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Par Fatou Warkha SAMBE

EN COLÈRE ET HEUREUSE

Le rêve très explicite de beaucoup d’Hommes dans nos sociétés, c’est de voir les féministes malheureuses, seules, aigries. Dans cette vision étriquée, une femme qui n’organise pas sa vie autour d’un homme est incomplète et frustrée

Fatou Warkha Sambe  |   Publication 23/06/2025

Le rêve très explicite de beaucoup d’Hommes dans nos sociétés, c’est de voir les féministes malheureuses, seules, aigries. Cela les rassure. Cela conforte leur vision du monde : celle où le bonheur d’une femme passe nécessairement par la présence d’un homme. Dans cette vision étriquée, une femme qui n’organise pas sa vie autour d’un homme est incomplète et frustrée.

Leur incapacité à concevoir un bonheur féminin autonome révèle une insécurité profonde liée à la perte de contrôle : ils refusent de perdre leur rôle central, leur pouvoir affectif, leur statut de référence. Cette obsession est bien plus qu’un cliché : c’est une stratégie de disqualification. Car dire qu’une femme libre est malheureuse, c’est chercher à disqualifier sa liberté elle-même. Or, nous sommes nombreuses à construire nos existences sur d’autres bases : l’autonomie, la dignité, l’amitié, la sororité, la création, la solidarité. Des bases que ce système d’oppression ne comprend pas, car elles ne tournent pas autour de lui.

Dès le plus jeune âge, les filles apprennent à se contenir. La colère est perçue comme la rupture ultime avec ce que la société attend des femmes : patience, douceur, soumission. Dès l’enfance, on nous enseigne à craindre notre propre force. On nous apprend à étouffer la colère comme on étouffe un cri. Mais cette émotion, si redoutée, est peut-être l’une des plus révélatrices : une femme en colère n’est pas une femme déséquilibrée. C’est une femme qui a cessé de se taire. Et dans un système qui ne tient que parce que les femmes se taisent, cette colère est une menace réelle et nécessaire.

Cette émotion est tellement mal vue sur le visage d’une femme qu’elle devient automatiquement suspecte. On la lit comme un signe de déséquilibre, de solitude, de folie. Cette association n’est pas anodine : elle s’inscrit dans une longue histoire de pathologisation des femmes insoumises. Celles qui parlaient trop fort, qui refusaient les normes, étaient qualifiées d’hystériques, d’instables, voire de possédées. Leur refus n’a pas été lu comme politique, mais comme pathologique. Une manière de les neutraliser. Aujourd’hui encore, cette lecture perdure : une femme en colère serait irrationnelle. Mais cette idée ne vise qu’un seul but : délégitimer nos paroles et éviter qu’elles soient entendues comme ce qu’elles sont : des actes de résistance.

Nous sommes en colère, oui. Et je me demande même comment ne pas l’être dans une société aussi injuste, qui banalise les violences, récompense la soumission et marginalise les voix qui dénoncent. Notre colère n’est pas un dysfonctionnement : c’est une réponse saine à l’oppression. Elle est le miroir de ce que ce monde inflige aux femmes, jour après jour.

Cette colère dérange parce qu’elle désobéit. Parce qu’elle échappe aux règles établies, aux attentes sociales, aux mécanismes de contrôle. Et parce qu’elle désobéit, beaucoup souhaiteraient qu’elle soit punie -par le malheur, par la solitude, par la honte. Mais elle est tout l’inverse : elle est résistance, clarté, fidélité à ce qui est juste. Ce qui dérange, c’est qu’une femme puisse refuser de se soumettre sans sombrer. Qu’elle puisse dire non, et rester debout. Qu’elle puisse être en colère et heureuse.

Cette colère ne fait pas de nous des femmes malheureuses et aigries. Comme l’écrit Audre Lorde, notre colère est «un carburant, pas un fardeau». Elle nous pousse à prendre la parole, à agir, à transformer. Bell Hooks, elle, nous rappelle que l’amour et la justice ne peuvent se construire sans une reconnaissance de la douleur : «La colère, bien dirigée, est un acte d’amour pour soi et pour les autres.» Elles nous ont appris que cette émotion ne devait pas être redoutée, mais comprise comme une boussole politique. Une femme en colère est une femme qui refuse l’injustice, et cela ne la rend pas malheureuse, bien au contraire. C’est dans cette capacité à nommer, à refuser, à rêver d’autres possibles, que réside une joie profonde, une forme de puissance joyeuse que le système patriarcal n’a pas les outils pour interpréter.

Et puis, il y a du bonheur dans cette colère. Un bonheur discret, profond, inébranlable. Celui de se savoir du bon côté de l’histoire. Celui de vivre alignée avec ses principes, de pouvoir dire non sans se trahir, de dénoncer ce que d’autres taisent. Ma colère est une fidélité à moi-même, à mes valeurs, à celles qui se battent. Il y a une joie réelle dans le fait de savoir que nos colères améliorent la vie d’autres femmes, même discrètement. Il y a de la fierté dans le fait de se tenir debout pour d’autres, de devenir un point d’appui. Etre cette personne sur qui une sœur peut compter, c’est aussi cela le bonheur. Il ne réside pas dans la conformité, mais dans l’engagement. Et ça, aucun pouvoir ne peut le comprendre, ni le voler.

Beaucoup d’Hommes, ancrés dans une culture de domination, sont incapables d’imaginer qu’une femme puisse être heureuse sans leur regard, leur approbation, leur présence. Ils veulent croire que si nous sommes en colère, c’est parce qu’ils nous manquent. Mais savent-ils seulement ce qu’est le bonheur ? N’ont-ils jamais envisagé la joie comme une puissance qui se construit en dehors de toute emprise ? Une joie politique, ancrée dans l’autonomie, l’amour de soi, la sororité, la dignité retrouvée. Comme le dit Hooks, «le véritable amour ne peut exister que là où il y a de la liberté» et notre joie naît précisément de cette liberté reconquise. La joie féministe n’est pas un luxe, c’est une réponse à la dépossession. C’est refuser de laisser le plaisir, la fierté, le bien-être affectif et spirituel entre les mains de ceux qui nous dominent. Etre heureuse, pour une féministe, ce n’est pas échapper à la douleur : c’est ne plus se définir par le regard des autres. Notre joie leur semble impossible, parce qu’elle naît d’un espace qu’ils ne maîtrisent pas, un espace qui leur échappe ; fait d’autonomie, de liens choisis, de luttes communes. C’est cela qui les trouble : une allégresse qui ne se nourrit ni de leur regard ni de leur validation.

Cette idée selon laquelle les femmes, entre elles, ne peuvent être que rivales a été longuement entretenue. Mais qui alimente cette guerre ? Qui en tire avantage ? Un système qui tremble à l’idée que les femmes soient unies. C’est une vieille stratégie : diviser pour mieux régner. Injecter la méfiance, fabriquer la compétition, saboter la sororité. Pourtant, les femmes ne sont pas des ennemies naturelles. Elles ont été rendues étrangères les unes aux autres. Et pourtant, chaque fois qu’elles se regardent avec confiance, le système vacille. La prise de conscience de ces mécanismes d’opposition rend aujourd’hui plus forte encore l’alliance féminine. Il est désormais possible de se reconnaître, de s’écouter, de se protéger. Les moments d’union deviennent des espaces puissants, construits selon leurs propres définitions, règles et temporalités. Ce qui a été perçu comme de la dispersion se révèle être un éveil. Et ce qui dérange aujourd’hui, c’est cette entente retrouvée.

Des féministes avant nous ont embrassé cette colère. Leur rage n’était pas une faiblesse, mais une lucidité. Elles nous ont appris que la colère est une alliée. Une ressource. Une force de transformation. Et aujourd’hui encore, c’est elle qui nous pousse à marcher, à écrire, à créer des espaces de sororité. Cette colère fait peur, car elle est puissante. Et parce qu’elle révèle ce que l’ordre établi préfère ignorer : que les femmes ne sont pas là pour endurer, mais pour exister pleinement.

Nous sommes heureuses, oui parce que nous ne vivons plus dans l’illusion que notre bonheur dépend d’une reconnaissance extérieure. Nous savons que le bonheur n’est pas un privilège accordé par les puissants, mais un espace que l’on s’arrache. En refusant de placer les hommes au centre de nos existences, nous avons déplacé le cœur de notre joie : vers nos désirs, nos engagements, nos communautés. Il y a une force immense à aimer sans crainte, à s’aimer sans conditions, à créer sans permission. C’est un bonheur tissé d’actes de résistance et de soin, et cela aussi, c’est insupportable pour ceux qui nous veulent dépendantes.

Si cela rassure certains d’imaginer que les féministes sont malheureuses, libre à eux de s’accrocher à cette illusion. Mais la vérité, c’est que ce bonheur supposé n’est pas plus présent chez celles et ceux qui exercent ou défendent la domination. Peut-être même moins. Car il n’y a aucun épanouissement dans un pouvoir qui vacille dès qu’il est contesté. Aucun bonheur à vouloir faire taire celles qui, précisément, ont choisi de vivre debout.

Note :

Dans ce texte, le mot «Hommes» avec un H majuscule désigne à la fois les hommes et les femmes socialisé.es dans un système patriarcal et participant à son maintien.

Les citations : Audre Lorde, The Uses of Anger: Women Responding to Racism (1981) Bell Hooks, All About Love: New Visions (2000).

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