«L’AVENIR DU SENEGAL NE PEUT PAS SE NEGOCIER A PARTIR DE CONAKRY»
Le maire de Mermoz-Sacré-Cœur dégaine et tire sur la police, qu’il accuse de violer la loi, mais également sur les Présidents Macky Sall, Abdoulaye Wade et Abdou Diouf. Barthélemy Dias vide tout simplement son chargeur.

Votre sécurité a interpellé, ce matin (hier), un agent de la Direction de la surveillance du territoire (DST) devant votre domicile. Que s’est-il réellement passé ?
Je pense que la police est dans son droit, dans le contexte actuel, de surveiller certains responsables politiques, de les écouter et même de les prendre en filature. Mais, la police n’a pas le droit de violer la loi. Ce que la police, par le biais des agents de la DST, a eu à faire à mon domicile, est illégal et anormal. J’attendais une réaction autre de la Direction de la police nationale, que de dire que cet agent de la DST ne faisait que son travail. Cet agent est aussi un Sénégalais. Tout le monde sait qu’au Sénégal, il y a des réactions qui peuvent être instantanées et qui peuvent être incontrôlables. Cet agent de la DST, s’il avait été confondu avec un voleur, la police est bien placée pour savoir que les éléments qui sont devant chez moi et qui assurent ma sécurité, sont des personnes qui sont d’un gabarit qui n’est pas normal. Cet agent aurait pu être malmené. Quand la police se permet maintenant d’envoyer des gens dans mon véhicule, ça pose un sérieux problème. C’est la suite d’une tentative qui a échoué, il y a quelques jours, à travers un enregistrement audio qu’on a fait diffuser dans certains sites internet et qu’on a mis sur les réseaux sociaux, me prêtant une voix qui n’était pas la mienne, appelant à l’insurrection, avec pour objectif de me faire arrêter. J’ai été obligé de faire un démenti, pour que les Sénégalais comprennent que ce n’était pas ma voix et que je n’ai jamais appelé à l’insurrection. J’invite les plus hautes autorités de la police à faire leur travail dans les règles de l’art. L’attitude des Sénégalais est la meilleure attitude, parce qu’elle relève du mépris. Tout le monde sait que les résultats qui ont été prononcés ne sont pas les résultats qui reflètent la réalité des urnes.
Qu’est-ce qui vous fait dire cela ?
Aujourd’hui, personne ne peut prétendre qu’il y a eu une élection présidentielle au Sénégal le 24 février 2019. Parce qu’il n’y a pas de fichier électoral. Il y a un semblant de document qui porte le nom de fichier. Tout le monde sait que le fichier qui avait été remis au Conseil constitutionnel, dans le cadre du parrainage, n’est pas le même fichier qui a été utilisé pour les élections. Nous avons tous vu des enfants voter au Sénégal lors de ce scrutin. Nous avons tous vu des Sénégalais détenteurs de cartes d’électeur en bonne et due forme, se voir refuser leur droit de voter, au prétexte que leurs noms ne sont pas sur le fichier. Nous avons tous vu les abus qui ont été faits avec les ordres de mission, entre autres. Je pense qu’on ne peut pas accepter que 52 milliards aient été injectés pour confectionner des cartes d’électeur, et qu’on nous présente un sabotage structuré et organisé.
Comment analysez-vous la défaite de votre coalition «Idy 2019» à Dakar, fief de votre mentor politique, Khalifa Sall ?
Je ne parlerai pas de défaite, parce que Macky Sall, même dans un conte de fée, si on lui avait dit qu’il gagnerait les 19 communes du département de Dakar, il n’allait pas le croire. on considère qu’il n’y a pas eu d’élection le 24 février 2019. Mais, contrairement à Wade, nous n’avons pas boycotté. Parce qu’il faut faire face. boycotter l’élection présidentielle, c’est renforcer ou réconforter Macky sall dans sa stratégie de hold-up électoral. nous avons fait face par principe. Les gens de l’APR ne sont pas à l’aise de par leurs propos et leur posture. Ils sont très mal à l’aise, parce qu’ils savent que les Sénégalais ont compris ce qui s’est passé. Maintenant, les Sénégalais insistent pour vivre dans une démocratie. et c’est là où se trouve la question majeure. Je pense que le Président Macky Sall a intérêt à décortiquer le message du peuple sénégalais. Personnellement, j’invite Macky Sall à se ressaisir, parce que cette situation ne pourra pas perdurer. et je pense que Macky Sall gagnerait à poser des actes qui relèvent de la sincérité, de la franchise et de l’objectivité. Il y va de la stabilité du pays.
Mais, le Président Macky Sall vient d’appeler au dialogue et il a décidé de mettre à contribution les Présidents Diouf et Wade…
Le Président Macky Sall nous connaît très bien et on le connaît très bien. D’abord, son appel n’est pas sincère. Il ne s’agit pas de poser des conditions, il s’agit d’être objectif. Macky Sall sait très bien qu’on n’acceptera jamais de s’assoir avec lui, tant que Khalifa Sall, pris en otage à la Maison d’arrêt et de correction de Rebeuss, n’est pas libéré. S’il libère Khalifa Sall, jeudi, vendredi, on viendra au Palais, pour discuter avec lui. Tant que Khalifa Sall ne sera pas libéré, il n’y aura pas de dialogue dans ce pays. et quiconque de l’opposition prendra le risque d’aller dialoguer avec le Président Sall, sachant que Khalifa Sall est en prison, pour les raisons que tout le monde connait, nous considérons qu’à partir de ce moment, que ces personnes de l’opposition travaillent pour les intérêts de Macky Sall. Concernant Wade, je pense qu’il a un contentieux avec Macky Sall. Donc, comment peut-il avoir un contentieux avec lui et être un facteur dans ce dialogue. C’est contradictoire. Je voudrais demander à certaines autorités de ce pays de respecter le peuple sénégalais. L’avenir du Sénégal ne peut pas se négocier à partir de Conakry. Conkary ne peut être un donneur de leçon de morale et de démocratie au peuple sénégalais, ce n’est pas possible. Concernant le Président Diouf, il a eu à tenir des propos qui continuent à résonner dans nos oreilles. Il avait dit en quittant le pouvoir en 2000, qu’il ne regarderait plus derrière le rétroviseur. Il ne s’est jamais impliqué et immiscé de 2000 à 2012 dans la politique sénégalaise. Qu’est-ce qui motive aujourd’hui le Président Abdou Diouf, subitement, pour qu’il s’implique dans la politique sénégalaise ? Khalifa Sall est le fils d’Abdou Diouf, c’est son pur produit. Khalifa Sall incarne l’héritage d’Abdou Douf. en 2 ans, il n’a pipé aucun mot sur l’arrestation arbitraire et injuste de Khalifa Sall. objectivement, j’invite Macky Sall à chercher à impliquer d’autres personnalités que ces deux anciens Présidents.
Quelle lecture faites-vous concrètement de l’attitude de Me Wade lors de la Présidentielle qui a suscité moult commentaires ?
Le Président Wade est notre grand-père. C’est une référence pour nous en matière de démocratie. Il reste une icône de la vie politique sénégalaise. Mais, je voudrais lui dire qu’on ne peut pas aujourd’hui reléguer l’avenir du Sénégal au second plan, pour des intérêts subjectifs et personnels. Karim Wade est victime d’une injustice notoire. nous l’avons dit et dénoncé. Mais, je pense que le Président Wade a eu l’occasion à plusieurs reprises de poser des actes qui auraient pu nous rassurer par rapport à l’objectivité des combats qu’il mène. Au sortir de élections législatives de 2017, Wade a été élu député, au même titre que Khalifa Sall. Il était le député le plus ancien en termes d’âge. Donc, il devait diriger l’installation de l’Assemblée nationale. Mais, il a souhaité démissionner avant l’installation de l’Assemblée nationale. S’il s’agissait de Karim Wade, il n’aurait pas démissionné avant l’installation de l’Assemblée. et c’était très important, parce que Wade aurait pu imposer la présence de Khalifa Sall avant l’installation de l’Assemblée nationale. Il aurait marqué les esprits et ça allait rester dans les annales de l’histoire. Il a choisi d’opter pour autre chose. C’est la première remarque. La deuxième remarque que je souhaitais faire, c’est que Wade, de 1974 à 2000, en 26 ans, n’a jamais boycotté une élection présidentielle. Il a toujours participé, quelle que soit la situation. Donc, Wade connaît l’importance d’une élection présidentielle. Maintenant, si Wade veut tout conjuguer autour de son fils, là, je suis au regret de lui conseiller, d’opter pour une autre voie que celle qu’il a choisie. Son fils a un destin politique. C’est aux Sénégalais de décider s’il a un destin présidentiel. Wade doit savoir que la politique au Sénégal ne s’arrête pas le 24 février 2019. Quand demain, son fils aura besoin de notre soutien, on peut lui renvoyer l’ascenseur. Donc, j’invite Wade à avoir plus de considération pour le peuple Sénégalais qui lui a tout donné. J’invite Karim Wade à rentrer au Sénégal. Le combat se mène au Sénégal.