’était spécialisé dans les pillages financiers. Les Sénégalais, eux, réclament leurs 138 milliards distraits. C’est tout !
Voilà donc, sans être exhaustif, la compilation des éléments jusque-là constitutifs du «programme» de certains opposants. Et ils n’ont pas fini. Ils continueront à nous servir cette cuisson immangeable sur le plat de toutes les démagogies, sur la table de toutes les fictions et sur le couvert de toutes les accusations sans fondement. A mesure qu’approche l’échéance électorale, ils s’ingénieront à inventer des scandales, à produire des révélations assaisonnées de tous les ingrédients de la mauvaise foi. Parce que c’est la seule offre politique et électorale dont ils disposent face au Président Macky Sall.
A ces symptômes et ce syndrome d’une impuissance bruyante, le Président Macky Sall a toujours répondu et continue à répondre par la puissance silencieuse de l’action. Comme en témoignent et en témoigneront ses tournées économiques dans le Sénégal des profondeurs. Certains opposants parlent de tournées électorales. Cette vieille rengaine usée sur toutes les aspérités oppositionnelles, les Présidents Senghor, Diouf et Wade les avaient entendues. Rien de nouveau donc sous le ciel politico-électoral sénégalais. Et quand eux, opposants, font des visites à l’intérieur du pays, comment ça s’appelle donc ?
Loin de tout divertissement, le Président Macky Sall prend contact avec les populations, fait l’état des lieux de ses nombreuses réalisations, livrent des ouvrages et délivrent un espoir d’un futur meilleur fondé sur ses incontestables réussites sur les plans infrastructurel, économique, social, culturel et sportif, dans les secteurs de la santé et de l’éducation. Les premières rames du TER sont arrivées pour faire entrer le Sénégal dans la modernité du transport. De tels faits n’assurent pas une santé mentale à un opposant nihiliste, qui masque son impuissance par le bruit. Ça lui donne de la sueur froide. Des urticaires. Des démangeaisons.
FRONDE CONTRE NIASSE À L'ASSEMBLÉE NATIONALE
Des députés de l’opposition, membres du groupe parlementaire Liberté et Démocratie, ont tenu une rencontre ce jeudi pour exiger l’audit de la gestion de Moustapha Niasse
Réunis à la permanence de Bokk Gis Gis, Cheikh Mbacké Bara Doli, Mamadou Diop Decroix, Toussaint Manga, Cheikh Bamba Dièye, ont indiqué que le président de l’Assemblée nationale, Moustapha Niasse, gère cette institution comme si c’était son patrimoine en violant systématiquement le règlement intérieur, son objectif étant tout simplement de contenter le Président Macky Sall.
«Comment dans un état sérieux, le budget de l’Assemblée nationale reste méconnu ? Nous passons 60 jours à discuter des budgets des instituions et une seule refuse de se soumettre c’est l’Assemblée nationale. Personne ne peut dire comment l’argent est dépensé. Le budget de l’Assemblée n’appartient ni à Moustapha Niasse ni à Macky Sall. C’est un problème que nous avons décidé de prendre à bras le corps pour imposer à Moustapha Niasse de nous dire où va l’argent», tonne l’ancien patron de l’Union des jeunesses travaillistes libérales, Toussaint Manga.
Mamadou Diop Decroix d’ajouter que la volonté d’entretenir cette opacité a atteint un degré tel que la Commission Comptabilité et Contrôle de l’hémicycle ne s’est jamais réunie alors que sa tâche est justement de contrôler l’utilisation de l’argent de l’Assemblée nationale.
"ON VOUDRAIT QUE L'EUROPE INCARNE SES VALEURS PLUS QU'ELLE NE LES PROCLAME"
Felwine Sarr est un des intellectuels africains clés du moment - Son livre « Afrotopia », est considéré comme la bible d’une nouvelle utopie africaine, invitant à achever la décolonisation - ENTRETIEN
Le Soir |
Béatrice Delvaux |
Publication 23/11/2018
aut-il restituer les œuvres d’art africaines aux pays qui ont été pillés/spoliés, et si oui, lesquelles et selon quelle procédure ? Le sujet n’agite pas que la Belgique (qui attend la réouverture le 8 décembre de l’« AfricaMuseum » à Tervuren), il est surtout très vivement discuté en France. Ce jeudi, l’historienne française Bénédicte Savoy et l’économiste/artiste sénégalais Felwine Sarr ont remis au président Macron le rapport commandé : il prône la restitution de quelque 40.000 œuvres à un continent privé de sa mémoire (lire par ailleurs).
Felwine Sarr est un des intellectuels africains clés du moment. Son livre « Afrotopia », publié en 2016, est considéré comme la bible d’une nouvelle utopie pour l’Afrique, invitant à achever la décolonisation mais surtout à une révolution culturelle faisant des Africains des acteurs, à leur façon, de leur destin.
Début décembre, son texte « Traces. Discours aux Nations africaines », interprété par le comédien burkinabé Etienne Minoungou (« Moi, Mohammed Ali ») fera l’ouverture du Musée des Civilisations Noires à Dakar (Sénégal), une première pour le continent africain, suivi d’un autre projet muséal en Algérie.
« J’ai souhaité vous parler. Vous peuples des premières aubes » : ce sont les premiers mots de ce « Discours aux nations africaines ». Parler pour dénoncer les « détrousseurs » qui ont « spolié » le continent africain ?
J’essaye de faire un discours à la jeunesse africaine, qui revient sur la longue et vieille histoire du continent de façon métaphorique depuis les origines jusqu’à nos jours. Il revient aussi sur les épreuves que le continent a dû subir mais en tentant de complexifier le regard. Je ne veux pas qu’on passe pour des victimes : les passages qui évoquent la traite négrière insistent ainsi bien sur le fait que les nôtres y ont participé. Mais le plus important pour moi, c’est de dire que l’avenir reste ouvert et qu’il est à construire, et que fondamentalement les nations africaines peuvent prendre leur destin en main. C’est ce qui m’intéresse le plus. Il faut revenir bien évidemment sur l’histoire, les rapports sont asymétriques au détriment du continent mais je n’aime pas le misérabilisme et l’idée de considérer que la responsabilité est le fait des autres. Dans les derniers actes du « Discours », je veux dire aux jeunes africains que leur héritage a laissé une trace et que c’est à eux de la féconder, au sens culturel.
L’Afrique n’est toujours pas décolonisée, écrivez-vous. Vous voulez contribuer à ce qu’elle le soit ?
Absolument. Il y a un colonialisme mental et émotionnel. Toutes les catégories à travers lesquelles on voit le futur, sont des projections venues de l’extérieur qu’on prend pour argent comptant, comme si toutes les sociétés du monde devaient apporter les mêmes types réponses aux défis qui sont les leurs, en niant leurs spécificités et leur créativité. Je ne crois pas qu’un peuple ou une nation puisse s’en sortir s’il ou elle ne se fonde pas d’abord sur ses ressources, ce qu’il ou elle a en soi. Je ne prône pas l’autarcie mais l’autonomie intellectuelle : réfléchir par soi-même et retenir ce qu’on a envie, être créatif ou emprunter là où il faut et opérer notre synthèse. Or on a toujours des thuriféraires qui viennent nous dire comment gérer nos économies, notre politique.
« Nous ne devons plus accepter d’être ce champ du monde que l’on dévaste, d’être ceux que l’on méprise, insulte et avilit. Il s’agit pour nous de ne plus collaborer à notre propre asservissement », écrivez-vous ?
Cela s’applique aux asservissements internes et externes, aux pays qui sont sous des régimes dictatoriaux. Il faut une révolution interne : les jeunes doivent prendre leur destin en main et refuser d’être si mal gouvernés. On est encore le continent objet de commisération. C’est à nous de refuser d’être l’objet de pitié.
Pour ce faire, le continent doit « réapprendre ce que lui avaient enseigné les crues du Nil » ?
Il faut faire un usage de son patrimoine, de sa mémoire et de son histoire qui ne soit pas passéiste : nous ne pourrons remonter le cours de la vallée du Nil ou retrouver les fastes de l’empire du Ghana ou du Songhaï. Ce temps-là est révolu mais il a laissé des traces. Et chaque génération réinvestit l’héritage, en retient ce qu’il veut, le reféconde et le transmet. Nous ne pouvons pas être hors sol.
Vous dites aussi aux jeunes que la paix ne se trouve pas qu’ailleurs ?
Il faut dire aux jeunes de ne pas considérer que leur Orient n’est que l’extérieur. Si vous désinvestissez les espaces de toute perspective d’espoir, de progrès et d’émancipation, plus rien n’est pas possible. On comprend humainement les motivations de ces jeunes qui quittent le continent africain : ils n’ont pas de travail, certains sont dans des zones de conflit. Les réfugiés économiques contestent, eux, un ordre qui les opprime car il ne leur offre pas de possibilités. Ils sont en train de chercher ailleurs les moyens de revenir pour trouver une meilleure place. Je leur demande de s’interroger : le travail n’est-il pas justement de contester à l’intérieur l’ordre qui nous opprime et de le transformer pour qu’il devienne un espace d’opportunités ? On doit aussi travailler sur qui on est, sur notre vision du monde, nos rêves, nos imaginaires. Beaucoup de jeunes sont attirés par les lampions de l’Europe occidentale mais ils y vivent dans des conditions très difficiles, ils travaillent au noir : ce n’est pas une vie, ils sont perpétuellement sur la route. Je suis convaincu que s’ils mettaient tout ce courage et cette énergie dans leur continent, ils changeraient leurs conditions de vie.
Quels sont les atouts du continent ?
Il a beaucoup d’atouts culturels. Pour moi, l’économie est avant tout un fait social, une relation. C’est le fondement de toutes les sociétés humaines : cultiver le lien social et produire de la relation. Et là-dessus les Africains n’ont aucune leçon à recevoir et c’est une ressource fondamentale.
Que dites-vous aux Européens : Respectez-nous ?
Le respect ne se quémande pas mais s’impose. On aurait souhaité être dans un monde où les nations se regardent avec fraternité, respect et estime en partant du fait que nous sommes d’une commune humanité, avec les visages multiples de l’expérience humaine. Toute civilisation est incomplète et à besoin de l’autre pour sa complétude. Mais nous ne sommes pas dans ce monde-là,. La première chose à faire est de renverser l’échelle de valeurs vers la qualité d’être, du vivre ensemble, la production de convivialité et de fraternité. Cela se travaille dans l’espace des idées et des représentations.
Vous êtes en colère contre le discours européen sur la migration ?
J’ai appris à ne plus être en colère mais plutôt à agir : où est-ce que je plante ma pioche ? Il y a des colères saines mais seules, elles sont improductives. Ce discours sur la migration est très problématique : on voudrait que l’Europe incarne les valeurs, plus qu’elle ne les proclame. De plus, il n’est pas intelligent stratégiquement à moyen et long terme. Le devenir du monde est cosmopolite, on ne peut pas penser qu’on peut avoir un îlot de richesses, et que le reste du monde soit mis à l’écart. C’est beaucoup plus intelligent de travailler à un monde équitable pour que chacun puisse vivre dignement, chez lui et d’organiser la circulation des uns et des autres. Un pays comme la France accueille 89 millions de touristes par an. mais elle n’a pas de place pour 100.000 réfugiés ou 33.000 demandes d’asile : c’est incroyable ! Il faut oser dire aux gens : ces gens ne viennent pas vous prendre le pain dans la bouche, ils contribuent à la société. Ce continent européen produit de l’intelligence, de l’intellectualité, du savoir : comment se fait-il qu’on ne puisse pas tenir aux opinions un discours plus constructif et réaliste, en arrêtant de jouer sur la peur ?
Quelle est l’importance du « Musée des civilisations noires » ?
Il est une forme d’inscription symbolique vers le futur. Le continent y dit son passé mais sans surpondération car il dit surtout où il veut aller et quelle civilisation il veut être. C’est important que nous ayons des lieux à travers lesquelles on se parle à nous-même comme au monde : des musées, des biennales, des événements culturels où l’on projette un discours symbolique de sens et de signification. Nous sommes dans un basculement du monde et notre continent y a un espace. La vie y renaît, la vitalité est forte, il est temps pour lui qu’il prenne le tournant civilisationnel vers plus d’humanité. Ces lieux doivent dire cela.
«Il ne s’agit pas de vider les musées français»
C’est Emmanuel Macron qui a tout déclenché. Le 28 novembre 2017, lors d’un discours à Ouagadougou (Burkina Faso), il déclarait vouloir que « d’ici cinq ans, les conditions soient réunies pour des restitutions temporaires ou définitives du patrimoine africain en Afrique ». Une première pour un président, remarque Le Monde, dans un pays qui considérait les collections nationales comme inaliénables et toute restitution impossible. L’Elysée a dans la foulée confié à l’historienne de l’art française Bénédicte Savoy et à l’économiste/artiste sénégalais Felwine Sarr une mission d’analyse qui a produit un rapport remis ce vendredi. Son contenu a été commenté à « Libération » par les deux auteurs.
Ils rappellent que 85 à 90 % du patrimoine artistique africain se trouvent hors du continent : « Une anomalie à l’échelle du monde. Cette exception justifie un rééquilibrage » Rien à voir avec une punition mais, justifient-ils, « La jeunesse africaine a droit à son patrimoine. La reconnexion à cette histoire culturelle est aussi un élan vers l’avenir. » Les chercheurs qui posent clairement la question de la captation patrimoniale comme arme de guerre ou de déshumanisation, disent avoir découvert un véritable « système » d’appropriation de l’art africain par la France via les butins de guerre, les vols ou les pillages. Et de citer cette mission qui avait acheté un masque au Mali 7 FF – le prix de 12 œufs à Paris –, alors que le même mois un masque Dogon était vendu à Drouot 200 FF – 2000 pour les plus chers. « Il ne s’agit pas de vider les musées français » affirment les auteurs. La France posséderait quelque 90.000 œuvres d’art africaines dans ses collections nationales : 46000 pourraient être visés par une procédure de restitution qui demanderait la modification préalable du code du patrimoine. « C’est un travail scientifique, nous ne nous positionnons pas de façon morale mais historique sur le parcours des objets. Et sur l’histoire de la violence symbolique et réelle de notre captation patrimoniale. » concluent les auteurs.
Un «Discours aux Nations africaines» pour prendre son destin en main
« Nous ne devons plus accepter d’être ce champ du monde que l’on dévaste. Nous devons nous dresser et chasser ces pantins désarticulés par une longue pratique de la courbette et de l’indignité. La trace nous dit de nous réhabiliter, de sortir du regard vicié de soi. Elle nous dit de naître complètement. » Ces phrases extraites de ce « Discours », sont nées d’abord dans la tête du directeur du théâtre de Namur, Patrick Colpé. Fort d’un rapport long, familial et professionnel avec le Sénégal, conscientisé par la lecture d’ » Afrotopia » de Felwine Sarr, il se dit outré par la manière dont on présente l’Afrique en Occident, dans les médias comme au théâtre. « Afrotopia amenait un changement d’angle et permettait de créer une relation différente. Je me suis dit qu’il y avait quelque chose à faire, via un texte fort qui ne maintiendrait plus le public d’ici dans sa zone de confort par rapport à ce continent. »
Patrick Colpé demande à Felwine Sarr d’écrire ce texte, inspiré du « Discours à la nation » de Celestini. L’économiste/artiste accepte, avec Etienne Minoungou comme interprète. Latif Coulibaly, ministre de la culture sénégalais, séduit par ce regard très contemporain et non patrimonial sur l’Afrique, très proche du nouveau « Musée des cinvilisations noires », a souhaité que « Traces » en marque l’ouverture début décembre. Le public devra attendre septembre 2020 pour le découvrir au Théâtre de Namur. Une tournée en Europe mais surtout dans l’Afrique subsaharienne, devrait suivre. « Parler aux populations africaines », c’est le grand souhait de Patrick Colpé et de Felwine Sarr.
MACKY ET LA SOCIÉTÉ CIVILE, AU GRÉ DES INTÉRÊTS
Ceux qui ont suivi les pas de l’opposant Macky Sall de 2008 à 2012 sont tentés de sourire en suivant ses passes d’armes avec ses anciens amis de la société civile devenus selon lui, des «politiciens encagoulés»
Il est difficile de comprendre les relations entre le pouvoir et les organisations de la société civile au Sénégal. Tellement les relations qui les lient changent au gré des intérêts de ceux qui sont au pouvoir.
En effet, en période de galère, de persécution, de chasse aux sorcières ou frappés par les rigueurs de la pratique d’opposant on fait le pied de grue aux portes des organisations de la société civile et autres défenseurs des droits de l’Homme pour un soutien. On trouve tout cela normal. Mais une fois au pouvoir, les rapports évoluent négativement. Le discours aussi et les convictions aussi. Tout ce qui était normal devient anormal. Les anciens «frères d’armes» deviennent subitement des ennemis. L’actualité brûlante au Sénégal est là pour le confirmer.
Ceux qui ont suivi les pas de l’opposant Macky Sall de 2008 à 2012 sont tentés de sourire en suivant ses passes d’armes avec ses anciens amis de la société civile devenus selon lui, des «politiciens encagoulés». Au point de chercher à asphyxier financièrement certains et à interdire d’autres de continuer à exercer leurs activités sur le territoire national. Le mouvement Y en a marre qui est devenu aujourd’hui la bête à abattre était pourtant l’un des tout premiers grands soutiens du candidat Macky Sall. A l’époque, Fadel Barro, Thiat, Kilifeu et Cie étaient, aux yeux de l’opposant Macky Sall, des jeunes conscients, patriotes et engagés. «J’ai rencontré une jeunesse très consciente engagée, patriotique, une jeunesse citoyenne qui m’a réaffirmé les principes pour lesquelles le mouvement Y en a marre a été créé ici, dans cette maison, au mois de janvier 2011», disait le candidat Macky Sall qualifié au second tour, au sortir d’une rencontre avec ces jeunes en mars 2002 à l’entre-deux-tours.«Cet esprit Y en a marre qui peut heurter certains, en réalité, est un esprit extrêmement positif pour l’approfondissement de la démocratie et le développement de la citoyenneté dans notre pays. Fadel Barro et ses amis ont montré leur choix irrévocable de poursuivre le combat qui a été entamé depuis plusieurs mois à travers ce second tour de l’élection présidentielle. Ils ont dans ce cadre décidé, à travers l’opération doggali (En finir, Ndlr), de poser le dernier jalon et donc de soutenir ma candidature pour une victoire du camp du peuple au soir du 18 mars», ajoutait le leader de l’Apr. Mais depuis, beaucoup d’eau a coulé sous les ponts. Le mouvement Y en a marre est devenu infréquentable pour ne pas dire dangereux pour la démocratie et la stabilité du régime en place.
D’autres organisations de la société civile comme Amnestyinternational sont aussi devenues infréquentables. «Amnesty international gagnerait à voir le statut de ces représentants chez nous. Je respecte Amnesty international tout comme toutes les Ong qui luttent quotidiennement et vaillamment pour les droits de l’homme. Mais lorsque les représentants de ces organisations marchent avec l’opposition, lorsqu’il s’agit d’un référendum, vont voter dans le camp de l’opposition contre le pouvoir, ces avis n’ont aucun intérêt à mes yeux. Absolument, elles sont politisées. Elles gagneraient à quitter ces organisations pour rentrer dans l’opposition et on est à l’aise. Mais quelqu’un qui manifeste avec l’opposition, ne peut pas me donner un avis de société civile», a martelé le Président Sall sur le plateau de France 24 il y a quelques jours. Une volte face qui s’explique difficilement.
Quand Macky sollicitait l’intervention des services de l’Onu contre Wade
Pourtant en 2011, à la place de l’Obélisque, l’opposant Macky Sall acquiesçait en entendant Alioune Tine et autres membres de la société civile aujourd’hui accusés d’être des politiciens encagoulés, dire clairement au président sortant Me Wade, que leur objectif n’était pas de prendre le pouvoir mais de défendre le peuple.«Notre vocation n’est pas de conquérir le pouvoir, mais de veiller au respect de la Constitution dans le but de préserver la paix», expliquait Alioune Tine alors président de la Rencontre africaine pour la défense des droits de l’homme (Raddho). «Ce qui nous intéresse, c’est la vie de la nation et des populations. Nous sommes là pour elles, pas pour prendre la présidence de la République», renchérissait Mouhamadou Mbodj du Forum civil.
Mieux, les tenants du pouvoir actuel qui font fi des décisions et autres observations ou recommandations d’organisations comme le Conseil des droits de l’Homme de l’Onu dans l’affaire Karim Wade ont à un moment donné sollicité leurs interventions. Ce fut le cas quand l’opposant Macky Sall adressait une lettre au Haut commissaire des Nations unies aux droits de l’homme en début février 2011pour «arrêter les dérives» de Wade. «Nous venons par la présente lettre porter à votre attention les violations flagrantes des droits fondamentaux des Sénégalais. Les 30 et 31 janvier derniers, cinq personnes ont trouvé la mort et des dizaines d’autres ont été blessés par les forces de sécurité à Podor et à Dakar lors de manifestations pacifiques contre la validation par le Conseil constitutionnel de la candidature illégitime d’Aboulaye Wade», disait Macky Sall à Mme Navi Pillay.«La violence d’Etat n’a qu’un seul but : Museler le peuple et en particulier la jeunesse face à la volonté du Président sortant de briguer illégalement un troisième mandat. En votre qualité de Haut commissaire des Nations unies aux droits de l’homme, nous vous demandons d’interpeller dans les meilleurs délais l’Etat du Sénégal pour ses violations du droit à la vie ainsi que du droit inaliénable de tout peuple à s’exprimer librement et à manifester pacifiquement pour le respect de la Constitution et de la démocratie», ajoutait-il. Pourtant, sept ans après, c’est exactement ce que demandent aujourd’hui, l’opposition sénégalaise et les membres de la société civile. Autre temps, autres mœurs.
Avant Macky Sall, son prédécesseur avait tenté le même coup en accusant Alioune Tine et consorts d’être des politiciens encagoulés. Au point de brandir la menace d’exclure la Raddho des organisations qui devraient assurer l’observation du scrutin présidentiel de 2012.«La Raddho mène un combat contre le pouvoir d’un côté et de l’autre dit : ‘Je veux être observateur’, c’est inacceptable», disait Serigne Mbacké Ndiaye, porte-parole de Abdoulaye Wade, aujourd’hui dans la mouvance présidentielle. Il ajoutait : «Il est hors de question que la Raddho soit observateur. (…) Il faut que les règles du jeu soient respectées et il faut des gens neutres pour assurer la supervision du scrutin». La suite, on la connait. «Ils changent de camp, mais la Vérité hélas, reste toujours la Vérité…Elle est comme l’eau, incolore et inodore. Elle appartient toujours à elle-même. Elle est têtue, déterminée et constante. Elle ne change pas et n’appartient à personne. Elle traverse toujours le temps et transcende les contingences, les clivages et les hommes.Elle, c’est la Vérité d’hier, qui est plus que Vérité aujourd’hui. Ce qui était faux hier, l’est plus qu’aujourd’hui. Qu’importe les acteurs et les auteurs, les coupables et les victimes», rappelle Abdourahmane Sow coordonnateur de la Cos/M23.
ABDOUL JUGE MACKY
Relations avec le chef de l’Etat, situation économique, unité de l’opposition, rôle des religieux dans la vie publique…Abdoul Mbaye dit tout - ENTRETIEN
Qu’est-ce qui a été déterminant dans votre engagement, en 2012, aux côtés de Macky Sall qui venait d’être élu président de la République ?
Notre compagnonnage n’a pas commencé en 2012, mais en 2011. J’ai toujours été éloigné de la politique au cours de ma carrière professionnelle. Mais, en 2011, j’ai cru, à tort ou à raison, qu’il y avait une montée des dangers et j’avais décidé de m’impliquer davantage, en essayant d’apporter un soutien au candidat que je considérais comme étant le meilleur, parmi ceux qui étaient en compétition. C’est dans ces conditions que j’avais décidé d’accompagner le candidat Macky Sall avec son programme ‘’Yonu Yokute’’, sans jamais demander quoi que ce soit en contrepartie.
Je lui faisais des notes régulières au cours de sa campagne pour proposer, orienter et corriger certaines imperfections. C’est même avec surprise que j’avais appris ma nomination comme Premier ministre, quand il a été élu. J’étais parti en mission juste après le deuxième tour. Le président m’avait vraiment surpris en me demandant, alors que je l’appelais pour le féliciter, quand j’allais revenir. Dans l’avion, je me suis dit qu’il voulait peut être me nommer ministre des Finances et j’avais déjà préparé ma réponse négative. Je lui aurais proposé de rester le conseiller que j’ai été pendant la campagne. Et quand je suis revenu, il m’a surpris en me proposant directement les fonctions de Premier ministre. Je pensais, en ce moment-là, que j’allais être en mesure d’influer sur le fonctionnement de l’Etat, celui de l’économie du Sénégal, dans le respect des orientations qu’il avait lui-même définies à travers le ‘’Yonu Yokute’’.
De son vivant, pensez-vous que votre père (Kéba Mbaye : magistrat, ancien président du Conseil constitutionnel) vous aurait accordé sa bénédiction, lui qui n’était souvent pas tendre avec les hommes politiques ?
(Il se redresse) Bon, il avait été observateur de la politique sénégalaise. Il a toujours refusé de faire de la politique. Je ne vous cache pas que j’ai beaucoup pensé à lui avant d’accepter cette fonction, mais il faut souligner qu’à l’époque c’était une fonction qu’on m’a proposée en tant que technocrate. Il n’était pas prévu que je devienne membre d’un parti. Je restais toujours convaincu que la politique n’était pas mon affaire. Lorsque j’ai décidé de la faire, je suis allé réinterroger un courrier que mon père m’avait adressé quand j’étais nommé, très jeune, Pdg de la Banque de l’habitat du Sénégal. Dans son avant-dernier paragraphe, j’ai retrouvé des lignes qui annonçaient peut-être mon entrée en politique. Il commençait par dire : ‘’Ne fais surtout pas de la politique, mais un jour viendra où tu pourras dire ce que tu voudras là où tu voudras.’’ J’ai considéré que c’était une manière de me dire qu’un jour viendra, tu pourras faire de la politique.
La séparation avec le président a été plus ou moins brutale. Avez-vous eu des regrets ?
Non ! La séparation n’a pas été brutale. Elle a même été amicale, parce que moi j’ai une conception un peu particulière de la fonction que j’occupais. Cette conception tient du fait que j’ai été mandataire social et dans les sociétés anonymes, le directeur général est révocable ad nutum. Le Conseil d’administration peut mettre un terme à ses fonctions à tout moment. C’est encore plus valable pour un poste de Pm qui est la fonction la plus précaire au monde. J’ai juste considéré que le chef de l’Etat avait de nouvelles perspectives et avait besoin d’un nouveau Premier ministre… C’est donc en de très bons termes que nous nous sommes séparés. Comme je l’ai dit dans mon ouvrage, je lui ai répété ce que je lui avais dit au moment de ma nomination : ‘’Vous pouvez mettre fin à mes fonctions demain, je vous serais reconnaissant de m’avoir choisi aujourd’hui.’’
Certains vous accusent pourtant d’être animé par un désir de vengeance ?
Non. Pas du tout. L’essentiel, pour moi, était d’occuper pleinement les fonctions qui m’étaient dévolues. J’ai voulu laisser un bon souvenir et je crois que c’est le cas. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle j’ai écrit un ouvrage précisant tout ce que j’ai pu faire avec l’équipe gouvernementale qui m’avait accompagné, avec les fonctionnaires de mon cabinet. Et je n’ai pas entamé ma carrière politique tout de suite. Avant cet engagement, j’ai eu à créer un club de réflexion qui s’appelle Travail et vertu. Lequel club œuvrait pour les décideurs de ce pays, à commencer par le président de la République. J’ai donc continué à travailler pour le chef de l’Etat, parce que considérant qu’il n’était mu que par l’intérêt du Sénégal. C’est donc très réducteur de parler de vengeance. Et puis me venger de quoi ? Pour moi, c’est plutôt marrant. Encore une fois, mon engagement est le fruit d’une analyse lucide et logique. Je suis de ceux qui pensent que la politique doit cesser d’être ce qu’elle est, c’est-à-dire un moyen de s’enrichir au détriment du plus grand nombre. Je ne suis pas dans les débats de personne. Encore moins dans le ‘’ôte-toi je m’y mette’’. La politique doit être un sacerdoce au service des populations ; voilà le message que je m’efforce de porter aux Sénégalais.
Quel a été le déclic qui vous a poussé à entrer en contradiction avec Macky Sall ?
D’abord, je n’entre pas en contradiction avec une personne. J’ai considéré simplement que je peux apporter quelque chose à mon pays, en faisant de la politique. Par contre, je suis en opposition avec la coalition au pouvoir parce qu’ils sont sur une route que je n’accepte plus. J’avoue que ce qui a véritablement fait déborder le vase, c’est le renoncement au mandat de 5 ans en ayant recours à un référendum qui était inutile. Manifestement, c’était un reniement et, au même moment, des bruits insistants faisaient état d’un développement de la corruption. J’avais aussi remarqué que le traitement des contributions faites pour aider à la résolution de certains problèmes, comme par exemple la relance du tourisme, la lutte contre la mendicité des enfants, la recherche d’une productivité accrue, ainsi que l’amélioration de la production rizicole, me laissait fortement douter de la volonté du régime de vouloir le bien des Sénégalais.
Sur quoi vous fondez-vous pour dire qu’il y a des faits de corruption ?
Je commençais d’abord à avoir des informations sur le scandale Petrotim et Ovido Tender concernant le pétrole. Concernant le tourisme, je me suis rendu compte, sur le tard, qu’on avait choisi de sacrifier le redressement de l’activité touristique du Sénégal sous le prétexte d’un contrôle de sécurité en mettant en place un système de visas qui avait surtout aidé à enrichir un personnage sulfureux…
En tant que candidat à la prochaine présidentielle, pouvez-vous revenir sur les grands axes de votre programme ?
Nous considérons que le régime actuel se bat contre l’émergence du Sénégal. Il fait des choix qui sont dramatiques, qui ne sont même pas conformes à l’esprit du Pse qui repose sur un développement de l’agriculture, la recherche d’une croissance inclusive et qui donne la priorité à des secteurs comme l’agriculture, le tourisme… L’émergence doit également reposer sur une modification structurelle de notre économie. Elle suppose un renforcement de notre capital humain. Et sur tous ces chantiers, il y a absence de progrès ou échec.
Parlons d’abord de l’essentiel : ‘’la restructuration de l’économie’’ qui est totalement absente. On ne constate aucun effort visant à faire reposer l’économie du pays autrement que sur les secteurs primaire et tertiaire par un développement du secteur secondaire. Avez-vous vu plusieurs usines inaugurées depuis que le Pse est actif ? Non. Avez-vous vu un renforcement de l’agriculture, notamment par le développement de l’agro-industrie ? Non…
Le gouvernement tient un tout autre discours et parle même de production agricole record ?
Ce sont des chiffres mensongers. Ce qu’on constate, c’est que la faim et l’insécurité alimentaire se sont installées dans notre pays. Il n’y a pas non plus de renforcement du capital humain. Le système éducatif est en déliquescence. On voit des étudiants mal formés. L’Etat peine à payer leur scolarité dans les instituts privés. La construction de nouvelles universités prend du retard au moment où l’on dépense des sommes énormes dans des infrastructures de moindre importance. Ce régime nous a, en effet, entrainés dans de grands projets qui font fonctionner des entreprises appartenant à d’autres nations. Ce qui pose en amont le problème de la politique d’endettement avec les ponctions sur les recettes budgétaires au titre du service de la dette ; et en aval un transfert des bénéfices réalisés sur les chantiers ouverts par ces mêmes entreprises. Globalement, nous ne sommes pas en présence d’un régime qui recherche l’accélération d’une croissance inclusive.
Donc, sans remettre en cause les choix principaux du Pse parce qu’ils sont justes. Nous, nous décidons d’œuvrer différemment en inversant les priorités. Ces priorités, pour nous, c’est la lutte contre la faim. Il est totalement anormal que dans un pays ayant 58 ans d’indépendance, qu’on ait encore faim. C’est inadmissible. C’est cela la priorité et non la construction de stades ou de nouveaux palais présidentiels. Ensuite, il faut lutter contre l’extrême pauvreté. Pour ce faire, il faut créer de la résilience au niveau de la campagne. Pour ce qui est des villes, il faut lutter contre la pauvreté par le développement de l’artisanat, l’absence de mépris vis-à-vis de la toute petite entreprise du secteur informel. Parce que c’est là où se trouvent les Sénégalais qui travaillent, les Sénégalais qui souffrent, qui ont besoin d’être assistés, d’être aidés pour faire croitre leurs microentreprises. C’est donc une véritable résolution que nous proposons.
Vous parlez de développement du monde rural. Des programmes comme le Pudc et le Puma ne s’inscrivent-ils pas dans cette dynamique ?
Moi, je viens d’une tournée dans le monde rural. J’ai constaté que les paysans souffrent. Ensuite, le peu d’arachide qu’ils ont pu produire et vendre, on leur doit des arriérés. Ils n’ont en plus ni eau ni électricité. Les fameuses routes du Pudc, elles ont une peur extrême de la pluie. Il suffit qu’il pleuve pour qu’elles soient emportées. Pour ce qui est des forages soi-disant, il faut d’abord savoir qu’il y a une grosse contribution des populations et un tout petit investissement, genre réserve citerne pour les maisons de familles nombreuses qu’on présente comme forage pour tout un village. Il y a donc beaucoup de cinéma. Les populations sénégalaises souffrent profondément dans leur chair, dans le non accès aux services essentiels que sont l’eau, l’électricité, parfois même le téléphone dans certaines zones où ils utilisent le réseau d’autres pays frontaliers comme la Gambie.
Comment pouvez-vous expliquer tout ça dans un contexte où l’on a quand même enregistré une croissance durable, ces dernières années ?
C’est évidemment une grosse contradiction qui repose sur des statistiques erronées manipulées par le gouvernement. Cette croissance de 7,2 % n’existe pas. Et d’ailleurs, sur leurs propres chiffres avant réévaluation du Pib, le revenu en dollar du Sénégalais moyen n’avait pas évolué les quatre dernières années. Il y a donc mensonge manifeste, organisé autour des productions agricoles. On fait doubler la production céréalière en 2017. Ce qu’on ne voit nulle part. La preuve : il y a la faim constatée par l’Onu et acceptée par les autorités sénégalaises. Comment est-ce possible de parler de doublement de la production dans un contexte où les gens ont faim ? Ce n’est pas possible. On annonce 1 million 400 mille tonnes d’arachide pour 2017-2018, ce qui serait un record absolu, car on ne l’a jamais fait. En tant que banquier, cela aurait nécessité au minimum 250 milliards de francs Cfa, si l’on considère le prix qui a été fixé.
Or, on nous parle de 30 à 40 milliards mobilisés. Mais c’est du bidon. Il en est de même pour la campagne précédente où l’on nous parlait d’un million de tonnes. Au même moment, le directeur de la Sonacos se plaignait de ne pas atteindre son objectif qui consistait à collecter 250 000 tonnes. Il faut aussi savoir que la capacité totale de l’industrie huilière du Sénégal ne dépasse pas 500 mille tonnes ; et ce n’est que la capacité théorique. La capacité fonctionnelle serait à 350 000 t. Où passe donc le reste de l’arachide, puisque ce n’est pas exporté ? Cela ne peut pas être consommé. C’est un mensonge. L’autosuffisance en riz, même chose. Ils ont dû renoncer, l’année dernière, parce que c’était un message trop flagrant. Jusqu’en juin 2017, date butoir, ils continuaient de dire qu’ils vont atteindre l’objectif malgré les importations qui ne fléchissaient presque pas. C’est finalement le président de la République qui avait corrigé son ministre, en le reportant en fin 2018. Nous y sommes et les prémices, on ne les voit même pas.
A vous entendre, vous ne faites plus confiance aux fonctionnaires en charge d’élaborer ces statistiques ?
Ce que je sais, c’est que les chiffres sont faux. Ce qui est également sûr, c’est qu’on a assisté à une politisation extrême de l’Administration sénégalaise. On n’a jamais atteint un tel niveau de politisation. Aujourd’hui, même le moindre recrutement dans la Fonction publique est soumis à l’appartenance à l’Apr. Mais c’est une catastrophe. Ce qu’il y a de plus grave, c’est qu’on ne leur demande ni des compétences ni des résultats, mais des résultats électoraux. Même pour la collecte de parrains, on leur assigne des objectifs. Ce régime a mis à terre l’Administration et l’économie de notre pays.
Ces chiffres que vous contestez reçoivent souvent la caution par des institutions internationales et régionales. Diriez-vous que ces organisations sont complices du gouvernement ?
Ces institutions n’opèrent pas un contrôle effectif des chiffres. Elles peuvent simplement mettre en exergue les incohérences. Mais je puis vous dire, parce que j’y ai gardé des contacts, qu’elles en rigolent parfois. Quand on leur annonce des chiffres complètement anormaux, parfois ça fait rire aux éclats. Mais, quelque part, ça ne les gêne pas beaucoup. Tant que l’option gouvernementale principale consiste à privilégier tout ce qui est grands projets, tout ce qui est contribution au commerce international par de l’endettement extérieur. Dans une certaine mesure, la raison d’être de ces institutions de Breton Woods, c’est le fonctionnement de ce commerce international. Mais arrive un moment où ils sont obligés de faire des constats et ils l’ont fait récemment pour les finances publiques sénégalaises. Obligeant le ministre des Finances d’admettre ce que nous lui avons toujours signalé.
Certains projets sont aujourd’hui à l’arrêt, dénonce la Banque mondiale, pour absence de la contrepartie de l’Etat. Quelle lecture en faites-vous ?
Nous avons affaire à des spécialistes de la politique, incompétents, dès lors qu’il s’agit de gérer l’économie et les finances publiques. C’est la première fois d’ailleurs, depuis plusieurs années, qu’on ait un ministre des Finances politicien de premier plan. A partir de ce moment, on oublie tout le reste. La priorité, pour le gouvernement, c’est la politique, y compris les dépenses publiques, l’endettement… A mon avis, on est sur une pente et ça ne va pas s’arrêter tant que ce régime restera en place.
En quoi le changement de l’année de base a permis de donner une nouvelle santé aux statistiques économiques ?
Il faut relever que c’est une pratique assez courante. Cela a permis d’augmenter le Pib du Sénégal de 29,4 %. En langage plus clair, cela veut dire que, soudain, les Sénégalais sont devenus plus riches. Je ne sais pas si vous l’avez ressenti, mais moi non. Cela a permis au gouvernement de donner l’air d’un gouvernement qui respecte les ratios. C’est le cas du service de la dette, du taux d’endettement, des dépenses par rapport au Pib… Si on ne l’avait pas changé, on allait droit vers le mur. Cela donne donc en apparence une nouvelle virginité statistique en termes de critère qui permet de calculer la solvabilité d’un Etat.
Vous avez été aux législatives de 2017, mais vous n’avez pas réussi à obtenir ne serait-ce qu’un siège de député. N’est-ce pas un échec ?
Les élections sont intervenues six mois seulement après la naissance de notre parti. Deux choix étaient envisageables. Soit on n’y va pas parce qu’on est très jeune avec un parti pas suffisamment structuré… Soit on y va pour apprendre. Nous avons choisi la deuxième option. C’est vrai que ça aurait été un coup extraordinaire, mais le fait de ne pas en avoir n’est pas une fin en soi. On a appris comment former une coalition, comment participer à des élections. Nous avons tiré les leçons de cette participation et mieux nous armer pour le futur. Personnellement, il n’était même pas prévu pour moi d’aller siéger à l’Assemblée nationale. J’apportais mon image, mais il était prévu que je me désiste au profit de la deuxième personne.
La date limite pour la campagne de parrainage arrive à grands pas. Où en êtes-vous avec la collecte ?
On a mis en place tout un dispositif. Comme on le sait, c’est un système mis à dessein pour éliminer des candidats. La tâche a été rendue plus difficile par le recours à l’achat de conscience. Ils ont transformé la collecte en un marché de surenchère. Nous, nous avons le souci de faire valoir nos idées, d’attirer l’attention des populations sur ce que doit être la politique. C’est cela notre priorité. Mais on s’évertue à avoir le nombre de parrains. On pense que ce sera possible, mais on n’exclut pas non plus l’hypothèse inverse. En ce moment-là, il faudra à un moment donné envisager d’alternatives.
Pourquoi n’avez-vous pas choisi d’aller à ces joutes avec tous ceux qui prônent comme vous la rupture dans la gouvernance publique ?
L’option de se regrouper était une bonne stratégie pour des élections législatives. Ça ne l’est pas pour la présidentielle. Le chef de l’Etat qui est un manœuvrier hors-pair l’a parfaitement compris et c’est pourquoi on a eu autant de partis en compétition lors des législatives. C’est aussi pour la même raison qu’il veut restreindre au maximum le nombre de compétiteurs pour la présidentielle. Un regroupement à partir du premier tour joue en faveur du candidat de la majorité.
Mais dans cette perspective, est-ce que vous ne risquez pas d’être largués par les grands partis de l’opposition ?
Encore une fois, l’élection présidentielle est un moment important dans la vie d’un pays. Nous sommes un parti, il est donc normal qu’on participe à l’expression universelle des suffrages. Mais ce n’est pas notre priorité. Nous sommes porteurs de valeurs, nous sommes porteurs d’un message fort concernant la manière de faire la politique.
Nous souhaitons ainsi agir sur les mentalités, sur les consciences en étant conscient que ce n’est pas un combat facile qui peut se gagner en 1 an ou 2 ans. Par contre, on prépare déjà cette alliance future avec les partis avec lesquels nous partageons les mêmes valeurs. On se promet un soutien respectif, pas dans le sens d’un partage du pouvoir comme ce à quoi on a assisté jusque-là. Je suis président de la République. Toi, je te donne l’Assemblée nationale. Toi, je te crée un Haut conseil des collectivités territoriales… Nous ne sommes pas dans cette logique, mais dans une démarche programmatique où c’est l’intérêt du Sénégal qui va être mis en avant. Nous nous sommes dit : entendons-nous sur un programme minimum correspondant aux intérêts de notre pays.
Que reprochez-vous au gouvernement dans la gestion du pétrole et du gaz ?
Il y a eu des attributions de permis qui n’ont pas respecté la loi du Sénégal. Ce qui est extrêmement grave. Un permis a été octroyé sur la base des informations mensongères données par un ministre, sous la forme d’un rapport de présentation de décret. A la demande de qui ? Pourquoi les attributions diffèrent d’un opérateur à un autre ? Pourquoi accorder à une entreprise un privilège auquel les autres n’ont pas droit ? Comment on a fait pour choisir telle société et non telle autre ? Nous avons quand même le droit de savoir et j’ai adressé aux autorités une lettre allant dans ce sens. Publier les contrats seulement, c’est de la poudre aux yeux.
Concernant le dossier Petrotim, le gouvernement se défausse souvent sur l’ancien régime qui serait responsable de cette attribution ?
C’est un mensonge. Dans ce cas, le processus avait été stoppé, a donné lieu à une enquête de l’Inspection générale d’Etat. Des recommandations ont été faites, mais elles n’ont pas été respectées. C’est donc bidon comme argument. Si nous sommes élus, nous allons faire un audit approfondi de tout ce qui a été signé, parce que des décisions ont été prises en contradiction avec les intérêts du Sénégal. Il sera difficile, dans certains cas, de revenir sur les engagements sans prendre de gros risques. En fonction de ce qui pourra être révisé dans le sens des intérêts du Sénégal, on décidera de l’attitude à adopter.
Le ministère de l’Intérieur a récemment reçu l’opposition qui réclamait un audit complémentaire du fichier. N’est-ce pas preuve de bonne volonté ?
Vous savez, on réclame quelque chose depuis un an… Le régime est constamment dans la ruse. Ils laissent l’opposition jeter un regard sur un fichier sur lequel il n’est plus possible d’apporter des corrections. C’est minable, à mon avis.
Quel commentaire faites-vous de la décision de ne pas matérialiser les constats du Comité des Droits de l’homme des Nations Unies dans l’affaire Karim Wade ?
A manipuler une partie de la justice pour obtenir des décisions politiques, on finit par porter atteinte à la crédibilité de l’ensemble du système judiciaire sénégalais. C’est malheureusement ce qui est arrivé. Et ce sont nos remarquables magistrats qui en font les frais. Cette perte de crédibilité s’est traduite par des condamnations par pratiquement toutes les juridictions et instances internationales. L’éthique et le comportement chevaleresque auraient recommandé de faire amende honorable pour l’image de notre pays, de notre justice. Dans un pays qui ne respecte pas la justice, il faut craindre des mouvements de révolte.
Pensez-vous que la traque des biens mal acquis a été dévoyée de son objet initial ?
C’est effectivement le cas. La traque doit exister. Elle ne doit jamais cesser. Dans notre programme, nous avons d’ailleurs promis de corser les sanctions en matière de crimes économiques. On ne se rend pas compte combien d’années de labeur d’un paysan on a volé quand quelqu’un dilapide des milliards. Il faut donc être très sévère avec ceux qui détournent l’argent du contribuable. Nous proposons même de rendre ces peines imprescriptibles. Par contre, il n’y aura pas de deux poids deux mesures. Il ne doit y avoir ni protection ni chantage comme c’est le cas actuellement.
De l’intérieur, comment vous avez vécu ce procès contre Karim Wade ?
Je n’étais plus aux affaires au moment du procès. Mais, personnellement, j’ai été dans une démarche consistant, compte tenu du contexte de l’époque, à privilégier une documentation très précise de ce qui s’était passé et de ce qu’on pouvait reprocher à une liste de personnes qui avaient été ciblées. Malheureusement, la démarche que j’avais proposée n’a pas été retenue.
Aujourd’hui, le président a évoqué une possibilité d’étudier une amnistie pour Karim Wade et Khalifa Sall. Comment l’avez-vous accueillie ?
Le principe est scandaleux. C’est incroyable que l’amnistie soit ainsi dévoyée. C’est la première fois que j’entends un chef d’Etat proposer l’amnistie avec en contrepartie un bénéfice direct. En clair, il leur dit : vous êtes des adversaires dangereux. Svp ne vous présentez pas contre moi. Si je passe, je vous amnistie. Cela veut dire tout simplement qu’il les a condamnés pour qu’ils ne puissent pas participer.
Pourquoi vous vous en prenez rarement à vos amis banquiers qui, pourtant, font également beaucoup souffrir les consommateurs ? Ce qui n’est pas sans contribuer au faible taux de bancarisation ?
C’est vous qui le dites, mais j’ai fait pas mal de propositions allant dans le sens d’un accroissement de la bancarisation au Sénégal... Personnellement, je considère qu’il y a trop de banques au Sénégal, même si cela peut vous paraitre contradictoire. Certains pensent que plus il y a de banques, plus on a un taux de bancarisation important.
Ma position a toujours été le contraire. Plus il y a de banques, plus les opérations sont éclatées, moins les banques gagnent de l’argent par le volume et plus elles cherchent à le faire par le coût de leurs services, le coût de leur crédits. Ce qui fait que l’on se retrouve dans un système d’opérations bancaires chères et on en exclut une grande partie de la population. En revanche, si on fait le choix d’une concentration importante du système, l’effet volume joue. Les marges peuvent être réduits et sur le coût des services et sur le coût du crédit. Et l’accès devient plus aisé, plus facile. Maintenant, le mal est fait et il n’existe aucune remise en cause de cette dispersion bancaire. Il faut le regretter parce que la tendance mondiale est à la concentration…
Il y a aussi les prélèvements illégaux de frais par les banques, malgré les directives de la Bceao. Qu’est-ce qui l’explique ?
S’il y a des pratiques illégales, il faut les dénoncer. Mais, encore une fois, avec leurs petits bilans, les banques, pour survivre, ont besoin de mettre les frais à certains niveaux. Il y a toutefois des frais qui ne se justifient pas. Il appartient aux associations de consommateurs de mener la lutte.
Votre point de vue sur l’intervention des religieux dans la sphère politique ?
Très sincèrement, ça me désole. La politique, ce n’est pas seulement être acteur. C’est aussi en parler. Le religieux doit être à équidistant pour pouvoir jouer son rôle d’arbitre lorsque les populations souffrent, lorsque nous sommes dans des situations qui heurtent la morale. Trop souvent, ils se laissent entrainer par les politiciens du pouvoir qui ont les moyens. Ils ne doivent pas se laissés entrainer dans des débats qui ne sont pas les leurs.