LA POPULATION APPLAUDIT MAIS DOUTE DE LEUR APPLICATION
La gestion des urgences dans nos établissements sanitaires est devenue une préoccupation aussi bien pour les patients que pour les accompagnants qui vivent le supplice pour bénéficier des soins de qualité

La gestion des urgences dans nos établissements sanitaires est devenue une préoccupation aussi bien pour les patients que pour les accompagnants qui vivent le supplice pour bénéficier des soins de qualité. Une situation qui a poussé le ministre de la Santé, Abdoulaye Diouf Sarr, à prendre des mesures allant dans le sens de rendre plus optimale la gestion des urgences.
Ce sera une grosse épine enlevée du pied des patients et de leurs accompagnants si les mesures prises par le ministre de la Santé sur la gestion des urgences sont appliquées. De nombreuses personnes sont décédées dans les structures sanitaires faute de prise en charge adéquate au niveau des urgences. Les populations ne cessent de se plaindre des manquements notés dans les urgences. Pour remédier à cette situation, le ministre de la Santé a pris une batterie de mesures susceptibles d’améliorer la gestion des urgences.
Ainsi, les directeurs des hôpitaux sont tenus d’assurer une bonne prise en charge des patients qui arrivent dans les services d’urgence. Un tour dans quelques structures sanitaires comme l’hôpital Fann ou le centre Abass Ndao permet de sonder les populations. Rencontrée à Fann, Aïda Sall, venue accompagner sa tante, estime que cette mesure devait être prise depuis fort longtemps. «Il ne fallait pas attendre que les gens meurent pour prendre ces dispositions. Je ne veux pas être pessimiste, mais je pense que ces mesures ne seront jamais appliquées et qu’il n’y aura pas de suivi», clame-elle. Seydou Ba ne dit pas autre chose lorsqu’il soutient que l’Etat a mis la charrue avant les bœufs. Il est convaincu que ces mesures ne vont rien régler. «Avec un personnel insuffisant, un matériel désuet et le manque de lits, comment pourra-t-on appliquer ces mesures», se demande-t-il.
Rencontré dans les couloirs du centre hospitalier Abass Ndao où il est venu récupérer les résultats de ses analyses, Lamine Fall déplore l’habitude des Sénégalais de ne jamais appliquer les décisions prises. «On prend de bonnes décisions, mais on ne les applique pas. C’est cela qui pose problème au Sénégal», se désole-t-il.
Sous le couvert de l’anonymat, cette responsable du Service d’Accueil et des Urgences (Sau) d’une structure sanitaire de la place révèle qu’ils n’ont que 12 lits qui sont pleins chaque jours. «Comment allons-nous gérer cette situation ? Avec cette capacité litière très limitée, si un malade vient, on va le référer dans d’autres structures et là-bas aussi, il peut trouver la même situation», souligne-telle avant de plaider pour le respect de la pyramide sanitaire. «Parfois, le patient souffre d’une douleur qui peut être réglée au niveau du poste ou du centre de santé, mais il préfère venir à l’hôpital. C’est sur ces questions que le ministère doit communiquer», indique-t-elle. Un autre problème qui pose problème, selon notre interlocutrice, est l’urgence de la nuit. La plupart des cas, ce sont des étudiants en médecine qui assurent la garde. Parfois, ils ont des problèmes pour déterminer l’urgence.
DR CHEIKH TACKO DIOP, DIRECTEUR DE L’HOPITAL DE FANN «IL FAUT FAIRE LA PART DES CHOSES ENTRE CE QUI EST URGENT ET CE QUI NE L’EST PAS»
La problématique des urgences, indique Dr Cheikh Tacko Diop, directeur de l’hôpital de Fann, est universelle. Il estime que le ministre de la Santé a juste rappelé ce qu’il convient de faire normalement dans une structure sanitaire. «Un malade demande qu’il soit bien pris en charge. S’il arrive avec une urgence et que nous avons de la place, on l’admet sinon on lève l’urgence avant de le référer. Si nous n’avons pas une grande capacité litière, le patient est censé aller dans une autre structure sanitaire», affirme-til. Cependant, il a tenu à définir ce qui est une urgence médicale. «Une urgence est une pathologie, un état qui, s’il n’est pas réglé tout de suite, peut mettre en jeu le pronostic vital de l’individu, c’est-à-dire que si toute de suite, l’urgence n’est pas levée, l’individu meurt.»
A en croire Dr Cheikh Tacko Diouf, «la population appelle urgence beaucoup de pathologies qui ne le sont pas en réalité. Certains ont une douleur depuis le matin et ils restent chez eux jusqu’au soir pour dire qu’ils sont en urgence alors qu’ils pouvaient le régler au poste de santé ou au centre de santé. Il faut faire la part des choses entre ce qui est urgent et ce qui ne l’est pas. Pour ceux qui viennent, chaque cas est une urgence», dit-il.