UNE CAMPAGNE GLOBALEMENT TRANQUILLE, MAIS...
Si, au départ, tout le monde craignait un remake des événements de mars dernier, on aura plutôt eu droit à une campagne globalement tranquille selon les analystes et observateurs politiques contactés par Le Témoin…

Globalement la campagne électorale pour les locales de ce dimanche 22 janvier s’est déroulée sans grands incidents majeurs sur l’ensemble du territoire national. Si, au départ, tout le monde craignait un remake des événements de mars dernier, on aura plutôt eu droit à une campagne globalement tranquille selon les analystes et observateurs politiques contactés par Le Témoin…
Abdou Aziz Diop, acteur de la société civile
D’après Abdou Aziz Diop, au niveau local comme national, la campagne se passe bien malgré quelques scènes isolées de violence. Il estime qu’il faut saluer le travail des religieux, de la société civile, et surtout de ceux de nos compatriotes regroupés au sein du cadre unitaire dont il fait partie. « Les prédictions étaient que ces locales allaient être un prolongement des événements du mois de mars qui étaient une victoire pour l’opposition. Et pour le pouvoir, c’était une défaite alors que ce n’était pas le cas. C’était carrément une grosse tache noire de notre démocratie survenue par l’irresponsabilité des acteurs politiques de part et d’autre. On sentait des prémices de violence, mais heureusement que jusqu’à présent la campagne se passe bien », se réjouit notre interlocuteur. Abdou Aziz Diop ajoute que c’est sur le plan programmatique qu’ils attendent vraiment les candidats. Ce, afin qu’ils déclinent leurs programmes car les élections locales restent des élections citoyennes. « Ce sont les citoyens qui choisissent ceux qui doivent décider de leurs destinées. Nous attendons de futurs maires compétents, qu’ils sachent au moins ce qui les attend et que le conseil municipal soit bien représentatif de toutes les couches de la population. Qu’on ait des conseils municipaux assez dynamiques, inclusifs et qu’il y ait des profils pluridisciplinaires. L’Etat a transféré des compétences aux collectivités territoriales dans le cadre de la décentralisation, mais il n’y a pas de concordance entre les compétences transférées et les ressources. Les ressources financières sont importantes certes mais, le plus important, ce sont les ressources humaines de qualité. Car, ce sont les ressources humaines qui seront capables avec une ingénierie financière de capter toutes les opportunités et de développer des stratégies pour le financement local. Nous réitérons une ancienne proposition dans le cadre de l’Acte 3 et qui consiste à ce que les maires, une fois élus, développent une stratégie locale durant les trois premières années de leurs mandats et aussi fassent une déclaration de politique locale comme le fait le Premier ministre à l’Assemblée nationale au début de ses fonctions », conseille notre figure de proue de la société civile. Selon M. Diop, il faudrait institutionnaliser cette déclaration de politique locale pour que les maires puissent décliner leur vision au début de leur mandat devant les acteurs choisis. Ce afin qu’ont ait une démocratie participative et non une démocratie représentative et aussi que le principe de la redevabilité soit institutionnalisé. Que tous les présidents de commissions fassent leurs bilans pour chaque six mois. Cela permet de faire un suivi-évaluation. Abdou Aziz Diop préconise aussi qu’on introduise la déclaration de patrimoine et le principe de révocation du maire. Car, à l’en croire, on voit que les maires du côté du pouvoir font ce qu’ils veulent car il y a l’impunité. Et pour ceux de l’opposition, c’est le contraire. Mais si on introduit ce principe, en cas de prévarication, de détournement de deniers publics, de corruption, cela permettra aux populations de révoquer leur maire à mi-mandat. Il est aussi important dans le cadre toujours des perspectives de penser aux futurs pôles territoriaux. « Dans l’Acte 3, il n’y a plus de communautés rurales. Mais la réalité est que toutes ces communautés rurales, transformées en communes, sont vides de changement. Alors, il faut procéder à la matérialisation des pôles territoriaux. Développer les infrastructures et avoir une autre vision de développement. Dakar étouffe et Diamniadio est un pôle urbain. Mais nous avons besoin de pôles territoriaux de développement, des pôles industriels à l’intérieur du pays », précise-t-il.
Embouteillage de discours politiciens
Selon Abdoul Aziz Diop, le débat doit être aujourd’hui un débat de développement plutôt qu’un débat de politiciens. Comment faire pour les faire réélire de 2012 à 2021 ? C’est un vide. Si nous ne faisons pas attention, en 2024, aussi ces élections risquent d’être un référendum pour 2024. On n’a jamais vu des élections qui ont des enjeux aussi importants. L’enjeu d’abord, c’est surtout avec le futur gouvernement car on parle du retour d’un Premier ministre. Et tout le monde se positionne pour les législatives et pour les présidentielles. La composition des locales aura forcément un impact sur les prochaines présidentielles. Car le prochain président de la République du Sénégal en 2024 sera le président des hydrocarbures. Il y aura des changements de paradigmes. Il y a des enjeux très importants par rapport à ces ressources naturelles dans un futur proche. Il faut aussi prévoir les violences post électorales pour préserver la stabilité du pays avant et après les élections. Car il peut y avoir des surprises alors que les élections, c’est une fête de la démocratie.
René Mangassa, politologue a braqué son regard sur les profils des 4 candidats à la conquête de la Mairie de Dakar.
René Mangassa, acteur de la société civile, pense que tous les candidats à la mairie de Dakar ont le profil de l’emploi. « Si on prend Soham El Wardini, c’est un candidat qui peut se prévaloir d’avoir dirigé la Mairie de Dakar. Même si elle a remplacé Khalifa Sall, elle a exposé des compétences liées à ses fonctions de maire qui peuvent lui permettre de se propulser loin devant ses adversaires. Elle peut faire de sorte qu’elle peut se légitimer », a analysé René Mangassa. Quant au deuxième candidat, tête de liste de Yewwi Askan Wi, Barthélémy Dias, maire sortant de la commune de Mermoz-SacréCœur, notre interlocuteur estime qu’il a un profil intéressant. « C’est un candidat très sérieux qui peut apporter beaucoup de choses aux Dakarois. Il a fait des réalisations à la commune de Mermoz-Sacré-Coeur. Barth bénéficie aussi de l’aura de Khalifa Sall et du poids politique de Ousmane Sonko. Khalifa Sall qui a fait élire beaucoup de maires à travers Taxawou Dakar. Cette transmission n’est pas à sous-estimer. Khalifa Sall bénéficie toujours de son aura politique qui peut toujours profiter à Barth. Il a un potentiel avec un poids politique réel. On peut compter sur lui pour la victoire finale. Puisqu’il a un avantage et il peut devancer légèrement les autres », relève-t-il. Analysant la candidature d’Abdoulaye Diouf Sarr, tête de liste de la «coalition Benno Bokk Yaakaar », il relève l’importance de sa coalition qui est la seule à avoir existé durant plus de 10 ans sans fissure. « Diouf Sarr a été maire d’une commune de Dakar, une commune extrêmement importante. Ça lui donne beaucoup plus de poids politique. Capitalisant sur ses suffrages de Yoff et disposant de la formidable machine de Benno, Il part avec beaucoup d’atouts pour remporter la victoire finale », analyse M. Mangassa. Pour Pape Diop, tête de liste de « Bokk Guiss-Guiss, notre analyste déclare qu’il a un réel potentiel mais son poids politique actuel est incertain. « Ce sont les élections locales qui ont permis de le sortir. Est-ce que son poids politique est resté le même ? Une chose est sûre, il connaît bien la capitale. Cela dit, je ne suis pas certain que son premier passage, en tant que maire, va lui servir à grand-chose », indique René Mangassa. S’agissant de la candidature de Doudou Wade, tête de liste « Wallu », l’analyste estime que le Pds a toujours son poids électoral dans la capitale. Le Pds, dit-il, a un poids réel. « Il y a des questions à se poser sur le sud de Dakar. Il n’y a pas de réelle animation politique pour le Pds. Mais, Doudou Wade a une assise politique très forte. Puisqu’il a assuré beaucoup de choses lorsqu’il était aux affaires », a-t-il dit.