«COMME ON A ASSOUPLI, IL FAUT ASSUMER»
Président de l’Association des Professionnels de Santé Publique (Apsp) et enseignant à l’Université Assane Seck de Ziguinchor (Uasz), Pr Issa Wone diagnostique, dans cet entretien accordé à «L’AS», les mesures d’assouplissement prises par le gouvernement.

Président de l’Association des Professionnels de Santé Publique (Apsp) et enseignant à l’Université Assane Seck de Ziguinchor (Uasz), Pr Issa Wone diagnostique, dans cet entretien accordé à «L’AS», les mesures d’assouplissement prises par le gouvernement. Il invite l’Etat à assumer ses responsabilités puisqu’il a assoupli de nombreuses restrictions.
Selon vous, quels risques sanitaires pourraient découler des mesures d’assouplissement prises par l’Etat?
Il ne faut pas se focaliser sur ces mesures qui sont déjà prises. On doit plutôt se focaliser sur l’accentuation des mesures de prévention, et malheureusement les gens se relâchent à ce niveau, car les masques ne sont plus portés et la distanciation n’est plus respectée. Les mesures d’assouplissement relèvent, à mon avis, d’une nécessité économique. Pour moi, il faut se ressaisir et mettre le focus sur les mesures de prévention. Ce que l’Etat doit faire pour accompagner ces mesures d’assouplissement, c’est imposer le dépistage pas seulement actif, comme ils font, mais aussi le dépistage passif. Ce qui signifie que les personnes doivent être de mieux en mieux informées sur les risques, quitte à même faire un système de traçabilité téléphonique. Comme on a assoupli, il faut assumer. Maintenant que nous avons assoupli et que peut-être le pays va respirer au plan économique, il faut mettre l’accent sur la prévention. Si on veut atténuer les conséquences économiques, il faut assouplir. Mais si on veut qu’assouplissement ne conduise pas à catastrophe, il faut miser sur les mesures de prévention.
Puisqu’on a rouvert tous les lieux publics, ne faudrait-il pas, selon vous, reprendre les cours dans les écoles ?
Le problème avec l’école, c’est qu’il y a l’opinion publique, c’est-à-dire celle des parents. Si on rouvre les écoles, quel parent va accepter que son enfant prenne des risques. Les écoles privées qui ont les moyens ont divisé leurs classes en deux ou trois. Mais imaginez les enfants qui doivent aller dans des écoles publiques, dans une classe de 100 élèves, si l’on divise par deux, il y aura encore trop d’élèves. Dans ces conditions, je vois mal les parents accepter que leurs enfants aillent à l’école, donc c’est un cercle vicieux. Tout le monde doit s’y mettre pour que l’on comprenne que cette maladie est extrêmement contagieuse. Quelles que soient les mesures prises, si on n’applique pas les mesures de prévention, nous irons droit au mur.
Nombreux sont ceux qui estiment qu’il y a des milliers et des milliers de cas asymptomatiques à Dakar, surtout avec tous ces enseignants qui ont quitté Dakar et sont testés positifs ?
J’en doute, parce que quand on regarde le taux de dépistage, il est extrêmement faible, mais il est orienté. Puisqu’on dépiste les personnes suspectes, on peut croire que l’incidence au sein de la population générale est plus faible qu’au sein d’une population à risque. Par conséquent, il faut augmenter le dépistage, mettre des mesures de coercition comme payer une amende si l’on ne porte pas de masque.