UN LEXIQUE REVELATEUR DES AMBITIONS DE L’ETAT
Le nouveau gouvernement est marqué par l’éclatement et la suppression de certains ministères et le changement de dénomination ou la fusion pour d’autres départements ministériels.

Le premier gouvernement de l’acte 2 du magistère du Président Macky Sall ne se singularise pas seulement par sa taille par rapport au précédent attelage gouvernemental. L’autre détail qui frappe, c’est le chamboulement observé dans la dénomination de certains ministères. Certains départements ministériels ont disparu de l’organigramme gouvernemental, d’autres ont été éclatés alors que certains ont été fusionnés ou ont changé de libellé. Le changement le plus notable, c’est sans doute l’éclatement du ministère de l’Economie, des Finances et du Plan. Scindé en deux, il a enfanté un ministère des Finances et du Budget et un ministère de l’Economie, du Plan et de la Coopération. Ce qui entraîne la disparition du ministère délégué en charge du Budget. Cette séparation entre Economie et Finances n’est pas inédite au Sénégal. Dans le premier gouvernement formé en 1960, siégeaient un ministre du Plan, du Développement et de la Coopération technique (Amadou Karim Gaye) aux côtés d’un ministre des Finances (André Peytavin). De même, dans le gouvernement de 1966, siègent Habib Thiam, comme ministre du Plan et du Développement et Jean Colin au ministère des Finances. Jusqu’en 1968 avec Abdou Diouf (Plan et Industrie) et Jean Collin (Finances). C’est dire donc que ce n’est pas une première que deux départements se partagent la question des questions économiques et financières dans une équipe gouvernementale. Et dans le monde, on trouve quelques exemples comme en Allemagne. La France l’a également expérimentée en 2014 sous François Hollande avant qu’Emmanuel Macron ne revienne à l’ancien système. Autre ministère éclaté, c’est celui de la Communication, des Télécommunications, des Postes et de l’Economie numérique. Désormais il y a, d’un côté, un ministère de la Communication et de la Culture et de l’autre un ministère des Télécommunications et de l’Economie numérique. Le regroupement de la Communication et de la Culture entérine la disparition de ce dernier secteur comme ministère plein. Mais l’appellation de ministère de la Communication et de la Culture n’est pas nouveau.
Le libellé existait dans l’attelage gouvernemental sous le Président Abdou Diouf et même sous Abdoulaye Wade. A côté des ministères séparés en plusieurs départements, il y a ceux qui ont connu des changements dans leur dénomination. Le ministère des Infrastructures, des Transports terrestres et du Désenclavement a été délesté du mot « Transports ». Désormais, il faut dire Infrastructures terrestres et Désenclavement. Itou pour le ministère de la Fonction publique, de la Rationalisation des effectifs et du Renouveau du service public qui se voit enlever « Rationalisation des effectifs » pour devenir ministère de la Fonction publique et du Renouveau du service public. Le ministère de la Femme, de la Famille et du Genre se voit greffer « Protection de l’Enfance » à la faveur de la disparition du ministère de la Bonne gouvernance et de la Protection de l’enfance. Le ministère des Transports aériens et du développement des infrastructures aéroportuaires et celui du Tourisme ont été fusionnés pour donner un ministère du Tourisme et des transports aériens. Une appellation qui a existé dans l’organigramme gouvernemental par le passé. Le ministère de la Formation professionnelle, de l’Apprentissage et de l’Artisanat et celui de l’Emploi, de l’Insertion professionnelle et de l’Intensification de la main d’œuvre ont été fondus pour donner un ministère de l’Emploi, de la Formation professionnelle et de l’Artisanat. Quant au ministère de la Gouvernance territoriale, du Développement et de l’Aménagement du territoire, il connaît un petit glissement lexical en devenant ministère des Collectivités territoriales et de l’Aménagement du Territoire. Le même changement lexical est noté concernant le ministère de l’Industrie et des Petites et moyennes industries qui s’est mué en ministère du Développement industriel et des Petites et moyennes industries.
Plus de ministres délégués
Pour la première fois au Sénégal, on entendra parler de ministre de l’Eau. En effet, le ministère de l’Hydraulique et de l’Assainissement a muté en ministère de l’Eau et de l’Assainissement. Tandis que le ministère de l’Urbanisme, du Logement et de l’Hygiène publique s’est substitué au ministère du Renouveau urbain, de l’Habitat et du Cadre de vie. Le ministère du Commerce, de la Consommation, du Secteur informel et des Pme a été simplifié en ministère du Commerce et des Pme. Même constat pour le ministère de la Jeunesse, de la Construction citoyenne et de la Promotion du volontariat devenu tout ministère de la Jeunesse. Et puis, il y a certaines dénominations ministérielles qui ont disparu. Il s’agit du ministère de l’Intégration africaine, du Nepad et de la Francophonie, celui de la Bonne Gouvernance et de la Protection de l’Enfance et celui de la Promotion des investissements, des Partenariats et du Développement des Téléservices de l’Etat.
Autre fait marquant, l’attelage gouvernemental ne compte aucun Ministre délégué. Le précédent gouvernement en comptait deux. Ils ont été remplacés par des Secrétaires d’Etat qui avaient fait leur apparition, pour la première fois en 2014 à la faveur du tout premier gouvernement de Mouhammed Boun Abdallah Dionne avant d’être supprimés en 2017, au lendemain des législatives. Contrairement à 2014 où ils étaient six, ces secrétariat d’Etat sont au nombre de trois. Il y a celui auprès du ministre des Infrastructures terrestres et du Désenclavement en charge du Développement du Réseau ferroviaire ; celui auprès du ministre des Affaires étrangères chargé des Sénégalais de l’Extérieur et celui auprès du Garde des Sceaux en charge de la Promotion des droits humains et de la Bonne gouvernance. Une seule nouvelle création est notée : le ministère du Développement communautaire, de l’Equité sociale et territoriale. Un département ministériel qui laisse penser à une volonté du président de la République de donner un pilotage plus institutionnel au Programme d’Urgence de Développement communautaire (Pudc), au Puma et au Promovilles, en consolidant ses acquis tout en élargissant ses perspectives et son champ d’action dans le monde rural.