LE SÉNÉGAL DÉNONCE LES SANCTIONS AMÉRICAINES CONTRE SON JUGE À LA CPI
Dakar exprime sa "pleine solidarité" au juge Mame Mandiaye Niang et appelle les États parties à défendre l'indépendance de la justice internationale

(SenePlus) - Le gouvernement a réagi avec fermeté jeudi aux sanctions américaines visant le magistrat sénégalais Mame Mandiaye Niang, juge à la Cour pénale internationale. Dans un communiqué officiel, Dakar a exprimé son "étonnement" face à ces mesures et appelé Washington à les retirer immédiatement.
La position sénégalaise marque une rupture diplomatique claire avec Washington sur cette question. Le gouvernement de Dakar "invite les autorités américaines à retirer ces sanctions qui constituent une grave atteinte au principe de l'indépendance de la justice et au droit des Magistrats de la Cour d'exercer de façon libre et sereine le mandat qui leur est confié par les 125 États membres parties au statut de la CPI."
Cette prise de position officielle place le Sénégal en première ligne de la défense de la justice pénale internationale. Le pays, "premier à avoir ratifié le Statut de Rome", selon le communiqué, "exprime sa pleine solidarité à Monsieur Niang, aux autres magistrats visés par les sanctions, et réaffirme son soutien indéfectible à la CPI dans sa mission au service de la justice pénale internationale."
La riposte sénégalaise intervient au lendemain de l'annonce par le secrétaire d'État américain Marco Rubio de sanctions visant quatre magistrats de la CPI. Washington accuse ces juges d'avoir "directement participé aux efforts déployés par la CPI pour enquêter, arrêter, détenir ou poursuivre des ressortissants des États-Unis ou d'Israël, sans le consentement de l'un ou l'autre de ces pays."
Rubio avait justifié ces mesures en affirmant que l'institution basée à La Haye représentait "une menace pour la sécurité nationale et a été utilisée comme un instrument de guerre juridique contre les États-Unis et leur proche allié Israël."
Au-delà de la défense de son ressortissant, le Sénégal élargit sa critique en appelant "instamment les États Parties à réaffirmer leur solidarité à la Cour, et à redoubler d'efforts pour s'assurer que les Magistrats et tout le personnel de la Cour puissent remplir leur mission en toute indépendance, sans menaces ni restrictions."
Cette déclaration sénégalaise fait écho aux réactions européennes, notamment celle de la France qui s'était dite "consternée" par la décision américaine. Paris avait exprimé "sa solidarité à l'égard des magistrats visés par cette décision" et estimé que les sanctions américaines étaient "contraires au principe d'indépendance de la justice."
La CPI elle-même avait qualifié ces sanctions d'"attaque flagrante contre l'indépendance d'une institution judiciaire impartiale", soulignant que quatre autres magistrats avaient déjà été visés par des sanctions américaines en juin.
Les sanctions américaines consistent en une interdiction d'entrée sur le sol américain et le gel des avoirs éventuels détenus aux États-Unis pour les magistrats visés.
Ces mesures s'inscrivent dans une offensive plus large de l'administration Trump contre la CPI, particulièrement motivée par les procédures ayant visé des soldats américains en Afghanistan et les mandats d'arrêt contre le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou et son ancien ministre de la Défense pour crimes de guerre présumés dans la bande de Gaza.
Netanyahou avait d'ailleurs salué la décision américaine, y voyant "une action décisive contre la campagne de diffamation et de mensonges visant l'État d'Israël."