LA VIE ET L’ŒUVRE DE DANSOKHO REVISITÉES
Les partisans, camarades de gauche et amis de l’homme ont tous fait le déplacement à l’UCAD2 de l’université de Dakar samedi dernier afin de lui rendre hommage

Dans un discours solennel, le Secrétaire général du Pit a retracé la vie et l’œuvre d’Amath Dansokho, samedi dernier, lors d’une cérémonie d’hommage qui lui a été rendu par le Comité central du parti de gauche. Les partisans, camarades de gauche et amis de l’homme ont tous fait le déplacement à l’UCAD2 de l’université de Dakar.
Il est vrai qu’Amath Dansokho n’était pas particulièrement porté sur les célébrations et redoutait, par-dessus tout, la glorification. Mais pour le secrétaire général du PIT, cette cérémonie solennelle cherche à donner des repères indispensables notamment pour les jeunes générations, mais pas seulement.
Dans un long discours, Samba Sy a retracé la vie et l’œuvre, parsemées de combats, de Amath Dansokho. Qui dès sa jeunesse, étant élève, a mené très tôt des grèves au Collège Blanchot de Saint Louis du fait de son rejet de la politique assimilationniste du colonialisme français.
Selon le ministre du Travail et par ailleurs secrétaire général du PIT, le natif de Kédougou a découvert le marxisme au bord d’un train en lisant «Le fils du Peuple» de Maurice Torez entre Dakar et Tambacounda. «Il vit s’éveiller en lui, de façon tenace et persistante, un sentiment qui ne le quitta plus. Celui du rejet de toute exploitation de l’homme par l’homme. Ce qu’il décelait non seulement dans la lutte des cheminots de la ligne ferroviaire Dakar – Niger, mais aussi dans celle contre la spoliation des paysans producteurs d'arachides par les "Traitants" Libano-Syriens, pour le compte des Entreprises commerciales de Bordeaux et de Marseille», raconte-t-il.
Quasi naturellement, ajoute-t-il, en réaction contre le BDS sur la question de l’Indépendance et de l’Unité Africaine, Amath Dansokho adhéra au Parti Africain de l’Indépendance (Pai) créé en 1957. «C’est ainsi qu’étudiant, il fit ses premiers pas dans la lutte pour l’Indépendance, la Démocratie et l’Unité Africaine en perspective du socialisme, comme y appelait le ‘’Manifeste de 1957’’. Le référendum de 1958, organisé par la France sur la question de l’Indépendance de ses colonies donnera l’occasion à Dansokho de participer, au sein du PAI, à la tentative de mise en œuvre de son mot d'ordre: «MOM Sa REW, BOKK Sa REW, DEFAR Sa REW», se souvient Samba Sy.
Poursuivant, il affirme que c’est surtout à Prague, en Tchécoslovaquie, qu’Amath Dansokho a manifesté sa nature "d'homme libre en quête de plus de liberté". En effet, il n’a hésité un seul instant, au moment de l'invasion de cette ville par des troupes du pacte de Varsovie, à condamner fermement celles-ci et à exiger leur retrait, se conformant à la position du Parti. «La réaction du "Parti Communiste de l'URSS" (PCUS) ne tarda pas.
L’exclusion d’Amath de la «Revue Internationale» et son expulsion de Prague furent décrétées. Ce qui a été entravé par la détermination etle soutien de ses camarades de la «Revue Internationale» qui l'avaient en haute estime et grande considération, tenant particulièrement à la qualité de son travail et à sa chaleur humaine.» Pour Samba Sy, c'est assurément à la «Revue Internationale» que le défunt leader emblématique a conforté son engagement marxiste, se forgeant une vaste culture générale qui contribuera à l'efficacité de son travail à la direction du Parti notamment à son retour au pays, aux côtés de Seydou Cissokho élu Secrétaire général du PAI par la Conférence rectificative de 1967 et confirmé dans ses responsabilités au second Congrès de 1972.
DANSOKHO, ACTEUR MAJEUR DE LA PAIX ENTRE LE SENEGAL ET LA MAURITANIE SUITE AUX EVENEMENTS DE 1989
C'est surtout en 1989, en pleine crise post- électorale de la Présidentielle de 1988, et au cœur d’un conflit meurtrier avec la Mauritanie, à deux doigts d’une guerre entre les deux pays, que Dansokho, alors Secrétaire Général du PAI, puis du PIT/SENEGAL à côté de feu Seydou Cissokho qui en était le Président, a su imprimer une marque personnelle de sortie de crise.
A en croire Samba Sy, il contribua à l'élaboration d’une position originale et lucide du Parti en portant courageusement son refus de toute guerre avec la Mauritanie dans un contexte national où les va- t- en guerre venaient de tous côtés. Non sans appeler aussi à la concertation entre les forces vives de l’opposition et du pouvoir pour, à la fois , dénouer pacifiquement la crise post –électorale et se rassembler aux fins de défendre la Nation en cas d’attaque du Sénégal par un quelconque pays voisin. Selon Samba Sy, cette prise de position publique a contribué à baisser la tension entre le Sénégal et la Mauritanie.
LES MESURES SOCIALES PRISES PAR DANSOKHO, MINISTRE DE L’URBANISME ET DE L’HABITAT
En tant que ministre de l’Urbanisme et de l’Habitat, Dansokho avait fait prendre au Président Abdou Diouf d’importantes mesures sociales comme le branchement à l’eau et à l’électricité des quartiers non lotis de Dakar qui en étaient jusqu’alors exclus. Selon son camarade de lutte et actuel secrétaire général du PIT, il instaura aussi une politique d’octroi d’un lieu de recasement des quartiers spontanés et d’aide au déplacement et à l’installation de leurs habitants, avant tout déguerpissement. C’est dans ce même élan, dit-il, que des mesures furent prises pour transformer les loyers simples de la SICAP et de la SN HLM en pleine propriété pour ceux des locataires dont le payement avait largement amorti le coût du logement et pour diminuer de 40% les prix des nouveaux logements construits par ces deux Société. «Amath a également mené, avec vigueur, une politique d’amélioration de l’habitat dans la banlieue à travers un projet de «restructuration et de régularisation foncière» qui permit à des milliers de pères ou mères de famille d’ accéder à la propriété foncière dans des quartiers assainis et lotis.»
«SANS LA FETICHISER, L’ŒUVRE DE DANSOKHO NOUS SERVIRA DE GUIDE DANS L’ACTION»
Malgré sa position dans le gouvernement de Diouf, il n’a jamais perdu sa liberté de ton puisqu’il s’est permis de critiquer objectivement, à l’époque, la «mauvaise gouvernance » du régime socialiste. Ce qui lui avait valu, son exclusion du gouvernement de Diouf. Les mêmes causes produisant les mêmes effets, indique Samba Sy, Dansokho et le PIT n’ont jamais hésité à critiquer le Projet de Constitution du Président de la première alternance démocratique du Sénégal en 2000,(Me Abdoulaye Wade), aux motifs de renforcement et de concentration des pouvoirs entre les mains du Chef de l’Etat, lui donnant droit de vie et de mort sur le Pouvoir législatif après deux ans d’une législature de 5 ans. Ce qui avait valu de nouveau à Dansokho d’être exclu du Gouvernement qui venait de franchir son septième mois d’existence.
Et pour le PIT, la tenue, plus tard, des "Assises nationales du Sénégal" n’a été rien d’autre que la traduction grandeur nature de la "Stratégie de large rassemblement" servant de boussole à toutes les actions de Dansokho et de son Parti. Aussi, après avoir co-présidé le mouvement M 23 qui a créé les rapports de forces qui ont obligé le Président Wade à aller au second tour de l’élection présidentielle de 2012, Amath Dansokho a contribué à mettre en place, une coalition des coalitions, dénommée «Benno Bokk Yakaar».
«BBYremporta haut la main le second tour de l’élection présidentielle, portant le Président de la coalition Macky 2012 au pouvoir. Un Président qui fit de Dansokho, pas seulement un ministre d’Etat, mais son conseiller spécial. Ce qu’il restera jusqu’à son dernier souffle», a-t-il rappelé. Compte tenu de tout cela, Samba Sy estime que le Comité central du PIT prend l’engagement devant la famille de Dansokho et le peuple sénégalais, que son immense œuvre ne sera jamais perdue. «Sans la fétichiser, elle nous servira de guide dans l’action, toujours au service du grand nombre», dit-il. A souligner que le Président Macky Sall, absent du pays, a été représenté à la cérémonie par son ministre-conseiller Mor Ngom.