L’OPTION DE LA TECHNOCRATIE
Pas moins d’une douzaine de directeurs généraux ont fait leur entrée dans le gouvernement. Peut-être c’est là un signe du Président Macky Sall de mettre vite en route son concept de « fast-track » dans la conduite des dossiers.

« Dans bien des cas, trop de routine, trop de lenteur et de procédures et de formalités indues continuent d’enterrer l’efficacité du service public et la compétitivité de notre économie. Dans la nouvelle dynamique que je compte imprimer à la conduite des affaires publiques, j’ai la ferme intention d’inscrire toutes les actions de l’État en mode fast-track ».
Ainsi parlait le Président Macky Sall, le 2 avril dernier, dans son discours à l’occasion de sa prestation de serment. Invitant, par ailleurs, l’administration à « épouser les réalités de son temps ». Cette ambition d’aller vite dans la conduite des dossiers de l’Etat justifie-t-il le nombre élevé de directeurs généraux nommés dans le nouveau gouvernement, si l’on sait que l’efficacité est la première qualité recherchée chez un manager ? En tout cas, le constat est là. Ils sont au moins une douzaine de managers ou responsables de premier plan de structures publiques à avoir rejoint le gouvernement. Parmi ces « directeurs généraux » promus à la station ministérielle, il y a Mouhamadou Makhtar Cissé, ancien directeur général de la Senelec.
Trainant la réputation d’un homme rigoureux et efficace, cet Inspecteur général d’Etat (Ige) qui fut aussi Directeur général des douanes, fait, en réalité, son retour dans le gouvernement. En effet, il a déjà occupé le poste de ministre délégué en charge du Budget sous Macky Sall entre 2013 et 2014 avant d’être nommé directeur de cabinet du président de la République. Un an plus tard, il est porté à la tête de la Société nationale d’électricité qu’il a remise sur de bons rails. Il est désormais à la tête du stratégique ministère du Pétrole et de l’Energie. Directeur général de l’Agence de gestion du patrimoine bâti de l’Etat (Agpbe) depuis 2015, Abdou Karim Fofana est dans son élément au ministère de l’Urbanisme, du Logement et de l’Hygiène publique. Il est le maître d’œuvre des Sphères ministérielles de Diamniadio qui vont permettre au gouvernement du Sénégal d’en finir avec la location d’immeubles dont les arriérés de loyers ont cumulé jusqu’à 30 milliards de FCfa et des dettes bancaires de l’ordre de 10 milliards de FCfa. Un Abdou Karim peut en cacher un autre. Celui qui était jusqu’ici à la tête de l’Autorité de régulation des télécommunications et des postes (Artp), en l’occurrence Abdou Karim Sall, s’est révélé un homme de rigueur et de poigne à la tête de cette structure. Il s’est opposé quand il le fallait aux opérateurs de téléphonie tout en menant à bon port l’Artp.
Même s’il n’a pas duré à la tête de la Société d’aménagement et d’exploitation des terres du Delta (Saed), Samba Ndiobène Kâ, nouveau ministre de l’Elevage et des Productions animales, y a laissé ses marques. Il a réussi à consolider les acquis tout en accentuant les efforts pour doper la production rizicole dans le delta et la vallée du fleuve Sénégal. Evoluant dans le même secteur, le développement agricole mais dans le sud du pays, la Sodagri, sous la conduite de Moussa Baldé, est devenue un pilier de la politique agricole de l’Etat dans la région naturelle de Casamance. C’est donc un homme au profil de l’emploi qui a été nommé à la tête du ministère de l’Agriculture et de l’Equipement rural.
Ancien directeur général de la société de transport Dakar «Dem Dikk», Dame Diop est également en terrain connu au ministère de l’Emploi, de la Formation professionnelle et de l’Artisanat. En effet, après avoir quitté la direction de «Dakar Dem Dikk», il avait atterri à la direction générale du Fonds de financement de la formation professionnelle et technique (3Fpt) où il a laissé un bon bilan. Le nouveau ministre de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation, Cheikh Omar Hann a, lui aussi, pendant cinq ans, fait ses preuves à la direction du Coud, dans un milieu hostile, constamment en proie aux humeurs des étudiants. C’est dans la conduite des affaires des étudiants que Moïse Sarr aussi s’est révélé. Depuis avril 2013, il était le chef du Service de la gestion des étudiants sénégalais à l’étranger basé à Paris. A ce titre, il a eu à gérer, au quotidien, l’épineuse question des bourses étrangères. C’est donc tout naturellement qu’il a été fait secrétaire d’Etat en charge des Sénégalais de l’extérieur.
Femme discrète et à la tête bien faite, Ndèye Tické Ndiaye Diop a conduit, sans faire de vagues, les affaires de l’Agence nationale des affaires maritimes (Anam) pendant deux ans. Femme de dossiers, cet ingénieur de formation en technologie générale halieutique a occupé auparavant le poste de secrétaire général du ministère de la Pêche et de l’Economie. Elle est chargée de mettre sa rigueur, son expérience et son efficacité au service du développement de l’Economie numérique et des Télécommunications. Quant à Aminata Assome Diatta, nouvelle ministre du Commerce et des Pme, et Mayacine Camara, secrétaire d’Etat en charge du Réseau ferroviaire, ils occupaient jusqu’ici des postes techniques dans des ministères.
La première au ministère du Commerce en tant que directrice du Commerce extérieur et le second en tant que coordonnateur de la Direction générale de la planification et des politiques économiques (Dgppe). Avec cette palette de managers, on peut dire qu’on est en face d’un « gouvernement de directeurs généraux » par opposition au terme usité de « gouvernement de technocrates ».