DAKAR SOLLICITÉ POUR ACCUEILLIR DES EXPULSÉS AMÉRICAINS
Pendant que Diomaye rencontrait Trump à la Maison Blanche, le département d'État transmettait discrètement au Sénégal une demande d'accueil de migrants. Le Wall Street Journal révèle cette pression exercée en parallèle des discussions officielles

(SenePlus) - Pendant que Bassirou Diomaye Faye rencontrait Donald Trump à la Maison Blanche, l'administration américaine proposait discrètement au Sénégal d'accueillir des migrants expulsés dont les pays d'origine refusent le rapatriement.
La diplomatie de façade masquait des négociations plus sensibles. Alors que le président Bassirou Diomaye Faye participait mercredi au sommet avec Donald Trump sur les questions économiques et sécuritaires, le département d'État américain avait déjà transmis au Sénégal une demande pour héberger des migrants expulsés, révèle le Wall Street Journal.
"Avant que les dirigeants du Libéria, du Sénégal, de la Mauritanie, du Gabon et de la Guinée-Bissau arrivent à la Maison Blanche pour le sommet sur les questions économiques et sécuritaires, le département d'État a envoyé à chaque pays des demandes pour accueillir des migrants", rapporte le quotidien américain, citant "un document interne et des responsables américains actuels et anciens".
Cette révélation éclaire d'un jour nouveau les discussions entre Trump et les dirigeants africains. Le président américain avait d'ailleurs fait allusion à ces demandes lors du sommet : "J'espère que nous pourrons faire baisser les taux élevés de personnes qui dépassent la durée de leurs visas, et aussi faire des progrès sur les accords de pays tiers sûrs", avait-il déclaré lors de ses remarques d'ouverture.
Le document du département d'État, consulté par le Wall Street Journal, détaille les modalités de cette proposition. "La proposition américaine demande aux pays d'accepter le 'transfert digne, sûr et en temps opportun depuis les États-Unis' de ressortissants de pays tiers", précise l'enquête.
Les pays concernés, dont le Sénégal, devraient s'engager à ne pas renvoyer les migrants transférés "vers leur pays d'origine ou pays de résidence habituelle précédente jusqu'à ce qu'une décision finale ait été prise" sur leurs demandes d'asile aux États-Unis, selon le document.
La présence de Stephen Miller, "chef de cabinet adjoint de la Maison Blanche et architecte de la campagne d'expulsions de Trump", lors de la table ronde avec les dirigeants africains confirme l'importance accordée à cette question migratoire. Il était accompagné de "Massad Boulos, conseiller principal pour les affaires africaines".
Le WSJ révèle que "les diplomates américains ont été priés de dire à leurs homologues ouest-africains que l'hébergement de ressortissants de pays tiers était la question la plus importante pour Trump". Plus explicitement encore, "les responsables ont dit aux gouvernements que l'aide à la migration était critique pour améliorer les liens commerciaux avec les États-Unis".
Le Sénégal dans la stratégie migratoire américaine
Cette pression exercée sur le Sénégal s'inscrit dans une politique plus large de l'administration Trump. "L'administration recherche des pays supplémentaires pour accueillir des migrants depuis la conclusion d'un accord avec le Panama en février, dans le cadre duquel un avion de plus de 100 migrants, principalement du Moyen-Orient, a été envoyé vers la nation d'Amérique centrale", contextualise le Wall Street Journal.
Le quotidien précise que "les États-Unis poursuivent des accords migratoires avec d'autres pays, notamment la Libye, le Rwanda, le Bénin, l'Eswatini, la Moldavie, la Mongolie et le Kosovo".
Pendant que ces négociations secrètes se déroulaient, Bassirou Diomaye Faye déployait ses arguments de séduction. Le président sénégalais "a exhorté Trump à construire un nouveau terrain de golf dans le pays africain", rapporte le Wall Street Journal, illustration d'une diplomatie plus légère contrastant avec les enjeux migratoires sous-jacents.
Cette approche s'inscrit dans la nouvelle doctrine américaine : "L'administration promeut des liens commerciaux élargis, plutôt que l'aide étrangère, avec les pays africains après avoir dissous plus tôt ce mois-ci l'Agence américaine pour le développement international."
À ce jour, "il n'est pas clair si l'un des pays qui ont rencontré Trump mercredi ont accepté la proposition américaine. Aucun des dirigeants africains ne l'a mentionnée lors de la partie publique de la réunion", note le Wall Street Journal.
Les ambassades du Sénégal, du Libéria, de la Mauritanie, du Gabon et de la Guinée-Bissau "n'ont pas immédiatement répondu aux demandes de commentaires", précise l'enquête.