«NOTRE REGIME EST PRESIDENTIALISTE»
La suppression annoncée du poste de Premier ministre nourrit des divergences sur la nature de notre régime politique. Parlementaire pour certains, présidentiel pour d’autres. Mais, pour Mouhamadou Mounirou Sy, notre régime est présidentialiste.

Quelle est la différence entre régime présidentiel et régime parlementaire ?
De manière très basique, la distinction entre ces régimes résulte de la nature stricte ou souple de la séparation des pouvoirs. En théorie du droit et de la science politique, cette différence de régimes a été théorisée dans la doctrine française par le Professeur Maurice Duverger. Ce qu'il faut retenir subrepticement est que le régime présidentiel est un cadre politique dans lequel il existe une séparation stricte des pouvoirs exécutif et législatif. Avec ce régime, c'est le Parlement qui vote certes les lois, mais le président de la République, souvent le chef de l'exécutif, est fort et stable. On parle alors de présidentialisme lorsque l'équilibre entre les pouvoirs est rompu et que le régime consiste à asseoir l'hégémonie du président de la République et la réduction, voire la faiblesse des pouvoirs du Parlement. Selon la dose de prérogatives qui est octroyée au chef de l'Etat, on parle de régime présidentialiste, semi-présidentiel ou présidentiel tout court. Donc, il s'agit d'un système constitutionnel qui organise la séparation stricte des pouvoirs, c'est-à-dire qu'aucun pouvoir n'a la possibilité d'influencer l'autre.
Dans quel cas de figure se trouve le Sénégal ?
En vertu des textes, de la nature souple de la séparation des pouvoirs et des rapports entre l'exécutif et le législatif, le régime sénégalais montre des allures d'un régime parlementaire. Beaucoup d'éléments constitutionnels peuvent être des illustrations parfaites. D'abord, le Gouvernement est doublement responsable devant le Président de la République et devant le Parlement avec les deux armes opposées qui sont les corolaires, à savoir la motion de censure et la question de confiance. La motion de censure, qui est à l'initiative des parlementaires, permet à ces derniers de se prononcer sur la politique du Gouvernement. S’ils la désapprouvent, le Gouvernement est forcé de démissionner. Quant à la question de confiance, elle est posée par le Gouvernement directement à l’Assemblée nationale.
Par cette procédure, celui-ci met sa responsabilité en jeu et sera contraint de démissionner en cas d’échec. En revanche, une réussite peut permettre de mettre fin à un désaccord entre le Gouvernement et les parlementaires ou aider à rassembler une majorité divisée au sein du Parlement. C'est pourquoi, en cas de divergence entre le parti au pouvoir et la majorité parlementaire, la cohabitation serait inévitable avec un Premier ministre, chef du Gouvernement, qui définit et conduit la politique de la Nation. Ce qui est la marque notoire d'un régime parlementaire. Mais, dans la pratique, tout semble montrer une forte dose de présidentialisme en raison du déséquilibre des pouvoirs en faveur de l'exécutif au premier chef duquel, le président de la République. Donc, on pourrait ne pas se tromper si l'on qualifie notre régime de présidentialiste depuis la Constitution de mars 1963.