IL FAUT REDUIRE LES NAISSANCES
Il faut changer la pyramide des âges, en réduisant les naissances en Afrique, si le continent veut profiter pleinement de la capture du dividende démographique pour son développement. Et que la jeunesse cesse d’être un poids.

Les pays africains, d’une manière générale, ont encore des efforts à fournir, pour tirer profit de la capture du dividende démographique. Ce dividende est considéré par les Nations Unies comme un élément essentiel pour le développement du continent. Dans ce dessein, l’ambassadeur de Madagascar au Sénégal, Augustin Richard Paraina, soutient que le premier défi à relever, c’est d’inverser la pyramide des âges. “Il ne faut pas qu’elle soit trop élargie à la base. Les actifs doivent être plus nombreux que ceux qui sont pris en charge. D’où cette politique de limiter les naissances. Parce qu’on ne peut pas construire tout le temps des écoles pour nos enfants. Ce sera au détriment de la qualité de l’enseignement, si on continue à ce rythme. Il y a trop de naissances en Afrique par rapport aux capacités du continent, aux ressources’’, affirme M. Paraina. Il s’exprimait hier, face à la presse, lors du lancement du Rapport d’étape 2018 du Fonds des Nations Unies pour la population (Unfpa) sur le dividende démographique en Afrique de l’Ouest et du Centre.
Au fait, à l’échelle mondiale, cette partie du continent enregistre, selon ce document, le taux de dépendance le plus élevé. Il est estimé à 87,2 % pour les tranches d’âges de 0 à 14 ans et de 65 ans et plus. Pour le taux de fécondité, il reste aussi le plus élevé avec 5,2 enfants par femme et une croissance démographique annuelle estimée à 2,7 %. Ce qui fait dire au diplomate malgache que les pays africains doivent aussi “transformer’’ la jeunesse. “Elle ne doit pas être un poids, mais un atout pour son pays’’, dit-il. D’ailleurs, sur la limitation des naissances en Afrique, le directeur régional de l’Unfpa estime que c’est un “mauvais procès’’ qu’on fait à l’Occident, en soutenant que les Occidentaux veulent l’imposer en Afrique. “Ce sont les Africains euxmêmes qui veulent faire de la capture du dividende démographique une priorité. Il y a une nécessité pour les Africains d’avoir un peu une maitrise de leur poids démographique. Il est temps pour que les Africains mettent l’accent sur l’essentiel. Il s’agit de changer la pyramide des âges sans laquelle on ne peut pas voir du progrès dans le continent’’, renchérit Mabingué Ngom.
Un effort fiscal conséquent et une mobilisation continue
A ce propos, le patron de l’Unpfa dans la région reconnait qu’il y a des initiatives “concrètes, assez dynamiques’’ qui se dessinent et qu’il faut “peaufiner, renforcer et étendre’’. “Mais il y a des endroits où c’est un peu timide. Ce sont des zones où il faut faire beaucoup d’efforts additionnels. Pour 2019, le défi est celui de la consolidation. Il y a des pays où il faut vraiment créer la dynamique politique et l’accompagner par des actions concrètes. Dans d’autres pays, nous avons dépassé de loin cet engagement politique, et la mobilisation des acteurs est déjà assez forte. Donc, dans chaque pays, il faut avoir un profil d’intervention qui est en phase avec l’état des lieux’’, poursuit M. Ngom. Au fait, d’après lui, ce processus nécessite un engagement “beaucoup plus fort’’. Qui sera suivi par des inscriptions budgétaires additionnelles de la part des institutions qui soutiennent les pays et également de la communauté internationale. “C’est un engagement qui demande un effort fiscal conséquent et une mobilisation continue, une politique claire qui doit être suivie par des ressources. Il faut descendre au niveau des masses pour créer une dynamique de changement, de transformation, sans laquelle on ne saurait espérer capter le dividende démographique. Nous nous sommes dotés de biens, d’instruments méthodologiques qui peuvent permettre de mettre en œuvre cet agenda de capture du dividende démographique au profit du continent’’, ajoute-t-il.
Sur ce, le directeur régional de l’Unfpa pour l’Afrique de l’Ouest et du Centre souligne que la Mauritanie affiche une volonté “politique complète’’ dans ce sens. C’est pareil au Niger, au Burkina Faso et en Côte d’Ivoire. “Le Mali, à côté, est en train de s’investir, de même que le Tchad. Aujourd’hui, il y a des enjeux nouveaux qui sont liés à la population visiblement, tels que certains phénomènes dans le bassin du lac Tchad, la région des Grands lacs dans le Sahel qui font que, malgré les progrès, nous avons plus de raisons d’accélérer la transition démographique, de régler la question de la jeunesse, de l’emploi des jeunes, de l’émancipation de la femme. Ce sont des problèmes d’une acuité extraordinaire qui doivent nous encourager à redoubler d’efforts’’, relève-t-il. Au Sénégal, d’après ce responsable onusien, la question est sur la table. La partie technique est achevée. “Il faut maintenant que ce dossier puisse être porté au plus haut niveau pour qu’il fasse partie des priorités’’. Pour M. Ngom, la capture du dividende démographique doit être au cœur des discours politiques. C’est ainsi qu’il invite le Sénégal à adhérer au Projet d’autonomisation des femmes et dividende démographique (Swedd).