AMADOU BA, L’HOMME QUI ETOUFFE SES AMBITIONS
Secret de Polichinelle ou fantasme politique ? Force est de constater que l’ancien ministre de l’Economie et des Finances, Amadou Ba, est l’acteur politique de la mouvance présidentielle qui fait plus l’objet de fixation sur ses ambitions politiques.

Faire l’autruche est une expression qui conviendrait parfaitement au personnage de Amadou Ba. L’ancien ministre des Affaires Etrangères s’est donné au fil des années une carrure d’homme politique présidentiable, mais il reste inflexible. Amadou Ba garde toujours le mystère, parfois à ses risques et périls, sur son avenir politique alors même que ses ‘’adversaires‘’ à Dakar commencent à s’afficher
Secret de Polichinelle ou fantasme politique ? Force est de constater que l’ancien ministre de l’Economie et des Finances, Amadou Ba, est l’acteur politique de la mouvance présidentielle qui fait plus l’objet de fixation sur ses ambitions politiques. Accusé à tort ou à raison de lorgner le fauteuil de son chef, il a été la cible, ces dernières années, de ses frères de parti qui ne ratent aucune occasion pour le fusiller. Certains avaient poussé le bouchon jusqu’à demander son exclusion du gouvernement. Ce que le Président Macky Sall a fini par faire lors du dernier remaniement.
Manifestement, la carrière de l’ancien chef de la diplomatie sénégalaise sonne déjà comme une victoire à la Pyrrhus alors que lui-même entretient toujours le flou artistique sur son avenir politique. «Je me bats pour le Président Macky Sall. Je me bats pour que la vision du Président Macky Sall puisse continuer, sa vision en 2035», avait-il déclaré à nos confrères de la «TFM». Et il n’avait pas manqué d’ajouter que les gens ont des imaginations fertiles. «Ils compliquent des situations qui ne méritaient pas l’attention des Sénégalais. Etre dans un gouvernement, c’est un privilège; il faut qu’on remette les choses à leurs places. Je suis un fonctionnaire qui est au service de l’Etat. Quand tu es au service de l’Etat, ta personne importe peu. C’est pourquoi, quand vous me posez des questions sur mes ambitions personnelles, je suis mal à l’aise».
Toujours est-il que cette déclaration de fidélité à Macky Sall et à sa vision politique, c’était avant qu’il ne soit débarqué du gouvernement. Cependant, et contrairement aux autres «mousquetaires» comme l’ancienne présidente du CESE Aminata Touré et l’ancien ministre Omar Youm qui n’ont pas caché leur amertume d’avoir été démis par le chef de l’Etat, Amadou Ba fait toujours dans le politiquement correct, même si, selon certains de ses proches, il a mal vécu son éviction du gouvernement. «Cela nous fait mal, mais ce serait sage pour lui de rester dans l’Apr jusqu’à l’approche des élections de 2024 pour sortir. Trois ans, c’est très long en politique», soufflait un de ses affidés lors de la passation de service entre lui et sa remplaçante Me Aissata Tall Sall.
Pour Amadou Ba, il est visiblement hors de question pour le moment de faire face à Macky Sall. Même s’il ne participe plus aux réunions des cadres de l’Apr, il continue à être légaliste politiquement. Il y a quelques jours, sa candidature supposée à la mairie des Parcelles Assainies a été rapidement démentie par sa cellule de communication. Et celle-ci d’ajouter qu’il toujours respecté les règles du parti. «En aucune manière, il ne dérogerait à la discipline du parti. Il continue de marcher masqué et de rester ‘’loyal‘’ à son mentor».
Dr MOUSSA DIAW, ENSEIGNANT EN SCIENCES POLITIQUES A L’UGB
«Ce serait bien pour lui de trancher dès maintenant le débat» Répondant récemment à l’ancien ministre de l’Intérieur Mbaye Ndiaye qui lui demandait d’éviter les oiseaux de mauvais augure qui lui prêtent des ambitions démesurées et le poussent dans un combat qui n’est pas le sien, Amadou Ba avait lancé : «Le défi le plus important, c’est le défi de l’unité». Avec son flegme légendaire et le sens du sarcasme qu’on lui connaît, il ajoutait : «Mbaye Ndiaye, je sais que tu aimes profondément le Président Macky Sall. Et s’il y a dans un domaine où je veux te concurrencer, c’est celui-là». Pour quelqu’un qui veut étendre ses tentacules sur le plan politique, est-ce une bonne posture communicationnelle ? Pour le politiste et enseignant à l’Université Gaston Berger (Ugb) de Saint Louis, Moussa Diaw, l’attitude de l’ancien ministre des Finances n’est pas une posture politique payante. «Parce qu’on est dans un contexte où si vous n’agissez pas, vous ne communiquez pas, les gens vous oublient, vous cédez la place aux autres. On est dans un monde conquis par la communication. Une personnalité politique, c’est d’abord d’intervenir dans l’espace politique, donner son avis et prendre position et contribuer au débat démocratique. Mais si on prend du recul et qu’on joue dans l’ambiguïté, ce n’est pas une posture politique porteuse pour quelqu’un qui a des ambitions aussi locales que nationales. Cela ne relève pas de la posture d’un homme politique qui est averti et qui sait le rôle que joue la communication dans les rapports sociaux», analyse l’enseignant. Dr Moussa Diaw pense que ce serait mieux pour lui de trancher dès maintenant le débat et d’annoncer la couleur.
Toutefois, le politiste dit comprendre son mutisme. «Il a peur parce qu’il a besoin du soutien du Président Macky Sall aussi bien pour les locales que pour les prochaines échéances. Il ne veut pas prendre le risque de s’annoncer et de ne pas avoir par la suite le soutien du chef de l’Etat», renchérit-il. Selon Dr Moussa Diaw, Amadou Ba a vécu quelques épreuves avec son limogeage du gouvernement qui ont laissé moralement des traces. «C’est pourquoi, il est dans une posture où il n’ose pas se prononcer ouvertement. A mon avis, il attend la consigne d’évaluer la situation», explique l’enseignant joint au téléphone par «L’As». Il souligne dans la foulée que l’ancien ministre des Affaires étrangères a des doutes, c’est pourquoi, il est très prudent. Convaincu que Amadou Ba est un homme politique qui a ses réseaux solides, Moussa Diaw indique que ce qui serait bien pour lui c’est d’avoir la mairie des Parcelles Assainies. «Cela lui permettra d’avoir une base et de constituer davantage un réseau qu’il va développer par la suite. Là, il n’a aucune base et il flotte politiquement», dit l’enseignant en sciences politiques.