LES APPELS À MANIFESTER SE POURSUIVENT MALGRÉ LA COUPURE PARTIELLE D'INTERNET
La suspension temporaire de l’usage des applications digitales est renouvelée toutes les 24 heures « selon l’évolution de la situation. Manifestants et internautes parviennent toutefois à contourner le blocage

Un jeune homme désarmé, violemment frappé par les forces de l’ordre. Un manifestant maintenu de force devant les boucliers des gendarmes, alors que fusent les jets de pierres. Et des photos de jeunes que leurs proches annoncent morts, asphyxiés par les gaz lacrymogènes ou tombés sous les balles.
Ces images, l’État sénégalais aurait-il préféré qu’elles ne soient pas diffusées ? Depuis jeudi 1er juin au soir, jour où l’opposant Ousmane Sonko a été condamné à deux ans de prison ferme pour « corruption de la jeunesse », l’accès aux principales applications de messagerie et aux réseaux sociaux est restreint dans le pays. Les internautes sénégalais peuvent néanmoins utiliser des réseaux privés virtuels, ou VPN, pour contourner ces interdictions, et ils ne s’en privent pas.
WhatsApp, Facebook, Twitter…
L’observateur mondial d’internet Netblocks a confirmé le blocage de l’accès à certaines plateformes, comme WhatsApp, Twitter, Facebook ou Instagram. « Des données de réseaux en temps réels montrent ces restrictions en vigueur chez le principal fournisseur mobile Orange (Sonatel), avec un effet sur l’opérateur Free (Tigo) », a précisé Netblocks, qui s’est basé sur un échantillon de 120 postes d’observation à travers le pays.
« ‘L’État du Sénégal a décidé en toute souveraineté de suspendre temporairement l’usage de certaines applications digitales par lesquelles se font des appels à la violence et à la haine », a justifié le ministre de l’Intérieur, Antoine Félix Diome, dans la nuit de jeudi à vendredi. Cette suspension temporaire est renouvelée toutes les 24 heures « selon l’évolution de la situation », explique le ministre de la Communication, Moussa Bocar Thiam.
« Les opérateurs ont l’obligation de suivre les réquisitions de l’autorité en vertu de leur cahier des charges, lorsque la sécurité et la défense nationale l’exigent », précise Moussa Bocar Thiam. Cette réquisition s’adresse « à tous les opérateurs », c’est-à-dire Orange, Tigo et Expresso. Le signal de la chaîne privée Walf a également été coupé jeudi « pour empêcher la diffusion d’images et de messages faisant appel à la révolte populaire », a fait savoir le gouvernement.